Les Chinois Ă Paris
Les Chinois à Paris est une comédie franco-italienne écrite et réalisée par Jean Yanne et sortie en 1974.
Titre original | Les Chinois Ă Paris |
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RĂ©alisation | Jean Yanne |
Scénario |
Jean Yanne GĂ©rard Sire Robert Beauvais d'aprĂšs son roman Quand les Chinois... |
Acteurs principaux | |
Sociétés de production |
Ciné qua non Productions 2000 Produzioni Europee Associati |
Pays de production |
France Italie |
Genre | Comédie |
Durée | 110 min |
Sortie | 1974 |
Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution
Synopsis
L'Europe est en passe d'ĂȘtre totalement envahie par l'armĂ©e innombrable de la Chine maoĂŻste. Ă la tĂ©lĂ©vision, le prĂ©sident de la RĂ©publique française (Bernard Blier) appelle le peuple français Ă l'esprit d'abnĂ©gation et de sacrifice. Mais, immĂ©diatement aprĂšs son allocution, il s'embarque avec son entourage dans un avion pour New York.
Pendant que les Parisiens sâentre-tuent sur l'autoroute pour pouvoir fuir les premiers, l'armĂ©e d'occupation chinoise occupe la France sans effusion de sang. Les troupes chinoises ont Ă peine installĂ© leur campement que les autoritĂ©s de l'Ătat, de l'Ăglise et la presse viennent offrir leurs services. Le Haut-Commissaire Pou-Yen installe son quartier gĂ©nĂ©ral aux Galeries Lafayette. Puis, depuis PĂ©kin, le ComitĂ© central nomme le Français HervĂ© Sainfous de Montaubert (Jacques François) au poste de gouverneur de la France occupĂ©e. L'occupant entreprend de mener une rĂ©volution prolĂ©tarienne en France, Ă la maniĂšre chinoise : l'une des premiĂšres mesures est la suppression des voitures individuelles. Dans le cadre de la planification d'une division internationale du travail, les Chinois cherchent Ă quoi ils pourraient occuper les Français. Ils dĂ©couvrent que ceux-ci sont connus pour ĂȘtre les plus grands fumistes du monde. En raison de la confusion sĂ©mantique entre le terme argotique de « fumiste » et le mĂ©tier de poĂȘlier-fumiste, toute la France se retrouve Ă fabriquer des tuyaux de poĂȘle. Les industriels, comme GrĂ©goire Montclair (Michel Serrault), deviennent subitement de zĂ©lĂ©s communistes.
RĂ©gis Forneret (Jean Yanne) est propriĂ©taire d'un sex-shop. Personnage cynique et dĂ©sabusĂ©, il cherche comment tirer parti de la situation. Le rigorisme des communistes chinois le pousse Ă transformer son magasin en boutique de chop suey. Mais il a tout de suite une autre idĂ©e : il invente les « podomĂštres », un systĂšme de taxis en pousse-pousse, qui obtient immĂ©diatement un Ă©norme succĂšs. Il fĂȘte bientĂŽt son premier milliard. Il se fait ensuite prĂ©senter au haut-commissaire Pou-Yen. Il le persuade de le subventionner pour qu'il monte un « opĂ©ra rĂ©volutionnaire ». Il fĂȘte bientĂŽt son deuxiĂšme milliard. Et il fĂȘtera son huitiĂšme en signant un contrat pour fabriquer des gilets pare-balles pour l'armĂ©e chinoise. Plus tard, lors d'une nouvelle rencontre avec Pou-Yen, Forneret obtient l'autorisation de transformer la France en vĂ©ritable pays symbolique de la dĂ©cadence, sous prĂ©texte de servir de contre-exemple au monde socialiste. Avec l'aide des subventions chinoises, il couvre la France de boĂźtes de nuit, de casinos, de cabarets et de bordels.
Les Chinois en viennent à partager les ébats nocturnes des Français, ce qui finit par les épuiser. Un matin, ils évacuent la France sans coup férir.
La France est de fait libĂ©rĂ©e. Le prĂ©sident de la RĂ©publique rentre alors des Ătats-Unis. Celui-ci est Ă peine rĂ©installĂ© que Forneret vient lui vendre tout le matĂ©riel militaire abandonnĂ© par les Chinois. Forneret quitte ensuite la France pour l'Italie, toujours sous occupation chinoise, pour continuer ses affaires fructueuses. Il confie Ă StĂ©phanie, qu'il a emmenĂ©e avec lui, qu'il vient dĂ©jĂ de revendre au pape tous ses pousse-pousse.
