Frères Faucher
Les frères Faucher (1760-1815), aussi appelés « les jumeaux de La Réole », prénommés Constantin et César, sont des frères jumeaux, nés le à La Réole en Gironde, devenus généraux de brigade pendant la Révolution française. Ils meurent tous deux le même jour, fusillés le à Bordeaux sur décision d'un conseil de guerre, victimes de la « Terreur blanche ».
Naissance | |
---|---|
Décès |
(Ă 55 ans) |
Allégeance |
Grade militaire |
Général (chacun) |
---|---|
Distinction |
Biographie
Fils d'un militaire devenu diplomate et commissaire des guerres et d'une mère issue de la bonne bourgeoisie[1], les frères Faucher sont des jumeaux d'une parfaite ressemblance. Pour se faire reconnaitre, ils portent à leur boutonnière une fleur différente. Issus d'un milieu plutôt aisé, ils reçoivent une bonne éducation.
En 1775 ils entrent aux chevau-légers de la garde de Louis XVI et deviennent lieutenants dans un régiment de dragons. Ayant fait des études de droit, ils deviennent aussi avocats. Ils se lient d'amitié avec André-Daniel Laffon de Ladebat[2].
Le 11 juin 1790, leur élection en qualité de députés de la circonscription de Bazas est invalidée[3].
En 1791, César est élu président de l'administration et commandant des gardes nationales de La Réole. Constantin est commissaire du Roi, puis président de la municipalité du chef-lieu de ce district.
En 1793, acquis aux idées révolutionnaires, ils forment un corps franc d'infanterie, sous la désignation des « Enfants de La Réole », et reprennent leur carrière militaire contre les royalistes lors de la guerre de Vendée. Ils parcourent rapidement tous les grades, d'adjudant-général jusqu'à général de brigade — à titre provisoire —, le . Mais les nombreuses blessures reçues au combat les obligent à quitter le service.
Au moment de quitter l'armée, ils sont accusés de fédéralisme et de royalisme et traduits devant un tribunal révolutionnaire le . Condamnés à mort et conduits à l'échafaud, ils sont sauvés par le représentant du peuple Joseph Lequinio, qui obtient leur grâce et fait casser le jugement de condamnation à mort[2].
Ayant rejoint l'armée de Moselle de Kléber, ils demandent à être réformés.
En 1800, ralliés au coup d'État du 18 Brumaire, Constantin est nommé sous-préfet de La Réole et César membre du conseil général de la Gironde.
DĂ©missionnaires en 1803, ils restent Ă©trangers aux affaires publiques jusqu'en 1814.
Durant les Cent-Jours, ils sont nommés chevaliers de la Légion d'honneur et employés en qualité de maréchaux de camp à l'armée des Pyrénées orientales.
César est nommé représentant par les électeurs de la Réole et Constantin maire de la même ville, puis, lors de l'état de siège du département de la Gironde, commandant des arrondissements de la Réole et de Bazas. En défendant La Réole, ils sont condamnés à mort par les Anglais, mais graciés sur l'intervention du maréchal Marmont[4].
La mort des frères Faucher
Le , sous le règne de Louis XVIII, le général Clausel ordonne aux frères Faucher de cesser leurs fonctions, le drapeau blanc venant d'être arboré à Bordeaux. Mais les frères Faucher, à La Réole, conservent le drapeau tricolore jusqu'au 23 juillet[5]. Des troubles surviennent à La Réole où un détachement des régiments coloniaux, composé d'une vingtaine de noirs originaires de Guadeloupe ou de Saint-Domingue commandés par le lieutenant mulâtre Casimir Duclos, déchire le drapeau blanc aux cris de « Vive Napoléon » et se livre à des pillages envers les royalistes. Des gardes nationaux, envoyés à La Réole, pourchassent les bonapartistes à la recherche des frères Faucher qui sont arrêtés et emprisonnés, avec une partie des insurgés ; les autres s'étant enfuis vers Marmande[6].
Les frères Faucher sont poursuivis pour avoir « conservé un commandement qui leur avait été retiré, excité à la guerre civile, comprimé par la force l'élan de fidélité au Roi et embauché rebelles et soldats en les engageant à rejoindre Florian[7], chef des partisans »[8].
Le , ils sont transférés des prisons de la Réole au fort du Hâ à Bordeaux, puis interrogés le 18 et le 19. Ils sont traduits le devant un conseil de guerre au sein du château Trompette. On leur refuse le délai nécessaire pour trouver un défenseur. Plusieurs avocats s'étant récusés, ils se défendent mutuellement.
Ils sont condamnés à mort sur la base des trois premiers chefs d'accusation. Le , le conseil de révision confirme le jugement qui est exécuté le lendemain, le à Bordeaux. Ils sont emmenés à pied depuis le Fort du Hâ, où ils sont emprisonnés, jusqu'à la pelouse de Plaisance près du cimetière de La Chartreuse, pour être fusillés. Ils meurent courageusement, César commandant le feu.
Les autres insurgés capturés à Agen sont jugés plus tard, les 18 et , devant la cour d'assises de Bordeaux. Parmi leurs chefs, ayant agi « sous l'influence des Frères Faucher », un seul est condamné à mort, les autres à des peines de travaux forcés, au bannissement ou à cinq ans d’emprisonnement[7].
- Les frères Faucher, gravure de 1864.
- Plaque commémorative apposée sur leur maison natale, 10 rue Lamar à La Réole.
