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Masse d'air (énergie solaire)

Le coefficient de masse d'air représente le chemin optique du rayonnement solaire à travers l'atmosphère terrestre par rapport à ce chemin lorsque le Soleil est au zénith. Il permet de quantifier le spectre solaire en un lieu donné après que son rayonnement a traversé l'atmosphère. Cette grandeur est couramment utilisée pour caractériser les performances de cellules solaires et est souvent indiquée par les lettres « AM » suivies d'un nombre. Le coefficient AM1.5 est celui généralement retenu pour la conception de capteurs solaires photovoltaïques.

Description

Le rayonnement solaire suit étroitement celui du corps noir à 5 800 K[1]. Ce rayonnement est cependant atténué par diffusion et absorption en traversant l'atmosphère terrestre : plus l'épaisseur de celle-ci est grande, plus cette atténuation est sensible. Certains gaz de l'atmosphère absorbent des longueurs d'onde spécifiques, qui sont très fortement atténuées dans le rayonnement solaire parvenant au sol : c'est le cas de la vapeur d'eau, qui absorbe plusieurs longueurs d'onde, ainsi que de l'azote, de l'oxygène et du dioxyde de carbone. Le spectre solaire au niveau du sol est ainsi étroitement restreint aux longueurs d'onde comprises entre l'infrarouge lointain et le proche ultraviolet.

Outre les phénomènes d'absorption spectrale, les molécules des gaz de l'atmosphère dispersent également la partie basse — dans le bleu — des longueurs d'onde du rayonnement solaire par diffusion élastique avec les photons incidents, dite diffusion de Rayleigh dans ce cas, phénomène responsable de la couleur du ciel, tandis que le soleil paraît plus jaune, couleur complémentaire du bleu sur le cercle chromatique. Plus l'épaisseur d'atmosphère traversée par le rayonnement solaire est grande, plus l'effet de la diffusion de Rayleigh est sensible : c'est la raison pour laquelle le soleil paraît de plus en plus rouge à mesure qu'il décline sur l'horizon, car sa lumière perd une fraction de plus en plus importante de bleu dans son spectre.

Définition et calculs

Si est le chemin optique du rayonnement solaire et le chemin optique au zénith au niveau de la mer alors le coefficient de masse d'air vaut[2] :

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Ce coefficient dépend donc de la hauteur du Soleil sur l'horizon ainsi que de l'altitude et la latitude de l'observateur, et varie tout au long de la journée ainsi que selon les saisons.

Si est la distance zénithale du Soleil exprimée en degrés, on peut écrire en première approximation, qui reste raisonnable jusqu'à une hauteur d'environ 15° au-dessus de l'horizon — car la fomule ignore la courbure de la Terre et tend donc vers l'infini lorsque le Soleil se rapproche de l'horizon :

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De nombreux développements ont été proposés pour décrire de manière plus précise la masse d'air près de l'horizon, comme le modèle Kasten & Young en 1989[3] :

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Il en existe de nombreux autres. Au niveau de la mer, la masse d'air à l'horizon vaut par exemple 37,9 avec le modèle de Kasten & Young, mais 40 selon celui de G. V. Rozenberg en 1966[4] :

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Si est le rayon de la Terre et la hauteur effective de l'atmosphère, on peut modéliser avec une bonne approximation l'atmosphère terrestre comme une enveloppe sphérique simple de = 9 km de hauteur effective autour d'une planète de = 6 371 km de rayon, on peut écrire leur rapport et l'appliquer à la formule générale[5] :

.
  • (en) L'effet de l'atmosphère terrestre sur la transmission du rayonnement solaire jusqu'au sol peut être modélisé comme si l'atmosphère était concentrée dans un volume limité à 9 km d'altitude.
    (en) L'effet de l'atmosphère terrestre sur la transmission du rayonnement solaire jusqu'au sol peut être modélisé comme si l'atmosphère était concentrée dans un volume limité à km d'altitude.

Le tableau ci-dessous donne une comparaison de ces différents modèles à différentes distances zénithales :

Valeurs approchées du coefficient de masse d'air au niveau de la mer.
Terre plate Kasten et Young[3] Rozenberg[4] Sphère[5]
1,0 1,0 1,0 1,0
60° 2,0 2,0 2,0 2,0
70° 2,9 2,9 2,9 2,9
75° 3,9 3,8 3,8 3,8
80° 5,8 5,6 5,6 5,6
85° 11,5 10,3 10,3 10,6
88° 28,7 19,4 19,3 20,3
90° 37,9 40,0 37,6

Cela signifie que, pour cette application, l'atmosphère peut être considérée comme concentrée jusqu'à une altitude de km, de sorte que tous les effets de l'atmosphère sont considérés provenir de la moitié inférieure de la troposphère. Il s'agit d'un modèle approché simple et utile pour les calculs relatifs à l'intensité de l'énergie solaire à la surface de la Terre.

