Formule de WeizsÀcker
La formule de WeizsÀcker, appelée aussi formule de Bethe-WeizsÀcker, est une formule semi-empirique donnant une valeur approximative de l'énergie de liaison nucléaire B caractérisant la liaison entre les nucléons qui constituent le noyau des atomes (voir un résumé dans ModÚle de la goutte liquide).
Histoire
L'Ă©ponyme de formule de WeizsĂ€ckers.v.''WeizsĂ€cker_(formule_de)_1-0">[1] est le physicien allemand Carl Friedrich von WeizsĂ€cker (-) qui l'a proposĂ©e en [2] - col. 1''s.v.''WeizsĂ€cker_(formule_de)_3-0">[3] dans un article publiĂ© dans le Zeitschrift fĂŒr Physikn. 1
Expression
oĂč :
- B est l'énergie de liaison, A est le nombre de masse (ou nombre de nucléons contenus dans le noyau A = Z+N), Z est le nombre de protons ;
- est le terme de volumechap. 2,_
§ 2.9_11-0">[11] - chap. 2,_ § 2.1_12-0">[12] - chap. 2,_ § 2.2.4_13-0">[13] ; - est le terme de surfacechap. 2,_
§ 2.9_11-1">[11] - chap. 2,_ § 2.1_14-0">[14] - chap. 2,_ § 2.2.4_15-0">[15] ; - est le terme coulombienchap. 2,_
§ 2.9_11-2">[11] - chap. 2,_ § 2.1_16-0">[16] - chap. 2,_ § 2.2.4_17-0">[17] ; - est le terme d'asymétriecol. 1''s.v.''WeizsÀcker_(formule_de)_3-3">[3] - chap. 2,_
§ 2.2.4_17-1">[17] - chap. 2,_ § 2.9_18-0">[18] - chap. 2,_ § 2.1_19-0">[19] ; - est le terme de paritéchap. 2,_
§ 2.2.4_17-2">[17] ou d'appariementcol. 1''s.v.''WeizsÀcker_(formule_de)_3-4">[3] - chap. 2,_ § 2.1_20-0">[20].
Remarques :
Dans le terme coulombien, est souvent remplacé par chap. 2,_
§ 2.9_11-3">[11] - chap. 2,_ § 2.2.4_13-1">[13] - col. 2''s.v.''WeizsÀcker_(formule_de)_21-0">[21] car [22].
Dans certaines formules, le terme d'appariement varie en plutĂŽt qu'en chap. 2,_
§ 2.9_23-0">[23].
Les valeurs des constantes utilisées sont (en MeV) :
- av = 15,56
- as = 17,23
- ac = 0,7
- aa = 23,6
- ap = 11,2
Il existe différents jeux de paramÚtres pour la formule de WeizsÀcker. Le choix du jeu de paramÚtres se définit en fonction des noyaux étudiés. Ainsi certains jeux de paramÚtres donneront des énergies de liaison plus précises pour les noyaux stables tandis que d'autres jeux donneront des résultats plus satisfaisant pour les noyaux exotiques.
Cette formule permet d'expliquer avec une bonne approximation la courbe d'Aston (ci-contre), qui représente l'énergie de liaison par nucléon en fonction du nombre de nucléons dans le noyau. C'est une courbe expérimentale car chaque énergie de liaison y est calculée à partir de la masse du noyau atomique mesurée par spectrométrie de masse.
Explication des différents termes
La formule de Bethe-WeizsÀcker fait apparaitre cinq termes :
- Les deux premiers sont dus au modĂšle de la goutte liquide du noyau.
- Le troisiÚme exprime la répulsion électrostatique entre les protons.
- Les deux derniers sont d'ordre quantique.
Pour expliquer ces différents termes, il faut supposer que le noyau est sphérique, de rayon . Et comme il est compact (son volume est proportionnel au nombre de nucléons A), alors est proportionnel à .
Ănergie de volume
Pour expliquer le premier terme, on peut utiliser une analogie avec un gaz parfait pour lequel l'énergie interne est proportionnelle au nombre de particules constituant le gaz. Ainsi, on pose que cette énergie de volume est proportionnelle à A. Elle permet d'expliquer les forces nucléaires de courtes portées, et la saturation des forces nucléaires :
.
Ănergie de surface
La notion de tension de surface (ou superficielle) d'une goutte liquide peut ĂȘtre utilisĂ©e pour interprĂ©ter le second terme. Intuitivement, les nuclĂ©ons Ă la surface du noyau sont en contact avec moins de nuclĂ©ons que ceux du centre, l'Ă©nergie de liaison en est donc diminuĂ©e, Ă l'instar (sans que ce soit le mĂȘme phĂ©nomĂšne physique en jeu) de ce qu'il se passe Ă une interface liquide/gaz telle qu'une goutte d'eau dans l'air.
