Mouvement de sanctification
Le Mouvement de sanctification (Holiness movement en anglais) est un courant chrĂ©tien issu du protestantisme mĂ©thodiste. Le mouvement se distingue par lâimportance quâil donne Ă la doctrine de la « perfection chrĂ©tienne » dĂ©rivĂ©e de l'enseignement de John Wesley, Ă savoir la croyance quâil est possible de vivre libre du pĂ©chĂ© volontaire, et en particulier la croyance que cela peut ĂȘtre accompli instantanĂ©ment par la grĂące[1]. En 1894, ce mouvement se sĂ©pare du mĂ©thodisme[2]. Il rassemble aujourd'hui plus de 12 millions de croyants dans le monde[3]. Sa contribution historique a Ă©tĂ© de dĂ©clencher le dĂ©veloppement du pentecĂŽtisme et du renouveau charismatique, des mouvements majeurs dans le paysage du christianisme du XXIe siĂšcle[4].
Type |
Mouvement chrétien |
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Doctrine
Les membres du mouvement de sanctification adhĂšrent Ă la doctrine â vigoureusement contestĂ©e par de nombreux luthĂ©riens et rĂ©formĂ©s - de la perfection chrĂ©tienne, qui a pour principe que les croyants qui sont dâabord sauvĂ©s et rĂ©gĂ©nĂ©rĂ©s par la grĂące divine, peuvent ensuite ĂȘtre libĂ©rĂ©s de lâenvie de commettre tout pĂ©chĂ© volontaire. Cette expĂ©rience personnelle, nommĂ©e sanctification complĂšte (en anglais : entire sanctification), est rĂ©alisĂ©e par la « seconde Ćuvre de la grĂące » ou « seconde bĂ©nĂ©diction » qui Ćuvre au travers de lâEsprit saint. Elle nâempĂȘche pas le croyant sanctifiĂ© de pĂ©cher mais il lui est possible de vivre une vie morale, Ă©purĂ©e si ce nâest de toute occasion de chute, du moins de la plus grande partie dâentre elles. Pour cela le mouvement de sanctification prĂŽne de suivre la loi divine avec rigueur. Câest ainsi que de nombreux groupes sâinterdisent toute consommation dâalcool, de jeu dâargent et parfois de danse et autres divertissements tels que le thĂ©Ăątre ou le cinĂ©ma[5].
Fondements théologiques
Les racines du mouvement de sanctification sont les suivantes :
- la RĂ©forme protestante, avec sa doctrine du salut par la foi par la seule grĂące divine,
- le puritanisme du XVIIe siĂšcle anglais et sa version amĂ©ricaine avec son insistance sur la fidĂ©litĂ© absolue Ă la Bible et le droit dâĂȘtre en dĂ©saccord avec lâĂ©glise officielle,
- le piétisme allemand du XVIIe siÚcle , conduit par Philipp Jakob Spener et les FrÚres moraves, qui combinait la recherché spirituelle individuelle avec la responsabilité de vivre une vie droite et intÚgre,
- le quiĂ©tisme, tel quâenseignĂ© par la SociĂ©tĂ© religieuse des Amis (les quakers), avec sa conviction que chaque individu peut faire lâexpĂ©rience dâun contact avec Dieu et peut comprendre quelle est la volontĂ© de Dieu pour lui-mĂȘme,
- Le premier RĂ©veil des annĂ©es 1730 en Angleterre sous la conduite de George Whitefield et des frĂšres John et Charles Wesley, et aux Ătats-Unis avec Jonathan Edwards qui mit Ă lâhonneur ce qui Ă©tait jusque-lĂ le concept purement orthodoxe de thĂ©osis, les enseignements du piĂ©tisme allemand, et le besoin pour chaque chrĂ©tien de connaĂźtre une expĂ©rience de conversion religieuse,
- Le second grand rĂ©veil du XIXe siĂšcle aux Ătats-Unis, propagĂ© par, entre autres, Francis Asbury, Charles Finney, Lyman Beecher et Phoebe Palmer, qui mit lui aussi lâaccent sur le besoin de sanctification personnelle et se caractĂ©rise par la multiplication des meetings Ă©vangĂ©liques[6].
