Flexitarisme
Le flexitarisme (mot-valise associant flexible et vĂ©gĂ©tarisme[1]), ou semi-vĂ©gĂ©tarisme[2], est une pratique alimentaire dont la base quotidienne est vĂ©gĂ©tarienne, mais qui autorise une consommation occasionnelle de chair animale (viande, poisson, etc.)[3]. On qualifie ainsi de flexitarien une personne qui a fortement rĂ©duit sa consommation de viande sans pour autant ĂȘtre devenu vĂ©gĂ©tarien.
Origine
Cette pratique se dĂ©veloppe dans les annĂ©es 1990 aux Ătats-Unis. Le point de dĂ©part viendrait de l'action militante du journaliste Mark Bittman, inventeur du terme et auteur de nombreux ouvrages sur les consĂ©quences de la production industrielle de bĆufs et de poulets[4].
DĂ©finition
Dans son Ă©dition de 2018, le dictionnaire Robert a intĂ©grĂ© le mot « flexitarien », donnant cette dĂ©finition : « adj. et n. (anglais flexitarian, mot-valise, de flexible et vegetarian) Qui limite sa consommation de viande, sans ĂȘtre exclusivement vĂ©gĂ©tarien[5]. »
Dans une Ă©tude parue en 2019[6], le rĂ©gime dit « planĂ©taire » est dĂ©fini. Il est dĂ©crit comme une forme de rĂ©gime flexitarien : « Il sâagit dâun rĂ©gime flexitarien, essentiellement Ă base de plantes, mais pouvant Ă©ventuellement contenir de modestes quantitĂ©s de poisson, de viande et de produits laitiers. » L'objectif de ce rĂ©gime est d'allier protection de la santĂ© et de l'environnement.
Principe
Ce terme désigne la pratique alimentaire de personnes qui sont principalement végétariennes mais qui mangent occasionnellement de la viande, du poisson et d'autres « produits animaux ». Généralement, un flexitarien mange des plats végétariens ou végétaliens dans son quotidien domestique, mais s'autorise des plats incluant de la chair animale lors d'occasions particuliÚres comme au restaurant, lors de repas de famille ou chez des amis, ou encore parce que le choix de plat végétarien n'est simplement pas disponible sur le lieu de restauration[7] - [8].
Les flexitariens partagent gĂ©nĂ©ralement les prĂ©occupations des vĂ©gĂ©tariens et vĂ©gĂ©taliens, Ă savoir le souhait d'un traitement plus juste des animaux, ou des prĂ©occupations environnementales ou de santĂ©, mais ils s'y astreignent de façon plus souple[9]. Dans la pratique, beaucoup de vĂ©gĂ©tariens « permanents » s'autorisent plus ou moins d'Ă©carts avec leur rĂ©gime alimentaire suivant les circonstances, du fait de la prĂ©gnance du rĂ©gime carnĂ© dans la sociĂ©tĂ© actuelle et de la difficultĂ© Ă compenser les carences alimentaires induites. Le fait mĂȘme de tolĂ©rer la consommation des produits de la pĂȘche, dans le cas du « pesco-vĂ©gĂ©tarisme », demeure d'ailleurs un point de contention au sein du mouvement sur sa dĂ©finition exacte[10] - [11].
On peut rapprocher cette philosophie de la prescriptions religieuse qui impose de manger maigre pendant le CarĂȘme, sauf le dimanche. D'une maniĂšre analogue, un flexitarien tend Ă manger vĂ©gĂ©tarien durant la semaine ouvrĂ©e, mais s'autorise des Ă©carts lors des sorties festives, qui ont lieu gĂ©nĂ©ralement le week-end en dehors pĂ©riode de vacances. ConcrĂštement, le flexitarisme pourrait ainsi ĂȘtre comparĂ© Ă un rĂ©gime de CarĂȘme gĂ©nĂ©ralisĂ© Ă toute l'annĂ©e.
