Ilham Tohti
Ilham Tohti[Note 1] (ouĂŻghour : ŰŠÙÙÚŸŰ§Ù ŰȘÙŰźŰȘÙ, ĂOuL : Ilham Toxti, ĂOuN : Ilⱚam Tohti; chinois simplifiĂ© : äŒććæšâąć蔫æ; ; pinyin : ), nĂ© le Ă Artux au Xinjiang, est un Ă©conomiste ouĂŻghour chinois.
Naissance | |
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Nom dans la langue maternelle |
ŰŠÙÙÚŸŰ§Ù
ŰȘÙŰźŰȘÙ |
Nationalité | |
Formation |
Université normale du Nord-Est (en) Université centrale des minorités |
Activités | |
Conjoint |
Guzailai Nuâer |
Enfant |
Jewher Ilham (d) |
A travaillé pour | |
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Condamné pour |
Crime de séparatisme (d) () |
Distinctions | Liste détaillée Prix PEN/Barbara Goldsmith pour la liberté d'écrire (en) () Prix Martin-Ennals () Prix des droits de l'homme de la Ville de Weimar () Prix des droits de l'homme Våclav-Havel () Prix Sakharov () |
La justice chinoise le condamne à la prison à vie en 2014 pour subversion. Ses proches sont sans nouvelle de lui depuis 2017. Toujours emprisonné, il reçoit de nombreuses distinctions, dont en le prix Sakharov du Parlement européen.
Biographie
Ilham Tohti enseigne le droit constitutionnel et le commerce international Ă l'universitĂ© centrale des minoritĂ©s de PĂ©kin. Ses Ă©tudiants sont des OuĂŻghours, mais aussi des Hans, Mongols ou TibĂ©tains[1]. Il est cĂ©lĂšbre pour ses confĂ©rences « libres » oĂč il n'hĂ©site pas Ă aborder des sujets difficiles comme le bilinguisme au Xinjiang, le contrĂŽle de la presse et du Net. Cet enseignement lui vaut une surveillance permanente[2].
Son blog Uyghur Online lui permet de proposer des solutions auprÚs des cadres politiques et économiques chinois pour améliorer la situation au Xinjiang[1].
Mise au secret en 2009
Il a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© Ă PĂ©kin en par les autoritĂ©s chinoises en raison de sa critique de la politique du gouvernement chinois envers les OuĂŻghours dans la rĂ©gion autonome ouĂŻghoure du Xinjiang[3]. La dĂ©tention de Tohti s'est produite quelques jours aprĂšs les Ă©meutes au Xinjiang en juillet 2009.
En , Wang Lixiong et sa femme Tsering Woeser ont lancĂ© une pĂ©tition[4] afin de demander la libĂ©ration de l'universitaire Ilham Tohti. La pĂ©tition souligne quâIlham Tohti revendique des relations amicales entre nationalitĂ©s. Son blog a Ă©tĂ© conçu comme un espace d'Ă©change, Ilham Tohti ne saurait ĂȘtre tenu pour responsable des propos tenus par des participants au forum du blog[5]. Le , 250 personnes avaient signĂ© cette pĂ©tition.
Hou Hanmin le porte-parole du Bureau d'information de la rĂ©gion autonome du Xinjiang et relayĂ© par lâagence de presse Ă©tatique Xinhua affirme quâIlham Tohti est « parti en vacances ». Le journal Mandarin news a essayĂ© sans succĂšs d'entrer en contact avec le blogueur.
Concernant cette affaire, l'organisation non gouvernementale internationale Reporters sans frontiĂšres indique le que « les dirigeants du Xinjiang ont dĂ©clarĂ© Ă la tĂ©lĂ©vision nationale que les sites Uyghur Online et Diyarim.com Ă©taient deux canaux Ă travers lesquels les manifestations Ă©taient organisĂ©es. Plus dâune cinquantaine de forums Internet et de plateformes de discussions ont Ă©tĂ© fermĂ©s, dont Uyghur Online, ainsi que de nombreux rĂ©seaux sociaux (Facebook, Twitter, YouTube, MSN messenger). Pour Reporters sans frontiĂšres, cette censure partielle dâInternet traduit la volontĂ© des autoritĂ©s dâempĂȘcher les mobilisations de OuĂŻghours et la publication dâinformations alternatives Ă la propagande du gouvernement »[6].
Le , Ilham Tohti a été libéré. Il indique avoir été assigné à résidence dans un hÎtel proche de Pékin, puis dans son logement. Il dit ne pas avoir subi de mauvais traitements[7].