Postérité
Sous la monarchie de Juillet, leur neveu, Casimir Faucher, publie un ouvrage en leur mémoire dénonçant un « assassinat juridique ».
Les jumeaux de la Réole est un drame en trois actes, écrit par Rougemont et Decomberousse. Il est représenté le au Théâtre de la Renaissance à Paris[9], et de 1827 à 1832 au Théâtre des Nouveautés[10].
Une médaille, réalisée par le sculpteur et médailleur David d'Angers, est frappée en leur honneur[11].
Les frères Faucher, fusillés sur décision d'un conseil de guerre le , à l'époque de la terreur blanche à Bordeaux, ont inspiré les figures des deux jumeaux Simeuse dans le roman de Balzac Une ténébreuse affaire.
Une rue de Bordeaux porte leur nom.
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
- Bibliothèque historique ou Recueil de matériaux pour servir à l'histoire du temps, vol. 6, Paris, Delaunay — Pélicier — Eymery, (lire en ligne), p. 169 et suiv. — Voir : « Procès des généraux César et Constantin Faucher, frères jumeaux de la Réole, condamnés à mort le 24 septembre 1815 par le premier conseil de guerre de la onzième division militaire ; jugement confirmé par celui de révision de 26 et exécuté le 27 à Bordeaux ; suivi de leur correspondance pendant leur détention au fort du Hâ. Pièces pour servir à la réhabilitation des frères Faucher ».
- M. PH. Le Bas, France. Dictionnaire encyclopédique, t. septième, Paris, Firmin Didot Frères, (lire en ligne).
- « Frères Faucher », dans Charles Mullié, Biographie des célébrités militaires des armées de terre et de mer de 1789 à 1850, [détail de l’édition] — Le texte se trouve également dans l'ouvrage plus ancien de Philippe Le Bas, France Dictionnaire Encyclopédique, publié en 1842.
- Casimir Faucher, Procès des frères Faucher, de La Réole, morts en 1815, victimes de la fureur des partis, Bordeaux et Paris, , 58 p. (lire en ligne).
- Charles Dalbaret, Un assassinat juridique - Les Généraux Faucher ou les Jumeaux de La Réole fusillés à Bordeaux sous la Terreur blanche (1815), Collection XIX, (ISBN 9782346104079, lire en ligne), réimpression de l'édition originale Charles Dalbare t, Assassinat juridique (1815) - Les généraux Faucher ou les jumeaux de La Réole fusillés à Bordeaux sous la terreur blanche, Paris, A. Bellier, , 351 p. (lire en ligne).
- Philippe Lauzun, Florian et ses bandes de partisans en 1814 et 1815, Agen, Imprimerie Moderne, (lire en ligne).
- Maurice Serval, « Autour d'un roman de Balzac : Une ténébreuse affaire », Revue d'Histoire littéraire de la France, vol. 29, no 4,‎ , p. 480–481 (ISSN 0035-2411, lire en ligne, consulté le ).
- J. Lucas-Dubreton, « Les frères Faucher », Revue des Deux Mondes (1829-1971),‎ , p. 589–603 (ISSN 0035-1962, lire en ligne, consulté le ).
- Pierre Bécamps, Deux victimes de la terreur blanche a Bordeaux, les généraux Cesar et Constantin Faucher, les jumeaux de la Réole, , 258 p.
- Les illustres de Bordeaux : catalogue, vol. 1, Bordeaux, Dossiers d'Aquitaine, , 80 p. (ISBN 978-2-84622-232-7, présentation en ligne)
Notes et références
- Lucas-Dubreton 1956, p. 589–603.
- Paul Marais, « Documents inédits sur la Révolution dans le département de la Gironde. Les frères Faucher, Laffon de Ladébat et leur correspondance », Revue Historique, vol. 43, no 2,‎ , p. 321 (ISSN 0035-3264, lire en ligne, consulté le ).
- Charles-François Bouche, « Rapport sur l'élection de MM. César et Constantin de Faucher, lors de la séance du 11 juin 1790 », Archives Parlementaires de la Révolution Française, vol. 16, no 1,‎ , p. 167–167 (lire en ligne, consulté le ).
- Thierry Pouliquen, « César et Constantin FAUCHER », sur thierry.pouliquen.free.fr, 2012-2020 (consulté le ).
- Camille Jullian, Histoire de Bordeaux depuis les origines jusqu'en 1895, Bordeaux, FĂ©ret et fils, (lire en ligne), p. 710.
- Julie Duprat, « La Réole, 1815 : une histoire de rebelles Noirs », sur Noire métropole, publié 6 novembre 2020 et mis à jour 15 février 2021 (consulté le ).
- Philippe Lauzun, Florian et ses bandes de partisans en 1814 et 1815, Agen, Imprimerie Moderne, (lire en ligne).
- Lucas-Dubreton 1956, p. 598.
- Rougement & Decomberousse, Les jumeaux de la Réole, ou les frères Faucher, drame en 3 actes, Paris, Quoy, (lire en ligne).
- Charles Dalbaret, Un assassinat juridique (1815).: Les généraux Faucher; ou, Les jumeaux de La Réole fusillés à Bordeaux sous la terreur blanche, A. Bellier & cie, (lire en ligne), p. 337-343
- « Bx 2007.0.34 Profils de César et Constantin Faucher », sur Collection en ligne du musée des Beaux-Arts de Bordeaux (musba-bordeaux.opacweb.fr) (consulté le ).
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- Causes politiques célèbres du dix-neuvième siècle:... Procès des Frères Faucher..., H. Langlois, (lire en ligne), p. 38