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Expédition du Challenger

L'expédition du H.M.S. Challenger fut la première grande campagne océanographique mondiale. Elle fut réalisée par une équipe de scientifiques à bord de la corvette britannique HMS Challenger entre et [1].

Le HMS Challenger.

Histoire

Planche issue des résultats de l'expédition représentant des poissons abyssaux.

LancĂ©e par l'Écossais Sir Charles Wyville Thomson (1830–1882) — de l'UniversitĂ© d'Édimbourg — la Royal Society of London obtint l'usage d'un navire de la Royal Navy, une corvette Ă  vapeur de 2 300 tonneaux avec une machine auxiliaire de 1 200 chevaux[2], le HMS Challenger, et, entre 1870 et 1872, le modifia pour le travail scientifique, l'Ă©quipant de laboratoires sĂ©parĂ©s pour l'Ă©tude de l'histoire naturelle et de la chimie, de cabines supplĂ©mentaires pour accueillir les scientifiques et d'une plateforme de dragage et chalutage. Les principaux objectifs de cette expĂ©dition Ă©taient, d’observer les propriĂ©tĂ©s physiques de l’ocĂ©an profond, d'amĂ©liorer la connaissance des reliefs sous-marins et d’étudier la rĂ©partition de la vie animale en fonction de la profondeur[3].

Le navire, commandĂ© par le capitaine George Nares, partit de Portsmouth le 21 dĂ©cembre 1872. L'expĂ©dition, Ă  l'initiative de William Benjamin Carpenter (1813-1885)[4], Ă©tait placĂ©e sous la supervision scientifique de Charles Thomson, assistĂ© de cinq autres scientifiques, dont l'Écossais Sir John Murray (1841-1914), d'un secrĂ©taire-artiste et d'un photographe[3]. Le bateau parcourut plus de 120 000 km Ă  travers les ocĂ©ans Atlantique, Austral, Indien et Pacifique[4]. Le but principal Ă©tait d'Ă©tudier les animaux pĂ©lagiques (particulièrement reprĂ©sentatifs d'anciens groupes) et enfin de comprendre la circulation des eaux ocĂ©aniques[4].

Les rĂ©sultats de l'expĂ©dition furent publiĂ©s dans un rapport scientifique (comprenant cinquante volumes) sous le titre Report of The Scientific Results of the Voyage of H.M.S. Challenger during the years 1873-76[5], qui parmi de nombreuses autres dĂ©couvertes catalogua 4 000 espèces animales inconnues. John Murray, qui supervisa la publication, dĂ©crivit ce rapport comme « la plus grande avancĂ©e dans la connaissance de notre planète depuis les cĂ©lèbres dĂ©couvertes des XVe et XVIe siècles ».

L'expédition du Challenger permit en particulier de recueillir de nombreuses données océanographiques concernant la physique des océans (ex. : température, salinité, densité de l'eau de mer). Toutefois le manque de connaissances théoriques en mécanique des fluides d'alors, ne permit pas de vérifier l'hypothèse émise par Carpenter sur le lien entre la cartographie de la température et la circulation océanique globale[6]. Après le retour du Challenger C.W. Thomson demanda à Peter Tait (1831-1901) de résoudre une épineuse et importante question : évaluer l'erreur de mesure de la température des eaux profondes engendrée par les fortes pressions auxquelles étaient soumis les thermomètres. P. Tait résolut cette question et poursuivit son travail par une étude plus fondamentale sur la compressibilité des liquides[7]. William Dittmar (1833-1892), de l'université de Glasgow établit la composition de l'eau de mer. Murray et Alphonse Renard (1842-1903) dressèrent une carte des sédiments océaniques[4].

Elle donna une idée plus précise des fonds sous-marins avec les grands bassins océaniques, découvrit la fosse des Mariannes et vérifia l'existence de la dorsale médio-Atlantique s'étendant du Sud au Nord. L'expédition découvrit aussi les champs de nodules métalliques.

Certains de ses rĂ©sultats sont dus aux 127 500 km couverts, 504 sondages en mer profonde, 133 dragages, 151 chalutages en pleine mer, 263 sĂ©ries de relevĂ©s de tempĂ©ratures de l'eau (i.e. plus de 8 000 mesures de tempĂ©rature en surface et en profondeur), environ 300 relevĂ©s de salinitĂ© et plus de 1 500 mesures de masse volumique[3] - [6]. Environ 4 717 nouvelles espèces de vie marine furent rĂ©pertoriĂ©es dont certaines Ă  plus de 5 500 mètres de profondeur[4].

