Kroum
Le khan Kroum (en bulgare : ĐĐœŃ«Đ·Ń/ĐŃ«ĐœĐ°Đ·Ń ĐŃŃĐŒ - lire « Kanas Krum » ; en grec : ÎÏÎżÏÎŒÎżÏ/Kroumos), aussi Krum, Crum, Crom, Crome, Crumm ou Crumme, appelĂ© le LĂ©gislateur ou Magnus (? â ) est un khan (souverain, chef de guerre) du khanat bulgare du Danube de 803 Ă 814. Il est considĂ©rĂ© comme l'un des plus grands souverains bulgares pour ses conquĂȘtes et l'introduction du premier code de loi connu pour la Bulgarie.
Krum | |
Titre | |
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Khan des Bulgares | |
â | |
Prédécesseur | Kardam |
Successeur | Omourtag |
Biographie | |
Date de décÚs | |
PĂšre | Kardam |
Enfants | Omourtag Doucom Tsoc |
Ătablissement de nouvelles frontiĂšres
Selon certaines sources, la famille de Kroum viendrait de Pannonie, oĂč elle Ă©tait au service des Avars. Selon d'autres, il Ă©tait peut-ĂȘtre un descendant de Koubrat. Christian Settipani en fait le fils de Kardam. Vers 805, Kroum prend avantage de la dĂ©faite du khaganat avar pour dĂ©truire le reste des Avars et Ă©tendre son autoritĂ© sur les Carpates de Transylvanie et le long du Danube en Pannonie orientale.
Guerre avec Nicéphore Ier
Ă partir de 807, Kroum mĂšne une sĂ©rie de guerres afin dâintĂ©grer les tribus slaves au sein dâune confĂ©dĂ©ration bulgaro-slave. Alternant raids audacieux et des siĂšges des forteresses byzantines, il bat les Byzantins dans la vallĂ©e de la Strouma en 807, puis sâempare de Serditsa/Sredets (Sofia) en 809. Il massacre la garnison en dĂ©pit de sa promesse de clĂ©mence (voir siĂšge de Serdica). En rĂ©action, l'empereur byzantin NicĂ©phore Ier Ă©tablit des populations anatoliennes le long de la frontiĂšre avec le Khanat bulgare pour la protĂ©ger. Il essaie aussi de reprendre Serdica, en vain.
L'invasion de la Bulgarie par Nicéphore Ier
DĂ©cidĂ© Ă dĂ©truire les Bulgares, NicĂ©phore Ier rĂ©unit une Ă©norme armĂ©e en . Le , il campe Ă MarcellĂŠ (en), Ă la frontiĂšre bulgare. Kroum fait une premiĂšre tentative de nĂ©gociation, mais NicĂ©phore la rejette, dĂ©terminĂ© Ă avancer le plus loin possible. Il divise son armĂ©e en trois colonnes, chacune suivant des trajets diffĂ©rents vers la rĂ©sidence permanente du khan bulgare Ă Pliska. Son armĂ©e Ă©vite les embuscades bulgares dans les Balkans et bat une armĂ©e de 12 000 hommes qui sâopposait Ă sa progression en MĂ©sie. Une autre armĂ©e bulgare de 50 000 hommes est battue sous les murs de Pliska (bataille de Pliska). Le , la ville tombe aux mains de NicĂ©phore, « guidĂ© par ses propres intentions malhonnĂȘtes ainsi que par ses conseillers vĂ©reux », selon le chroniqueur ThĂ©ophane le Confesseur, qui lui est hostile pour sa politique religieuse.
Lâempereur byzantin sâempare lui-mĂȘme du trĂ©sor du khan bulgare (il fut ministre des Finances avant de devenir empereur), et toute la ville est pillĂ©e, les soldats tuant et violant la population, dâune maniĂšre ayant frappĂ© les chroniqueurs byzantins. Selon ThĂ©ophane le Confesseur, il aurait coupĂ© les oreilles et dâautres membres des soldats qui avaient touchĂ© au butin que lâempereur avait rĂ©uni.
Michel le Syrien, le patriarche des jacobites syriens au XIIe siÚcle décrit dans sa Chronique les brutalités et les atrocités de l'empereur : « Nicéphore, l'empereur des Romains marcha contre les Bulgares : il fut victorieux et en tua un grand nombre. Il parvint jusqu'à leur capitale, s'en empara et la dévasta. Sa sauvagerie alla à ce point qu'il fit apporter leurs petits enfants, les fit étendre à terre et fit passer dessus des rouleaux à battre le grain. »
Kroum sâhumilia et renouvela sa proposition de paix. Selon ThĂ©ophane le Confesseur, il aurait dĂ©clarĂ© : « Et voilĂ , tu as vaincu. Prends tout ce que tu veux et va-tâen en paix. » NicĂ©phore se moqua de lui et ordonna dâincendier son palais.
La bataille de Virbitsa et la mort de Nicéphore Ier
Alors que NicĂ©phore Ier et son armĂ©e pillent la rĂ©sidence permanente du tsar, Kroum mobilise son peuple pour dresser des embuscades sur le chemin de retour de lâarmĂ©e byzantine. AprĂšs avoir incendiĂ© la ville, lâarmĂ©e byzantine fait retraite. PrĂ©venu des prĂ©paratifs bulgares, l'empereur paniquĂ© rĂ©pĂšte plusieurs fois Ă ses compagnons : « MĂȘme si nous avions des ailes nous ne pourrions pas Ă©chapper au pĂ©ril. »
Ă l'aube du 26 juillet, les Byzantins sont piĂ©gĂ©s entre des fossĂ©s et des barricades de bois dans le dĂ©filĂ© de VÄrbica (en). Ă la bataille de Virbitsa, NicĂ©phore est tuĂ© ainsi qu'une grande partie de son armĂ©e. Beaucoup de soldats sont noyĂ©s dans le fleuve proche, ou tuĂ©s quand les barricades sont mises Ă feu.
