Jef Van Bilsen
Anton Arnold Jozef (Jef) van Bilsen, nĂ© le Ă Diest et mort le Ă Kraainem, Ă©tait un docteur en droit de Louvain, militant du Verdinaso et professeur Ă lâuniversitĂ© de Gand. Il fit Ă©galement partie de la branche congolaise de lâagence Belga et fut le Commissaire royal du Service de coopĂ©ration au dĂ©veloppement de 1965 Ă 1966[2].
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Anton Arnold Jozef Van Bilsen |
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Verdinaso (- |
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Il est surtout connu pour ĂȘtre lâauteur du âplan de trente ans pour lâĂ©mancipation de lâAfrique belgeâ qui demandait que l'Ă©lite congolaise soit prĂ©parĂ©e avant d'accĂ©der Ă l'indĂ©pendance. Ce plan proposait trente ans pour cette prĂ©paration, mais le Manifeste de la conscience africaine de l'ABAKO y rĂ©pondit par un contre-manifeste qui voulait l'annulation de ce plan et l'indĂ©pendance immĂ©diate[3].
PremiÚres années : 1913 à 1940
Jef Van Bilsen est nĂ© en 1913 dans la ville de Diest dans le Limbourg[2], dâune famille catholique flamande. Il entra Ă lâuniversitĂ© de Louvain oĂč il fit des Ă©tudes en droit, en histoire et en philosophie. Câest Ă©galement lĂ quâil eut son premier engagement politique, dans le mouvement Ă©tudiant radical flamand. Ă la suite de cela, il passe rapidement Ă lâextrĂȘme droite avec lâunion des national-solidaristes thiois, ou Verdinaso. Câest Ă cette occasion quâil fait la rencontre de Joris Van Severen[4], fondateur et chef du mouvement en question. Cette expĂ©rience sera dĂ©terminante pour la suite de sa vie et pour sa carriĂšre, de par ses relations et la vision du monde politique quâil va se forger. Il est notamment convaincu du rĂŽle primordial des Ă©lites politiques et culturelles pour lâĂ©mancipation des peuples[4].
Peu de temps avant la seconde guerre mondiale, une dispute éclate entre Joris Van Severen et Van Bilsen, en conséquence de quoi ce dernier sera exclu du mouvement[4].
CarriĂšre
1940 - 1945
En ce contexte de seconde guerre mondiale, Jef Van Bilsen conservera son caractĂšre de personnalitĂ© engagĂ©e et particuliĂšrement active. Membre de la RĂ©sistance LĂ©opoldiste puis de lâArmĂ©e secrĂšte (1944), Ă©galement officier de liaison pour lâarmĂ©e amĂ©ricaine en Allemagne (1942)[2], il se noue des contacts prĂ©cieux et se fait une place auprĂšs des Ă©lites politiques. Durant la guerre, il correspond notamment avec lâancien ministre des colonies, August De Schryver[4].
1945 - 1954
Ă la sortie de la guerre, il tire profit de ses actions durant celle-ci et de ses nouvelles relations et devient rĂ©dacteur colonial de lâagence de presse Belga Ă LĂ©opoldville (aujourdâhui Kinshasa) en 1946 oĂč il rencontre, dĂšs son arrivĂ©e, le gouverneur gĂ©nĂ©ral de lâĂ©poque Pierre Ryckmans[5]. Durant le temps oĂč il occupe le poste, il conclut des accords de collaboration avec lâagence de presse sud-africaine (SAPA) ainsi que des revues rhodĂ©siennes (dont notamment lâEast Africa and Rhodesia[6]) afin de disposer de la base dâinformation la plus complĂšte possible. Ce poste lâamena Ă nouer beaucoup de contacts et rencontrer de nombreuses personnes influentes telles que listĂ©es dans son livre âCongo 1945 â 1965, La fin dâune colonieâ[7].
Trois ans plus tard, il accepte le poste de secrĂ©taire flamand du centre Harmel, mis en place afin de rechercher une solution aux problĂšmes communautaires rencontrĂ©s par la Belgique[8]. ParallĂšlement Ă cela, il assure encore la fonction de chef adjoint du cabinet de Pierre Harmel, ministre catholique de lâĂ©ducation publique, de 1950 Ă 1954.
