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Grand Inquisiteur de France

Il y avait deux Grands Inquisiteurs de France (G.I.F) :

  • le premier siĂ©geait Ă  Paris, pour les pays de langue d'oil mais disposait de cinq Ă  six tribunaux ambulants. Lui seul avait vĂ©ritablement droit au titre ;
  • le second siĂ©geait Ă  Toulouse, pour les pays de langue d'oc, ce dernier siège fut « dĂ©doublĂ© » durant les troubles albigeois Ă  Carcassonne. Ces deux sièges Ă©taient fixes et leur PrĂ©sident Ă©tait simplement appelĂ© « Grand Inquisiteur ».
Le Grand Inquisiteur dit aussi Le Pape et l'inquisiteur, J-P. Laurens, 1882

De fait, dans ces pays d'oc (très liĂ©s avec l'Aragon), l'appellation d« Inquisiteur gĂ©nĂ©ral « Inquisiteur gĂ©nĂ©ral »'n'Ă©tait plus en usage.

Nomination

Les Grands Inquisiteurs de France étaient nommés par le Roi de France ou par le comte de Toulouse.

RĂ´le de saint Dominique et des dominicains

Fra Angelico, saint Dominique de GuzmĂ n

L'Inquisition sera confiée aux franciscains et surtout aux frères prêcheurs, les dominicains, mais cette fondation a lieu deux ans après la mort de leur fondateur, Dominique de Guzmàn (v.1175– † 1221), opposé de son vivant à toute forme d'action autre que la prédication et la persuasion verbale (controverses, exhortations, avis...)[1].

Il rejoint en cela Bernard de Clairvaux (1090 – † 1153) qui stipulait : « Fides suadenda non imponenda » (la foi doit ĂŞtre persuadĂ©e non imposĂ©e) et si la lutte contre les hĂ©rĂ©sies est fort ancienne, l'instauration d'une Loi de procĂ©dure pĂ©nale dans cette lutte est une grande innovation en Europe. Jusque-lĂ  (et mĂŞme plus tard), souverains, Ă©vĂŞques et lĂ©gats agissaient un peu selon leur bon vouloir, ce qui souvent signifiait des atrocitĂ©s innommables. L'instauration d'une violence nĂ©cessaire mais codifiĂ©e serait alors une avancĂ©e lĂ©gislative et aurait donc pu ĂŞtre, en principe, souhaitable.

Aussi, rompant avec la doctrine de non violence - prêchée par ces deux Saints éminemment célèbres, Jacques Ier d'Aragon abolira cette tradition en 1232 (selon l'avis de son confesseur Raymond de Peñafort) et demandera l'instauration d'une Inquisition en Aragon. Il sera suivi par Raymond V de Toulouse en 1234.

L'Inquisition médiévale (en France)

