Hannes Keller
Hannes Keller, né le à Winterthour, et mort le [1] à Niederglatt[2], est un physicien suisse, mathématicien, ayant fait des études de philosophie. Pionnier de la plongée profonde, inventeur et entrepreneur, il est également musicien (pianiste classique), il a produit deux CD et participé à plusieurs concerts devant 2 000 personnes.
Son parcours dans la plongée est né de sa collaboration, avec le professeur Paul Profos, en 1957, avec qui, il a fait deux publications scientifiques, sous leurs deux noms.
Durant la mĂȘme pĂ©riode, Keller a Ă©tĂ© initiĂ© Ă la plongĂ©e par un ami. Perfectionniste et passionnĂ©, il a consacrĂ© son temps libre Ă tout ce qu'il pouvait apprendre sur le sujet. Peu de choses Ă©taient connues de la science sur la plongĂ©e et le matĂ©riel de plongĂ©e disponible dans le commerce le limitait Ă 100 m de profondeur. Seuls les militaires possĂ©daient les Ă©quipements qui, Ă lâĂ©poque, permirent un record Ă 180 m.
La plongée profonde
Keller a Ă©mis la thĂ©orie selon laquelle un plongeur peut respirer un mĂ©lange de gaz diffĂ©rent de ceux qui composent l'air atmosphĂ©rique. Par consĂ©quent, il Ă©tait possible de franchir les limitations de la profondeur imposĂ©e par la physiologie humaine. La grande innovation de Keller a Ă©tĂ© sa mĂ©thode des changements de gaz (d'un mĂ©lange hĂ©lium-oxygĂšne Ă un mĂ©lange azote-oxygĂšne) au moment idĂ©al pendant la dĂ©compression. « Le changement dâun gaz lĂ©ger (hĂ©lium) Ă un gaz lourd (azote) permettant dâaccĂ©lĂ©rer la dĂ©compression. » Les expĂ©rimentations Ă venir allaient lui donner entiĂšrement raison.
LâĂ©quipe scientifique
Sur la base de cette rĂ©flexion, pour rĂ©soudre les questions concernant lâaction des gaz sur le systĂšme pulmonaire, Keller est allĂ© rencontrer Albert BĂŒhlmann Ă l'universitĂ© de Zurich. BĂŒhlmann Ă©tait spĂ©cialisĂ© dans l'appareil respiratoire et les systĂšmes de circulation. Ă lâĂ©poque, BĂŒhlmann croyait que la narcose Ă©tait principalement induite par le dioxyde de carbone (CO2).
Les deux scientifiques sont convenus de travailler ensemble et BĂŒhlmann sâest consacrĂ© aux aspects physiopathologiques des mĂ©langes gazeux pour faire une plongĂ©e expĂ©rimentale profonde dans le lac de Zurich assistĂ© par son ami, Peter Stirnenann. La plongĂ©e de Keller sâĂ©tant faite sans aucun problĂšme de santĂ©, il est alors prĂȘt Ă tester les limites des nouveaux mĂ©langes de gaz Ă base dâhĂ©lium.
Les records de profondeur
En 1959, il teste avec succĂšs ses premiĂšres tables de dĂ©compression dans le lac de Zurich, oĂč il a atteint une profondeur de 120 m avec lâaide de son ami Peter Stirnenann (Ă cette Ă©poque lâexploration des grandes profondeurs en plein dĂ©veloppement, sous lâimpulsion de Jacques Piccard).
En 1960, il développe des modÚles mathématiques et des tables de décompression en utilisant la technologie informatique qui débutait. Persuasif, Keller réussit à convaincre IBM de lui accorder gratuitement quelques heures sur un ordinateur IBM 650 (Mainframe) en dehors des heures de travail, pour réaliser les calculs nécessaires à l'élaboration de tables de décompression, basés sur l'hypothÚse de mélanges multiples pour différentes profondeurs.