Historique
Ămergence du mouvement de sanctification
Les propagateurs méthodistes
Bien quâil se soit propagĂ© grĂące au Grand RĂ©veil sur une base pluri-confessionnelle, et bien quâil soit trĂšs loin de faire lâunanimitĂ© parmi les mĂ©thodistes, le dĂ©collage du mouvement de sanctification doit presque tout au mĂ©thodisme : dâune part il sâappuie sur la doctrine de la perfection chrĂ©tienne dĂ©veloppĂ©e par John Wesley dans son ouvrage A Plain Account of Christian Perfection, et dâautre part une partie des mĂ©thodistes amĂ©ricains se sont consacrĂ©s Ă sa propagation dĂšs la fin du XVIIIe siĂšcle[7]. Ă partir de 1840, le grand rĂ©veil et la diffusion du mĂ©thodisme au travers des « camp meetings » font beaucoup pour diffuser le mouvement de sanctification[8]. Il est Ă noter que deux dĂ©nominations se rĂ©clamant de John Wesley et du mouvement de sanctification se sĂ©pareront du mĂ©thodisme pendant cette pĂ©riode. En 1843 Orange Scott fonda la Wesleyan Methodist Connection (ancĂȘtre de lâĂglise wesleyenne Wesleyan Church (en)) Ă Utica, dans lâĂtat de New York. En 1860, B.T. Roberts et John Wesley Redfield fondĂšrent lâĂglise mĂ©thodiste libre (Free Methodist Church) qui sâattacha aux idĂ©aux dâabolitionnisme, dâĂ©galitarisme et de sanctification par la âseconde bĂ©nĂ©dictionâ. Le plaidoyer et lâaction en faveur des pauvres restera une caractĂ©ristique de ces Ă©glises dâinspiration mĂ©thodiste[9].
Parmi les premiers et ardents propagateurs méthodistes du mouvement, on peut citer le cercle new-yorkais se réunissant autour du couple Palmer et la mission au Canada du pasteur Caughey.
- Ă New York, des dizaines de personnes dont des Ă©vĂȘques mĂ©thodistes participent aux « Tuesday Meetings » lancĂ©s dĂšs 1835 sous la conduite de Sarah A. Lankford puis de sa sĆur Phoebe Palmer qui disait avoir vĂ©cu une expĂ©rience de sanctification complĂšte en 1837 et devint un des grands propagateurs du mouvement de sanctification naissant. SimultanĂ©ment, Ă Boston, le pasteur mĂ©thodiste Thimothy Merritt fondait un journal nommĂ© « le guide vers la perfection chrĂ©tienne » qui devint ensuite « le guide vers la saintetĂ© » atteignant un tirage de 30 000 exemplaires[10]. Le docteur Walter Palmer et son Ă©pouse Phoebe rachetĂšrent le journal en 1865.
- Au Canada, le pasteur mĂ©thodiste James Caughey, missionnaire amĂ©ricain envoyĂ© en Ontario par lâĂglise mĂ©thodiste wesleyenne (Wesleyan Methodist Church) des annĂ©es 1840 jusquâen 1864, rĂ©alisa des conversions massives, particuliĂšrement dans lâouest canadien dans les annĂ©es 1851-1853 en combinant un appel modĂ©rĂ© Ă lâĂ©motion religieuse et un appel sans ambiguĂŻtĂ© Ă lâengagement personnel, rĂ©alisant ainsi la synthĂšse entre le style Ă©motionnel des « camp meetings » et les attentes dâun public mĂ©thodiste urbain plus sophistiquĂ©[11]. Sous son ministĂšre, un rĂ©veil a pris place en Ontario, en 1857[9].