Arrestation et condamnation en 2014
Lors d'une opĂ©ration musclĂ©e, prĂšs de 30 policiers de PĂ©kin et du Xinjiang l'ont arrĂȘtĂ© Ă nouveau le , et ont saisi quatre ordinateurs, des tĂ©lĂ©phones portables et des mĂ©moires de ses Ă©tudiants. Un porte-parole du ministĂšre des affaires Ă©trangĂšres a dĂ©clarĂ© que Tohti Ă©tait soupçonnĂ© d'avoir commis des dĂ©lits et enfreint la loi[8] - [9]. Il avait exprimĂ© sur son site web sa crainte d'une recrudescence des pressions exercĂ©es contre les OuĂŻghours Ă la suite d'un attentat, attribuĂ© aux sĂ©paratistes, oĂč une voiture fonça dans la foule sur la place Tian'anmen Ă PĂ©kin, tuant cinq personnes[10].
AccusĂ© dâun « crime » qui peut ĂȘtre puni de la peine de mort ou de la prison Ă perpĂ©tuitĂ©[11], Ilham Tohti est jugĂ© en devant un tribunal du Xinjiang pour « sĂ©paratisme ». Selon son avocat, il n'a fait qu'« exprimer ses opinions en tant qu'universitaire ». Les observateurs Ă©trangers n'ont pas pu accĂ©der au tribunal d'Urumqi. L'ONG Human Rights Watch Ă©voque une « mascarade de justice » qui « confortera le sentiment de discrimination Ă l'encontre des OuĂŻghours »[12]. Amnesty International dĂ©nonce les pressions qui ont contraint l'un de ses avocats Ă renoncer Ă le dĂ©fendre, et le fait que ses avocats n'ont pas eu accĂšs Ă toutes les piĂšces du dossier. Il leur a aussi Ă©tĂ© interdit pendant six mois de voir leur client[13]. Le reprĂ©sentant de lâUnion europĂ©enne Ă PĂ©kin a dĂ©clarĂ© que « lham Tohti exerçait ses activitĂ©s dans le respect de la loi chinoise, et il doit ĂȘtre libĂ©rĂ© »[14].
Au terme d'un procĂšs de deux jours, Ilham Tohti est condamnĂ© Ă la rĂ©clusion Ă perpĂ©tuitĂ©, accusĂ© notamment d'avoir Ă©crit des messages favorables Ă l'indĂ©pendance du Xinjiang sur son site web. La BBC remarque que le verdict est surprenant : membre du Parti communiste chinois, Ilham Tohti avait toujours insistĂ©, dans ses Ă©crits universitaires ainsi que sur son site web, que le Xinjiang devait rester chinois, et avait fermement dĂ©noncĂ© la violence de certains sĂ©paratistes ouĂŻghours[13]. Le professeur Elliot Sperling qualifie le procĂšs d'inĂ©quitable[15]. Pour Pierre Haski, sa condamnation relĂšve de lâĂ©limination des voix modĂ©rĂ©es parmi les OuĂŻghours[16].
En , l'avocate Wang Yu, qui est intervenue pour dĂ©fendre Tohti, est arrĂȘtĂ©e et accusĂ©e de « subversion contre l'Ătat », passible d'une peine de prison Ă vie[17].
Le , quatre cents universitaires, de toutes nationalités, ont demandé à Xi Jinping, le président chinois, de libérer Ilham Tohti[18].
Sa fille, Jewher Tohti, indique que la derniĂšre fois oĂč sa famille a pu voir son pĂšre en prison câest en 2017, câest lâĂ©poque oĂč les camps d'internement du Xinjiang sont mis en place. Depuis elle ne sait pas oĂč il est ou s'il est encore vivant[19]. La sinologue Marie Holzman indique : « Rien ne filtre, on ne sait rien. Les frĂšres dâIlham Tohti, au Xinjiang, sont sans aucun doute soumis Ă une pression intense pour ne rien dire, sous peine de ne plus le voir. Câest une stratĂ©gie volontaire des autoritĂ©s : faire comme sâil nâexistait pas »[20]. Le Parlement europĂ©en lui remet en le prix Sakharov. Toujours emprisonnĂ©, câest sa fille Jewher Tohti qui reçoit le prix en son nom[21]. En , l'Union europĂ©enne demande Ă la Chine la libĂ©ration immĂ©diate de Ilham Tohti [22].
Distinctions
- 2014 : PEN/Barbara Goldsmith Freedom to Write Award (prix pour la libertĂ© dâĂ©crire)[1].
- 2016 : Prix Martin Ennals[23]
- 2017 : Prix des droits de l'homme de la Ville de Weimar
- 2019 : Prix VĂĄclav-Havel[24]
- 2019 : Prix Sakharov[25]
- 2022 : Prix Academic Honoris Causa de Carta Academica[26]
Notes et références
Notes
- "Ilham Tohti" est le rĂ©sultat quand les mĂ©dias anglophones omettent erronĂ©ment mais intentionnellement les diacritiques de l'ĂOuN.