Chronologie

  • 1199 : Le pape Innocent III dĂ©finit la procĂ©dure inquisitoriale contre les albigeois dans la bulle Vergentes in senium.
  • 1200 : Vers cette Ă©poque, promulgation de lois punissant de mort les hĂ©rĂ©tiques par Louis VIII en France (1226), par Raymond V de Toulouse (1229), Pierre II d'Aragon (1226), etc. Le bĂ»cher devient la sanction usuelle contre les hĂ©rĂ©tiques.
  • 1205 : Le pape Innocent III, dans sa bulle Si adversus vos, condamne ceux qui viennent Ă  la dĂ©fense des hĂ©rĂ©tiques, leur interdisant de fait le secours d'un avocat, voire de tĂ©moins Ă  dĂ©charge. Cette disposition excessive ne restera pas en usage.
  • 1207 : Le pape Innocent III fait prĂŞcher la croisade contre les albigeois. Elle prendra fin par le TraitĂ© de Paris (1229).
  • 1213 : La dĂ©crĂ©tale Licet Heli permet d'appliquer la procĂ©dure inquisitoire contre les hĂ©rĂ©sies. Elle sera complĂ©tĂ©e par la dĂ©crĂ©tale Per tuas litteras.
  • 1215 : Le IVe concile du Latran reprend et met en ordre toutes les dispositions relatives Ă  la procĂ©dure inquisitoriale.
  • 1231 : La Constitution Excommunicamus, condamnant l'hĂ©rĂ©sie, excommunie les hĂ©rĂ©tiques et officialise les ordonnances du pouvoir temporel : la prison Ă  vie pour les repentants, le bĂ»cher pour les hĂ©rĂ©tiques rĂ©calcitrants.
  • Ă€ partir de 1231 : Les premiers inquisiteurs sont dĂ©signĂ©s et missionnĂ©s par le Saint-Siège qui fait des choix pour le moins malheureux. Le premier des inquisiteurs Conrad de Marbourg, nommĂ© en 1231, sera assassinĂ© en 1233.
  • 1235 : Robert le Bougre est nommĂ© inquisiteur de France.
  • 1233, en avril : Bulle Ille humani generis : la compĂ©tence contre les hĂ©rĂ©sies est retirĂ©e aux tribunaux ecclĂ©siastiques quand un tribunal d'Inquisition existe.
  • 1234 : Les tribunaux d'Inquisition sont installĂ©s Ă  Toulouse et Carcassonne. Ils sont confiĂ©s aux Dominicains.
  • 1237 : Raymond VII de Toulouse obtient la suspension de l'Inquisition dans ses États.
  • 1237 : Ă€ Carcassonne, rĂ©pression particulièrement musclĂ©e par le Catalan Ferrier, surnommĂ© le marteau des hĂ©rĂ©tiques. Ce surnom sera plus tard donnĂ© Ă  Torquemada et Antoine de Padoue.
  • 1239 : En Champagne, Robert le Bougre fait brĂ»ler 180 personnes au Mont-AimĂ©, jugĂ©es en Ă  peine une semaine.
  • 1242 : Premier manuel de l'Inquisition, Ă©laborĂ© par Raymond de Peñafort.
  • 1242 : Deux inquisiteurs, Guillaume Arnaud et Étienne de Saint-ThibĂ©ry, sont assassinĂ©s Ă  Avignonet.
  • 1244 : Fin de l'hĂ©rĂ©sie Ă  Montpellier, le tribunal de l'Inquisition y est supprimĂ©.
  • 1246 : Innocent IV veut suivre de près et intervient dans le fonctionnement des tribunaux d'Inquisition, ce qui cause des frictions (voir Inquisition mĂ©diĂ©vale).
  • 1249 : Sans passer par le tribunal de l'Inquisition, Raymond VII de Toulouse fait brĂ»ler quatre-vingts hĂ©rĂ©tiques en sa prĂ©sence, sans leur permettre de se rĂ©tracter.
  • 1250 : L'Inquisition (inquisitio hereticæ pravitatis) est en place et fonctionne dans toute l'Europe occidentale.
  • 1252 : Pierre de VĂ©rone, qui sera surnommĂ© « Pierre Martyr », est assassinĂ© en Italie. Il est canonisĂ© un an plus tard.
  • 1252 : Innocent IV promulgue la bulle Ad extirpanda autorisant l'usage de la question dans les enquĂŞtes de l'Inquisition. Cette autorisation est confirmĂ©e en 1259 (Alexandre IV) et 1262 (ClĂ©ment IV), date Ă  laquelle les inquisiteurs sont finalement autorisĂ©s Ă  assister Ă  la question.
  • 1254 : Innocent IV renouvelle l'interdiction faite aux autoritĂ©s civiles d'emprisonner ou de brĂ»ler les hĂ©rĂ©tiques sans l'avis de l'Ă©vĂŞque du lieu, interdiction souvent rappelĂ©e par la suite.
  • 1255 : Innocent IV prescrit l'usage des boni viri.
  • 1255 : Les dominicains s'Ă©tablissent Ă  Toulouse.
  • 1261 : Le tĂ©moignage des hĂ©rĂ©tiques et apostats est officiellement admis devant les tribunaux de l'Inquisition.
  • 1273 : Thomas d'Aquin dans la Somme thĂ©ologique considère que la peine de mort peut ĂŞtre lĂ©gitimement employĂ©e pour assurer le maintien de l'ordre public, y compris contre les hĂ©rĂ©sies.
  • 1286 : Plainte du consul de Carcassonne au roi de France sur la cruautĂ© des inquisiteurs du lieu.
  • 1301 : Philippe IV le Bel prend prĂ©texte des excès de l'Inquisition pour reprendre en main le fonctionnement de ces tribunaux.
  • 1306 : ClĂ©ment V ordonne une enquĂŞte sur le fonctionnement de l'Inquisition dans le sud de la France.
  • 1307 : les premiers Templiers sont brĂ»lĂ©s sur ordre de Philippe le Bel.
  • 1308 : Bernard Gui est nommĂ© Grand inquisiteur de Toulouse.
  • 1310 : Marguerite Porete, dite Marguerite des PrĂ©s est brĂ»lĂ© pour hĂ©rĂ©sie, auteur mystique et chrĂ©tienne du courant des bĂ©guines, nĂ©e vers 1250, brĂ»lĂ©e avec son livre Le Miroir des Simples âmes et anĂ©anties....
Une béguine (telle Marguerite Porete), imprimée à Lübeck en 1489
Exécution des Templiers
  • 1312 : Constitutions Multorum querela et Nolentes sont promulguĂ©es lors du concile de Vienne, exigeant le contrĂ´le de l'Ă©vĂŞque du lieu pour tous les actes importants de la procĂ©dure de l'Inquisition.
  • 1314 : les MaĂ®tres Templiers sont brĂ»lĂ©s pour hĂ©rĂ©sie sodomie, etc.
  • 1321 : Le dernier dignitaire cathare, Guillaume BĂ©libaste, est brĂ»lĂ© Ă  Villerouge-Termenès, par l'Inquisition de Carcassonne.
  • 1324 : Jean de Beaune, inquisiteur de Carcassonne.
  • 1328 : Dernier hĂ©rĂ©tique brĂ»lĂ© Ă  Carcassonne.
  • 1400 : La fonction d'inquisiteur devient progressivement un titre accessoire ou honoraire.

