Keffieh
Le keffieh (/ke.fje/ ; de l'arabe : كوفية, kūfīya) est la coiffe traditionnelle moyen-orientale, portée en Irak, en Jordanie, dans la péninsule arabique (en particulier les pays du golfe Persique), et par les palestiniens, les assyriens, les kurdes et les bédouins. Cette pièce de coton, qui servait aux paysans à se préserver du vent, du soleil et du sable, permettait de distinguer les citadins des ruraux. Le keffieh noir et blanc est devenu l'emblème des Palestiniens et rappelle également la révolte arabe de 1936-1939. Le keffieh connait également un gain de popularité dans le milieu de la mode ainsi qu'au sein des free partys[1].
Issu de la région appelée anciennement « al-Hijaz », « al-Iraq », « al-Yaman », « Accham » et « Filistin », il s'est généralisé au point de devenir un élément de costume commun à beaucoup d'habitants des pays orientaux du monde arabe, et, au-delà de cette région, il s'est popularisé dans le monde entier.
Description
Fait de tissu (traditionnellement coton mais la viscose l'a en partie supplanté, dans certaines productions), il servait originellement à masquer le visage pour se protéger du soleil et des tempêtes de sable. Il est parfois maintenu en place par un anneau de cordelette appelé agal (en arabe : عقال, ʿiqāl, prononciation bédouine : ʿigal).
Le keffieh est le symbole des Palestiniens, mais il existe différents motifs et le nom qu'on lui donne en dépend :
- Le keffieh est la coiffe des citadins, portée en Irak et au Levant ;
- La ghutra est la coiffe des nobles, portée dans le Golfe et dans la péninsule arabique ;
- La shemagh est la coiffe des Bédouins, portée dans la péninsule arabique ;
- Le muzzar est la coiffe portée par les habitants d'Oman et du Yémen.
- Yasser Arafat porte un keffieh.
- Hamad ben Khalifa Al Thani porte une ghutra.
- Salmane ben Abdelaziz Al Saoud porte une shemagh.
- Qabus ibn Saïd porte un muzzar.
Étymologie
Le mot « keffieh », prononcé en arabe [l-kufiyya], vient du nom de la ville de Koufa (à 170 km de Bagdad), qui était un haut-lieu de savoir. L'origine des motifs apparents sur la « keffieh » vient de l'art de la calligraphie arabe du style kouffien [l-khatt l-kuffi], un style créé dans cette même ville.
R. Dozy estime par contre que le terme « keffieh » a une étymologie commune avec l'italien cuffia, l'espagnol cofia, le français coiffe et le portugais coifa, et a été emprunté aux Italiens qui, au Moyen Âge, commerçaient dans les ports d'Égypte et de Syrie[2].
Historique
Au cours de la révolte arabe de 1936-1939 menée contre la présence anglaise en Palestine, le keffieh revêt alors une importance capitale pour les Palestiniens. En effet, les révolutionnaires portaient alors le keffieh, qui leur servait à se protéger le visage et à ne pas être reconnu par les Britanniques. Mais cela les rendait bien évidemment plus repérables dans les villes et les arrestations se multipliaient, les porteurs du keffieh étant considérés comme des opposants. C'est alors que toute la population fut appelée à porter le keffieh. Les citadins abandonnèrent le tarbouche (signe de distinction sociale) pour porter le keffieh, qui était une coiffe paysanne[3].
De même que le chèche pour les troupes françaises, le keffieh est porté par les forces armées de l'Empire britannique stationnées au Proche-Orient depuis presque un siècle. Mais c'est durant la Seconde Guerre mondiale et plus particulièrement durant la campagne en Afrique du Nord que son usage s'est généralisé dans les troupes déployés dans des zones aux températures élevées. Il est utilisé par ces militaires pour sa fonction première de protection contre le soleil et la poussière.
Actuellement, de nombreuses troupes de l'OTAN le portent sous l'appellation shemagh en Afghanistan ou en Irak, même s'il n'est fourni systématiquement qu'à certaines troupes du Commonwealth. Il est particulièrement prisé dans des troupes embarquées qui sont constamment exposées aux projections de sable et de poussière causées par le mouvement des véhicules.
Mais le keffieh fut surtout popularisé par Yasser Arafat dans les années 1960 lorsqu'il se fit remarquer comme leader de l'OLP. Le keffieh reste le plus important symbole des militants palestiniens[3].
Dès les années 1980, le keffieh fut adopté en Europe par les militants de mouvements anarchistes. Le keffieh est devenu également un objet de mode à la fin de la décennie 2000, prenant des couleurs n'ayant pas de lien avec le keffieh originel (bleu, rose, vert, jaune), apparaissant même dans des défilés de grands créateurs de mode parisiens[3] - [4] - [5].
Couleurs
Les couleurs de ceux utilisés par les militaires varient et vont de sable (pour ceux qui équipent les soldats britanniques), à vert olive (pour les soldats irlandais) en passant par le brun ainsi que d'autres agencements de couleurs traditionnelles.
Pour les Palestiniens, sa couleur indique la faction à laquelle appartient le porteur : le keffieh vert et blanc est le symbole du Hamas, le keffieh noir et blanc est le symbole du Fatah, le keffieh rouge et blanc est le symbole du FPLP[6]. Son port reste bien souvent assimilé à un soutien à la cause palestinienne.
Notes et références
- Jean-Pierre Filiu, « La popularité planétaire du foulard palestinien », sur Un si Proche Orient, (consulté le )
- Reinhart Dozy, Dictionnaire détaillé des noms des vêtements chez les Arabes, Amsterdam, J. Müller, (lire en ligne), « كوفية (kūfīya) », p. 394.
- Jean-Pierre Filiu, « La popularité planétaire du foulard palestinien », Le Monde, (lire en ligne).
- Lise Barcellini, « Le keffieh, tissu de discorde entre militants et bobos », Rue89, (lire en ligne).
- (en) Nina Lalli, « Checkered Past. Arafat's trademark scarf is now military chic », The Village Voice, (lire en ligne).
- « Le keffieh, plus qu’un banal accessoire de mode, tout un symbole », L'Orient expressif, (lire en ligne).