En introduisant comme le second terme de la formule, on prouve, en premiĂšre approximation, que la surface du noyau est proportionnelle Ă .
Pour cela, on approxime que le volume du noyau est proportionnel au nombre de nucléons. Il s'agit d'une approximation courante[24] :
Avec le rayon moyen d'un nucléon.
La surface d'une sphÚre de rayon étant , en remplaçant par son approximation, on obtient :
D'oĂč,
RĂ©pulsion Ă©lectrostatique
Les protons Ă©tant tous chargĂ©s positivement, ils se repoussent mutuellement. Cela participe Ă diminuer l'Ă©nergie de liaison par un terme de rĂ©pulsion Ă©lectrostatique . Dans une approximation grossiĂšre, le noyau peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme une sphĂšre avec une densitĂ© de charge uniforme. L'Ă©nergie potentielle d'une telle distribution de charge est donnĂ©e par :
oĂč est la charge totale, le rayon de la sphĂšre. En identifiant Ă et en prenant le rayon proportionnel Ă , on obtient la forme du terme coulombien. Cependant, la rĂ©pulsion coulombienne n'existe que lorsqu'il y a plus d'un proton ce qui induit que devient . La valeur de peut ĂȘtre calculĂ©e approximativement en utilisant l'Ă©quation ci-dessus :
L'Ă©nergie potentielle de la distribution de charge est donc :
La constante du terme de répulsion électrostatique est :
Une autre valeur de peut ĂȘtre obtenue en utilisant la constante de structure fine :
oĂč est la constante de structure fine, , le rayon du noyau avec qui vaut approximativement 1,25 femtomĂštres. Cela donne une valeur thĂ©orique de de 0,691 MeV ce qui est peu Ă©loignĂ© des valeurs mesurĂ©es.
Ănergie d'asymĂ©trie
La répulsion électrostatique étant en compétition avec l'interaction forte pour stabiliser le noyau, les noyaux lourds ont besoin d'un surplus de neutrons afin que cette interaction forte contrebalance l'effet de la répulsion électrostatique. Il y a donc une asymétrie du nombre de neutrons par rapport au nombre de protons. Cela n'a, a priori, aucun autre effet sur l'énergie de liaison que ceux qui ont été étudiés plus haut. En réalité, un effet quantique va jouer un rÎle : les nucléons se trouvent sur des niveaux d'énergie, ce qui fait qu'un surplus de neutrons va augmenter leur énergie. On obtient alors que l'effet sur l'énergie de liaison s'écrit : .
Ănergie d'appariement
Un deuxiÚme effet quantique joue un rÎle dans l'énergie de liaison : les nucléons ayant un spin demi-entier ont tendance à s'apparier deux à deux, pour se grouper préférentiellement en nombre pair. Ainsi, un nombre impair de neutrons ou de protons sera moins stable.
Une formule empirique permet de rendre compte de cet effet en ajoutant à l'énergie de liaison une énergie d'appariement (ou de parité) ayant différentes valeurs selon qu'il y a un nombre pair ou impair de nucléons, neutrons ou protons :
Les noyaux ayant un nombre pair de nuclĂ©ons, neutrons et protons sont plus stables que ceux ayant un nombre impair de nuclĂ©ons, eux-mĂȘmes plus stables que ceux ayant un nombre pair de nuclĂ©ons et impair de neutrons et protons, donc l'Ă©nergie de liaison varie en consĂ©quence.
Utilisation de la formule
Ăquation de la vallĂ©e de la stabilitĂ©
Pour un nombre de masse donné A, on s'aperçoit que la formule de Bethe-WeizsÀcker fournit une équation quadratique en fonction de la charge Z. On a ainsi :
Par définition, les noyaux stables sont définis comme étant des noyaux qui maximisent l'énergie de liaison . Ainsi en cherchant les valeurs de qui annulent la dérivée par rapport à , on peut obtenir une équation donnant les noyaux de la vallée de stabilité.
Améliorations
De nombreux modÚles ont par la suite tenter de raffiner le modÚle de la goutte liquide proposé initialement par Carl Friedrich von WeizsÀcker en introduisant de nouveaux paramÚtres afin de reproduire plus finement les masses mesurées expérimentalement.
ModĂšle de la gouttelette liquide
Ce modĂšle a Ă©tĂ© proposĂ© par William D. Myers et Wladyslaw J. Swiatecki dans les annĂ©es 1970. Il ajoute deux paramĂštres supplĂ©mentaires au modĂšle de la goutte liquide, Ă savoir la compressibilitĂ© de la matiĂšre nuclĂ©aire et lâasymĂ©trie locale proton-neutron[25].
Notes et références
- s.v.''WeizsÀcker_(formule_de)-1" class="mw-reference-text">Taillet, Villain et Febvre 2018, s.v.WeizsÀcker (formule de), p. 785-786.
- Pfalzner 2006, B.4, p. 217.