1954 - 1960
AprĂšs la dĂ©mission du gouvernement en 1954, et par la mĂȘme occasion du ministre Harmel ainsi que de son cabinet, Van Bilsen put de nouveau se concentrer sur ses propres projets. GrĂące Ă son sponsor, le baron Yves de Brouwer, il mit en place un centre dâĂ©tudes africaines qui fournissait chaque semaine un digest qui consistait en âune synthĂšse des Ă©vĂ©nements politiques, Ă©conomiques et sociaux survenus en Belgique et Ă lâĂ©trangerâ[9] aux hommes dâaffaires. Cependant le baron Ă©tait leur unique abonnĂ© et, aprĂšs presque deux annĂ©es dâactivitĂ©, le projet cessa. Pendant ce temps Van Bilsen souhaita entreprendre un voyage dâĂ©tude en Afrique, que le baron finança Ă©galement en Ă©change de ârapports sur chaque pays visitĂ©sâ[10]. Il dĂ©buta son voyage dans la capitale Ă©conomique actuelle de la CĂŽte dâIvoire, Abidjan et le poursuivi au Gold Coast (futur Ghana), au Congo, en Ouganda, au Kenya pour le finir au Soudan. Dans chaque pays visitĂ©, il sâattelait Ă rencontrer les membres du gouvernement afin de se faire une idĂ©e des âstructures politiques et administrativesâ[10] de ces pays et dâanalyser âleurs perspectives de dĂ©veloppementâ[10].
Ces annĂ©es marquent la pĂ©riode de sa vie durant laquelle Jef Van Bilsen va ĂȘtre le plus proche du Congo sur le plan politique, et le plus impliquĂ© dans la question de la dĂ©colonisation. Câest Ă ce moment quâil publie, entre autres Ă©crits sur lâindĂ©pendance envisagĂ©e du Congo, son demeurĂ© cĂ©lĂšbre âPlan de trente ansâ, voir infra. Il est aussi trĂšs proche des Ă©lites politiques congolaises et de lâABAKO.
1960-1970
Au lendemain de la dĂ©colonisation, Jef Van Bilsen maintient des liens forts avec le Congo et poursuit son engagement sur la scĂšne internationale. Ă Harvard il travaille au Center for International Affairs qui, dâaprĂšs ses mots, âĂ©tait un institut de recherche oĂč chacun travaillait librement Ă un projet distinctâ[11]. Robert Bowie dirigeait le centre, secondĂ© par Henry Kissinger, diplomate amĂ©ricain, par les deux Ă©conomistes Thomas Schelling et Edward Mason mais Ă©galement Rupert Emerson qui se penchera plus spĂ©cialement sur la problĂ©matique de lâAfrique. Van Bilsen travaillait avec ce dernier ainsi quâavec Carl Rosberg et Martin Kilson sur ce sujet. En plus de ses recherches, il est invitĂ© Ă maintes confĂ©rences et, au lieu de dĂ©laisser ses recherches pour devenir confĂ©rencier, il dĂ©cida âd'ĂȘtre lâun et lâautreâ[12]. Le gouvernement belge insista cependant pour quâil revienne au pays, ou il donna de nouvelles confĂ©rences.
Il fait partie du DĂ©partement de la CoopĂ©ration au dĂ©veloppement (Ă©galement connu sous le nom de lâOffice de CoopĂ©ration au DĂ©veloppement) dont il devient ensuite secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral en 1962. Lâobjectif principal de lâOCD Ă©tait dâapporter âune aide technique postcolonialeâ[13] au Congo, au Katanga, au Ruanda et au Burundi, les anciennes colonies belges. Câest en cette qualitĂ© quâil prend contact avec lâUniversitĂ© de Gand qui sera mise en relation et coopĂ©rera alors avec lâUniversitĂ© rwandaise[4].
En 1965, Van Bilsen est Commissaire du Roi pour la CoopĂ©ration au DĂ©veloppement[4]. Il ne connaĂźt cependant pas ses compĂ©tences prĂ©cises et qualifie son rĂŽle de âfiguratifâ[14], notamment afin dâinstaurer un Ă©quilibre entre nĂ©erlandophones et francophones au sein du gouvernement. Lors du bref laps de temps ou il endossa cette fonction, il eut lâoccasion sâentretenir avec le roi Baudoin sur la coopĂ©ration au dĂ©veloppement. Son rĂŽle pris fin avec la chute du gouvernement Harmel en 1966 (qui ne dura que 6 mois). Durant le gouvernement Vanden Boeyants I (1966-1968), Van Bilsen fut le directeur du Cabinet de Pierre Harmel (1966-1968), tout en enseignant Ă mi-temps Ă lâUniversitĂ© de Gand[4].