Fiche technique
- Titre : Les Chinois Ă Paris
- RĂ©alisation : Jean Yanne
- ScĂ©nario : Jean Yanne, GĂ©rard Sire, Robert Beauvais, dâaprĂšs le roman de ce dernier Quand les Chinois..., Fayard, 1966[2]
- Dialogues : Jean Yanne
- Chorégraphe : Monique Vence
- Graphisme : Tito Topin
- Générique début : Claude Copin
- Producteurs : Jean Yanne, Jean-Pierre Rassam
- Distribution : United Artists
- DĂ©cor : Jacques Dugied
- Musique : Michel Magne
- Directeur de la photographie : Jean Boffety
- Année : 1974
- Format : couleur - Mono
- Durée : 110 minutes
- Genre : comédie
- Pays : France; Italie
- Langue : français, chinois
- Date de sortie :
Distribution
- Jean Yanne : RĂ©gis Forneret
- Michel Serrault : Grégoire Montclair, industriel converti au marxisme-léninisme
- Nicole Calfan : Stéphanie, fille de Lefranc
- Jacques François : Hervé Sainfous de Montaubert, gouverneur nommé par les Chinois
- Georges Wilson : Lefranc
- Macha MĂ©ril : Madeleine, femme de Fontanes
- Bernard Blier : le président de la République française
- Paul PrĂ©boist : le prĂȘtre naturalisĂ© chinois de la « police civique »
- Fernand Ledoux : Frugebelle, académicien collabo
- Daniel Prévost : Albert Fontanes, un résistant
- Paul Mercey : un résistant
- KyĆzĆ Nagatsuka : gĂ©nĂ©ral Pou-Yen, haut-commissaire chinois en France (avec la voix de Michel Roux)
- Lawrence Riesner : le conseiller du président de la République française
- Fernand Berset : un policier
- Yves Barsacq : le général moustachu au béret rouge (qu'il porte à l'anglaise)
- Lionel Vitrant : un bagarreur
- Irina Grjebina : lâ« entraĂźneuse » des pousse-pousse (ou « podomĂštres »)
- Michel Delahaye : l'archevĂȘque
- Jean-Michel Desjeunes : le présentateur des informations
- Jean-Louis Maury : le préfet (avec la voix de François Perrot)
Lieux de tournage
- Une des cours du chĂąteau de Vincennes : bivouac de Pou-Yen.
- Les Galeries Lafayette : devenues le siĂšge du haut-commissariat chinois.
- Rue dâAnjou : siĂšge volontairement modeste du gouvernement français fantoche dâHervĂ© Sainfous de Montaubert.
- 42-40, quai dâOrlĂ©ans (dans lâĂźle Saint-Louis) : appartement des Lefranc avec vue sur le chevet de Notre-Dame.
- Parvis du TrocadĂ©ro : emplacement des tribunes de la fĂȘte devant « libĂ©rer les forces de la joie ».
- Intérieurs : ils sont tournés dans une maison avenue du Mal Douglas Haig à Versailles.
- Gare de Paris-Austerlitz.
ThĂšmes
De maniÚre générale, Jean Yanne ne se moque pas vraiment des Chinois, mais bien plus des Français[3], de leur passé proche et des modes intellectuelles de son époque[4]. Le film fait clairement allusion à ces thématiques :
- L'engouement naïf et sans mesure de nombreux intellectuels français pour le marxisme-léninisme et, tout particuliÚrement à partie des années 1960, pour le maoïsme et la Révolution culturelle[5] - [6]. Avec le recul, l'historien et sinologue Lucien Bianco parlera plus tard d'une « euphorie maoïste des années 70, récidive de l'euphorie communiste des années 50 » [6].
- Cet engouement maoïste, qui a été traité quelques années plus tÎt dans La Chinoise, un film de Jean-Luc Godard (1967). La principale organisation des étudiants maoïstes en France, l'Union des jeunesse communistes (marxistes-léninistes) avait alors parlé de «provocation», d'un film qui associait « les marxistes-léninistes à de jeunes bourgeois qui s'amusent [...], qui jouent à la révolution »[5] - [7].
- Le grotesque de la Révolution culturelle, alors encensée par des intellectuels comme Alberto Moravia et Maria-Antonietta Macciochi[5]. On voit de nombreuses fois des soldats chinois s'exercer à brandir le Petit livre rouge des citations de Mao Zedong. On voit aussi le Commandement central de l'Armée chinoise en France siéger dans une tente militaire, tendue à l'intérieur des Galeries Lafayette. Dans une autre scÚne, les Gardes rouges affirment que la dénonciation est un devoir du bon communiste.
- La crainte des Chinois et de leur nombre (le « péril jaune »), illustrée par l'essai Quand la Chine s'éveillera⊠le monde tremblera d'Alain Peyrefitte paru en 1973.
- Le souvenir des pĂ©riodes de lâOccupation (1940-1944), de la libĂ©ration et de l'Ă©puration en France, notamment la tendance Ă la collaboration[3].
Accueil
- Le film est extrĂȘmement mal accueilli par les militants maoĂŻstes français. L'Union des communistes de France (UCF-ML), dirigĂ©e par Alain Badiou, dĂ©chaĂźne une campagne de boycott du film en distribuant des tracts intitulĂ©s : « Les Chinois Ă Paris : un film comique ? Non ! Un film anticommuniste ! ». Jean Yanne y est dĂ©noncĂ© comme un « gros requin du cinĂ©ma, milliardaire, copropriĂ©taire de Gaumont ». Les groupes mĂšnent ensuite des actions de sabotage de la projection du film, notamment par des jets de peinture sur les Ă©crans[5].