SuccÚs au-delà du méthodisme
Le mouvement de sanctification attire rapidement des adeptes non méthodistes qui deviennent également ses ardents propagateurs :
- le congrégationaliste Thomas Upham (en), qui avait été un participant précoce des Tuesday Meetings se lança dans des recherches sur le mysticisme et identifia un certain nombre de précurseurs au mouvement de sanctification parmi lesquels le piétiste allemand Johann Arndt et la quiétiste catholique Madame Guyon.
- le calviniste Asa Mahan (en), prĂ©sident du Oberlin College, et Charles Grandison Finney, Ă©vangĂ©liste liĂ© au collĂšge, dirent avoir reçu le baptĂȘme de lâesprit en 1836 et furent dâardents dĂ©fenseurs de lâabolition de lâesclavage[12].
- le presbytĂ©rien William Boardman (en) renforça le message de ses campagnes dâĂ©vangĂ©lisation par la publication en 1858 dâun livre The Higher Christian Life, qui marqua le point haut du dĂ©veloppement du mouvement avant la pause forcĂ©e de la Guerre de SĂ©cession (1861-1865). Le "Mouvement pour une vie supĂ©rieure" se dĂ©veloppa en Grande-Bretagne sur les idĂ©es du livre (voir plus loin).
- La quaker amĂ©ricaine Hannah Whitall Smith fit une expĂ©rience personnelle de la conversion pendant les annĂ©es 1860. Elle dĂ©couvrit cette occasion ce quâelle appelait le secret de la vie chrĂ©tienne : le fait de consacrer totalement sa vie Ă Dieu, et simultanĂ©ment de laisser Dieu transformer sa vie. Son mari fit la mĂȘme expĂ©rience lors dâun camp meeting en 1867. Le couple devint le principal animateur de la dĂ©jĂ cĂ©lĂšbre "convention de Keswick", qui forma la base RĂ©veil de sanctification de Keswick[13].
Expansion rapide du mouvement de sanctification
AprĂšs la Guerre de SĂ©cession (1861-1865), de nombreux adhĂ©rents du mouvement de sanctification â pour la plupart mĂ©thodistes â voulurent retrouver les temps forts des « camp meetings » mĂ©thodistes quâils avaient connus pendant lâĂ©poque du RĂ©veil. Le premier de ces camps clairement marquĂ© au coin du mouvement de sanctification rĂ©unit 10 000 personnes Ă Vineland dans le New Jersey en 1867. Ses principaux animateurs Ă©taient les pasteurs mĂ©thodistes John S. Inskip, John A. Wood et Alfred Cookman. Au cours dâune rĂ©union de priĂšre Ă genoux Ă lâissue de ces journĂ©es, le groupe des organisateurs dĂ©cida de tenir un autre meeting du mĂȘme genre lâannĂ©e suivante. Cette organisation se fit connaĂźtre sous le nom dâAssociation nationale de la Sanctification (National Holiness Association), puis de Partenariat pour la Sanctification chrĂ©tienne (Christian Holiness Partnership (en)). Le deuxiĂšme « camp meeting » national, tenu Ă Manheim en Pennsylvanie, rĂ©unit 25 000 personnes venues de tous les Ătats-Unis. Certains le surnommĂšrent une « PentecĂŽte ». Le culte du lundi soir devint presque lĂ©gendaire en raison de lâimpact spirituel et de lâinfluence quâil dĂ©gagea. Le troisiĂšme camp meeting national se rĂ©unit Ă Round Lake, dans lâĂtat de New York. Cette fois, il fut couvert par la presse national, ce qui assura une notoriĂ©tĂ© instantanĂ©e Ă bon nombre des organisateurs. Dans les annĂ©es 1870, la ferveur revivaliste de mouvement de rĂ©veil de Keswick sâempara de la Grande- Bretagne oĂč il fut parfois appelĂ© le Mouvement de Vie supĂ©rieure, du nom du livre de William Boardman (voir plus haut). Ce mouvement tint des confĂ©rences Ă Broadlands et Oxford en 1874 puis Ă Brighton et Keswick en 1875. La Convention de Keswick devint rapidement le centre nĂ©vralgique du Mouvement de Sanctification en Grande-Bretagne. La Mission de la Foi (Faith Mission (en)) en Ăcosse fut un autre consĂ©quence du Mouvement de Sanctification britannique. Il y eut aussi des consĂ©quences aux Ătats-Unis : en 1874, Albert Benjamin Simpson ayant lu lâouvrage de William Boardman ressentit le besoin dâune vie plus sanctifiĂ©e. Simpson fonda lâAlliance chrĂ©tienne et missionnaire (Christian and Missionary Alliance).