1970-1996
Alors quâil y travaillait dĂ©jĂ Ă mi-temps, Jef Van Bilsen enseigne Ă temps plein Ă lâUniversitĂ© de Gand Ă partir de 1970. Il travaille et enseigne principalement sur le Tiers Monde, il est dâailleurs directeur du DĂ©partement pour lâĂ©tude des problĂšmes du Tiers Monde Ă partir de 1974 et jusquâen 1983. Ă cet Ă©gard, il se montre particuliĂšrement progressiste et sâintĂ©resse tant Ă lâaspect politique quâadministratif, ainsi que coopĂ©rationnel du sujet[4].
La décolonisation
Plan de 30 ans
Ce nâest quâen , lors du discours dâouverture de lâInstitut de formation sociale coloniale Ă Bruxelles, que Jef Van Bilsen put commencer Ă travailler plus concrĂštement sur lâAfrique. Devant un public composĂ©, notamment, de personnes se prĂ©parant Ă travailler âcomme assistants sociaux en Afriqueâ[15], il suggĂ©ra, prudemment selon ses mots, lâidĂ©e de progressivement inclure âdes Noirs dans les cadres (...) de lâadministration, de la justice et de lâarmĂ©e colonialeâ[15]. En , la premiĂšre publication concernant le plan fut publiĂ©e dans la revue De Gids op maatschappelijk gebied et elle fut traduite en 1956 en français.
En 1958, il publie son livre Vers lâindĂ©pendance du Congo et du Ruanda-Urundi[16] qui vise Ă la dĂ©fense de sa thĂšse.
RĂ©actions et critiques du plan de 30 ans
La publication de son plan suscita des rĂ©actions tant du cĂŽtĂ© des Belges que des Congolais[17]. Cette dĂ©colonisation avec des objectifs clairs Ă©tait bien perçue du cĂŽtĂ© belge exceptĂ© pour la ânomenklatura colonialeâ[18] qui le recevait avec hostilitĂ©. Par nomenklatura coloniale Jef Van Bilsen dĂ©signe âle ministre des Colonies et son entourage, un nombre limitĂ© de parlementaires conservateurs dans tous les partis, le sommet de lâadministration coloniale Ă Bruxelles, LĂ©opoldville et Usumbura et (...) un grand nombre de figures dirigeantes des milieux dâaffaires coloniauxâ[19]. En effet, le plan prĂ©sentait une menace rĂ©elle pour ceux-ci qui risquaient ainsi de perdre leurs privilĂšges.
Du cĂŽtĂ© des congolais le plan suscite lâagitation qui conduit Ă la rĂ©daction, en 1956 du dĂ©sormais cĂ©lĂšbre âManifeste de Conscience Africaineâ et qui est immĂ©diatement suivie par la rĂ©action du seul parti politique structurĂ© de lâĂ©poque: lâABAKO[3].
Enfin, un dernier type de critique rĂ©sidait en le fait de constater simplement que ce texte qui a pourtant gĂ©nĂ©rĂ© de si fortes rĂ©actions, âse bornait Ă constater âlâĂ©veil de lâAfriqueâ et Ă prĂȘcher âun dialogue belgo-congolaisâ qui permettrait de responsabiliser les Congolais par lâĂ©largissement des droits et des devoirs politiquesâ[18].
Relations avec les Ă©lites africaines
Câest Ă Bruxelles, en 1959, quâil rencontra pour la premiĂšre fois les principaux dirigeants de lâABAKO (Joseph Kasa-vubu, Daniel Kanza et Simon Nzeza) qui venaient de sortir de prison grĂące au ministre Maurice Van Hemelrijck[20]. En 1960 Jef Van Bilsen devint le conseiller politique de Joseph Kasa-vubu ainsi que celui de lâABAKO[4]. Cette fonction de conseiller politique fut cependant âbrĂšveâ[21] car son engagement dans les Ă©vĂ©nements congolais Ă©tait tel quâil Ă©tait devenu le sujet des critiques des opposants de Joseph Kasa-Vubu mais Ă©galement de certains membres de lâABAKO (dont notamment Kini et Moanda). De plus, lâatmosphĂšre Ă©tait encore tendue au Congo et les forces militaires ne voyaient pas dâun bon Ćil âlâingĂ©rence dâun nombre trop Ă©levĂ© de Belgesâ[22].
Cependant, ses fonctions auprĂšs de Joseph Kasa-Vubu ayant pris fin, il se trouva dans une position privilĂ©giĂ©e pour observer les Ă©vĂ©nements politiques Ă suivre. Il donna ainsi de multiples confĂ©rences autour de ce sujet et consacra lâĂ©pilogue de son livre âCongo, 1945-1965: La fin dâune colonieâ Ă des explications relatives Ă la dĂ©colonisation et, en particulier, Ă âLâimplosion de lâAfrique Noireâ[23].
