Initiative YasunĂ-ITT
L'Initiative YasunĂ-ITT est un projet officiel du gouvernement Ă©quatorien entre 2007 et 2013, proposant aux autres gouvernements ainsi qu'Ă la sociĂ©tĂ© civile de s'impliquer financièrement afin d'Ă©viter que soit exploitĂ© un important gisement de pĂ©trole dĂ©couvert en 1990 au cĹ“ur d’un des milieux les plus riches de la planète en biodiversitĂ©, le parc national Yasuni. Ainsi ce milieu exceptionnel serait prĂ©servĂ©.
Pays | |
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Provinces | |
Coordonnées |
1° 05′ 00″ S, 75° 55′ 00″ O |
Superficie |
9 823 km2 |
Type |
Initiative politique (d) |
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Catégorie UICN |
II |
Création | |
Administration |
Ministerio del Ambiente (ministère de l'Environnement) |
Site web |
L'initiative est un échec, conduisant au démarrage de l'exploitation pétrolière en 2016. Celle ci fait cependant l'objet de référendums en 2018 et 2023.
Objectif de l'initiative
La condition à ce renoncement fut un dédommagement financier de la part de la communauté internationale à hauteur de 50 % de la valeur du pétrole potentiellement exploitable. Après avoir reçu avant fin 2011 plus de 100 millions de dollars le gouvernement de Rafael Correa décida de poursuivre cet engagement. En fin de compte, la communauté internationale s’était engagée à débourser 3600 millions de dollars (3,6 milliards) pour protéger le parc Yasuni, ce paiement devant s'étaler sur une période de 13 ans sous l'administration du PNUD (Programme des Nations unies pour le développement ). Cependant un défaut dans l’apport des capitaux escomptés pouvait mettre en péril le maintien du projet.
Enjeux
Situé dans les provinces d'Orellana et de Pastaza dans le Nord-Est de l'Équateur, le parc national Yasuni couvre 10 227 km2 d'Amazonie presque entièrement recouverte de forêt amazonienne[1]. Placé entre le Rio Napo et Rio Curaray, il s'agit d'une des 19 zones mondiales de mégadiversité totalisant plus de 4 000 espèces végétales et 1 000 espèces animales. C'est une des 44 zones protégées du pays, qui a mis en réserve 20 % de son territoire, soit environ 5 millions d'hectares, notamment menacé par la déforestation et le braconnage[2] - [3].
Les sous-sols de ce parc recèlent cependant trois champs pĂ©troliers — Ishpingo, Tambococha et Tiputini, abrĂ©gĂ© en ITT — qui totalisent près de 850 millions de barils de pĂ©trole brut. Le sous sol de ce « bloc 43 » reprĂ©sentent ainsi 20 % des rĂ©serves du pays, dĂ©jĂ membre de l'Organisation des pays exportateurs de pĂ©trole (OPEP). Lors d'un discours devant l'Organisation des Nations unies (ONU), le prĂ©sident Rafael Correa propose en 2007 l'Initiative YasunĂ-ITT, qui consiste Ă renoncer Ă exploiter cette ressource pourtant très profitable afin de prĂ©server le territoire et d'Ă©viter l'Ă©mission d'environ 400 millions de tonnes de CO2. En contrepartie, il demande Ă la communautĂ© internationale de verser Ă l'Équateur la moitiĂ© des recettes pĂ©trolières estimĂ©es, soit 2,7 milliard d'euros Ă©talĂ©s sur treize ans[3] - [4].
Devant l'échec de cette proposition — moins de 1 % des fonds sont récoltés malgré l'enthousiasme des écologistes — Rafael Correa autorise le l'exploitation des champs pétrolifères ITT. Le président cherche alors à minimiser l'impact de l'exploitation sur le parc en affirmant qu'elle n'affectera que 0,01 % du territoire[5] - [6]. Le gouvernement juge ainsi « essentielle » pour l'économie la poursuite de l'exploitation pétrolière dans le pays, la durée restante des réserves hors ITT étant estimée à une décennie. L'économie de l'Équateur est alors toujours fortement affaiblie par la crise bancaire de 1999, qui a été telle qu'elle a conduit le pays a abandonner sa monnaie nationale, le sucre, au profit du dollar américain[7].
La décision provoque une levée de bouclier de la part des écologistes et surtout des communautés indigènes Kichwas et Huaorani, dont douze réunies au sein du mouvement Ecuarunari. Cherchant à empêcher l'exploitation du Yasuni, ces militants surnommés Yasunidos déposent une demande d'initiative populaire[4] - [8].