Des associations amĂ©ricaines de sanctification commencĂšrent Ă se former Ă la suite de cette nouvelle vague de « camp meetings », telle que lâAssociation de Sanctification de lâOuest (« Western Holiness Association ») - premiĂšre association rĂ©gionale, formĂ©e Ă Bloomington, dans l'Illinois, et prĂ©figurant les futures sĂ©parations entre mĂ©thodisme et mouvement de sanctification. En 1877, plusieurs "conventions de sanctification gĂ©nĂ©rale" se rencontrent Ă Cincinnati et Ă New York[9].
En 1871, lâĂ©vangĂ©liste amĂ©ricain Dwight L. Moody fit une expĂ©rience de baptĂȘme de lâesprit aprĂšs des rencontres avec deux femmes de lâĂglise mĂ©thodiste libre mais il la baptisa « expĂ©rience avec la puissance » et conserva lâidĂ©e dâune sanctification progressive. Il ne sâaffilia donc pas au mouvement de sanctification mĂ©thodiste-wesleyien. Ses idĂ©es sont toujours celle des Ă©glises qui se rĂ©clament de lui aujourdâhui[14].
Structuration du mouvement de sanctification
La grande majoritĂ© des adhĂ©rents au mouvement de sanctification restĂšrent membres des principales Ă©glises mĂ©thodistes amĂ©ricaines, notamment de lâĂglise Ă©piscopale mĂ©thodiste (Methodist Episcopal Church (en)). Il y avait toutefois une certaine agitation dans les milieux mĂ©thodistes car certains pensaient que la dĂ©nomination avait perdu sa ferveur. La Wesleyan Methodist Church (en) (en 1841) et lâĂglise mĂ©thodiste libre (en 1860) se sĂ©parĂšrent du mĂ©thodisme pour former les premiĂšres Ăglises du mouvement de sanctification. Toutes deux dĂ©fendaient lâabolition de lâesclavage en plus de leur adhĂ©sion Ă doctrine de la perfection chrĂ©tienne.
Ceux des adhĂ©rents qui provenaient dâautres traditions thĂ©ologiques fondĂšrent des organisations wesleyennes spĂ©cifiques. En 1881, Daniel Sidney Warner (en) lança le « mouvement de rĂ©formation de lâĂglise de Dieu », devenu aujourdâhui lâĂglise de Dieu dâAnderson (Ă Anderson, Indiana), introduisant le restaurationnisme dans le mouvement de sanctification.
Le livre de Phoebe Palmer, âla promesse du pĂšreâ, publiĂ© en 1859, qui argumentait en faveur de lâaccĂšs des femmes au ministĂšre pastoral, influença Catherine Booth, cofondatrice de lâArmĂ©e du Salut (la pratique du ministĂšre fĂ©minin est assez rĂ©pandue dans le mouvement de sanctification mais pas universel). La fondation de lâArmĂ©e du Salut permit Ă l'Ă©toile du mouvement de sanctification de continuer Ă briller au sein des Ă©glises mĂ©thodistes.