Liste des Grands Inquisiteurs

Ă€ Paris, pour les pays de langue d'oil

  • en 1235, Robert le Bougre, dominicain, est nommĂ© inquisiteur gĂ©nĂ©ral du royaume de France (autre dĂ©nomination du GIF). Mais, Ă  l'instar de Conrad de Marbourg premier inquisiteur connu, il commet tellement d'exactions qu'il est relevĂ© de ses fonctions l'annĂ©e suivante pour finir (probablement) ses jours en prison.

Ă€ Toulouse

Ă€ Carcassonne

  • 1237 : frère Ferrer ou Ferrier, G. I., dominicain catalan, se livre Ă  une rĂ©pression particulièrement sĂ©vère ; il est surnommĂ© le marteau des hĂ©rĂ©tiques.

Bibliographie

Bibliographie ancienne

  • Histoire de France depuis les temps les plus reculĂ©s jusqu'en 1789 par Henri Martin. Nouvelle Ă©dition. Paris, chez FURNE et Cie, LIBRAIRES-EDITEURS, 1844.
  • The Cardinals of the Holy Roman Church - Biographical Dictionary ... ou Dictionnaire des cardinaux, contenant des notions gĂ©nĂ©rales sur le cardinalat, la nomenclature complète, par ordre alphabĂ©tique, des cardinaux de tous les temps et de tous les pays de Charles Berton, Jacques-Paul Migne. PubliĂ© en 1857. Paris.

Bibliographie moderne

  • Yves Dossat, « Le bĂ»cher de MontsĂ©gur », Le Credo, la Morale et l'Inquisition, Cahiers de Fanjeaux n° 6 (1971), Privat, Toulouse, p. 371
  • RĂ©gine Pernoud, Pour en finir avec le Moyen Ă‚ge, Seuil, coll. « Points », 1977 (ISBN 2-02-005074-9), p.p. 99-129
  • Mgr. CĂ©lestin Douais, Documents Pour Servir a L'histoire de L'inquisition Dans Le Languedoc, Ă©d. Slatkine, Genève, 1977

Notes et références

  1. M.-H. Vicaire, « Saint Dominique et les inquisiteurs », Annales du Midi, vol. 79, no 82,‎ , p. 173–194 (DOI 10.3406/anami.1967.4405, lire en ligne, consulté le )
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