Le flexitarisme est encouragé par des initiatives à échelle mondiale comme le lundi sans viande, qui vise à sensibiliser les populations aux impacts environnementaux et sanitaires de la consommation de produits carnés. L'idée est d'inviter à réduire la consommation de viande en proposant une action simple et à la portée de tous[12] - [13].
Les 3 types de flexitarisme
- Le flexitarisme dit « total » : il s'agit d'un rĂ©gime oĂč la personne n'inclut pas de consommation de viande dans son quotidien, mise Ă part lors dâĂ©vĂ©nement particulier, comme des repas d'anniversaire ou des repas de NoĂ«l.
- Le flexitarisme dit « partiel » : il s'agit d'un régime qui inclut la consommation de viande dans son quotidien alimentaire, mais de façon modérée (ex. : 2 à 3 fois par semaine)
- Le flexitarisme dit « spécialisé » : il s'agit d'un régime qui diminue la consommation d'une viande ou une catégorie de viande en particulier (ex. : moins de viande rouge)
Pratiques alimentaires voisines
Semi-végétarismes
- Pesco-vĂ©gĂ©tarisme : rĂ©gime alimentaire excluant la chair animale sauf les produits de la pĂȘche ;
- Pollotarisme (de pollo, signifiant « poulet » en espagnol et en italien) : rĂ©gime alimentaire excluant la chair animale sauf celle de volaille et, gĂ©nĂ©ralement, des produits de la pĂȘche ;
- Pesco-pollotarisme : terme dĂ©signant prĂ©cisĂ©ment le « vĂ©gĂ©tarisme » s'autorisant Ă la fois les produits de la pĂȘche et les volailles, bien qu'il soit rare qu'un pollotarien s'interdise le poisson. Il s'agit de la limite entre vĂ©gĂ©tarisme et rĂ©gime carnĂ©.
Autres
- Régime kangatarien : pratique alimentaire originaire d'Australie dans laquelle, en plus des aliments autorisés dans un régime végétarien, la viande de kangourou est également consommée. Dans le contexte australien, la justification philosophique se trouve dans le fait que les kangourous sont considérés, à tort ou à raison, comme une espÚce nuisible et envahissante, qu'il convient de réguler par la chasse. En France, on pourrait transposer ce raisonnement à des animaux tels que le sanglier et le chevreuil.
- Régime préindustriel ou « paysan » : régimes à base de végétaux dans lesquels les produits d'origine animale ne constituent pas une grande partie de l'alimentation mais restent conceptuellement acceptable selon certaines définitions, classiquement lors d'occasions festives. Cela consiste à reprendre les anciennes habitudes alimentaires qui existaient avant que la production de masse ne démocratise la consommation réguliÚre de viande et de produits animaux transformés.
- RĂ©gime planĂ©taire : paradigmes alimentaires qui ont les objectifs suivants : nourrir une population mondiale croissante, rĂ©duire considĂ©rablement le nombre de dĂ©cĂšs dans le monde causĂ©s par une mauvaise alimentation et ĂȘtre respectueux de l'environnement afin d'empĂȘcher l'effondrement Ă©cologique.
Chair animale | Autres produits d'origine animale | |||
---|---|---|---|---|
RĂ©gime alimentaire | Poissons | Volaille | Nuisibles | |
Pesco-végétarisme | Oui | Non | Non | Oui |
Pollotarisme | Non | Oui | Non | Oui |
Pesco-pollotarisme | Oui | Oui | Non | Oui |
Kangatarisme | Non | Non | Oui | Oui |
Végétarisme | Non | Non | Non | Oui |
Reconnaissance du terme
En 2003, l'American Dialect Society a choisi le mot (anglais) flexitarian comme le néologisme le plus utile de l'année[14], le définissant comme « un végétarien qui mange occasionnellement de la viande ».
En 2018, une étude de l'université Dalhousie, menée par Sylvain Charlebois, estime que 10,2 % des Canadiens se considÚrent flexitariens[15].