Le mouvement de sanctification sâengagea aussi dans une intense activitĂ© missionnaire :
- Le mĂ©thodiste Martin Wells Knapp fonda en 1897 lâInternational Holiness Union and Prayer League Ă Cincinnati, Ohio, qu idevint ensuite lâĂglise de sanctification du pĂšlerin (Pilgrim Holiness Church (en)), une organisation missionnaire qui connut un grand succĂšs en CorĂ©e au Japon, en Chine, en Inde, en Afrique australe et en AmĂ©rique latine. (Auparavant Knapp avait Ă©galement fondĂ© le magazine «Godâs Revivalist» en 1883, puis ultĂ©rieurement, en 1900, lâuniversitĂ© chrĂ©tienne God's Bible School and College (en).)
- One Mission Society (en) fondée sous le nom de « Oriental Mission Society » pour propager le méthodisme au Japon est devenue la plus grande organisation missionnaire du mouvement de sanctification.
Divisions au sein du méthodisme
Les tensions Ă©taient parfois vives entre les mĂ©thodistes qui nâadhĂ©raient pas au mouvement de sanctification et les autres. Dans les annĂ©es 1890, on estime que la proportion de ceux qui souscrivaient aux idĂ©es du mouvement de sanctification sâĂ©levait Ă entre un tiers et la moitiĂ© des quelque 4 millions de mĂ©thodistes amĂ©ricains[15].
Aux premiĂšres Ă©glises en rupture avec le rameau mĂ©thodiste sâajouta en 1908 lâĂglise du NazarĂ©en. Le pasteur mĂ©thodiste Benjamin Franklin Haynes (en) a laissĂ© un tĂ©moignage de premiĂšre main de cette Ă©poque dans son livre Tempest-Tossed on Methodist Seas (« malmenĂ© par la tempĂȘte dans des mers mĂ©thodistes ») qui raconte sa rupture avec lâĂglise Ă©piscopale mĂ©thodiste pour rejoindre ce qui allait devenir lâĂglise du NazarĂ©en. La tension culmine lors de la confĂ©rence de lâĂglise Ă©piscopale mĂ©thodiste de 1898 qui adopte une rĂšgle interdisant Ă tout pasteur ou diacre mĂ©thodiste de prĂȘcher sur le territoire dâune Ă©glise mĂ©thodiste sans son accord, faute de quoi il sâexpose Ă des poursuites en justice[16] ! De nombreux pasteurs ou prĂ©dicateurs itinĂ©rants du mouvement de sanctification trouvĂšrent difficile de poursuivre leur ministĂšre dans ces conditions, surtout lĂ oĂč lâĂglise mĂ©thodiste Ă©tait hostile au mouvement de sanctification, et cela conduit Ă la formation de nombreuses organisations dissidentes. Elles se regroupĂšrent essentiellement au sein de lâĂglise du NazarĂ©en et delâĂglise mĂ©thodiste libre. Le nombre de ceux qui quittĂšrent les principales dĂ©nominations mĂ©thodistes Ă cette Ă©poque pour adhĂ©rer Ă ces Ă©glises du mouvement de sanctification nâexcĂ©dĂšrent pas 100 000 personnes[15].
Au XXe siĂšcle
Au dĂ©but du XXe siĂšcle, la tradition des âcamp meetingsâ et des campagnes dâĂ©vangĂ©lisation rĂ©alisĂ©es avec le concours des Ă©glises locales se poursuivit. L'Ă©vangĂ©liste baptiste britannique Oswald Chambers diffuse son petit ouvrage de dĂ©votion My Utmost for His Highest dans le monde entier. Les mouvements pentecĂŽtistes et charismatiques prirent de lâimportance et sâattachĂšrent certains des membres du mouvement de sanctification. Le mouvement de sanctification eut par ailleurs de bonnes relations avec le fondamentalisme Ă©vangĂ©lique mais fut parfois submergĂ© par lâarrivĂ©e des mĂ©thodes de la critique radicale des textes sacrĂ©s et autres Ă©coles de pensĂ©e libĂ©rale. Le mouvement de sanctification se trouva ainsi marginalisĂ© dans certaines Ă©glises comme lors de la fusion entre Ăglises mĂ©thodistes qui conduisit Ă former lâĂglise mĂ©thodiste unie en 1939 mais il put se maintenir dans certaines institutions telles que lâuniversitĂ© Azusa Pacific University (en). La division et la marginalisation du mouvement de sanctification sâaccentua aprĂšs la DeuxiĂšme Guerre mondiale. MĂ©content de lâĂ©volution de la sociĂ©tĂ© et de lâopinion y compris Ă lâintĂ©rieur de leurs Ă©glises, certains formĂšrent le Mouvement de Sanctification conservateur (Conservative Holiness Movement (en))[17].
