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Groupe fortifié Verdun

La Feste Haeseler, rebaptisée groupe fortifié Verdun après 1919, est un ouvrage militaire situé près de Metz. Constitué des forts Sommy et Saint-Blaise, le groupe fortifié fait partie de la seconde ceinture fortifiée des forts de Metz. Il connut son baptême du feu, fin 1944, lors de la bataille de Metz.

Groupe fortifié Verdun
Feste Graf Haeseler
Illustration du fort.
Description
Ceinture fortifiée seconde ceinture fortifiée de Metz
Type d’ouvrage fort de type Biehler (ouvrage à organes dispersés)
Dates de construction 1899-1905
Dates de modernisation
Garnison 700 hommes (500+200)
Armement 10 pièces d’artillerie
(4 Ă— 100 mm, 4 Ă— 150 mm + 2 Ă— 100 mm)
Usage actuel désaffecté
Protection néant
CoordonnĂ©es 49° 02′ 43,37″ nord, 6° 05′ 58,2″ est
GĂ©olocalisation sur la carte : France
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Groupe fortifié Verdun
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Groupe fortifié Verdun
GĂ©olocalisation sur la carte : Moselle
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Groupe fortifié Verdun

Contexte historique

Pendant l'Annexion allemande, Metz, dont la garnison allemande oscille entre 15 000 et 20 000 hommes au dĂ©but de la pĂ©riode[1] et dĂ©passe 25 000 hommes avant la Première Guerre mondiale[2], devient progressivement la première place forte du Reich allemand[3]. La Feste Haeseler complète la Seconde ceinture fortifiĂ©e de Metz composĂ©e des Festen Wagner (1904-1912), Kronprinz (1899 - 1905), Leipzig (1907-1912), Kaiserin (1899-1905), Lothringen (1899-1905), Freiherr von der Goltz (1907-1916), Haeseler (1899-1905), Prinz Regent Luitpold (1907-1914) et Infanterie-Werk Belle-Croix (1908-1914).

Baptisé en l’honneur du comte Gottlieb von Haeseler, commandant du XVIe Corps d’Armée de Metz, le groupe fortifié a été construit sur la rive droite de la Moselle, au Sud de Metz, entre les villages de Corny-sur-Moselle et d’Augny. Complémentaire de la Feste Kronprinz, la Feste Haeseler contrôlait la vallée de la Moselle, donc l’axe de communication routier et ferroviaire entre Metz et Nancy. Le fort faisait partie d’un programme de fortifications plus vaste, appelé « Moselstellung », et englobant des forteresses disséminées entre Thionville et Metz, dans la vallée de la Moselle. L’objectif de l’Allemagne était de se protéger contre une attaque française visant à reprendre l'Alsace-Lorraine, soit l’Alsace et la Moselle, à l’Empire allemand. Le système de fortification fut conçu pour s’adapter aux progrès grandissants de l’artillerie depuis la fin du XIXe siècle. Basé sur de nouveaux concepts défensifs, tels que la dispersion et la dissimulation, le groupe fortifié devait constituer, en cas d’attaque, un barrage infranchissable pour les forces françaises.

Conception d’ensemble

Le périmètre de protection du groupe Verdun est assuré par un ensemble de positions d’infanterie, de casernes fortifiées et de batteries d’artillerie, disséminés sur une vaste superficie et dissimulés par la topographie naturelle. À partir de 1899, le plan Schlieffen de l’état-major allemand conçut les fortifications de la Moselstellung, entre Metz et Thionville, comme un verrou destiné à bloquer l’avance éventuelle des troupes françaises en cas de conflit[4]. Ce concept de ligne fortifiée sur la Moselle constituait une innovation significative par rapport au système Séré de Rivières développé par les Français. Il inspira plus tard les ingénieurs de la ligne Maginot[5].