- Le film déplut au gouvernement chinois qui, par l'intermédiaire de son ambassadeur de Chine en France, demanda à Alexandre Minkowski, président de l'Association des amitiés franco-chinoises, de déclarer publiquement que le film était « un geste inamical vis-à -vis du peuple chinois ». Alexandre Minkowski s'y refusa[8].
- L'accueil du film par la critique n'est pas tendre : le quotidien Le Monde y voit « un monument de vulgarité », ce qui permettra à Jean Yanne de détourner la critique en apposant sur les affiches du film le bandeau suivant : « Un monument (Le Monde) ».
Autour du film
Les Chinois Ă Paris est une super-production qui rĂ©clamait des moyens beaucoup plus importants que ceux dont Jean Yanne Ă©tait habituĂ© Ă disposer. Afin d'avoir le budget nĂ©cessaire, le rĂ©alisateur a fait appel Ă Marcel Dassault, qui finança le film Ă deux conditions : que les affiches soient placĂ©es sur le chemin qui menait sa limousine de son domicile de Neuilly-sur-Seine Ă ses bureaux des Champs-ĂlysĂ©es, d'une part, et que le film soit projetĂ© en exclusivitĂ© Ă Paris dans la salle de cinĂ©ma qu'il possĂ©dait (le Paris, proche de ses bureaux), d'autre part[9].
L'opéra Carmeng
Spectacle dans le spectacle, Carmeng est dans ce film un ballet reprĂ©sentĂ© Ă lâOpĂ©ra de Paris (OpĂ©ra Garnier) devant le gratin de la collaboration franco-chinoise, Ă lâinitiative de lâhabile RĂ©gis Forneret, incarnĂ© par Jean Yanne. Le spectacle est une caricature des ballets de la RĂ©volution culturelle maoĂŻste, comme Le DĂ©tachement fĂ©minin rouge[10], tournĂ© en film et exportĂ© au dĂ©but des annĂ©es 1970 par les services de propagande chinois dans le monde entier[11].
Ă lâentrĂ©e de lâOpĂ©ra et sous une banderole affirmant que La culture est pour les masses populaires une arme puissante de la rĂ©volution, le programme annonce Carmeng opĂ©ra rĂ©volutionnaire Ă thĂšme dĂ©mocratique et contemporain.
Carmeng reprend nombre dâairs de lâopĂ©ra Carmen de Georges Bizet (1838-1875).
Notes et références
- http://m.douban.com/movie/subject/1883701/.
- Catalogue BNF : http://catalogue.bnf.fr/servlet/biblio?idNoeud=1&ID=32916468&SN1=0&SN2=0&host=catalogue.
- « Jean Yanne en roi du marché noir dans Les Chinois à Paris », sur www.parisfaitsoncinema.com (consulté le )
- Guy Konopnicki, « Les Chinois Ă Paris », Marianne,â (lire en ligne).
- Christophe Bourseiller, Les Maoïstes, la folle histoire des gardes rouges français, Paris, Plon, , 346 p. (ISBN 2-259-18090-6), p. 13-22, 65, 274-275.
- Alexis Lacroix, « Un Alain Badiou n'est possible qu'en France », Marianne,â (lire en ligne).
- « François Caviglioli a rĂ©ussi Ă faire rĂ©agir ceux que La Chinois prĂ©tendait dĂ©fendre. Les "Chinois" de Paris dĂ©savouent Godard », Le Nouvel Observateur,â .
- Alexandre Minkowski, Un Juif pas trĂšs catholique, autobiographie, Ramsay, 1980, p.206.
- « « Bug », « Le mystĂšre AndromĂšde », « Les Chinois Ă Paris »⊠Nos choix de films classiques rĂ©Ă©ditĂ©s », Le Monde.fr,â (lire en ligne, consultĂ© le )
- Nan Ma, « Les Chinois Ă Paris : Le DĂ©tachement fĂ©minin rouge et le maoĂŻsme français du milieu des annĂ©es 1970 », Perspectives chinoises, vol. 1, no 2020,â , p. 45â54 (ISSN 1021-9013, lire en ligne, consultĂ© le )
- « La Chine prĂ©sente au Festival de Venise », Le Monde,â (lire en ligne).
Liens externes
- Ressources relatives Ă l'audiovisuel :
- Allociné
- Centre national du cinéma et de l'image animée
- Ciné-Ressources
- Unifrance
- (en) AllMovie
- (pl) Filmweb.pl
- (en) IMDb
- (en) LUMIERE
- (de) OFDb
- (mul) The Movie Database
- Les Chinois Ă Paris sur MadMovies
- Une réhabilitation de Jean Yanne et de ses Chinois à Paris sur Rue89 (1977)
- Bande-annonce sur Dailymotion comportant quelques scÚnes ne figurant pas dans le film (Chinois dans le métro, sur la tour Eiffel, voguant sur un bateau-mouche)
- VidĂ©o de Carmeng sans les sous-titres expliquant lâargument du ballet
- http://www.imcdb.org/movie.php?id=69874 IMCDb Internet Movie Cars Database