Références
- André Gattolin, Marie Holzman et Noël MamÚre Donnons le prix Sakharov à un intellectuel ouïghour Libération, 14 juillet 2016
- Le Nouvel Observateur du 23 dĂ©cembre au 5 janvier 2010 : La voix des sans paroles de Ursula Gauthier - Ilham Tohti : une fenĂȘtre sur le Xinjiang (page 83).
- « Outspoken Economist Presumed Detained », Radio Free Asia (consulté le )
- Texte de la pĂ©tition en faveur de la libĂ©ration de lâĂ©conomiste Ilham Tohti
- Source : Le Courrier International.
- « Reporteurs sans FrontiÚres : un mois sans nouvelles »(Archive.org ⹠Wikiwix ⹠Archive.is ⹠Google ⹠Que faire ?)
- Libéré, un universitaire blogueur ouïghour demeure sous étroite surveillance - Reporters sans frontiÚres « Copie archivée » (version du 31 août 2013 sur Internet Archive)
- « China police detain Uighur scholar Ilham Tohti », BBC News,â (lire en ligne, consultĂ© le ) : « Foreign Ministry spokesman Hong Lei said the scholar had been "criminally detained" and was suspected of "committing crimes and violating the law" ».
- Brice Pedroletti, InquiĂ©tudes aprĂšs l'arrestation de lâintellectuel ouĂŻgour Ilham Tohti
- China police detain Uighur scholar Ilham Tohti, op. cit. : « He had recently expressed fears on his website about increased pressure on Uighurs following last October's deadly attack in Beijing's Tiananmen Square. / A car crashed through a crowd and burst into flames, killing five people. Beijing authorities have blamed the incident on Uighur separatists. »
- Gregory B. Lee (en), sinologue AprÚs Simon Leys : lettre ouverte aux sinologues et défenseurs des droits humains, 16 août 2014.
- AFP, Chine: 2e jour de procÚs pour séparatisme d'un intellectuel ouïghour au Xinjiang, Le Point, 18 septembre 2014.
- (en) "China jails prominent Uighur academic Ilham Tohti for life", BBC News, 23 septembre 2014.
- « Ilham Tohti, lâĂąme ouĂŻghoure entravĂ©e par PĂ©kin », LibĂ©ration.fr,â (lire en ligne, consultĂ© le )
- (en) European Parliament Conference Launches Ilham Tohtiâs Candidature for Sakharov Prize « Even more worryingly, as Professor Elliot Sperling cautioned, by demonising the Uyghurâs Islamic faith, this fosters resentment. Whatâs more, by imprisoning without a fair trial Professor Ilham Tohti, a moderate, liberal and non-violent public critic of the government, the legitimate issues he brings to the surface are ignored, leaving the situation at risk of exploitation from extremists. »
- Pierre Haski rĂ©pond Ă nos questions sur les libertĂ©s en Chine Groupe dâĂ©tudes gĂ©opolitiques, 4 avril 2018
- Deux nouveaux avocats inculpés de subversion Le Point, 13 janvier 2016
- Des centaines dâintellectuels exhortent le prĂ©sident chinois Ă libĂ©rer Ilham Tohti Amnesty international, 15 janvier 2016
- "Le sujet des Ouïghours n'est pas politique. C'est une question d'humanité" Paris Match, 17 décembre 2019
- Frédéric Lemaßtre et Brice Pedroletti Le prix Sakharov décerné à Ilham Tohti, dissident ouïgour emprisonné Le Monde, 24 octobre 2019
- Le prix Sakharov Ilham Tohti, voix étouffée de la minorité ouïgoure La Croix, 18 décembre 2019
- LâUE demande Ă la Chine la libĂ©ration de la « journaliste citoyenne » Zhang Zhan Le Nouvel Obs, le 29/12/2020 : « Outre Zhang Zhan, lâUE demande la libĂ©ration immĂ©diate de lâavocat Yu Wensheng, [...] Elle rĂ©clame Ă©galement celle des avocats Li Yuhan et Gao Zhisheng, des cyberdissidents Huang Qi et Wu Gan, du dĂ©fenseur des droits Ge Jueping (arrĂȘtĂ© en 2016 lors du G20 en Chine), de lâĂ©crivain et militant Qin Yongmin, du militant de la langue tibĂ©taine Tashi Wangchuk, du dĂ©fenseur des droits de lâhomme Liu Feiyue, ainsi que de lâintellectuel ouĂŻghour Ilham Tohti. »
- Droits de lâhomme : le prix Martin Ennals dĂ©cernĂ© Ă lâintellectuel ouĂŻgour Ilham Tohti
- Le Ouïgour Ilham Tohti lauréat du prix Vaclav-Havel Le Figaro, 1 octobre 2019
- « Le prix Sakharov dĂ©cernĂ© Ă Ilham Tohti, dissident ouĂŻgour emprisonnĂ© », Le Monde,â (lire en ligne)
- « Carta Academica: Academic Honoris Causa 2022 », LN24,â (lire en ligne)