Valeurs particulières

Les valeurs de coefficients de masse d'air ci-dessous sont celles auxquelles il est le plus souvent fait référence.

  • AM0

Il s'agit du rayonnement solaire au-dessus de l'atmosphère terrestre — littéralement « zéro atmosphère » — correspondant grossièrement au rayonnement d'un corps noir à 5 800 K. C'est le standard utilisé pour les applications spatiales, par exemple pour les nombreux satellites en orbite terrestre basse tels que la station spatiale internationale. À ce niveau, l'irradiation solaire totale reçue par unité de surface correspond à la constante solaire et vaut 1 360,9 ± 0,5 W/m2[6].

  • AM1

Il s'agit du rayonnement solaire reçu au niveau de la mer avec un soleil au zénith, correspondant littéralement à une épaisseur d'atmosphère terrestre. L'intervalle de coefficients AM1 ( = 0°) et AM1.1 ( = 25°) est celui qu'on retient pour les applications solaires au niveau de la mer dans les régions équatoriales ou tropicales.

  • AM1.5

Ce coefficient est celui généralement retenu pour les applications solaires dans les régions tempérées. Il correspond à une distance zénithale de 48,2°. On le rencontre souvent écrit AM1.5G, le « G » signifiant « global » et indiquant qu'on considère le rayonnement direct du soleil et le rayonnement diffusé par le ciel. L'irradiation correspondant au spectre AM1.5G est de l'ordre de 970 W/m2, ce qu'on arrondit généralement à 1 000 W/m2 pour simplifier les calculs avant prise en compte des divers effets d'atténuation qui affectent le rayonnement reçu ; la composante directe seule, sans la diffusion atmosphérique, est de l'ordre de 887 W/m2[7].

  • AM2 à AM3

Les coefficients AM2.0 ( = 60°) à AM3.0 ( = 70°) s'appliquent aux latitudes élevées, par exemple subarctiques. En pratique, le coefficient AM2.0 est pratique pour calculer la performance d'une installation en hiver, dans la mesure où la masse d'air reste supérieure à 2 toute la journée aux alentours du solstice d'hiver aux latitudes voisines de 37° et au-delà, ce qui est par exemple le cas de Tunis.

Intensité du rayonnement solaire

L'intensité du rayonnement reçu décroît lorsque le coefficient de masse d'air croît, mais cette évolution n'est pas linéaire car de multiples facteurs atmospéhriques entrent en ligne de compte. Ainsi, l'essentiel des longueurs d'onde énergétiques est éliminé dans la haute atmosphère, de sorte que l'énergie reçue avec un coefficient AM2 n'est pas moitié moindre que celle reçue avec un coefficient AM1, et donc un soleil au zénith[8]. De plus, l'humidité atmosphérique et la présence d'aérosols, de smog photochimique voire d'une couche d'inversion peuvent atténuer le rayonnement jusqu'à près de 70 % à proximité de l'horizon.

Si l'on écrit = 1 353 W/m2 la constante solaire reçue au sol, une approximation couramment employée pour déterminer l'intensité du rayonnement reçu en fonction de la masse d'air peut s'écrire[9] - [10] :

.

Le facteur 1,1 vient de ce qu'on estime généralement que la composante diffusée du rayonnement reçu représente 10 % de sa composante directe, d'où , tandis que le facteur 0,7 provient du fait qu'environ 70 % de l'intensité incidente est transmise par l'atmosphère terrestre jusqu'au sol ; l'exposant 0,678 est empirique et tient compte des propriétés non uniformes des couches de l'atmosphère. Cette formule s'inscrit dans l'incertitude découlant des facteurs atmosphériques variables tels que la pollution :