Keller soumet des centaines de milliers de calculs informatiques pour trouver les temps de remontĂ©e, les profondeurs, et les procĂ©dures de dĂ©compression. Il Ă©dite environ quatre cents tables diffĂ©rentes pour des profondeurs allant jusquâĂ 430 m de profondeur. ParallĂšlement Ă ses recherches, il commence Ă expĂ©rimenter ses hypothĂšses avec des plongĂ©es de plus en plus profondes, toujours aidĂ© par Stirnenann.
Toujours en 1960, il Ă©tablit un nouveau record du monde de plongĂ©e dans le lac Majeur. Avec lui, la montre ONSA « Scaphandrier » rĂ©siste Ă une profondeur de 155 m. Puis Keller se rend aux Ătats-Unis pour tenter de convaincre l'US Navy de financer la poursuite de ses travaux. Bien que de nombreux experts de la marine sont intriguĂ©s et intĂ©ressĂ©s par la requĂȘte de Keller, le financement est rejetĂ©.
Keller se rend ensuite en France pour faire la mĂȘme dĂ©marche auprĂšs de la Marine nationale avec lâaide de Jacques-Yves Cousteau. Bien que les Français ne peuvent financer son travail, ils lui donnent accĂšs Ă la chambre hyperbare du GERS (Groupe dâĂ©tude et de recherches sous-marine) de Toulon.
Le , il atteint en simulation avec le caisson de Toulon la profondeur de 250 m.
Le , il bat le record du monde de plongée en atteignant 300 m dans le caisson de simulation hyperbare du GERS à Toulon, observé par plusieurs officiers de la marine nationale française et des scientifiques comme Xavier Fructus et Jacques-Yves Cousteau.
Cet exploit retient l'attention de la communautĂ© des scientifiques, mais contribue Ă promulguer le mythe selon lequel Keller est un phĂ©nomĂšne de la nature pouvant supporter des pressions importantes qui tueraient le commun des mortels. Câest ainsi que pour la plongĂ©e dĂ©bute une nouvelle Ăšre, la plongĂ©e Ă saturation.
Le , Hannes Keller bat un nouveau record de plongĂ©e (en pleine eau) Ă â222 m dans le lac Majeur et remonte sans incident aprĂšs 45 minutes de plongĂ©e. Hannes Keller s'associe alors avec l'explorateur et cinĂ©aste Max-Yves Brandly et l'instructeur national suisse de plongĂ©e Arthur Droz pour mettre au point en collaboration avec Vulcain la premiĂšre montre-rĂ©veil de plongĂ©e, la Cricket Nautical[3] quâil utilise pour cette plongĂ©e.
AprĂšs ce record, Keller acquiert une renommĂ©e dans le monde scientifique de la plongĂ©e Ă la fois militaire et de loisirs. Cet Ă©vĂ©nement convainc lâUS Navy du sĂ©rieux de Keller.
En 1962, Keller reçoit le soutien financier de l'US Navy et de Shell pour continuer ses recherches. Il dĂ©bute alors la prĂ©paration dâune plongĂ©e Ă 300 m. Il conçoit et construit une tourelle de plongĂ©e, qu'il baptise Atlantis, et qui possĂšde une trappe dans sa partie infĂ©rieure Ă travers laquelle les plongeurs peuvent sortir et retourner dans la tourelle.
Dans la foulée, il fonde le Laboratoire hyperbare Hannes Keller à l'université de Zurich. En modifiant sa cloche de plongée Atlantis, qu'il a utilisée pour sa plongée de 300 mÚtres en Californie, il l'utilise comme chambre hyperbare de laboratoire à laquelle il ajoute deux chambres plus larges.
Il finance le tout avec des moyens extrĂȘmement limitĂ©s. Pour sa recherche hyperbare, il engage Benno Schenk comme chef de laboratoire. Son laboratoire construit avec grand succĂšs des chambres hyperbares pour des clients en GrĂšce, Turquie, France, Ătats-Unis, Allemagne et Suisse.
