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Heather Dohollau

Heather Dohollau (née Lloyd à Treherbert, au pays de Galles, le , et morte à Saint-Brieuc le ) est une poète britannique d'expression française.

Heather Dohollau
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Biographie
Naissance

Treherbert (en)
Décès
(Ă  88 ans)
Saint-Brieuc
Nationalité
Activités

Biographie

Heather Dohollau, nommée ainsi par ses parents en écho à la bruyère qui couvre les collines de son lieu de naissance, passe son enfance dans le Sud du Pays de Galles. Peu après sa naissance à Treherbert, dans la vallée de la Rhondda (vallée minière à l’époque), ses parents vont vivre à Penarth, petite ville de bord de mer au sud de Cardiff. « Enfance secrète de fille unique où les lieux étaient plus réels que les êtres, et où les livres m’étaient aussi nécessaires que la confirmation de mon image dans le miroir »[1]. Elle commence très jeune à lire et à écrire, consciente d’un « possible des mots »[2].

Contrairement Ă  sa famille maternelle galloisante, elle ne parle que l’anglais, qui reste Ă  l’époque perçu au Pays de Galles dans la moyenne bourgeoisie comme la langue de la culture. Durant les vacances, elle retourne dans la vallĂ©e de la Rhondda chez ses grands-parents, et y passe des Ă©tĂ©s qui inspireront son poème Éloge de l’ennui (Un regard d’ambre). Sa scolaritĂ© prend fin Ă  la suite d'un changement dans la situation de son père. Grâce Ă  la bibliothèque publique de Penarth, elle dĂ©couvre Hölderlin, Rilke et Rimbaud, entre autres.  

Survient la guerre, et le dĂ©part de son père (qui travaille pour le ministère de l'Air / Air Ministry) pour Londres. En 1942, Ă  dix-sept ans, Heather Lloyd se rend Ă  Cardiff, malgrĂ© les bombardements de la ville (dont un tiers sera dĂ©truit au terme du conflit) et de la ligne ferroviaire, pour travailler dans une librairie communiste oĂą elle a accès aux poètes de la Guerre d’Espagne, Ă  proximitĂ© du MusĂ©e des Beaux-Arts qu’elle frĂ©quente le midi. En , son engagement dans la Women’s Land Army la conduit Ă  la ferme de Llyn yr eos, Ă  St Fagans. Le travail est ardu mais dans la revue littĂ©raire Horizon, qui deviendra cĂ©lèbre, elle dĂ©couvre la peinture de Morandi, Balthus et David Jones qui la touche profondĂ©ment. Au printemps 1944, sa mère et elle emmĂ©nagent dans un appartement Ă  Cardiff et Heather Lloyd devient Ă©lève infirmière Ă  l’hĂ´pital psychiatrique de Whitchurch, qui traite les soldats souffrant des traumatismes du front. Dans l’immĂ©diat après-guerre, elle quitte l’hĂ´pital pour s’occuper de sa mère dont la santĂ© dĂ©cline. Le , Phyllis Lloyd meurt, Ă©vènement qui est Ă  l’origine du dĂ©part de sa fille pour Paris (en ) : saut dans l’inconnu qu’elle a qualifiĂ© de « suicidaire » (voir La Promesse des mots). 

Ă€ Paris, qu’elle choisit comme destination après avoir vu le film Les Enfants du paradis, elle s’inscrit Ă  l’École des Beaux-Arts. C’est le dĂ©but de deux annĂ©es de solitude et de deuil, mais de fortes dĂ©couvertes Ă©galement :sa rencontre avec l’Existentialisme marque le dĂ©but d’une pensĂ©e de la libertĂ© que nourriront DostoĂŻevski et Chestov. Elle vit l’exposition rĂ©trospective sur Bonnard de 1947 comme une vĂ©ritable rĂ©vĂ©lation, et aspire Ă  poursuivre une double carrière de poète et de peintre. Par la suite elle passe deux ans Ă  Londres (1949-1951), oĂą elle travaille dans une banque et loge dans un studio Ă  Hampstead. Ses lectures de Keats, Virginia Woolf et Blake l’accompagnent.  

Au cours d'un bref sĂ©jour en Bretagne, sur l'Ă®le de BrĂ©hat en , elle rencontre son futur mari Yves Dohollau. Ă€ la suite de leur mariage en , ils s’installent Ă  BrĂ©hat pour y passer presque deux dĂ©cennies de vie insulaire, puis semi-insulaire dans des conditions modestes, mais dans un lieu qui, de par sa beautĂ©, sa forme fragmentaire offre des rapports avec la peinture qui imprĂ©gnera et marquera fortement l’œuvre poĂ©tique de Heather Dohollau. L’étĂ©, elle s'occupe avec son mari d'une galerie d’art situĂ©e dans le jardin, et dans une boutique attenante, d’artisanat breton dont des crĂ©ations de Pierre Toulhoat. De la poterie y est Ă©galement exposĂ©e; celles de Maurice Crignon et des Pierlot de Ratilly, en particulier. C’est Ă  BrĂ©hat qu’elle rencontre le poète Louis Guillaume qui y sĂ©journe rĂ©gulièrement. Il lui fera dĂ©couvrir plusieurs Ă©crivains europĂ©ens. Ce sont des annĂ©es de renouveau poĂ©tique en anglais, qui mettent fin Ă  l’aphasie qu’elle connaissait depuis la perte de sa mère: renaissance poĂ©tique qui permet Ă  Heather Dohollau, dĂ©sormais mère de quatre enfants (MikaĂ«la, Rozenn, Fanch et Haude), de maintenir un espace de libertĂ©. 