En 2019, le lobby de l'Association nationale interprofessionnelle du bĂ©tail et des viandes lance une campagne marketing intitulĂ©e « Naturellement flexitariens », oĂč le sens du mot est dĂ©tournĂ©. Elle y promeut le « flexitarisme » comme une alternative aux rĂ©gimes exclusivement vĂ©gĂ©tariens[16].
Critiques
Une critique publiée par Les Inrockuptibles porte sur l'absence de définition précise du concept[17].
Dans son ouvrage Le Végétarisme et ses ennemis[18], Renan Larue développe l'histoire du végétarisme et analyse le concept de flexitarisme comme la traduction d'un malaise. Le chercheur y voit une « dissonance cognitive », soit un différentiel entre nos actes et les valeurs auxquelles on dit croire.
Notes et références
- « Comment devenir flexitarien en 7 jours », sur TopSantĂ©, : « Flexitarien est une extravagance lexicale, composĂ©e des termes "flexible" et "vĂ©gĂ©tarien". Autrement dit, le flexitarien serait un vĂ©gĂ©tarien qui s'accorde le droit de manger ponctuellement de la chair animale â ou un omnivore qui dĂ©cide d'en manger moins ».
- (en) Clare Armstrong, « Semi-Vegetarian - Vegetarianism », sur medicineonline.com, (consulté le ).
- « Le flexitarisme : lâalimentation durable pour tous », sur lepalaissavant.fr, (consultĂ© le ).
- « Demain, serons-nous tous vĂ©gĂ©tariens ? », Les Ăchos, (consultĂ© le ).
- « Les mots nouveaux », sur lerobert.com, (consulté le ).
- « RĂ©gime planĂ©taire », EAT - The Lancet,â , p. 11 (lire en ligne [PDF]).
- [radio] « Les flexitariens, ces gastronomes butineurs », sur radio-canada.ca, (consulté le ).
- Marie-Odile Briet, « VĂ©gĂ©tarien, mais pas trop », L'Express,â (lire en ligne).
- « Nouvelle pratique. Ătes-vous un flexitarien ? », sur ConsoGlobe, .
- « Végétariens, végétaliens, vegan : le point sur les différents régimes sans viande », sur madame.lefigaro.fr, (consulté le ).
- « Lexique : comprendre la galaxie végétarienne », sur Le Monde, (consulté le ).
- « Meatless Monday », sur meatlessmonday.com (consulté le ).
- « Meat Free Monday », sur meatfreemondays.com (consulté le ).
- (en) American Dialect Society, « 2003 Words of the Year », sur americandialect.org, (consulté le ).
- « Moins de viande pour plus de santĂ© », La Presse,â (lire en ligne, consultĂ© le ).
- Lise Ouangari, « "Ils sÚment le doute" : comment le lobby de la viande essaie de récupérer le "flexitarisme" », sur Ouest-France.fr, (consulté le ).
- « Flexitariens : et si on arrĂȘtait les flexiconneries ? », Les Inrockuptibles, (consultĂ© le ).
- Le Végétarisme et ses ennemis, Paris, PUF, 2015.
Annexes
Bibliographie
- Vincent Graton, Isabelle Huot et JĂ©rĂŽme Ferrer, VĂ©gĂ©tarien : parfois, souvent ou passionnĂ©ment : 120 recettes savoureuses, Ădition La Presse, , 206 p. (ISBN 9782923681610)
- (en) Dawn Jackson Blatner, The Flexitarian Diet : The Mostly Vegetarian Way to Lose Weight, Be Healthier, Prevent Disease, and Add Years to Your Life, Mcgraw-hill, , 304 p. (ISBN 978-0-07-154957-8)
- (en) Jill Hamilton, Vegetarianism, Greenhaven Press, , 104 p. (ISBN 9780737741889), A Flexitarian Diet Offers a Less Strict Option to Vegetarianism
- « Flexitarisme : qu'est-ce que c'est ? » sur futura-sciences.com