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Joseph Lequinio

Marie Joseph Lequinio, nĂ© le Ă  Sarzeau[1] et mort le Ă  Edgefield dans l'État de Caroline du Sud (États-Unis)[1], est un rĂ©volutionnaire français, dĂ©putĂ© Ă  la Convention et reprĂ©sentant en mission auprĂšs de l'ArmĂ©e de l'Ouest.

Joseph Lequinio
Illustration.
Fonctions
Député du Nord
–
LĂ©gislature Conseil des Cinq-Cents
Groupe politique Montagne
Député du Morbihan
–
Législature Assemblée nationale législative
Convention nationale
Groupe politique Montagne
Maire de Sarzeau
Biographie
Nom de naissance Marie Joseph Lequinio de Kerblay
Date de naissance
Lieu de naissance Sarzeau
Date de décÚs
Lieu de décÚs Edgefield (Caroline du Sud)
Nationalité Français
Profession Avocat
Religion Athée

Biographie

Avocat et important propriĂ©taire terrien, maire de la presqu’üle de Rhuys en 1789, juge au tribunal de Vannes en 1790, Joseph Lequinio est Ă©lu l’annĂ©e suivante Ă  l'AssemblĂ©e lĂ©gislative par le Morbihan. Il demande la mise sous sĂ©questre des biens des Ă©migrĂ©s, la suppression du titre de « majestĂ© » attribuĂ© au roi, l’autorisation de se marier pour les prĂȘtres, Ă©dite une feuille d’information pour les paysans, le Journal des laboureurs qu’il Ă©dita Ă  Paris du au . MalgrĂ© son aversion pour la guerre, il vote le Ă  l'assemblĂ©e lĂ©gislative la dĂ©claration de guerre [2].

Élu dĂ©putĂ© Ă  la Convention (1792), il dĂ©posa le un Ă©crit intitulĂ© Richesse de l’État par la navigation intĂ©rieure qui eut pour rĂ©sultat un dĂ©cret pour l’établissement d‘un canal entre la Vilaine et la Rance. Il vote pour la mort du roi et part, dĂšs , en mission Ă  l'ArmĂ©e du Nord.

Il fait paraßtre le un ouvrage épais, Les préjugés détruits, qu'il fait réimprimer en janvier puis en . Il y appelle à l'égalité totale des hommes et des femmes, aux droits des paysans, à l'abolition de la peine de mort, à l'abrogation de l'esclavage des Noirs, à l'athéisme et à la condamnation de la guerre. Dans le procÚs du roi, il vote pour la culpabilité, contre l'appel au peuple, pour la mort et contre le sursis. Il rappelle son abolitionnisme, mais invoque le maintien de la peine de mort dans la loi, pour ne pas en excepter Louis XVI.

EnvoyĂ© de la Convention en aoĂ»t 1793 dans l’Oise et l’Aisne avec Sylvain-Phalier Lejeune, Joseph Lequinio ordonne l’arrestation de tous les nobles entre dix-sept et soixante ans pour les hommes, dix-sept et cinquante ans pour les femmes. On l’envoie ensuite avec Joseph François Laignelot rĂ©organiser les ports de La Rochelle et de Rochefort. Les deux hommes tentent de rĂ©organiser ces ports, arrĂȘtant les officiers qui leur paraissent suspects notamment Louis-RenĂ©-Madeleine de Latouche-TrĂ©ville.

Il se consacre avec zĂšle Ă  la dĂ©christianisation de la Charente-InfĂ©rieure, ce qui lui vaut des rĂ©primandes du ComitĂ© de salut public, averti de ses excĂšs par Sylvain Phalier Lejeune. Dans la Charente-Maritime, Lequinio Ă©tablit une commission rĂ©volutionnaire Ă  La Rochelle le [3] pour juger les 750 Ă  800[4] prisonniers vendĂ©ens enfermĂ©s dans les prisons de la ville. Selon les ordres du reprĂ©sentant en mission, la peine de mort n'est appliquĂ©e qu'aux prĂȘtres, aux bourgeois, aux nobles, aux maltĂŽtiers, aux dĂ©serteurs et aux contrebandiers, 60 sont guillotinĂ©s[3]. Les paysans et les ouvriers sont, de leur cĂŽtĂ©, condamnĂ©s aux travaux Ă  la chaĂźne[3] mais 510 meurent des Ă©pidĂ©mies[4]. À Rochefort, les reprĂ©sentants Lequinio et Laignelot instaurent en octobre un tribunal rĂ©volutionnaire pour juger les Ă©quipages de L'Apollon, du GĂ©nĂ©reux et du Pluvier, impliquĂ©s dans l'insurrection de Toulon. Le , le verdict est rendu pour les accusĂ©s des deux premiers navires : sur 34, dix sont guillotinĂ©s, deux dĂ©portĂ©s, huit emprisonnĂ©s et 14 acquittĂ©s. Le , sept membres de l'Ă©quipage du Pluvier sont condamnĂ©s Ă  mort, les six autres sont acquittĂ©s. D'autres exĂ©cutions suivent, telles celle de Gustave DechĂ©zeaux, le , puis celle du contre-amiral Ă  la retraite, Nicolas Henri de Grimouard, le [3]. Finalement, 52 personnes sont guillotinĂ©es Ă  Rochefort, dont 19 officiers de marine[5].