Le , au large de lâĂźle de Santa Catalina en Californie, il Ă©tablit encore un nouveau record du monde en atteignant les 313 m de profondeur. Cet exploit, malgrĂ© des Ă©vĂ©nements tragiques[4], provoque un fort retentissement tant en plongĂ©e civile, militaire que sportive, telle qu'elle est pratiquĂ©e actuellement.
En 1965, il quitte le laboratoire et laisse tout Ă BĂŒhlmann et Schenk. Le nom de son laboratoire est modifiĂ© par BĂŒhlmann en Laboratoire hyperbarique de l'universitĂ© de Zurich. Câest alors que Shell finance avec plusieurs millions un nouveau systĂšme de chambres trĂšs confortables avec BĂŒhlmann et Schenk.
Lâindustriel
Au début des années 1970 et pendant les dix ans qui suivirent, Shell a commencé le développement des ROV (Remote Operated Vehicles), pour effectuer des travaux d'inspection offshore profondes, et dans certains cas, remplacer ou compléter la nécessité d'utiliser les plongeurs. La robotique sous-marine prend alors le pas sur les plongeurs.
En 1982, avec La Spirotechnique, il participe Ă la crĂ©ation dâune tenue de plongĂ©e profonde comprenant un ensemble (Ă©quipement intĂ©grĂ© de plongĂ©e), dâun cordon ombilical, dâun vĂȘtement Hannes Keller et dâun systĂšme de rĂ©chauffement Ă lâeau chaude. UtilisĂ© pour les plongĂ©es dâintervention ou Ă saturation entre â50 m et â300 m de profondeur permettant de supporter des tempĂ©ratures rigoureuses jusquâĂ 2 °C. Cet Ă©quipement nâest plus utilisĂ© aujourdâhui.
Hannes Keller a Ă©galement dĂ©veloppĂ© des combinaisons pour le sport professionnel, en particulier pour le ski. De trĂšs nombreuses mĂ©dailles olympiques et des compĂ©titions mondiales ont Ă©tĂ© remportĂ©es par leurs utilisateurs. Lâentreprise japonaise Descente[5] achĂšte dâabord la licence Keller pour les combinaisons sportives, puis tout le secteur « sport » de Keller.
à partir de 1970, Keller devient entrepreneur dans le secteur des technologies de l'information. En 1974, il fonde la société Keller SA qui devient leader mondial dans la fabrication de capteurs de pression isolés, basés sur la technologie piezorésistive.
En 1980, Keller vend sa propre gamme d'ordinateurs et devient l'un des principaux fournisseurs de PC d'IBM en Suisse. Plus tard, Hannes Keller crĂ©e dâautres logiciels, dont Ways for Windows et Witchdesk[6] dont 3 millions dâexemplaires seront vendus.
Avec dix ans dâavance sur Bill Gates, il crĂ©e le premier correcteur de texte par lâinformatique. IBM a achetĂ© ses licences, puis copiĂ© son logiciel pour lâintĂ©grer dans Word.
Prix
Hannes Keller a reçu de nombreux des prix internationaux, dont ceux des sociétés :
- Undersea
- Oceaneering
- Boston Sea Rovers
- Argosy's Giant of Adventure Award
Visipix
Hannes Keller a crĂ©Ă© lâun des plus grands musĂ©es dâimages dâInternet, Visipix[7], avec 1,3 million d'images en ligne. Les Copyrights sont gratuits pour toutes utilisations.
L'artiste
A partir de 2004, Hannes Keller a travaillé comme artiste indépendant.
Notes et références
- (de) « Traueranzeigen von Hannes Keller | trauer.nzz.ch », sur trauer.nzz.ch (consulté le )
- Phil Davison: Hannes Keller, deep diver who pioneered breathing gas mix, dies at 88. In: Washington Post, 25 décembre 2022.
- Cricket Nautical
- « Deux morts pendant l'expĂ©rience de plongĂ©e du Suisse Keller », Le Monde.fr,â (lire en ligne, consultĂ© le )
- Site officiel de Descente
- Witchpen.
- « Visipix »(Archive.org ⹠Wikiwix ⹠Archive.is ⹠Google ⹠Que faire ?)