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Manufacture royale de glaces de miroirs

La Manufacture royale de glaces de miroirs est une ancienne manufacture, créée en 1665, à l'origine de Saint-Gobain. Elle a produit les miroirs de la galerie des Glaces de Louis XIV[1].

Manufacture royale de glaces de miroirs
Présentation
Type
Propriétaire
société privée
Patrimonialité
Coordonnées
49° 35′ 56″ N, 3° 22′ 37″ E
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La Compagnie du Noyer (1665-1683)

Les plans ambitieux de Jean-Baptiste Colbert, ministre des Finances de Louis XIV visaient Ă  donner Ă  la France l'autosuffisance pour les arts et manufactures, afin de satisfaire la demande domestique en produits de luxe, ce qui avait pour effet de servir la gloire du roi et de renforcer l'Ă©conomie du pays[2]. Colbert s'est ainsi intĂ©ressĂ© aux verres et miroirs, une industrie monopolisĂ©e par la RĂ©publique de Venise qui exportait le verre de Venise dans toute l'Europe. Or l'importation de ces verres Ă©tait coĂ»teuse (30 000 livres-or par an), si bien que Colbert fit espionner les verriers vĂ©nitiens et parvint Ă  en faire venir (leur promettant argent, exemption d'impĂ´ts et femmes), mais ces derniers furent empoisonnĂ©s au mercure[3] utilisĂ© pour la fabrication de la galerie des Glaces[4]. Colbert Ă©tablit donc par lettres patentes, entre autres projets, en la Manufacture royale de glaces de miroirs. Son bĂ©nĂ©ficiaire et premier directeur fut le financier Nicolas du Noyer, receveur gĂ©nĂ©ral des tailles Ă  OrlĂ©ans[5].

Nicolas du Noyer et ses partenaires reçurent un monopole de 20 ans pour la fabrication du verre et des miroirs. La compagnie fut alors connue sous le nom informel de Compagnie du Noyer. Elle bĂ©nĂ©ficia d'un financement de l’État de 11 000 livres et commença ses activitĂ©s dans le faubourg Saint-Antoine Ă  Paris.

Colbert affecta à la Manufacture royale de glaces de miroirs plusieurs ouvriers vénitiens qui étaient venus à Paris. Les premiers miroirs sans défaut furent produits en 1666[6]. Bien que les miroirs produits par sa compagnie puissent rivaliser avec ceux de Venise, du Noyer se plaignit que les ouvriers vénitiens ne partageaient pas leurs secrets de fabrication avec leurs collègues français et que la Compagnie n'arrivait pas à faire des bénéfices. Les distractions de Paris nuisaient au bon travail des ouvriers et le coût du bois était très élevé. Aussi en 1667, les verriers vénitiens sont renvoyés et la fabrication de la glace est transférée à Tourlaville près de Cherbourg, au lieu-dit La Glacerie, où existait déjà une glacerie au milieu de la forêt de Brix sous la direction de Richard Lucas de Néhou. Les ateliers parisiens furent consacrés au polissage du verre.

À plusieurs reprises la Compagnie du Noyer fut réduite à importer de verre de Venise pour le finir en France. Toutefois en la Manufacture royale de glaces de miroirs était suffisamment sûre d'elle-même pour que l'importation de verre soit interdite aux sujets du roi[6].

Ă€ la fin du règne de Louis XIV, l'industrie miroitière avec Ă  sa tĂŞte, la Manufacture royale de glaces de miroirs, exporte des glaces dans toute l'Europe pour un Ă©quivalent de 300 000 Ă  400 000 livres or par an. Le monopole vĂ©nitien est remplacĂ© par le monopole français.

Les autres compagnies jusqu'Ă  la RĂ©volution

Cependant, en 1688, l'État aida Ă  la crĂ©ation de la Compagnie ThĂ©vart et la finança en partie. Le monopole de la Compagnie du Noyer Ă©tait donc enfreint, d'autant plus que ThĂ©vart faisait des miroirs et du verre selon une nouvelle technique de coulage qui lui permettait de faire des tailles de 60 pouces par 40 alors que Noyer ne faisait que du 40 par 40. Une compĂ©tition sĂ©vère s'introduisit donc au cĹ“ur de ce mĂ©tier, mĂŞme si en thĂ©orie les glaces que devaient produire les deux compagnies Ă©taient diffĂ©rentes. Toutefois il semble que derrière la Compagnie ThĂ©vard soit Louis Lucas de NĂ©hou, neveu de Richard de NĂ©hou et inventeur du procĂ©dĂ© par coulage. En 1692, Louis Lucas de NĂ©hou s'installe dans l'ancien château des sires de Coucy, Ă  Saint-Gobain, dans l'Aisne, car le nouveau procĂ©dĂ© exige des quantitĂ©s de bois très importantes.