Heather Dohollau et sa famille viennent habiter Saint-Brieuc en , l'année de naissance de leur cinquième enfant (Tanguy), mais continuent de vivre à Bréhat l’été jusqu’à la vente inévitable de la maison (et galerie saisonnière) en 1969 après la naissance de deux autres enfants (Kristen, Tristan). De 1970 à 1989, elle travaille en tant que bibliothécaire à Saint-Brieuc. C’est dans cette ville qu’elle commence à écrire dans sa langue d’adoption, le français (qu’elle appelle daughter tongue, par opposition à mother tongue, la langue maternelle), au contact d’un environnement littéraire plus riche. À son arrivée, elle fait rapidement la connaissance de Louis Guilloux. Il lui fait connaître et rencontrer l'écrivain, philosophe et critique d'art, Jean Grenier, qui avait été le professeur de philosophie d'Albert Camus à Alger.

Jean Grenier la met en relation avec Albert Camus avec qui elle correspond quelque temps. Par l’entremise de Louis Guilloux et Jean Grenier, elle dĂ©couvre le philosophe Jules Lequier, qui fait l’objet de son premier livre, Ă©crit en 1967 : le roman La RĂ©ponse. Toujours dans les annĂ©es 1960, grâce Ă  Alain Cuny, elle noue avec Pierre Jean Jouve une amitiĂ© littĂ©raire qui durera jusqu'Ă  la mort du poète en 1976. Elle publiera plusieurs essais sur Jouve (1974, 2010). Elle rencontre Ă©galement Henri Thomas, Yves Bonnefoy, Jean Starobinski, Philippe Jaccottet, Corinna Bille, Maurice Chappaz, Pierre-Alain Tâche, Salah StĂ©tiĂ©, Jean-Pierre Abraham, Bernard NoĂ«l, Lorand Gaspar et HervĂ© Carn, entre autres, avec qui elle entretiendra aussi de profondes amitiĂ©s. 

En 1974, Heather Dohollau publie des essais critiques sur Segalen et Rilke, dans une prose densĂ©ment poĂ©tique. Quatre ans plus tard, un premier recueil apparaĂ®t dans la revue Solaire, sous le titre Seule enfance (1978). Il attire l’attention de son futur Ă©diteur Yves PriĂ©, lui-mĂŞme poète. Leur rencontre en 1980 est suivie de près par la naissance des Ă©ditions Folle Avoine, qui publiera tous les Ă©crits en français de Heather Dohollau qu’elle a souhaitĂ© publier. Les annĂ©es 1970 sont Ă©galement des annĂ©es de grands voyages, en particulier vers l’Italie (Venise et la Toscane se retrouvent dans de nombreux recueils), mais aussi en Iran et en Russie. Certains retours en Grande-Bretagne permettent une reprise de l’écriture en anglais. Ă€ partir du dĂ©but des annĂ©es 1980, Heather Dohollau se rend chaque annĂ©e Ă  Cerisy-la-Salle pour assister Ă  ses dĂ©cades littĂ©raires et philosophiques. Elle y fait des rencontres dĂ©terminantes, dont celle de Jacques Derrida.  

La perte de sa fille Mikaëla en 1988 marque un jalon important dans ses recueils.

Heather Dohollau a collaboré avec sa fille Haude ( - ), artiste-tisserande, autour d'une exposition, ainsi qu'avec son fils Tanguy, qui a illustré plusieurs de ses ouvrages. Elle a également publié un livre d'artiste réalisé avec des encres de Geneviève Guétemme, qui a également conçu deux créations (sous forme de cartes et de carnets) en dialogue avec la poésie de Heather Dohollau. L'artiste Chan Ky-Yut a publié un livre d'artiste autour du poème Le dit des couleurs.

Heather Dohollau a Ă©tĂ© promue Chevalier de la LĂ©gion d'honneur en 2000. C'est le poète Lorand Gaspar qui lui remettra cette distinction Ă  la Mairie de Saint-Brieuc. Sa poĂ©sie a Ă©tĂ© traduite en anglais, italien, allemand, polonais, arabe et hongrois. 

