Hippolyte inermis
Hippolyte inermis, la crevette d'herbiers selon lâINPN ou grande Hippolyte d'herbier[2] ou encore Hippolyte d'herbier, noms Ă©galement parfois donnĂ©s Ă une espĂšce proche : Hippolyte varians[3].
NE : Non évalué
- Alpheus elongatus Risso, 1827
- Alpheus viridis Otto, 1821
- Carida viridis Rafinesque, 1814
- Hippolyte mauritanicus Lucas, 1846
- Hippolyte mitchelli W. Thompson, 1853
- Hippolyte producta Norman, 1861
- Hippolyte virescens H. Milne Edwards, 1837 [in H. Milne Edwards, 1836-1844]
- Hippolyte whitei W. Thompson, 1853
- Hippolyte whitei var. ensis W. Thompson, 1853
- Hippolyte whitei var. falcatus W. Thompson, 1853
- Hippolytus brullei Guérin, 1832
- Palemon margaritaceus Risso, 1816
- Palemon olivieri Risso, 1816
- Virbius brullei (subsequent combination for Hippolytus brullei Guérin, 1832)
C'est une petite crevette (4 cm max), souvent d'un vert intense mais qui peut adopter d'autres couleurs et divers motifs de camouflage. Elle peut potentiellement ĂȘtre observĂ©e sur tout le littoral français, prĂšs du trait de cĂŽte et dans les herbiers[3] et plus largement dans une grande partie des eaux marines europĂ©ennes.
Histoire scientifique
Cette espĂšce a Ă©tĂ© dĂ©crite par William Elford Leach en 1816[4] peu aprĂšs quâil a crĂ©Ă© le genre Hippolyte et dĂ©crit une premiĂšre espĂšce (lâhippolyte variable) qui ressemble beaucoup Ă H. inermis.
La capacitĂ© de cet animal Ă changer de couleur, mimĂ©tiquement pour mieux se fondre dans son environnement a beaucoup intriguĂ© les naturalistes depuis le XIXe siĂšcle au moins et a fait lâobjet de quelques Ă©tudes (de pigments et chromatophores et des mĂ©canismes de camouflage). Une autre question scientifique aujourd'hui rĂ©solue a Ă©tĂ© de savoir si l'espĂšce Ă©tait ou non hermaphrodite.
Habitats et répartition géographique
Ce petit crustacé vit en Atlantique-ouest, Manche et mer du Nord, et en Méditerranée ; principalement dans les herbiers marins de posidonies (Posidonia oceanica) et de zostÚres (Zostera marina)[5] et jusque dans certains estuaires[6].
Description
Taille : cet animal atteint 4 cm Ă lâĂąge adulte.
Forme : Ă la diffĂ©rence dâHippolyte varians, cette crevette ne prĂ©sente pas de bosse trĂšs marquĂ©e au niveau du dos ; de profil, elle apparait plus rectiligne et elle est en outre un peu plus grande que H. varians (chez lâadulte).
Dimorphisme sexuel : cette espĂšce prĂ©sente un certain dimorphisme sexuel au moins en termes de taille et peut-ĂȘtre de couleur[7]. Les mĂąles sont en moyenne un peu plus petits. Lâabdomen des femelles est souvent gonflĂ© dâĆufs ou de zoeae.
Cette crevette a souvent Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©e par la littĂ©rature comme hermaphrodite protandre (c'est-Ă -dire que le mĂąle peut changer de sexe et devenir femelle, comme dâautres espĂšces de cette famille)[8]. Ceci a Ă©tĂ© mis en doute en 2005 par Cobos & al. qui nâont pas trouvĂ© chez lâespĂšce de signe de protandrie en Ă©tudiant finement les organes gĂ©nitaux de cette espĂšce Ă divers stade de croissance et conclut que lâespĂšce est au contraire gonochorique [9]), puis il a Ă©tĂ© dĂ©montrĂ© que lâabsorption de certaines diatomĂ©es Cocconeis sp. pouvait dĂ©clencher l'apparition de femelles primaires (par apoptose Ă la fois des gonades mĂąles et des cellules des glandes androgĂ©niques chez les postlarves. Cet effet semble spĂ©cifique Ă cette espĂšces et strictement localisĂ©e Ă la gonade mĂąle et de la glande androgĂšne, et limitĂ©e Ă une trĂšs courte pĂ©riode de temps (du 5e au 12e jour du dĂ©veloppement postlarvaire)[10] - [11]. Comme ces changements de sexes nâinterviennent quâavant la premiĂšre reproduction et jamais chez lâadulte, la structure de la population est in fine de type gonochorique [5].
Couleur : elle peut considérablement varier : rouge, verte, jaunùtre ou brune (avec des effets de transparence ou non) selon son milieu de vie ou l'heure de la journée. Ses chromatophores peuvent simuler des taches irréguliÚres de couleur rose-mauve évoquant les algues rouges encroûtantes qui croissent dans son environnement[2].