Lequinio arrive ensuite Ă  Fontenay-le-Comte, le . DĂšs le lendemain, il est confrontĂ© Ă  une mutinerie des 400 Ă  500 dĂ©tenus des prisons. Lequinio met fin aux troubles en abattant lui-mĂȘme d'un coup de pistolet l'un des prisonniers, deux autres sont tuĂ©s la mĂȘme journĂ©e. AussitĂŽt, le , le reprĂ©sentant en mission fait former une commission militaire qui, du au , juge 332 prisonniers et en condamne Ă  mort 192, qui sont fusillĂ©s dans les vingt-quatre heures[6] - [7].

De passage Ă  Vannes en , Joseph Lequinio contraint la population Ă  assister Ă  ses prĂȘches athĂ©es. Il s’oppose Ă  Robespierre sur la question de l‘Être suprĂȘme dans son ouvrage Les prĂ©jugĂ©s dĂ©truits, certains biographes ont interprĂ©tĂ© le rappel de Lequinio comme une disgrĂące de Robespierre[8]. Cependant, en , au nom de la libertĂ© de conscience, l'incorruptible prend sa dĂ©fense au club des jacobins, quand Jacques Brival attaque ses idĂ©es athĂ©es professĂ©es dans les prĂ©jugĂ©s dĂ©truits.

Le , Lequinio prĂ©sente un rapport devant le ComitĂ© de salut public sur la situation en VendĂ©e. Il juge indispensable de faire exĂ©cuter les prisonniers de guerre vendĂ©ens pris les armes Ă  la main, et souhaite mĂȘme que cette mesure soit Ă©galement appliquĂ©e aux soldats de la coalition, cependant, il estime que la population de la VendĂ©e est encore trop nombreuse pour ĂȘtre exterminĂ©e, il dĂ©sapprouve finalement les massacres des civils et accuse les militaires de profiter de la guerre pour s'enrichir par le pillage au lieu de combattre les rebelles[9] - [10].

AprĂšs le 9-Thermidor (), Joseph Lequinio tente de s’assurer le contrĂŽle du Club des Jacobins, puis, ayant Ă©chouĂ©, propose d’interdire aux dĂ©putĂ©s de frĂ©quenter des sociĂ©tĂ©s populaires.

Preuve s’il en est de la personnalitĂ© controversĂ©e de Lequinio, cette lettre pleine de compliments que lui adresse le Marie-Bonne RiviĂšre de la SouchĂšre, en pleine dĂ©tresse, il est vrai : "Citoyen reprĂ©sentant, Toi, qui aime tant faire le bien, et dont toutes les actions annoncent la bontĂ©, la justice et l'humanitĂ©, etc."

DĂ©noncĂ© par les habitants de Rochefort pour ses exactions et ses rapines, il se cache jusqu’à l’amnistie votĂ©e par la Convention le . Son Ă©lection au Conseil des Cinq-Cents dans le dĂ©partement du Nord en 1798 est annulĂ©e et il vit de son salaire d’inspecteur forestier Ă  Valenciennes.

ArrĂȘtĂ© quelques jours aprĂšs l’attentat de Saint-Nicaise (), il est expĂ©diĂ© par NapolĂ©on Bonaparte comme vice-consul Ă  Newport, aux États-Unis le . Son Ă©pouse, Jeanne-Odette de LĂ©vis Mirepoix, l'accompagne. Les dĂ©tails de sa vie ne sont pas trĂšs connus aux États-Unis, on sait qu'il s'occupe dĂšs 1805-1806 d'agriculture, de vignes, d'Ă©levage et de commerce des esclaves[11]. Durant cette pĂ©riode, il reprend son nom de naissance Lequinio de Kerblay.

Une controverse existe sur la date de sa mort. Des historiens ont affirmé qu'il serait revenu en France et serait mort à Sarzeau le . En réalité, les archives départementales du Morbihan[12] indiquent qu'une petite Marie-Joseph Quinio de cinq semaines est morte ce jour-là. Il a sans doute été confondu avec cette derniÚre. Aujourd'hui, on peut raisonnablement affirmer que Lequinio est mort à Egdefield (Caroline du Sud). Sa sépulture n'a jamais été localisée.

Publications

  • Joseph Lequinio,
    • Les PrĂ©jugĂ©s dĂ©truits, Paris, 9 novembre 1792.
    • Les PrĂ©jugĂ©s dĂ©truits, Paris, 1er janvier 1793 (rĂ©impression de l'ouvrage de novembre).
  • Joseph Lequinio, La Guerre de VendĂ©e et des Chouans, premiĂšre Ă©dition, Chez Pougin, imprimeur, 9 rue des PĂšres, Paris. 1er Brumaire, an 3.
  • Joseph Lequinio, La Guerre de VendĂ©e et des Chouans, Ă©dition critique par Jean Artarit, Centre vendĂ©en de recherches historiques, 2012.