La plupart des Ă©glises du mouvement sâassimilĂšrent aux Ă©vangĂ©liques de la National Association of Evangelicals (en)[18], dĂ©veloppant une forme de mĂ©pris pour le « lĂ©galisme », abandonnant leurs interdits vis-Ă -vis de la danse et du thĂ©Ăątre mais persistant dans la prohibition du tabac et de lâalcool. Comme les Ă©vangĂ©liques, ils adoptĂšrent des positions fermes sur le caractĂšre sacrĂ© du mariage et lâimportance de lâabstinence sexuelle avant le mariage. Dans les annĂ©es 1970, lâopposition Ă lâavortement devint un thĂšme rĂ©current et pendant les annĂ©es 1990, les positions contre lâhomosexualitĂ© active se multipliĂšrent. La tradition dâengagement social et charitable se poursuivit en particulier au travers de lâArmĂ©e du salut et dâautres organisations dâentraide.
Situation actuelle (XXIe siĂšcle)
ConfrontĂ©s Ă une forte crise dâidentitĂ© et Ă une Ă©rosion de leur membership, les Ă©vangĂ©liques du mouvement de sanctification wesleyen ont conduit plusieurs confĂ©rences inter-dĂ©nominationelles pour clarifier la diffĂ©rence entre la thĂ©ologie wesleyenne et celle des autres Ă©vangeliques, pour mieux prendre en compte le questions sociales actuelles et pouvoir sĂ©duire dans un monde post-moderne[19]. Citons Ă titre dâexemple le « manifeste de la sanctification » (The Holiness Manifesto) publiĂ© en 2006 par le Consortium wesleyen de la sanctification (ââWesleyan Holiness Consortiumââ). Le nombre total dâadhĂ©rents engagĂ©s dans la vie dâĂ©glise du mouvement de sanctification est aujourdâhui dâenviron 12 millions. 21 Ă©glises sont associĂ©es au Partenariat de la Sanctification chrĂ©tienne (âChristian Holiness Partnership (en)), et, en sus, des centaines de paroisses ou Ă©glises locales ne sont pas identifiĂ©es comme membre du Partenariat. Aucune Ă©glise du mouvement de sanctification nâest membre du Conseil ĆcumĂ©nique des Ăglises, mais plusieurs Ă©glises membres en sont traditionnellement proches[20]. LâĂglise du NazarĂ©en, lâĂglise wesleyenne Wesleyan Church (en) et lâĂglise mĂ©thodiste libre sont les plus grandes Ă©glises Ă©vangĂ©liques wesleyennes reprĂ©sentatives du mouvement de sanctification aujourdâhui. Des pourparlers en vue dâune fusion ont Ă©tĂ© menĂ©s mais ont abouti Ă la crĂ©ation dâorganes de coopĂ©ration comme la « Global Wesleyan Alliance »[21] - [22].
Certaines institutions d'enseignement sont affiliĂ©es au mouvement de sanctification, par exemple l'universitĂ© d'Asbury qui a fait parler d'elle lors du rĂ©veil de 2023, qui fait lui-mĂȘme suite Ă plusieurs autres dans la pure tradition mĂ©thodiste[23].