- col. 1''s.v.''WeizsÀcker_(formule_de)-3" class="mw-reference-text">Taillet, Villain et Febvre 2018, s.v.WeizsÀcker (formule de), p. 786, col. 1.
- n. 1
§ 15-4" class="mw-reference-text">Wapstra 1958, § 15, p. 26, n. 1. - WeizsÀcker 1935.
- § 15-6" class="mw-reference-text">Wapstra 1958, § 15, p. 26.
- Bethe et Bacher 1936.
- Wigner 1937.
- n. 3
§ 15-9" class="mw-reference-text">Wapstra 1958, § 15, p. 26, n. 3. - Bohr et Wheeler 1939.
- chap. 2,_
§ 2.9-11" class="mw-reference-text">Le Sech et NgÎ 2014, chap. 2, § 2.9, p. 30. - chap. 2,_
§ 2.1-12" class="mw-reference-text">Mayet 2017, chap. 2, § 2.1, p. 41, 1). - chap. 2,_
§ 2.2.4-13" class="mw-reference-text">Reuss 2003, chap. 2, § 2.2.4, p. 49. - chap. 2,_
§ 2.1-14" class="mw-reference-text">Mayet 2017, chap. 2, § 2.1, p. 42, 2). - chap. 2,_
§ 2.2.4-15" class="mw-reference-text">Reuss 2003, chap. 2, § 2.2.4, p. 49-50. - chap. 2,_
§ 2.1-16" class="mw-reference-text">Mayet 2017, chap. 2, § 2.1, p. 42, 3). - chap. 2,_
§ 2.2.4-17" class="mw-reference-text">Reuss 2003, chap. 2, § 2.2.4, p. 50. - chap. 2,_
§ 2.9-18" class="mw-reference-text">Le Sech et NgÎ 2014, chap. 2, § 2.9, p. 30-31. - chap. 2,_
§ 2.1-19" class="mw-reference-text">Mayet 2017, chap. 2, § 2.1, p. 42-43, 4). - chap. 2,_
§ 2.1-20" class="mw-reference-text">Mayet 2017, chap. 2, § 2.1, p. 43, 5). - col. 2''s.v.''WeizsÀcker_(formule_de)-21" class="mw-reference-text">Taillet, Villain et Febvre 2018, s.v.WeizsÀcker (formule de), p. 785, col. 2.
- Khater 2009.
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§ 2.9-23" class="mw-reference-text">Le Sech et NgÎ 2014, chap. 2, § 2.9, p. 31. - « Le noyau atomique », sur www.sciences-en-ligne.com (consulté le )
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Voir aussi
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Publications originales
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Dictionnaires et encyclopédies
- [Taillet, Villain et Febvre 2018] Richard Taillet, Loïc Villain et Pascal Febvre, Dictionnaire de physique, Louvain-la-Neuve, De Boeck Supérieur, hors coll., , 4e éd. (1re éd. ), 1 vol., X-956, ill., fig. et graph., 17 à 24 cm (ISBN 978-2-8073-0744-5, EAN 9782807307445, OCLC 1022951339, BNF 45646901, SUDOC 224228161, présentation en ligne, lire en ligne), s.v.WeizsÀcker (formule de), p. 785-786.
- [Wapstra 1958] (de + en) Aaldert Hendrik Wapstra, « Atomic masses of nuclides », dans Siegfried FlĂŒgge (Ă©d.), Handbuch der Physik / Encyclopedia of physics [« Encyclopedie de physique »], t. XXXVIII, 1re part. : Ăussere Eigenschaften der Atomkerne / External properties of atomic nuclei [« PropriĂ©tĂ©s externes des noyaux atomiques »], Berlin, Göttingen et Heidelberg, Springer, coll. « Kernphysik / Nuclear physics » (no 8 / 38 / 1), (rĂ©impr. ), 1re Ă©d., 1 vol., VI-471, ill., fig. et graph., 17 Ă 24,4 cm (ISBN 978-3-642-45902-3, OCLC 467895019, BNF 37353867, DOI 10.1007/978-3-642-45901-6, SUDOC 015349322, prĂ©sentation en ligne, lire en ligne), chap. 1er [« Masses atomiques des nuclĂ©ides »], p. 1-37 (OCLC 7322443398, DOI 10.1007/978-3-642-45901-6_1).
Articles connexes
Liens externes
- [Khater 2009] Antoine Khater, « Introduction à la physique nucléaire », dans Ressources numériques pédagogiques pour la licence physique, (lire en ligne), § 2.10 (« Relation empirique pour l'énergie de liaison par nucléon ») (lire en ligne).
- [Valentin n.d.] Luc Valentin, « Nucléaire (physique) : noyau atomique », dans EncyclopÊdia Universalis, n.d. (lire en ligne), § 2 (« Masse et énergie de liaison ») (lire en ligne).