Notes et références

  1. « Fiche Lequinio », sur assemblee-nationale.fr.
  2. Claudy Valin, Lequinio. La loi et le Salut public, Rennes, PUR, coll. « Histoire », 2014.
  3. Charles Berriat-Saint-Prix, La justice révolutionnaire, p. 273-285.
  4. Jacques Hussenet (dir.), « Détruisez la Vendée ! », p. 462.
  5. Jacques Péret, « Affrontements et ruptures révolutionnaires », in Jean Combes (dir.), Histoire du Poitou et des Pays charentais : Deux-SÚvres, Vienne, Charente, Charente-Maritime, Clermont-Ferrand, éditions Gérard Tisserand, 2001, p. 351.
  6. Charles Berriat-Saint-Prix, La justice révolutionnaire, p. 264-267.
  7. Jacques Hussenet (dir.), « Détruisez la Vendée ! », p. 455.
  8. Auguste Kuscinski, Dictionnaire des conventionnels, Paris, 1917, article « Lequinio ».
  9. Nicolas Delahaye et Pierre-Marie Gaborit, Les 12 Colonnes infernales de Turreau, p. 28.
  10. Joseph-Marie (1755-1812) Auteur du texte Lequinio, Guerre de la Vendée et des Chouans ([Reprod.]) / par Lequinio,..., (lire en ligne).
  11. « Histoire. J.-M. Lequinio, premier maire », sur Letelegramme.fr, Le Télégramme, 13/07/2015 00:00:00.
  12. Christine Belcikowski, « Une histoire dérangeante. Quand un buveur de sang épouse une ci-devant », sur Christine Belcikowski, (consulté le ).

Voir aussi

Bibliographie

  • Charles Berriat-Saint-Prix, La justice rĂ©volutionnaire aoĂ»t 1792 ... d'aprĂšs des documents originaux, Paris, Levy,
  • Nicolas Delahaye lien auteur1=Nicolas Delahaye et Pierre-Marie Gaborit, Les 12 Colonnes infernales de Turreau, Éditions Pays et Terroirs, , 159 p.
  • Jacques Hussenet (dir.), « DĂ©truisez la VendĂ©e ! » Regards croisĂ©s sur les victimes et destructions de la guerre de VendĂ©e, La Roche-sur-Yon, Centre vendĂ©en de recherches historiques, , 634 p.
  • Auguste Kuscinski, "Lequinio" dans Dictionnaire des Conventionnels, 1916.
  • Maurice Dommanget, "Un pionnier de la libre-pensĂ©e, Lequinio" dans la Raison, N° 4-.
  • NoĂ«l Barbe, “‘Ethnographie’ et RĂ©volution française : Lequinio de Kerblay (Sarzeau 1755-Newport 1813) et le Jura. Le discours ‘ethnographique’ comme instrument de pĂ©dagogie politique ”, Gradhiva. Revue d’histoire et archives de l’anthropologie, no 8, 1990, p. 10-16
  • NoĂ«l Barbe, « Charles Nodier/Lequinio de Kerblay, voyage romantique versus voyage des LumiĂšres. Essai d’épistĂ©mologie politique », in D. Fabre et J. –M. Privat (dir.), Savoirs romantiques, une naissance de l’ethnologie, Metz : Presses universitaires de Metz, 2010, pp. 131-164.
  • Françoise Brunel,
    • « Lequinio » dans Albert Soboul, Dictionnaire historique de la RĂ©volution française, Paris, PUF, 1989.
    • « Les dĂ©putĂ©s montagnards » dans Albert Soboul, Actes du colloque girondins-montagnards, Paris, SociĂ©tĂ© des Ă©tudes robespierristes, 1980, p. 343-361.
  • Jean-Philippe Giboury, "Lequinio" dans Dictionnaire des rĂ©gicides, Paris, Perrin, 1989.
  • Edna Hindie Le May (dir.), Dictionnaire des LĂ©gislateurs (1791-1792) (prĂ©face de Mona Ozouf), Centre international d'Ă©tudes du XVIIIe siĂšcle, 2007, 2 volumes, tome 2 : « H-Y », « Lequinio Joseph ».
  • Jean-Daniel Piquet, "Un article de Maurice Dommanget sur Lequinio, pionnier de la libre-pensĂ©e", colloque Maurice Dommanget tenu en , conseil gĂ©nĂ©ral de l'Oise, Archives dĂ©partementales de l'Oise, 1996, p. 31-8.
  • Jean-Daniel Piquet,
    • L'Émancipation des Noirs dans la pensĂ©e et le processus rĂ©volutionnaire français (1789-1795), doctorat d'Histoire Nouveau RĂ©gime, Paris VIII-Saint-Denis, .
    • L'Émancipation des Noirs dans la RĂ©volution française (1789-1795), Paris, Karthala, 2002, 509 pages.
  • Claudy Valin, Lequinio. La loi et le Salut public, Rennes, PUR, coll. « Histoire », 2014, 332 p.

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