Deux colloques internationaux et leurs actes lui ont été consacrés ainsi qu'un remarquable portrait filmé de la poète. S’y ajoutent de nombreux articles internationaux. Des ouvrages présentant son parcours littéraire et poétique sont à paraître.

Elle est décédée le .

Ĺ’uvres

  • La Venelle des Portes, 1981 (frontispice Tanguy Dohollau) ; rĂ©Ă©dition en 1996 avec Seule Enfance, publiĂ© initialement aux Ă©ditions Solaire en 1978.
  • La RĂ©ponse, 1982 (frontispice Tanguy Dohollau)
  • Matière de lumière, 1985 (frontispice Tanguy Dohollau)
  • Dans l’ile, 1985, rĂ©Ă©dition 1988 (frontispice Tanguy Dohollau)
  • L'Adret du jour, 1989 (frontispice Tanguy Dohollau), Prix Claude Sernet
  • Pages aquarellĂ©es, 1989, Ă©ditions Folle Avoine
  • Les portes d'en bas, 1992 (frontispice Tanguy Dohollau), Ă©ditions Folle Avoine
  • La Terre âgĂ©e, 1996 (frontispice Tanguy Dohollau)
  • Les cinq jardins et autres textes, 1996. (essais sur Rilke, Segalen et Trakl)
  • Le point de rosĂ©e, 1999
  • Le dit des couleurs, 2003
  • Une suite de matins, 2005
  • Un regard d’ambre, 2009
    • Pour les publications en revue et anthologies jusqu’en 2006, voir L’Évidence lumineuse, Bibliographie, p. 166-167.
  • Hommage Ă  Jouve, dans IntĂ©gritĂ©s et transgressions de Pierre Jean Jouve, sous la direction de BĂ©atrice Bonhomme, Éditions CalliopĂ©es, Cahiers Pierre Jean Jouve, 2 (2010), p. 21–28.

Bibliographie

  • Dossier Heather Dohollau (entretien et Ă©dition de dix textes), revue Friches, no 110, 2012, p. 15–35.
  • Les belles journĂ©es d'Heather Dohollau, Alain-Gabriel Monot, revue Armen no 188, 2012, p. 8–11.
  • Dossier Heather Dohollau : Les yeux du ciel, Marilyse Leroux, revue Hopala (La Bretagne au monde) no 43, 2013, p. 53-57.
  • Entretien Ă  propos du philosophe Jules Lequier, revue Cahiers Jules Lequier no 5, 2015
  • Michael Brophy, Tracing the Absent Real – the poetry of Heather Dohollau, Irish Journal of French Studies no 8, 2008, p. 109-121.
  • ClĂ©mence O’Connor, Translating Non-Figuration: Heather Dohollau’s Poems on Pure Visuality, French Studies no 64, 2010 (numĂ©ro spĂ©cial intitulĂ© New Ekphrastic Poetics, ed. Susan Harrow), p. 276-289.
  • ClĂ©mence O’Connor, Un manquement comme bien : The Unsaid as Poetic Resource in Heather Dohollau, French Forum no 37, 2012 (numĂ©ro spĂ©cial intitulĂ© Poetic Practice and the Practice of Poetics in French since 1945, ed. Hugues AzĂ©rard et al.), p. 237-255.
  • Suzanne Allaire, ClĂ©mence O’Connor, Dossier Heather Dohollau (introduction, entretien avec la poète et Ă©dition de dix textes, bibliographie), Friches no 110, 2012, p. 15-35.
  • ClĂ©mence O’Connor, Heather Dohollau : La poĂ©sie comme langue inconnue , dans TraversĂ©es poĂ©tiques des littĂ©ratures et des langues, ed. Cristina Pirvu et BĂ©atrice Bonhomme, Paris : L’Harmattan, 2013, p. 197-229.
  • Suzanne Allaire, Avec Heather Dohollau, Ă©ditions Folle Avoine, 2014.

Études critiques

Dans le sillage d’articles pionniers de Michael Bishop ont eu lieu deux colloques. Les actes des deux colloques internationaux consacrés à Heather Dohollau ont été publiés par Folle Avoine. Le premier colloque s’est surtout consacré à certains écrivains qui mettent en lumière les écrits de Heather Dohollau. Le second aborde certains thèmes saillants de son œuvre elle-même.

  • Lignes de vie, actes du colloque autour de l’œuvre poĂ©tique de Heather Dohollau. Saint-Brieuc, 16-, sous la direction de Ronald Klapka (1998).
  • L'Évidence lumineuse, Actes du Colloque de Cerisy, 9-, sous la direction de Daniel Lançon et Tanguy Dohollau (2006).

Filmographie

  • La promesse des mots, rĂ©alisateurs : Florence MahĂ© et Rolland Savidan, , 52 min, RS productions, PlĂ©rin, Bretagne.

Notes et références

  1. Publication accompagnant l’exposition consacrée à Heather Dohollau en 1996 à la bibliothèque municipale de Saint-Brieuc.
  2. Voir le film La Promesse des mots

Liens externes

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