Construction et aménagements

Le , le Kaiser Wilhelm II pose la première pierre du fort Saint-Blaise. Le groupe fortifiĂ© Verdun Ă©tant construit au sommet de deux collines, il est constituĂ© de deux forts, le fort Sommy sur 30 ha au sud, et le fort Saint-Blaise sur 45 ha au nord. Le groupe fortifiĂ© Verdun est dotĂ© de quatre obusiers de 150 mm et de six canons courts de 100 mm. Le fort Saint-Blaise Ă©tait prĂ©vu pour 500 hommes et le fort Sommy, pour 200 hommes. Il pouvait donc recevoir deux compagnies d’Infanterie, en plus des artilleurs. Saint-Blaise, dont la caserne fortifiĂ©e pouvait recevoir 500 hommes, dispose de 10 coupoles d’observation et de 12 postes de guet[4]. Sa citerne contenait 1 300 m3. 4 moteurs diesel, de 25Cv chacun, fournissait l’énergie nĂ©cessaire au fort Saint-Blaise. Le fort Sommy, dont la caserne fortifiĂ©e pouvait recevoir 200 hommes, dispose de 6 coupoles d’observation et de 8 postes de guet. Sa citerne pouvait contenir 600 m3 et il disposait de 3 moteurs diesel, de 20Cv chacun, pour fournir l’énergie nĂ©cessaire Ă  son fonctionnement[4]. Les armoiries du comte von Haeseler sont sculptĂ©es sur le fronton d’une des portes de l’ouvrage.

Affectations successives

Durant l’annexion de l’Alsace-Lorraine, le fort reçoit une garnison d’artilleurs à pied appartenant au XVIe Corps d’Armée. De 1914 à 1918, il sert de relais pour les soldats allemands montant au front. Ses équipements et son armement sont alors à la pointe de la technique militaire. En 1919, le fort est occupé par l’armée française.

Après le départ des troupes françaises en , l’armée allemande réinvestit les lieux. Début , au début de la bataille de Metz, le commandement allemand l’intègre au dispositif défensif mis en place autour de Metz. Compte tenu de la « tête de pont » américaine de Dornot, des combats féroces se déroulent autour du fort en . Actuellement, le fort est désaffecté. Le fort possède de remarquables peintures murales allemandes, antérieures à 1918[6].

Seconde Guerre mondiale

Au cours de la bataille de Metz, le groupe fortifié Verdun montrera tout son potentiel militaire et ses réelles qualités défensives. Sous-estimant les forces allemandes du secteur et la puissance de feu des forts de Metz[note 1], l’armée américaine tente d’établir une tête de pont sur la rive est de la Moselle, à hauteur de Dornot, au sud de Metz. Or le groupe fortifié Driant et le groupe fortifié Verdun dominent la vallée de la Moselle à cet endroit, et peuvent couvrir de leurs tirs l’ensemble du secteur. En outre, les troupes de la 462e Infanterie-Division et les Fahnenjunker de l’école d’officiers de Metz[note 2] connaissent bien le terrain[7]. Les combats autour des deux groupes fortifiés se dérouleront du au , dans des conditions extrêmes.

Le , le 3e bataillon du 11e régiment d'infanterie de l'armée américaine a pour objectif de prendre le groupe fortifié Verdun, soit les forts Saint-Blaise et Sommy[8]. Le fort n’est alors tenu que par un officier et six hommes de la Nachrichtenschule der Waffen-SS[note 3]. Un barrage roulant d’artillerie prépare le terrain aux troupes d’assaut américaines, qui ne rencontrent que peu de résistance. Sous le feu de l’artillerie, la section de la 462e Infanterie-Division, qui assurait la défense du secteur, se replie en effet prudemment vers le nord en direction de Frescaty. Après un dernier échange de tirs[note 4], la compagnie F du 11e Infantry Regiment atteint les fossés du fort, protégés par des herses infranchissables. Les Allemands semblent avoir déserté le secteur, où plane maintenant un silence inquiétant. Ne sachant pas à quoi s’en tenir, le capitaine américain de la compagnie F demande un pilonnage d’artillerie préventif sur le fort. Mais les trois premières salves, tirées trop courtes, font plusieurs morts et blessés dans ses rangs, et les suivantes tombent sur un fort déserté[8].