Voir aussi
Bibliographie
- (nl) Dirk Beke, « Jef Van Bilsen : De onafhankelijkheid van Congo en de visie op Lumumba », Afrika Focus, vol. 16, nos 1-2,â , p. 35-60 (lire en ligne, consultĂ© le ).
- (nl) Brecht Lein, « Jef Van Bilsen en het einde van het Verdinaso », Wetenschappelijke Tijdingen (nl), vol. LXX, no 4,â , p. 34-56 (lire en ligne, consultĂ© le ).
- (nl) Brecht Lein, « Jef Van Bilsen tussen Hendrik De Man en Tony Herbert », Wetenschappelijke Tijdingen, vol. LXXI, no 2,â , p. 105-140 (lire en ligne, consultĂ© le ).
- (nl) Filip Reyntjens, « Van Bilsen (Anton Arnold Jozef) », dans Biographie belge d'outre-mer, t. IX, Bruxelles, Académie royale des sciences d'outre-mer, (lire en ligne), col. 379-383.
- (nl) Lieven Saerens, Inventaris van het archief Anton A. Jozef (Jef) Van Bilsen (1913-1996), Louvain, KADOC, coll. « Reeks Inventarissen en Repertoria » (no 59), (lire en ligne).
- VAN BILSEN A. A. J., Vers lâindĂ©pendance du Congo et du Ruanda-Urundi, Kraainem, PremiĂšre Ă©dition, 1978.
- VAN BILSEN J., Congo 1945 â 1965, La fin dâune colonie, Bruxelles, Editions du CRISP, 1994.
- MICHEL M., Van Bilsen Jef, Congo 1945 â 1965, La fin dâune colonie, VingtiĂšme siĂšcle, Revue dâhistoire n°49, 1996.
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- MABILLE X., Histoire de la Belgique politique : facteurs et acteurs de changement, Bruxelles, QuatriĂšme Ă©dition complĂ©tĂ©e dâune postface CRISP, 2000.
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- MâPOYO KASA-VUDU J., 50 ans dâindĂ©pendance du Congo â Rupture ou continuitĂ©, ConfĂ©rence UROME du Ă Bruxelles, sur http://www.urome.be/pdf/Conference5.pdf consultĂ© le Ă 14h56.
Références
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- HervĂ© Hasquin, Dictionnaire dâhistoire de Belgique : Les hommes, les institutions, les faits, le Congo Belge et le Ruanda-Urundi, Namur, , p. 641
- « ConfĂ©rence UROME, 50 ans dâIndĂ©pendance du Congo - Rupture ou ContinuitĂ© ? », sur http://www.urome.be, (consultĂ© le )
- (nl) « Van Bilsen, Jef (1913-1996) », sur http://www.ugentmemorie.be, (consulté le )
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- Jef Van Bilsen, Congo 1945 â 1965, La fin dâune colonie, Bruxelles, Ă©ditions du CRISP, , p. 90-91
- Jef Van Bilsen, Congo 1945 â 1965, La fin dâune colonie, Bruxelles, Ă©ditions du CRISP, , p. 114
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- Jef Van Bilsen, Congo 1945 â 1965, La fin dâune colonie, Bruxelles, Ă©ditions du CRISP, , p. 313
- Jef Van Bilsen, Vers lâindĂ©pendance du Congo et du Ruanda-Urundi, Bruxelles, Ă©ditions du CRISP, , p. 125
- Jef Van Bilsen, Vers lâindĂ©pendance du Congo et du Ruanda-Urundi, Kraainem,
- Xavier Mabille, Histoire de la Belgique politique : facteurs et acteurs de changement, Bruxelles, CRISP, , p. 291
- Marc Michel, Van Bilsen Jef, Congo 1945 â 1965, La fin dâune colonie, VingtiĂšme siĂšcle, Revue dâhistoire n°49, p. 164
- Jef Van Bilsen, Congo 1945 â 1965, La fin dâune colonie, Bruxelles, Ă©ditions du CRISP, , p. 141
- Jef Van Bilsen, Congo 1945 â 1965, La fin dâune colonie, Bruxelles, Ă©ditions du CRISP, , p. 185
- Jef Van Bilsen, Congo 1945 â 1965, La fin dâune colonie, Bruxelles, Ă©ditions du CRISP, , p. 274
- Jef Van Bilsen, Congo 1945 â 1965, La fin dâune colonie, Bruxelles, Ă©ditions du CRISP, , p. 273
- Jef Van Bilsen, Congo 1945 â 1965, La fin dâune colonie, Bruxelles, Editions du CRISP, , p. 354