De la sanctification au PentecĂŽtisme
Naissance du pentecĂŽtisme
Le pentecĂŽtisme est directement issu du mouvement de sanctification. Il sâest dĂ©veloppĂ© sur le terreau du mouvement de sanctification Ă partir du « RĂ©veil d'Azusa Street », qui a eu lieu en 1906 Ă Los Angeles Ă lâinitiative de William Joseph Seymour (1870-1922), un pasteur mĂ©thodiste afro-amĂ©ricain qui croyait fermement Ă la valeur de la glossolalie (ou « parler en langues »). ExpulsĂ© de lâĂ©glise mĂ©thodiste par un pasteur qui ne croyait pas du tout Ă ces manifestations, il poursuivit sa prĂ©dication dans un bĂątiment dâune ancienne Ă©glise mĂ©thodiste Ă©piscopale africaine, dans Azusa Street, dâoĂč le nom du mouvement. Ce RĂ©veil se caractĂ©risait par son caractĂšre multiracial et rĂ©unissait des chrĂ©tiens de tous milieux Ă la recherche dâune expĂ©rience plus forte du Saint-Esprit, ce qui en fit le plus contagieux des rĂ©veils pentecĂŽtistes. Le mouvement se rĂ©pandit ensuite dans tous les Ătats-Unis, tant dans les rĂ©gions urbaines que rurales. Il sâest aujourdâhui rĂ©pandu dans le monde entier, oĂč lâon compte environ 78 millions de pentecĂŽtistes, et 510 millions dâadhĂ©rents des diffĂ©rents mouvements charismatiques eux-mĂȘmes issus ou inspirĂ©s par les pentecĂŽtistes. Au total ce sont donc indirectement quelque 600 millions de chrĂ©tiens qui sont issus du mouvement de sanctification[24].
Points de convergence
Beaucoup de pentecĂŽtistes ont conservĂ© aujourdâhui le plus clair de la doctrine et des pratiques du mouvement de sanctification. Plusieurs Ă©glises pentecĂŽtistes ont aussi conservĂ© le mot sanctification dans leur nom, comme lâĂglise International Pentecostal Holiness Church. Les termes de « pentecĂŽte » et dâ« apostolique », qui sont aujourdâhui utilisĂ©s par les adhĂ©rents des mouvements pentecĂŽtistes et charismatiques, lâont dâabord Ă©tĂ© par les Ă©glises issues du mouvement de sanctification en liaison avec le style de vie consacrĂ© Ă Dieu que dĂ©crit le Nouveau Testament. Le pentecĂŽtisme et le mouvement de sanctification ont en particulier en commun lâimportance quâelles accordent Ă lâexpĂ©rience de la rencontre du croyant avec Dieu aprĂšs sa conversion, une expĂ©rience quâelles appellent le baptĂȘme du Saint-Esprit. Elles souscrivent aussi Ă lâensemble des doctrines essentielles du protestantisme et Ă ses pratiques : autoritĂ© de la Bible, y compris dans les questions morales de la vie quotidienne.
Points de différenciation
Ă la diffĂ©rence du mouvement de sanctification, le mouvement de PentecĂŽte croit que le baptĂȘme du Saint-Esprit sâaccompagne de manifestations extĂ©rieures plus ou moins surnaturelles comme le parler en langues ou glossolalie, le don de prophĂ©tie ou le don de guĂ©rison. Cela nâempĂȘche pas que Pendant le "RĂ©veil d'Azusa Street", ces pratiques ont Ă©tĂ© vigoureusement rejetĂ©es par les leaders du mouvement de sanctification. Lâun dâeux, Alma White, Ă©vĂȘque de lâĂ©glise Pillar of Fire Church (en), Ă©crivit en 1936 un livre contre les pratiques pentecĂŽtistes, intitulĂ© DĂ©mons et langues, oĂč elle traitait le âparler en languesâ de "charabia satanique" et les services religieux pentecĂŽtistes de "sommets du culte de Satan"[25]. Il est vrai quâelle Ă©tait assez extrĂȘme dans de nombreux domaines et que la majoritĂ© des Ă©glises du mouvement de sanctification admettent aujourdâhui la lĂ©gitimitĂ© du parler en langues inconnues, sans en faire le signe de sanctification que les pentecĂŽtistes y voient.