DurĂ©e de vie : en Espagne une Ă©tude a montrĂ© que les mĂąles vivent moins longtemps (8 mois) que les femelles (12 mois environ)[5], et dans cette mĂȘme rĂ©gion, le sex-ratio est en faveur des femelles, tout au long du cycle de vie[5].
Variations de couleurs, mimétisme
La physiologie[12] et les causes des changements de coloration de cette crevette semblent ĂȘtre du mĂȘme type que pour l'espĂšce voisine Hippolyte varians que les scientifiques ont beaucoup Ă©tudiĂ© de ce point de vue, et depuis 150 ans au moins[13] - [14] - [15] ; des pigments et un systĂšme sophistiquĂ© de chromatophores permettent des changements de couleur et dâintensitĂ© (de jour et de nuit, y compris chez les larves). Plusieurs auteurs ont estimĂ© que le systĂšme hormonal jouait aussi un rĂŽle dans les cycles temporels de coloration (avec une hormone qui serait produite dans le pĂ©doncule oculaire[16]).
Risques de confusion
Elle peut ĂȘtre trĂšs facilement confondue avec d'autres espĂšces du mĂȘme genre, et en particulier avec une espĂšce proche (Hippolyte varians) qui est un peu plus petite (au mĂȘme Ăąge) et qui en outre prĂ©sente un aspect moins "bossu" (plus linĂ©aire).
Comportement
Le jour Hippolyte inermis se cache parmi les algues et les roches, dans des habitats spĂ©cifiques dont elle ne sâĂ©loigne pas, et oĂč grĂące Ă ses capacitĂ©s de camouflage elle est trĂšs discrĂšte.
Dans l'environnement nocturne, tout comme dâautres crevettes apparemment infĂ©odĂ©es Ă un habitat spĂ©cifique (ex : Eualus gaimardii et Lebbeus polaris)[17], elle peut, Ă la recherche de diatomĂ©es, sâĂ©loigner des zones dâoĂč elle ne sâabsente normalement pas le jour.
Chémotactisme
Cette espĂšce, comme toutes les autres crevettes est probablement capable de dĂ©tecter certains mĂ©tabolites libĂ©rĂ©s dans lâenvironnement marin[18] par les microalgues quâelle recherche comme nourriture (dont les diatomĂ©es de type Cocconeis[19]).
Ătat des populations, pressions, menaces
Le statut de cette espĂšce nâa pas fait lâobjet dâĂ©valuations fines, mĂȘme si elle a fait lâobjet de quelques Ă©tudes de dynamique de populations[5].
Elle est vulnérable à certains polluants marins, dont par exemple les métaux lourds ou métalloïdes[20]
Tout comme lâespĂšce voisine H. varians, elle fait partie des crevettes originales susceptibles dâĂȘtre recherchĂ©es pour lâaquariophilie, notamment Ă la suite de la dĂ©gradation gĂ©nĂ©rale des Ă©cosystĂšmes coralliens qui poussent certains marchands Ă se tourner vers des espĂšces dâherbiers europĂ©ens[21].
Pathologies
Comme toutes les crevettes, cette espĂšce peut ĂȘtre porteuse de parasites et de maladies bactĂ©riennes ou virales.
Elle est notamment lâhĂŽte de parasites tels que :
Notes et références
- Fiche H inermis sur la base de données Worms des espÚces marines
- Fiche H. inermis sur /www.cotebleue.org, consulté le 1er aout 2016
- Fiche INPN
- Leach W.E (1816) A tabular view of the external characters of four classes of animals, which Linné arranged under Insecta; with the distribution of the genera composing three of these classes into orders, &c. and descriptions of several new genera and species. Transactions of the Linnean Society of London. 11(2): 306-400., consultable
- ManjĂłn-Cabeza, M. E., Cobos, V., GarcĂa Muñoz, J. E., & GarcĂa Raso, J. E. (2009). Structure and absolute growth of a population of Hippolyte inermis Leach 1815 (Decapoda: Caridea) from Zostera marina (L.) meadows (Malaga, southern Spain). Scientia Marina, 73(2), 377-386
- Neves, A., Cabral, H. N., & Gordo, L. S. (2007). Distribution and abundance patterns of decapod crustaceans in the Sado estuary, Portugal. Crustaceana, 80(1), 97-112.
- Turquier, Y. (1963). Sur le dimorphisme sexuel chez deux espĂšces de crevettes: Hippolyte varians Leach et Hippolyte leptocerus (Heller). Bull. Soc. Linn. Normandie, 4(10), 111-118
- Zupo, V. (1994). Strategies of sexual inversion in Hippolyte inermis Leach (Crustacea, Decapoda) from a Mediterranean seagrass meadow. Journal of experimental marine biology and ecology, 178(1), 131-145
- Cobos, V., DĂaz, V., Raso, G., Enrique, J., & ManjĂłnâCabeza, M. E. (2005). Insights on the female reproductive system in Hippolyte inermis (Decapoda, Caridea): is this species really hermaphroditic?. Invertebrate Biology, 124(4), 310-320
- Zupo, V. (2000). Effect of microalgal food on the sex reversal of Hippolyte inermis (Crustacea: Decapoda). Marine Ecology Progress Series, 201, 251-259.
