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Hypocoristique

En sĂ©mantique et en pragmatique, un hypocoristique est un mot qui exprime une affection tendre, adressĂ© au destinataire de la communication ou dĂ©signant un ĂȘtre ou un objet dont parle le locuteur. En tant qu’adjectif, le terme qualifie un moyen par lequel on rĂ©alise un tel mot ou un tel autre fait de langue[1] - [2].

Les hypocoristiques sont employés dans certaines variétés de langue : les registres populaire et familier, le langage dit enfantin (celui des adultes utilisé avec les enfants et celui des enfants)[3] - [4] - [2].

Moyens de rĂ©alisation de l’effet hypocoristique

Mots hypocoristiques par eux-mĂȘmes

Dans certaines langues, les mots par lesquels les enfants s’adressent Ă  leurs parents, utilisĂ©s par les adultes aussi en s’adressant Ă  eux, et passĂ©s dans le registre familier des adultes qui les utilisent avec leurs parents, sont hypocoristiques par rapport Ă  leurs synonymes du registre courant, par exemple, en français, maman et papa par rapport Ă  mĂšre et pĂšre[3].

DĂ©rivation

L’un des moyens par lesquels on rĂ©alise l’effet hypocoristique est la dĂ©rivation lexicale qui consiste, dans les langues mentionnĂ©es dans cet article, en l’ajout de certains suffixes.

DĂ©rivation avec des suffixes diminutifs

La plupart des diminutifs expriment l’idĂ©e de petit et sont en mĂȘme temps hypocoristiques dans certains contextes[5] - [6] - [7] - [8]. Exemples :

(fr) sƓurette[9], frĂ©rot[10] ;
(en) kitty (< cat « chat »)[6], doggie (< dog « chien »)[4] ;
(ro) fetiță « fillette » (< fată « fille »), copilaș (< copil « enfant »)[11] ;
(hu) lovacska (< ló « cheval »), arcocska (< arc « joue »)[12] ;
(BCMS)[13] mačkica (< mačka « chat »), seoce (< selo « village »)[14].

On appelle parfois abusivement « diminutifs » tous les hypocoristiques[3]. En fait, on rĂ©alise des hypocoristiques avec les suffixes diminutifs, mais les mots qui en rĂ©sultent ne sont pas diminutifs si, dans leur contexte, ils n’impliquent pas l’idĂ©e de petit. C’est le cas, parmi les prĂ©cĂ©dents, de (fr) sƓurette, frĂ©rot, (en) kitty, doggie, (hu) lovacska utilisĂ©s pour des personnes adultes et des animaux de taille relativement grande. Ce phĂ©nomĂšne est prĂ©gnant dans le cas des prĂ©noms Ă  suffixes diminutifs utilisĂ©s pour des adultes aussi :

(fr) Jeannette (< Jeanne), Louison (< Louise)[9] ;
(en) Billie (< William)[6] ;
(ro) Măriuța (< Maria), Ionică (< Ion)[8] ;
(hu) Dorka (< DĂłra), Samu (< SĂĄmuel)[15] ;
(BCMS) Jelica (< Jelena), Ivica (< Ivan)[16].

Dérivation avec des suffixes spécifiques

En BCMS certains suffixes hypocoristiques ne sont pas diminutifs. À des adjectifs entiers on ajoute le suffixe -ko, ex. : zaljubljenko (< zaljubljen « amoureux »). Sa forme de fĂ©minin, -ka, remplace la dĂ©sinence de nominatif singulier -a : zaljubljenka (< zaljubljena « amoureuse »)[16].

Procédés simples

Certains hypocoristiques sont obtenus à partir de mots pourvus ou non de suffixes diminutifs, transformés par :

  • aphĂ©rĂšse (suppression d’un segment du dĂ©but du mot) : (fr) Sandrine (< Alexandrine)[3], (ro) Ghiță (< Gheorghiță)[2], (hu) NĂłra (< EleonĂłra)[15] ;
  • apocope (suppression d’un segment de la fin du mot) : (fr) Steph (< StĂ©phane), Ed (< Édouard)[5], (en) Phil (< Philip)[17], (ro) Geo (< George)[2], (hu) Kata (< Katalin)[15] ;
  • syncope (suppression d’un segment de l’intĂ©rieur du mot) : (ro) Mia (< Maria)[2] ;
  • prothĂšse (ajout d’un segment au dĂ©but du mot) : (hu) Panna (< Anna)[15] ;
  • rĂ©duplication :
    • du mot entier : (fr) Jean-Jean[5] ;
    • d’une syllabe : (fr) fifille „fetițo” (< fille „fată”)[1], Popol (< Paul)[3].