L'article 104 de la constitution équatorienne de 2008 donne en effet à la population la possibilité de convoquer la tenue d'un référendum populaire en matière législative à la condition de réunir en six mois les signatures d'au moins 5 % des électeurs inscrits sur les listes électorales, soit environ 600 000 signatures[9] - [10]. Malgré la réunion de 727 947 signatures par les Yasunidos, le référendum est empêché en mai 2014, le conseil électoral national (CNE) jugeant invalide près de 60 % d'entre elles[11]. Le rejet par le CNE — qui ne rend pas public lesquelles des signatures sont jugées invalides — est qualifiée par les partisans du projet de « décision arbitraire » et de « malhonnêteté politique et juridique » de la part du « Corréisme ». Lors du renouvellement du CNE en 2018, un comité d'audit conclu à la conformité des signatures et appelle à donner à l'initiative le certificat de validité, sans que ce rapport ne soit suivi d'effet. La décision du CNE d’entériner le rejet de 2014 est porté par les Yasunidos devant le Tribunal du contentieux électoral, qui approuve à son tour le rejet. Le 16 octobre 2020, les Yasunidos déposent par conséquent un recours devant la Cour constitutionnelle, qui admet l'affaire mais ne rend sa décision qu'en mai 2023[12] - [13].
La demande reste ainsi bloquĂ©e pendant une dĂ©cennie. Le permis d'exploitation des champs ITT est entretemps accordĂ© en mai 2014[14], et cette dernière dĂ©marre en 2016, ce qui conduit les Yasunidos Ă organiser des sit-in devant la Cour, le CNE et le Congrès national[4]. Le successeur de Correa Ă la prĂ©sidence, LenĂn Moreno, soumet en parallèle une proposition visant Ă Ă©largir la superficie des zones intangibles du Parc National de Yasuni et de rĂ©duire de 1 030 Ă 300 hectares la zone ouverte Ă l'exploitation. Soumise Ă rĂ©fĂ©rendum le 4 fĂ©vrier 2018 en mĂŞme temps que six autres propositions, elle recueille 67,31 % de votes favorables, pour une participation de 80,74 %[15] - [16]. MalgrĂ© son dĂ©part de l'OPEP en janvier 2020, l’Équateur produit toujours sur son territoire un peu moins d'un demi million de barils par jour, qui reprĂ©sentent en 2023 un tiers des revenus de l’État. Sur ce total, environ 55 000 barils proviennent des champs ITT[17] - [18].
Après près de dix ans de militantisme des organisations indigènes et écologistes, la Cour constitutionnelle finit le 10 mai 2023 par juger en appel que l'initiative initiale de 2014 est valide, oblige le CNE à reconnaître les signatures déjà soumises, et à organiser un référendum[4] - [19]. Ce dernier est fixé au 20 août suivant, soit en même temps que l'élection présidentielle et les élections législatives organisées de manière anticipée dans le contexte de la crise politique de 2023[20] - [21].
Analyse
Malgré l’attention qu’a su attirer le projet sur la scène mondiale, la contribution économique[22] par la communauté internationale ne s’est pas manifestée avec la force attendue.
D'un point de vue Ă©conomique il semblerait que la pression Ă laquelle devrait faire face un tel gisement non exploitĂ© soit très forte dans un futur proche car la rarĂ©faction du brut et sa demande. Le Bureau des Nations unies pour la coopĂ©ration Sud-Sud a dĂ©cernĂ© au gouvernement de l’Équateur le prix « visionnaire leadership et triangulaire 2012 » pour supporter l’initiative Ă©cologique YasunĂ-ITT, qui cherchait Ă laisser un Ă©norme champ pĂ©trolifère dans le sous-sol de la jungle amazonienne[23], en constante Ă©volution ne cessera de faire augmenter son prix et les possibles bĂ©nĂ©fices issus de son exploitation. La durabilitĂ© du projet Ă©tait intrinsèquement liĂ©e Ă la politique interne du pays. De ce fait rien ne garantissait qu'un futur gouvernement ne voie pas dans l'exploitation de ce site un plus grand bĂ©nĂ©fice que celui apportĂ© par le projet Yasuni-ITT. Il Ă©tait nĂ©anmoins prĂ©cisĂ© dans la constitution que tout forage Ă©tait interdit sans l'accord au prĂ©alable de l'assemblĂ©e nationale. Cela provoquerait le remboursement immĂ©diat et intĂ©gral des fonds apportĂ©s par les multiples donateurs et de fortes rĂ©actions Ă©manant de la sociĂ©tĂ© civile nationale et internationale, ce qui pourrait interrompre ces forages. Cependant, plusieurs points de l’initiative devraient ĂŞtre modifiĂ©s pour augmenter sa crĂ©dibilitĂ©. Celui-ci ne prĂ©voit pas le remboursement des investissements infĂ©rieur, les petits donateurs se voient donc dĂ©couragĂ©s, car ils ne sont pas assurĂ©s en cas de forage. De plus la modification de l'autorisation faite au gouvernement Ă©quatorien impliquant l'utilisation du fond pour ses propres besoins serait nĂ©cessaire pour Ă©viter tout conflit d’intĂ©rĂŞt. Une grande prĂ©caution quant Ă la bonne gestion des fonds serait nĂ©cessaire pour voir ce projet atteindre son but. NĂ©anmoins, cette innovation pouvait devenir un exemple pour beaucoup de pays concernĂ©s par la destruction environnementale que causent les exploitations pĂ©trolières. Un processus d’évaluation fut mis en place annuellement par le gouvernement de façon Ă faire le bilan annuel du projet et gĂ©nĂ©rer de nouvelles initiatives pour l’amĂ©liorer. Ă€ travers cette dĂ©marche, le gouvernement envisageait de mettre en route les modifications nĂ©cessaires pour favoriser l’investissement de la part de la communautĂ© internationale (pays, ONG, entreprises, institutions…). Ces modifications passaient entre autres par des processus de recherche et dĂ©veloppement centrĂ©s sur ce projet et une meilleure coordination entre les diffĂ©rents ministères nationaux impliquĂ©s. Mais, le , le prĂ©sident RaphaĂ«l Correa annonça la fin de l'initiative Yasuni-ITT faute d'apports internationaux significatifs[24] et le dĂ©but de l'exploitation pĂ©trolière de la zone. Cependant le dĂ©cret exĂ©cutif N.74 qui officialise cette exploitation dispose que 1 % seulement de la superficie du parc Yasuni pourra ĂŞtre exploitĂ©, soit 10 kilomètres carrĂ©s ou 1 000 hectares[25].