AussitĂ´t après, les mortiers et les mitrailleuses du 37e SS Panzer Grenadier Regiment de la 17e SS-Panzergrenadier-Division « Götz von Berlichingen Â», tout juste arrivĂ© dans le secteur, se dĂ©chainent sur le versant ouest du groupe fortifiĂ©, prenant Ă  revers les deux compagnies amĂ©ricaines. Les sections d’assaut du 2e bataillon amĂ©ricain doivent alors se replier sur la position du Fer Ă  cheval de Dornot, sous un feu croisĂ© meurtrier. Ă€ 22h00, la 6e compagnie de la 37e SS Panzer Grenadier Regiment rĂ©ussit Ă  reprendre possession du fort Saint-Blaise, sous un dĂ©luge de feu[8]. Quand le matin se lève, les pertes sont dĂ©jĂ  lourdes dans les deux armĂ©es. Le , le gĂ©nĂ©ral Kraus rĂ©affecte pas moins de 1 000 soldats du 37e SS Panzer Grenadier Regiment[note 5], Ă  la dĂ©fense du groupe fortifiĂ© Verdun, face Ă  la tĂŞte-de-pont de Dornot. Le , pour couvrir la retraite amĂ©ricaine sur Dornot, les P-47, du 23e escadron du 36e groupe de bombardiers du XIXe TAC , larguent pas moins de 23 bombes de 225 kg et 12 bombes de 115 kg[9] sur les forts Sommy et Saint-Blaise, oĂą se terrent littĂ©ralement les grenadiers allemands. Ils dĂ©truisent par un coup au but une tourelle de 150 mm, mais les superstructures du fort rĂ©sistent relativement bien[9]. MalgrĂ© les bombes incendiaires et les tirs d’artillerie meurtriers de l’armĂ©e amĂ©ricaine, les troupes allemandes tiennent toujours solidement la position.

Pour sĂ©curiser le secteur et contenir les troupes allemandes dans les forts de la ligne fortifiĂ©e West-Metz von Gallwitz, une opĂ©ration militaire est montĂ©e dans les jours suivants par l’état-major amĂ©ricain. L’opĂ©ration Thunderbolt, coordonnant une attaque combinĂ©e au sol et dans les airs, est planifiĂ©e le . Le , les chasseurs bombardiers du 19e Tactical Air Force effectuent un raid aĂ©rien sur les forts de Metz, larguant des bombes au napalm de 500 kg[10]. Les fortifications bĂ©tonnĂ©es et enterrĂ©es rĂ©sistent bien Ă  cette attaque aĂ©rienne. Avant le , deux nouveaux raids aĂ©riens se montreront inefficaces pour dĂ©loger les soldats allemands, qui se terrent pendant les raids, et retrouvent leurs postes de combat aussitĂ´t après.

Pendant un long mois, les soldats assiĂ©gĂ©s resteront Ă  leur poste, avec discipline et rĂ©signation, attendant une ultime attaque amĂ©ricaine qui ne viendra pas. Les AmĂ©ricains, ayant tirĂ© les consĂ©quences de leur Ă©chec devant le groupe fortifiĂ© Driant, ont effectivement renoncĂ© Ă  prendre frontalement d’assaut les forts situĂ©s Ă  l’ouest de Metz. Le gĂ©nĂ©ral Patton, digĂ©rant mal cet Ă©chec, rĂ©clamait pourtant chaque jour au Bomber Command des raids aĂ©riens sur les forts, pour « paver l’enfer de ces sales bâtards d’Allemands »[11]. Le temps en dĂ©cida autrement. L’opĂ©ration « vengeance » vit finalement le jour, peu de temps avant la chute de Metz. PrĂ©lude Ă  l’offensive sur la citĂ© messine, l'Air Force envoya en effet le , pas moins de 1 299 bombardiers lourds, B-17 et B-24, dĂ©verser 3 753 tonnes de bombes, de 1 000 Ă  2 000 livres, sur les ouvrages fortifiĂ©s et les points stratĂ©giques situĂ©s dans la zone de combat de la IIIe armĂ©e[12]. La plupart des bombardiers ayant larguĂ© leurs bombes sans visibilitĂ©, Ă  plus de 20 000 pieds, les objectifs militaires ont souvent Ă©tĂ© manquĂ©s. Ă€ Metz, les 689 chargements de bombes destinĂ©s Ă  frapper sept groupes fortifiĂ©s de Metz, dĂ©signĂ©s comme des cibles prioritaires, ne firent que des dĂ©gâts collatĂ©raux, prouvant une fois de plus l’inadĂ©quation des bombardements massifs sur des objectifs militaires[13].