Trajet

Carte montrant les divers trajets du Challenger.

Sur les 1 290 jours du voyage, le Challenger fit 727 jours de mer[3]. Le navire traversa l'Atlantique via les Canaries vers les Antilles puis remonta jusqu'Ă  Halifax en Nouvelle-Écosse. Il redescendit le long de la cote amĂ©ricaine, retraversa l'Atlantique vers les cĂ´tes africaines, repartit vers le BrĂ©sil dont il longea la cĂ´te puis traversa l'Atlantique Sud vers le Cap. Il descendit ensuite vers les mers australes, s'arrĂŞtant aux Ă®les Crozet et aux Ă®les Kerguelen (1874). Une partie de la toponymie actuelle des Kerguelen sont des noms donnĂ©s par l'expĂ©dition du Challenger. On y retrouve ainsi une vingtaine de nom de membres de l'Ă©quipage du navire. Ce dernier s'aventura ensuite plus au sud dans l'ocĂ©an Antarctique puis remonta vers la Tasmanie, l'Australie puis la Nouvelle-ZĂ©lande. Passant entre l'Ă®le du Nord et l'Ă®le du sud, il se dirigea ensuite vers les Ă®les Fidji, repartit vers l'ouest, traversa la mer de Corail, le dĂ©troit de Torres, l'IndonĂ©sie, les Philippines, franchit mer de Chine mĂ©ridionale pour atteindre Hong Kong. Il repartit vers l'est en longeant la cĂ´te nord de Nouvelle-GuinĂ©e, remonta vers les Ă®les Mariannes oĂą l'expĂ©dition dĂ©couvrit l'existence de la fosse des Mariannes (un relevĂ© Ă  plus de 8 000 mètres). Le navire prit la direction du Japon. Il fit ensuite un pĂ©riple dans le Pacifique Nord avant de descendre vers Hawaii et redescendre vers le Pacifique Sud et l'Ă®le de Pâques. Il rejoignit la cĂ´te chilienne, franchit le Cap Horn, les Malouines avant de rejoindre la cĂ´te brĂ©silienne. Il prit alors plein est, traversant la moitiĂ© de l'Atlantique sud vers Sainte-HĂ©lène avant de remonter plein nord, jusqu'aux cĂ´tes de la GuinĂ©e puis repartit de nouveau vers le milieu de l'Atlantique Nord avant de revenir vers l'Espagne puis l'Angleterre. Durant ses traversĂ©es de l'Atlantique, l'existence d'une chaine Ă©levĂ©e au milieu de l'Atlantique est confirmĂ©e[3].

Durant ces trois années, le navire perdit dix hommes, ce qui est peu pour un voyage de cette durée à cette époque sur un équipage et passagers de 243 personnes. 61 personnes désertèrent, soit pour rester en Australie (le navire ayant alors servi de transport gratuit), soit lassés par les longues journées monotones en mer de sondages et dragages.

Postérité

L'expĂ©dition du Challenger, ou le navire lui-mĂŞme, donne son nom au point ocĂ©anographique le plus profond jamais mesurĂ©, 10 923 m (mais pas par Challenger) : le Challenger Deep, situĂ© dans la fosse des Mariannes, Ă  la navette spatiale Challenger[8] et au cap Challenger dans l'archipel des Kerguelen.

Notes et références

  1. Julien Thoulet, Les deux derniers volumes des "Reports of the challenger expedition" in "Annales de Géographie", t.4, n° 17, (lire en ligne), pp. 500-506
  2. Jules Rouch, Époque contemporaine, tome IV de Histoire Universelle des Explorations publiée sous la direction de L.-H. Parias, Paris, Nouvelle Librairie de France, 1957, p. 43
  3. Aitken et Foulc 2018.
  4. Eric L. Mills, Expédition Challenger, L'Encyclopédie canadienne, .
  5. J. Murray, A.F. Renard, Report on the scientific results of the voyage of H.M.S. Challenger during the years 1873-1876: deep sea deposits, Ed. Johnson reprint corporation, New York, 1891, 525 p..
  6. Aitken et Foulc 2018.
  7. Aitken et Foulc 2018.
  8. Challenger (STA-099, OV-99), NASA, .

Voir aussi

Bibliographie

Liens externes

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