Références
- (es) « Plan de Manejo del Parque National Yasunà », (consulté le )
- Conservar la biodiversidad
- « L’Equateur renonce à sanctuariser le parc Yasuni pour en exploiter le pétrole », sur Le Monde.fr, Le Monde, (ISSN 1950-6244, consulté le ).
- « Équateur: manifestation pour bloquer l’exploitation pétrolière du Yasuni », sur RFI, RFI, (consulté le ).
- (en) https://www.facebook.com/bbcnews, « Ecuador approves Yasuni park oil drilling in Amazon rainforest », sur BBC News (consulté le ).
- (en) Alexandra Valencia, « Ecuador to open Amazon's Yasuni basin to oil drilling », sur U.S., Reuters, (consulté le ).
- Alexandre Shields, « L’exploitation pétrolière dans la réserve de Yasuni est «essentielle pour l’économie», dit le gouvernement », sur Le Devoir, (consulté le ).
- (ro) « Vers un référendum sur la réserve Yasuni en Equateur », sur www.7sur7.be (consulté le ).
- (en) Costa Rica, national Popular or citizens initiative [PCI - Referéndum Constitución y Leyes ]
- Constitution
- « Exploitation pétrolière en Equateur: une association réclame un référendum », sur www.20minutes.fr, (consulté le ).
- « ¿Yasunà y Yasunidos? ».
- (es) Manolo Sarmiento, « La gran farsa de la anulación de las firmas de la consulta por el Yasunà », sur GK, gkcityec, (consulté le ).
- « Feu vert à l'exploitation pétrolière de la réserve de Yasuni », sur Sciences et Avenir, (consulté le )
- Ecuador, 4. Februar 2018 : Vergrösserung des Schutzgebietes im Nationalpark YasunĂ
- (en) « Ecuador votes to reduce oil exploitation in Yasunà National Park », sur Mongabay Environmental News, mongabay, (consulté le ).
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- Martin, Pamela L., « Payer pour préserver : la politique internationale de la propositio... », sur revues.org, International Development Policy / Revue internationale de politique de développement, Institut de hautes études internationales et du développement, (ISBN 978-2-940415-45-8, ISSN 1663-9375, consulté le ), p. 141–160.
- http://www.el-nacional.com/mundo/ONU-iniciativa-ambientalista-Ecuador-Yasuni-ITT_0_103192073.html « Copie archivée » (version du 6 août 2018 sur Internet Archive)
- (de) « Andes.info.ec & redaktionstest.net - Redaktionstest.net », sur Redaktionstest.net, (consulté le ).
- http://www.telegrafo.com.ec/images/eltelegrafo/Economia/2013/15-08-13-economia-ITT.pdf
Voir aussi
Bibliographie
- Guillaume Fontaine, « Le mouvement écologiste contre l'exploitation d'hydrocarbures en Équateur », Problèmes d'Amérique latine, no 70 « Amérique latine, conflits et environnement »,‎ , p. 41-60 (ISSN 0765-1333, e-ISSN 1968-3898, DOI 10.3917/pal.070.0041, lire en ligne).
- (en) Jonathan Asher Greenberg, Shawn C. Kefauver, Hugh C. Stimson, Corey J. Yeaton et Susan L. Ustin, « Survival analysis of a neotropical rainforest using multitemporal satellite imagery », Remote Sensing of Environment, vol. 96, no 2,‎ , p. 202-211 (ISSN 0034-4257, OCLC 99054366, DOI 10.1016/j.rse.2005.02.010).
- Matthieu Le Quang, Laissons le pétrole sous terre ! : l'initiative Yasuni-ITT en Équateur, Montreuil, Omniscience, coll. « La manufacture des idées », , 253 p. (ISBN 978-2-916097-39-8, OCLC 826835121, BNF 42760074, SUDOC 165164409).