Exemples d'Ăglises issues du mouvement de sanctification
Notes et références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de lâarticle de WikipĂ©dia en anglais intitulĂ© « Holiness movement » (voir la liste des auteurs).
- Mannoia, Kevin W. et Don Thorsen. The Holiness Manifesto, (William B. Eerdmans Publishing, 2008)
- Claude Savart, Le Monde contemporain et la Bible, Ă©ditions Beauchesne, 1985, p. 359
- Conseil ĆcumĂ©nique des Ăglises, Ăglises de l'Illumination, Site officiel du Conseil ĆcumĂ©nique des Ăglises, Suisse, consultĂ© le 19 juillet 2015
- Conseil ĆcumĂ©nique des Ăglises, Ăglises pentecĂŽtistes, Site officiel du Conseil ĆcumĂ©nique des Ăglises, Suisse, consultĂ© le 14 juin 2018
- (en) Thomas Arthur Russell, Comparative Christianity: A Student's Guide to a Religion and Its Diverse Traditions, Universal-Publishers, , 121â (ISBN 9781599428772, lire en ligne)
- Peter Hocken, Le RĂ©veil de l'Esprit : les Ăglises pentecĂŽtistes et charismatiques, France, Ă©ditions Fides, 1994, page 54
- Vinson Synan, The Holiness-Pentecostal Tradition: Charismatic Movements in the Twentieth Century, (Grand Rapids, Michigan: William B. Eerdmans Publishing Company, 1997 2e Ă©d.), p. 8.
- Synan 1997, p. 17.
- , Stan Ingersol, christianitytoday.com, The Holiness Movement Timeline, USA, consulté le 11 mars 2016
- Synan 1997, p. 18.
- Peter Bush, "The Reverend James Caughey and Wesleyan Methodist Revivalism in Canada West, 1851-1856", Ontario History, Sept 1987, vol. 79 Issue 3, p. 231-250
- (en) Charles Jr. Yrigoyen, Historical Dictionary of Methodism, Scarecrow Press, (lire en ligne), p. 186
- Randall Herbert Balmer, Encyclopedia of Evangelicalism, Baylor University Press, USA, 2004, page 634
- Principes de lâĂglise Moody sur le site de lâĂ©glise, accĂšs le 17 janvier 2016
- Vinson Synan, The Holiness-Pentecostal Tradition: Charismatic Movements in the Twentieth Century, Ăditions Wm. B. Eerdman, 1971
- RĂšgle no 301 de la discipline de lâĂglise Ă©piscopale mĂ©thodiste du sud (Discipline of the Methodist Episcopal Church, South), 1898, p. 125
- Fundamental Wesleyan, Site du Mouvement de Sanctification conservateur, accĂšs le 31 mai 2015
- Site dâhistoire de lâĂglise du NazarĂ©en
- « About Us », Site holinesslegacy.com, accÚs le 31 mai 2015
- MĂ©mento du Conseil ĆcumĂ©nique des Ăglises, 2006
- http://wesleyananglican.blogspot.com/2011/08/wesleyan-holiness-mergers-not-taking.html (accÚs le 20 février 2015)
- « Global Wesleyan Alliance has 3rd annual gathering » site de « The Wesleyan Church » (accÚs le 31 mai 2015)
- (en-US) « A nonstop revival breaks out at Kentucky college. Now, it's viral on TikTok » [archive du ], The Courier-Journal (consulté le )
- Pentecostal churches, accĂšs le 31 mai 2015
- âThe Outpouring of the Holy Ghost at Azusa Street Missionâ, site de revempete.us, accĂšs le 31 mai 2015