Après une progression rapide dans la nuit du 16 au , le 3e bataillon du 11e Infantry Regiment encercle le groupe fortifiĂ©, obligeant ses dĂ©fenseurs Ă  se terrer dans les bunkers et les souterrains[14]. Alors que la citĂ© messine tombe aux mains des AlliĂ©s, le Ă  14h35, les liaisons entre les forts et le poste de commandement de Metz sont dĂ©finitivement coupĂ©es. Les forts, encerclĂ©s par 9 000 GIs, ne communiquent plus. EnfermĂ©s dans leurs bunkers, les soldats de la 462e Volksgrenadier Division ne peuvent plus compter que sur eux-mĂŞmes. Ă€ court de vivres et de munitions, l’ancienne Feste Haeseler se rend le au petit matin[15]. Deux officiers et 148 hommes de troupes en sortent, physiquement Ă©puisĂ©s et nerveusement Ă©prouvĂ©s. Une fois dans la place, les troupes amĂ©ricaines s’empressent de hisser leur drapeau au sommet du fort, sous les flashs des photographes militaires, voulant dĂ©finitivement faire oublier la dĂ©faite cuisante de Dornot.

Le fort Jeanne-d’Arc fut le dernier des forts de Metz à déposer les armes, le . La résistance allemande, déterminée, les intempéries et les inondations, inopportunes, ainsi qu’une tendance générale à mésestimer la puissance de feu des fortifications de Metz, ont contribué à ralentir l’offensive américaine, donnant l’occasion à l’armée allemande de se retirer en bon ordre vers la Sarre[16]. L’objectif de l’état-major allemand, qui était de gagner du temps en fixant le plus longtemps possible les troupes américaines en avant de la ligne Siegfried, sera donc largement atteint.

Notes et références

Notes

  1. Selon le général Friedrich von Mellenthin, officier à l’état-major du groupe d’armées G, la bataille de Metz « fut une suite d’erreurs provoquées, en grande partie, par un optimisme débordant exprimé par ceux qui dirigèrent les opérations » (« Objectifs atteints mais… », in Les années Liberté, Metz, 1994.)
  2. Fahnenjunkerschule VI des Heeres “Metz”: École des officiers de Metz, sous les ordres du colonel SS Joachim von Siegroth (environ 1800 Fahnenjunkers).
  3. École des transmissions de la Waffen-ss de Metz, sous les ordres du colonel SS Ernst Kemper.
  4. Des Allemands furent achevés par les GI’s, à titre de représailles, lorsqu’un des officiers américains fut mortellement touché.
  5. Estimation sujette à caution d’un prisonnier allemand appartenant à cette unité, lors de son interrogatoire.

Références

  1. René Bour, Histoire de Metz, 1950, p. 227.
  2. L’Express, no 2937, du 18 au 24 octobre 2007, dossier « Metz en 1900 », Philippe Martin.
  3. François Roth : Metz annexée à l’Empire allemand, in François-Yves Le Moigne, Histoire de Metz, Privat, Toulouse, 1986, (p. 350).
  4. Donnell Clayton, The German Fortress of Metz: 1870-1944, Oxford, Osprey, 2008, p. 24.
  5. Donnell Clayton, The German Fortress of Metz: 1870-1944. Oxford, Osprey, 2008, p. 10-13.
  6. Alain Hohnadel, Jean-Louis Goby : La mémoire des forts : peintures murales des soldats de la Ligne Maginot et des forts de Metz (1914-1940), Éditions Serpenoise, Metz, 1990.
  7. René Caboz, La bataille de Metz, Éditions Pierron, Sarreguemines, 1984, p. 182.
  8. René Caboz, La bataille de Metz. 25 août - 15 septembre 1944, Sarreguemines, 1984, p. 205-215 et carte p. 368.
  9. René Caboz, La bataille de Metz. 25 août - 15 septembre 1944, Sarreguemines, 1984, p. 267-268.
  10. 1944-1945 : Les années Liberté, le Républicain Lorrain, Metz 1994, p. 30.
  11. Jean Colin (général), Contribution à l’histoire de la libération de la ville de Metz ; Les combats du fort Driant (Septembre-Décembre 1944), p. 14.
  12. Général Jean Colin, Contribution à l’histoire de la libération de la ville de Metz ; Les combats du fort Driant (septembre-décembre 1944), Académie nationale de Metz, 1963, p. 13.
  13. Hugh M. Cole, The Lorraine Campaign, Center of Military History, Washington, 1950, p. 424.
  14. Hugh M. Cole, The Lorraine Campaign, Center of Military History, Washington, 1950, p. 442.
  15. « En finir avec les forts autour de Metz », dans 1944-1945 : Les années Liberté, le Républicain Lorrain, Metz, 1994, p. 42.
  16. Hugh M. Cole, The Lorraine Campaign, Center of Military History, Washington, 1950, p. 448.

Voir aussi

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