Cette concurrence dura 7 ans, jusqu'Ă  ce qu'en 1695 un ralentissement de l'Ă©conomie conduisit Ă  une fusion sous l'Ă©gide du ministère, donnant le jour Ă  la Compagnie Plastrier.

En 1702, après seulement 7 ans d'existence, la Compagnie Plastrier est mise en faillite sous l'effet de la dĂ©gradation de la conjoncture Ă©conomique et de la concurrence avec la Compagnie ThĂ©vart. Un groupe de financiers genevois conduit par Jacques Buisson, associĂ© Ă  la Maison Antoine Saladin et fils, prend le contrĂ´le de la Manufacture royale des glaces. La sociĂ©tĂ© prend le nom de Compagnie Dagincourt, du nom d'Antoine Dagincourt, le nouveau titulaire du privilège de fabrication des glaces. Elle reçoit de nouveaux statuts qui règlent avec prĂ©cision les relations entre les "IntĂ©ressĂ©s" (les actionnaires), la rĂ©partition du bĂ©nĂ©fice et l'administration des affaires. Son privilège est renouvelĂ© jusqu'Ă  la RĂ©volution, malgrĂ© les attaques de partisans de la libre entreprise dans ce domaine.

L'épuisement des ressources en bois du site de Tourlaville l'amène à importer du charbon anglais (ou des houillères de Littry entre 1749 et 1817[7]). Cette source d'énergie trop chère le fera péricliter, assurant la prééminence du site de Saint-Gobain.

L'actionnariat de la Manufacture royale des glaces au XVIIIe siècle se compose de familles issues de la banque genevoise, de la haute noblesse et de la bourgeoisie d'affaires parisiennes. Parmi eux, Pierre François Geoffrin, caissier gĂ©nĂ©ral (Ă©quivalent actuel du directeur financier) Ă  partir de 1703, accumule grâce Ă  sa position un nombre important de « deniers Â» (actions) jusqu'Ă  devenir le premier actionnaire de la Compagnie avec 13,5% du capital. Son Ă©pouse, la cĂ©lèbre Madame Geoffrin, et leur fille, Marie-ThĂ©rèse de La FertĂ©-Imbault, en hĂ©ritent Ă  sa mort en 1749. Elles deviennent ainsi deux des plus importantes actionnaires de la sociĂ©tĂ© et s'allient Ă  Antoine Saladin de Crans et au groupe des Genevois pour administrer l'entreprise. Madame Geoffrin utilise son salon littĂ©raire connu dans toute l'Europe, et la marquise de La FertĂ©-Imbault, sa position Ă  Versailles Ă  la cour de Louis XV, pour obtenir le renouvellement des privilèges de la Manufacture royale dans la seconde moitiĂ© du XVIIIe siècle[8].

Après la Révolution, la Manufacture devient la compagnie de Saint-Gobain. L'ancien site parisien, situé rue de Reuilly, est vendu à l'Armée qui y construit la caserne de Reuilly[9] - [10].

Évolution du privilège

Le privilège de la Manufacture royale des glaces accordé par les lettres patentes d' a été renouvelé six fois jusqu'à la Révolution[11].

Lettres patentes pour l'Ă©tablissement de la Manufacture royale des glaces de miroirs, octobre 1665[12]