Intensité en fonction de l'angle et du coefficient AM.
AM Effet de la pollution Valeur calculée ASTM G-173[11]
0 1 367[alpha 1] 1 353 1 347,9[alpha 2]
1 840 .. 1 130 = 990 ± 15 % 1 040
23° 1.09 800 .. 1 110 = 960 ± 16 %[alpha 3] 1 020
30° 1.15 780 .. 1 100 = 940 ± 17 % 1 010
45° 1.41 710 .. 1 060 = 880 ± 20 %[alpha 3] 950
48,2° 1.5 680 .. 1 050 = 870 ± 21 %[alpha 3] 930 1 000,4[alpha 4]
60° 2 560 .. 970 = 770 ± 27 % 840
70° 2.9 430 .. 880 = 650 ± 34 %[alpha 3] 710
75° 3.8 330 .. 800 = 560 ± 41 %[alpha 3] 620
80° 5.6 200 .. 660 = 430 ± 53 % 470
85° 10 85 .. 480 = 280 ± 70 % 270
90° 38 20

Ce tableau illustre le fait que l'intensité disponible pour les applications solaires ne décroît sensiblement qu'à l'approche de l'horizon : l'intensité du rayonnement reçu atteint encore 60 % de sa valeur maximale quand le soleil n'est plus qu'à 15° de l'horizon.

L'intensité reçue croît avec l'altitude puisque la masse d'air traversée par le rayonnement solaire diminue. Si est la masse d'air calculée au niveau de la mer alors l'intensité reçue à l'altitude exprimée en kilomètres au-dessus du niveau de la mer peut être exprimée à partir de = 1 353 W/m2 par l'équation[10] - [12] :

Le coefficient vaut environ 0,14 dans cette formule, qui ne s'applique qu'aux quelques premiers kilomètres au-dessus du niveau de la mer.

Notes et références

  1. La Deutsche Gesellschaft für Sonnenenergie retient 1 367 W/m2 comme valeur de la constante solaire[8].
  2. Le standard ASTM G-173 mesure l'intensité solaire dans la bande de longueurs d'onde de 280 à 4 000 nm[11].
  3. Interpolation des données de la Deutsche Gesellschaft für Sonnenenergie[8] par la méthode des moindres carrés en prenant pour l'air pollué et pour l'air pur.
  4. Le standard ASTM G-173 mesure l'intensité solaire en milieu rural[11], c'est-à-dire sans pollution, de sorte que cette valeur se trouve logiquement dans la fourchette haute de l'intervalle.
  1. (en) R. M. Goody et Y. L. Yung, Atmospheric Radiation: Theoretical Basis, 2e éd., Oxford University Press, 1989 (ISBN 978-0-19-510291-8).
  2. (en) Peter Würfeln, The Physics of Solar Cells, Wiley-VCH, 2005 (ISBN 3-527-40857-6).
  3. (en) Fritz Kasten et Andrew T. Young, « Revised optical air mass tables and approximation formula », Applied Optics, vol. 28, no 22, , p. 4735-4738 (PMID 20555942, DOI 10.1364/AO.28.004735, Bibcode 1989ApOpt..28.4735K, lire en ligne).
  4. (en) J. Paton, « Twilight—A Study in Atmospheric Optics », Physics Bulletin, vol. 18, no 1, , p. 24 (DOI 10.1088/0031-9112/18/1/014, lire en ligne).
  5. (de) E. Schoenberg, « Theoretische Photometrie, g) Über die Extinktion des Lichtes in der Erdatmosphäre », Handbuch der Astrophysik, vol. 2, Springer, 1929.
  6. (en) Greg Kopp et Judith L. Lean, « A new, lower value of total solar irradiance: Evidence and climate significance », Geophysical Research Letters, vol. 38, no 1, , article no L01706 (DOI 10.1029/2010GL045777, Bibcode 2011GeoRL..38.1706K, lire en ligne).
  7. (en) Jenny A. Nelson, The physics of solar cells, World Scientific Publishing Company, 2003, Bibcode : 2003psc..book.....N.
  8. (en) Deutsche Gesellschaft für Sonnenenergie, « Table 1.1 », Planning and installing photovoltaic systems: a guide for installers, architects and engineers, 2e éd., Earthscan, 2008 (ISBN 978-1844074426).
  9. (en) Todd J. Kaiser, « Characteristics of sunlight », sur https://www.montana.edu/, université d'État du Montana (consulté le ).
  10. (en) Christiana Honsberg et Stuart Bowden, « Air Mass », sur https://www.pveducation.org/ (consulté le ).
  11. (en) « Solar Spectra », sur nrel.gov, NREL (consulté le ).
  12. (en) E. G. Laue, « The measurement of solar spectral irradiance at different terrestrial elevations », Solar Energy, vol. 13, no 1, , p. 51-57 (DOI 10.1016/0038-092X(70)90006-X, Bibcode 1970SoEn...13...43L, lire en ligne).
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