Procédés combinés

  • aphĂ©rĂšse :
    • avec suffixation diminutive : (hu) Nusi (< Annus < Anna)[15] ;
    • avec rĂ©duplication de syllabe : (fr) Mimile (< Émile)[3], (ro) Luluș (< Corneluș < Cornel)[2] ;
  • apocope :
    • avec suffixation, Ă©ventuellement double : (hu) Kati, KatĂł, Katika, Katica, KatĂłka, KatĂĄcska, Katus, Katuska, Katinka (< Katalin)[15] ;
    • avec rĂ©duplication de syllabe : (hu) Lala (< Lajos « Louis »)[15] ;
  • prothĂšse avec suffixation, Ă©ventuellement double : (hu) Panni(ka)[15] ;
  • rĂ©duplication du mot entier avec prothĂšse de sa seconde occurrence : (hu) Anna-Panna (< Anna)[15].

On trouve aussi des procédés plus complexes, par exemple :

  • aphĂ©rĂšse, apocope et rĂ©duplication de syllabe : (fr) Nini (< VĂ©ronique)[5] ;
  • apocope, prothĂšse et suffixation, Ă©ventuellement double : (hu) Pisti(ke) (< IstvĂĄn « StĂ©phane »)[15].

En BCMS il y a aussi apocope avec dĂ©rivation par plusieurs suffixes uniquement hypocoristiques (en gras dans les exemples) : Mata (< Matija), Kate (< Katarina), Vlado ou Vlatko (< Vladimir), lija (lisica « renard »), baka « grand-maman » (< baba « vieille femme »), brale (< brat « frĂšre »), vujo (< vuk « loup »), brico (< brijač « barbier, coiffeur »), striko (< stric « oncle »), djeĆĄo (< djever « frĂšre de l’époux »)[16].

Emploi hypocoristique de faits de langue d’ordinaire neutres

Certains mots d’ordinaire neutres du point de vue pragmatique deviennent hypocoristiques dans certains contextes, par exemple :

(fr) mon petit[18], mon amour, mon ange, mon bijou, mon trésor ; par antiphrase, mon grand[19] ;
(ro) drag(ă) ou scump(ă) « chéri(e) », iubit(ă) « aimé(e) », iubire ou dragoste « amour », ßnger « ange », odor « bijou »[20] ;
(hu) drågåm « mon (ma) chéri(e) », szerelmem « mon amour », kicsim « mon (ma) petit(e) », angyalom « mon ange », kincsem « mon trésor »[21].

On utilise aussi des noms d’ĂȘtres non humains avec cette fonction, surtout Ă  l’adresse des enfants :

(fr) ma colombe[22], mon poussin, mon (petit) chat, mon (petit) lapin, ma biche, mon (petit) loup, ma puce[23], mon (petit) rat, mon chou[24] ;
(ro) pui, « poussin », porumbiță « colombe »[25].
(hu) csibém « mon poussin », galambom « ma colombe »[26].

En français il y a aussi une forme verbale temporelle employĂ©e avec un sens hypocoristique dans le langage enfantin et avec les animaux familiers, Ă  savoir l’imparfait dit hypocoristique utilisĂ© Ă  la troisiĂšme personne et se rapportant au moment oĂč l’on parle, ex. Comme il Ă©tait sage !, Comme il aimait bien sa maman ![27]

Perte du sens hypocoristique

Au cours de l’histoire de la langue, le mot hypocoristique peut devenir neutre du point de vue pragmatique. C’est le cas, par exemple, de prĂ©noms Ă  forme hypocoristiques, qui sont devenus des noms de famille. C’est le cas, en français, de noms tels que Thomasson et Masson (< Thomas), ou Michard et Michot (< Michel), etc.[3] De tels exemples en hongrois sont Bene, Benke et BenkƑ (< Benedek) ; BertĂłk et BartĂłk (< Bertalan) ; BalĂł (< BalĂĄzs)[15].

En hongrois, par exemple, il y a une tendance actuelle Ă  la perte de la valeur hypocoristique de certaines formes de prĂ©noms[15]. L’Institut de linguistique de l’AcadĂ©mie hongroise des sciences actualise et approuve pĂ©riodiquement une liste de prĂ©noms qu’on peut inscrire au registre de l’état civil. Elle comprend des variantes hypocoristiques aussi, par exemple Mari, Marica, Marika, Mariska, Ă  cĂŽtĂ© de MĂĄria[28].

Notes et références

Bibliographie

Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article : document utilisĂ© comme source pour la rĂ©daction de cet article.

  • (hu) BĂĄrczi, GĂ©za (dir.) et OrszĂĄgh, LĂĄszlĂł, A magyar nyelv Ă©rtelmezƑ szĂłtĂĄra [« Dictionnaire de la langue hongroise »] (ÉrtSz), Budapest, AkadĂ©miai kiadĂł, 1959-1962 (lire en ligne)
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  • (ro) « Dicționare ale limbii romĂąne (Dexonline) » [« Dictionnaires de la langue roumaine »] (consultĂ© le )
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  • (en) Rounds, Carol, Hungarian: an Essential Grammar [« Grammaire fondamentale du hongrois »], Londres / New York, Routledge, (ISBN 0-203-46519-9, lire en ligne [PDF]). Ouvrage utilisĂ© pour la rĂ©daction de l'article

Voir aussi

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