Les lettres patentes d' fondent la Manufacture royale des glaces de miroirs. MĂŞme si l'entreprise est Ă  capitaux privĂ©s, elle se voit cependant attribuer le titre prestigieux de "Manufacture royale" dès son origine et le conserve tout au long de l'Ancien RĂ©gime. Son objet principal est d'octroyer au financier Nicolas du Noyer, issu de la clientèle du ministre Colbert, un monopole de fabrication des glaces de miroirs Ă  la « façon de Venise Â» dans le royaume de France pour une durĂ©e de 20 ans. Le monopole de fabrication est exclusif : l'acte prĂ©cise que tous les privilèges prĂ©cĂ©dents sont rĂ©voquĂ©s, seul Nicolas du Noyer est autorisĂ© Ă  produire des glaces dans les termes prĂ©vus par les lettres patentes, c'est-Ă -dire des glaces « des mĂŞmes et diverses grandeurs, nettetĂ© et perfection que celles que l'on fait et fabrique Ă  Moran [Murano] près la Ville de Venise. Â» Le monopole ne porte pas en revanche sur la commercialisation, les lettres patentes restant muettes sur cette question : implicitement, les importations de glaces de Venise restent autorisĂ©es. Pour soutenir le dĂ©veloppement de l'entreprise, l'acte Ă©numère les exemptions fiscales accordĂ©es par le pouvoir royal aux fabricants, Ă  leur personnel et Ă  leurs activitĂ©s. Il mentionne Ă©galement un prĂŞt de 12 000 livres du TrĂ©sor royal.

Lettres patentes de renouvellement du privilège de la manufacture royale des glaces, sous le nom de Pierre de Bagneux, du [13]

Les lettres patentes de renouvellent le privilège accordé en 1665 qui arrivait bientôt à échéance. La majeure partie des conditions accordées par les précédentes lettres sont inchangées. Le nouveau titulaire du privilège, porté à une durée de 30 années, est Pierre de Bagneux.

3. Lettres patentes pour la réunion des deux manufactures des glaces, du premier

4. Lettres patentes pour le privilège de la compagnie Dagincourt, du

5. Lettres patentes de Louis XV données à Marly le renouvelant pour trente ans, à partir de 1732, le privilège exclusif d’Antoine Dagincourt en faveur du même titulaire

6. Lettres patentes du roi, portant privilège exclusif de la manufacture royale des glaces en faveur de Louis Renard, du

7. Lettres patentes du roi, portant privilège exclusif de la manufacture royale des glaces en faveur de Louis Renard, du mois de

De nos jours

En 2018, la manufacture des glaces est occupée par l’entreprise Concept 1900 qui fabrique et exporte à travers le monde des manèges de type Carrousel[14].

Voir aussi

Notes et références

Références

  1. Maurice Hamon, « Les commandes de glaces pour Versailles aux XVIIe et XVIIIe siècles Â», Colloque Verre et fenĂŞtre, de l'AntiquitĂ© au XVIIIe siècle
  2. (en) Abbott Payson Usher, « Colbert and Governmental Control of Industry in Seventeenth Century France », The Review of Economics and Statistics, 16.11, novembre 1934, p.237-240.
  3. Qui a fabriqué les miroirs de la galerie des Glaces ? émission les p'tits bareaux sur France Inter, 26 décembre 2010
  4. Alain Baraton, Vice et Versailles - Crimes, trahisons et autres empoisonnements au palais du Roi-Soleil, Grasset, 2011, 208 p.
  5. « Glace », Jacques Savary des Brûlons, Dictionnaire universel du commerce, 1723
  6. (en) Warren C. Scoville, Capitalism and French Glassmaking, 1640-1789, University of California Publications in Economics, 2006, p.28.
  7. Philippe Bernouis, « La Mine de charbon de Littry, hier et aujourd’hui », .
  8. Maurice Hamon, Madame Geoffrin, femme d'influence, femme d'affaires au temps des Lumières, Paris, Fayard, 2010, 782 p.
  9. Comparaison entre le cadastre de Paris par îlot (1810-1836), plan 32e quartier Quinze-Vingts, îlot no 5, côte F/31/88/07 et le plan parcellaire municipal de Paris (fin XIXe), plan 46e quartier Picpus, 59e feuille, côte PP/11822/A
  10. FĂ©lix et Louis Lazare, Dictionnaire administratif et historique des rues de Paris et de ses monuments, Ă©dition de 1844, p. 589 [lire en ligne]
  11. Claude Pris, La Manufacture royale des Glaces de Saint-Gobain, 1665-1830 : Une grande entreprise sous l’Ancien Régime, Lille, Service de reproduction des thèses de l’université, 1975, 3 vol., 1287 p.
  12. Texte sur Wikisource
  13. Texte sur Wikisource
  14. Concept 1900 : des carrousels fabriqués à Saint-Gobain qui s'exportent dans le monde entier sur www.france3.fr, 5 janvier 2021.

Sources

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