Le fils de NicĂ©phore et futur empereur Staurakios est emmenĂ© en sĂ©curitĂ© par la garde impĂ©riale. Il est nĂ©anmoins blessĂ© au cou et paralysĂ©, et meurt quelques mois plus tard. Selon la tradition, le khan bulgare Kroum fait couvrir dâargent le crĂąne de l'empereur pour sâen servir comme dâune coupe Ă boire.
Ă la suite de cette victoire, il avance jusquâĂ Constantinople.
Guerre avec Michel Ier Rhangabé
Staurakios est forcĂ© dâabdiquer aprĂšs un bref rĂšgne (il meurt de sa blessure en 812), et son beau-frĂšre Michel Ier RhangabĂ© lui succĂšde. En 812, Kroum envahit la Thrace, prend Debelt (en) et terrorise les populations des places fortifiĂ©es de la rĂ©gion, provoquant un exode vers Constantinople. De cette position de force, Kroum propose un retour au traitĂ© de 716. Mais, ne voulant pas compromettre son trĂŽne par ce qui apparaĂźtrait comme de la faiblesse, Michel RhangabĂ© rejette cette proposition, proclamant son refus de lâĂ©change des dĂ©serteurs. Pour augmenter la pression sur lâempereur, Kroum assiĂšge et prend Mesembria (Nessebar) Ă la fin de 812.
En fĂ©vrier 813, les Bulgares reprennent leurs razzias en Thrace, mais sont repoussĂ©s par les troupes impĂ©riales. EncouragĂ© par ces succĂšs, Michel Ier mobilise ses forces de tout l'empire, et se dirige vers le nord avec une importante armĂ©e, dans lâespoir dâune bataille dĂ©cisive. Kroum, lui, conduit son armĂ©e vers le sud, en direction dâAndrinople et campe prĂšs de Versinikia. Michel Ier RhangabĂ© Ă©tablit son armĂ©e face Ă lui, mais personne ne prend lâinitiative durant deux semaines. Finalement, le , les Byzantins attaquent, mais la bataille de Versinikia ou deuxiĂšme bataille dâAndrinople tourne immĂ©diatement Ă la dĂ©faite pour Byzance. La cavalerie de Kroum les poursuit et amplifie cette dĂ©route, et Kroum avance sur Constantinople, quâil assiĂšge par terre. Michel RhangabĂ© est forcĂ© d'abdiquer le et devient moine, devenant le troisiĂšme empereur byzantin abattu par Kroum en quelques annĂ©es.
Guerre avec LĂ©on V lâArmĂ©nien
Le nouvel empereur LĂ©on V l'ArmĂ©nien propose de nĂ©gocier, et arrange une rencontre avec Kroum. Mais il lui tend une embuscade et Kroum est blessĂ© par des archers en sâenfuyant. Furieux, il ravage les environs de Constantinople, puis sur la route du retour, il prend Andrinople et dĂ©porte ses habitants (dont les parents du futur Basile Ier) au-delĂ du Danube. MalgrĂ© lâapproche de lâhiver, Kroum profite du beau temps pour envoyer 30 000 hommes en Thrace, armĂ©e qui prend Arkadioupolis (Luleburgaz) et fait 50 000 prisonniers. Le pillage de la Thrace enrichit Kroum et son aristocratie, et permet d'utiliser des Ă©lĂ©ments architecturaux des villes pillĂ©es dans la reconstruction de Pliska ; les artisans dĂ©portĂ©s travaillĂšrent Ă©galement Ă la reconstruction de la ville.
Kroum passe lâhiver Ă prĂ©parer une attaque d'envergure sur Constantinople, oĂč la rumeur rapporte la constitution dâun important parc dâartillerie transportĂ© sur 5 000 chariots. Mais Kroum meurt le , et son fils Omourtag lui succĂšde. Quelques sources lui donnent deux fils aĂźnĂ©s, Doucom ou Dukum et Ditsen, Ditzeny ou Dizevg, khans respectivement de 814 Ă 815 et de 815 Ă 816, et un plus jeune fils, Tsoc ou Tsok.
HĂ©ritage
On se souvient de Kroum pour avoir institué le premier code de lois bulgare connu sous le nom de lois de Kroum[1], dont seuls quelques articles nous sont parvenus par l'intermédiaire de la Souda ; ces derniers punissaient sévÚrement le parjure, la calomnie et ordonnaient l'arrachage des vignes, une mesure interprétée comme une répression de l'ivresse[2]. Certains historiens lui attribuent une politique de centralisation du pouvoir et d'intégration des Slaves dans la classe dirigeante bulgare[3].
Références
- Le khan Kroum, le législateur conquérant
- John V. A. Fine, The Early Medieval Balkans, Ann Arbor, 1983, p. 100.
- John V. A. Fine, The Early Medieval Balkans, Ann Arbor, 1983, pp. 99-101.
Sources
Sources primaires
- Chronique de Michel le Syrien, Ă©d. par J.âB. Chabot, t. III, fasc. I, Paris, 1905, p. 17.
- ThĂ©ophane le Confesseur, Chronique, Ăd. Carl de Boor, Leipzig.
- Collier's Encyclopedia, vol. 4, p. 711.
- Christian Settipani, Continuité des élites à Byzance durant les siÚcles obscurs. Les Princes caucasiens et l'Empire du VIe au IXe siÚcle, 2006 [détail des éditions].
Voir aussi
Articles connexes
- Liste des souverains de Bulgarie
- Khanat bulgare du Danube (681-864)
- Premier Empire bulgare (864-1018)