- Zupo, V., Messina, P., Carcaterra, A., Aflalo, E. D., & Sagi, A. (2008). Experimental evidence of a sex reversal process in the shrimp Hippolyte inermis. Invertebrate Reproduction & Development, 52(1-2), 93-100.
- Keeble, F., & Gamble, F. W. (1904). The colour-physiology of higher Crustacea. Philosophical Transactions of the Royal Society of London. Series B, Containing Papers of a Biological Character, 196, 295-388 (résumé).
- Keeble, J. W., & Gamble, F. W. (1900). Physiologie de la coloration chez Hippolyte varians. Bull, du Muséum, 185-188
- Chassard-Bouchaud, C., & Hubert, M. (1970). PhénomÚnes chromatiques et rythme nycthéméral chez Hippolyte varians Leach (crustacé décapode). Experientia, 26(5), 542-543 (résumé).
- Chassard C (1961) Effets chromatiques de lâablation des pĂ©doncules oculaires chez les Hippolyte varians Leach (CrustacĂ© dĂ©capode). Comptes rendus hebdomadaires des sĂ©ances de lâAcadĂ©mie des sciences, 253(25), 3076
- Kleinholz, L. H., & Welsh, J. H. (1937). Colour changes in Hippolyte varians. Nature, 140, 851 (résumé)
- Berggren, M. (1993). Aquaria experiments on habitat choice of littoral shrimps of the Faroe Islands. Crustaceana, 65(2), 129-143
- Nappo, M., Berkov, S., Codina, C., Avila, C., Messina, P., Zupo, V., & Bastida, J. (2009). Metabolite profiling of the benthic diatom Cocconeis scutellum by GC-MS. Journal of Applied Phycology, 21(3), 295-306.
- JĂŒttner, F., Messina, P., Patalano, C., & Zupo, V. (2010). Odour compounds of the diatom Cocconeis scutellum: Effects on benthic herbivores living on Posidonia oceanica. Marine Ecology Progress Series, 400, 63-73.
- Untersteiner, H., Gretschel, G., Puchner, T., Napetschnig, S., & Kaiser, H. (2005). Monitoring Behavioral Responses to the Heavy Metal Cadmium in the Marine Shrimp Hippolyte inermis Leach(Crustacea: Decapoda) with Video Imaging. Zoological studies, 44(1), 71-80.
- Calado R (2006) Marine ornamental species from European waters: a valuable overlooked resource or a future threat for the conservation of marine ecosystems ? Scientia Marina, 70(3), 389-398. (PDF, 10 p)
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- Bay-Nouailhat A (2007) Description de Hippolyte inermis daté d'oct. 2007, sur le site de Mer & Littoral, consulté le .
- (fr) Référence INPN : Hippolyte inermis Leach, 1815 (TAXREF)
- (en) Référence BioLib : Hippolyte inermis Leach, 1815 (consulté le )
- (en) Référence NCBI : Hippolyte inermis (taxons inclus) (consulté le )
- (en) Référence World Register of Marine Species : espÚce Hippolyte inermis Leach, 1816 (consulté le )
- (fr) Référence DORIS : espÚce Hippolyte inermis (consulté le )
Bibliographie
- Cobos, V., DĂaz, V., Raso, J. E. G., & ManjĂłn-Cabeza, M. E. (2010). The male reproductive system of Hippolyte inermis Leach 1815 (Decapoda, Caridea). Helgoland Marine Research, 65(1), 17.
- Espinoza-Fuenzalida, N. L., Thiel, M., Dupre, E., & Baeza, J. A. (2008). Is Hippolyte williamsi gonochoric or hermaphroditic? A multi-approach study and a review of sexual systems in Hippolyte shrimps. Marine biology, 155(6), 623-635.
- Jousson, O., Bartoli, P., & Pawlowski, J. (1999). Molecular identification of developmental stages in Opecoelidae (Digenea). International Journal for Parasitology, 29(11), 1853-1858.
- Regnault M (1969). Recherche du mode de nutrition dâHippolyte inermis Leach (Decapoda: Caridea) au dĂ©but de sa vie larvaire: structure et rĂŽle des piĂšces buccales. Crustaceana, 17: 253-264.
- Regnault M (1969) Ătude expĂ©rimentale de la nutrition dâHippolyte inermis Leach (DĂ©capoda: natantia) au cours de son dĂ©veloppement larvaire, au laboratoire. Hydrobiology , 54: 749-764.