Eau virtuelle
Le concept dâeau virtuelle associe Ă quelques biens de consommation ou intermĂ©diaires la quantitĂ© dâeau nĂ©cessaire Ă leur fabrication. Il est associĂ© au concept d'empreinte eau.
Ce concept donne Ă©galement, quand il sâagit de besoins dâeau pure qui ne sera pas rĂ©utilisable ensuite sans traitement, un minorant de la quantitĂ© dâĂ©nergie nĂ©cessaire pour les produire, puisquâen rĂ©gime permanent cette eau pure ne peut provenir que dâun processus dâĂ©vaporation dont on connait la consommation en Ă©nergie.
Le concept d'eau virtuelle semble ĂȘtre l'analogue pour l'eau du concept d'Ă©nergie grise pour l'Ă©nergie.
Le concept souffre d'une méthodologie trÚs fragile qui repose énormément sur les hypothÚses moyennes de production retenues pour chaque produit, et surtout sur le risque de multiples comptabilisations de l'utilisation de l'eau à chaque étape de la production. Par exemple, dire qu'un hamburger consomme 2 400 litres d'eau virtuelle intÚgre déjà l'eau virtuelle utilisée pour la viande, le pain, la sauce, les légumes, etc C'est donc davantage une statistique militante destinée à mobiliser l'opinion qu'un outil statistique solide.
Utilisation du concept
Daniel Zimmer, directeur du Conseil mondial de lâeau et intervenant Ă la session du forum intitulĂ©e « Ăchanges et gĂ©opolitique de lâeau virtuelle », au Forum mondial de lâeau de 2003 Ă KyĆto affirme :
« Consommer un kilogramme de blĂ©, câest aussi, dans les faits, consommer le millier de litres dâeau quâil a fallu pour faire pousser cette cĂ©rĂ©ale. Manger un kilogramme de bĆuf, câest aussi consommer les 13 000 litres dâeau qui ont Ă©tĂ© nĂ©cessaires pour produire cette quantitĂ© de viande. Ce volume correspond Ă ce que nous appelons lâeau cachĂ©e, ou virtuelle. Câest parce quâils ne sont pas conscients de ce phĂ©nomĂšne que tant dâĂȘtres humains emploient cette ressource en aussi grande quantitĂ©. »
« Les diffĂ©rences dans lâutilisation de cette eau virtuelle sont frappantes dâun continent Ă lâautre. Si, en Asie, on en consomme en moyenne 1 400 litres par jour et par habitant, ce chiffre avoisine les 4 000 litres en Europe et en AmĂ©rique du Nord. Environ 70 % de lâeau utilisĂ©e par les activitĂ©s humaines sont consacrĂ©s Ă sa production alimentaire. »
« Parmi les principaux importateurs nets dâeau virtuelle, on peut citer le Sri Lanka, le Japon, les Pays-Bas, la CorĂ©e du Sud, la Chine, lâEspagne, lâĂgypte, lâAllemagne et lâItalie. »
Quelques ordres de grandeur
DâaprĂšs le Conseil mondial de l'eau[1], la quantitĂ© d'eau nĂ©cessaire pour produire divers types de nourriture varie considĂ©rablement selon le type de production :
La production d'un kg de : | utilise un volume d'eau de (litres) : |
---|---|
lait | 790 |
blé | 1 160 |
riz | 1 400 |
porc | 4 600 |
bĆuf | 13 500 |
L'eau virtuelle dans les relations internationales
L'eau virtuelle joue un rĂŽle dans les Ă©changes entre pays, notamment les Ă©changes de produits agricoles[2]. En effet, un pays dont les ressources d'eau sont faibles n'a pas intĂ©rĂȘt Ă exporter des produits, par exemple des fruits ou de la viande, dont la production requiert une grande quantitĂ© d'eau. Des pays comme la Jordanie et IsraĂ«l orientent certaines de leurs exportations en fonction de l'eau consommĂ©e. Le Conseil mondial de l'eau tente d'Ă©valuer les flux mondiaux d'eau virtuelle[1]. D'aprĂšs les calculs de Hoekstra et al. en 2003, le continent amĂ©ricain, l'Asie du Sud-Est et l'OcĂ©anie seraient les principaux exportateurs d'eau virtuelle, les importateurs les plus importants Ă©tant l'Afrique du Nord, l'Europe de l'Ouest et l'Asie centrale et du Sud.
Le choix de dĂ©velopper des cultures gourmandes ou, Ă l'inverse, Ă©conomes en eau, par exemple en vue de l'exportation, peut avoir des consĂ©quences importantes sur le plan gĂ©opolitique lorsqu'un pays occupe la partie amont d'un bassin fluvial. Les pays situĂ©s en aval recevront en effet plus ou moins d'eau selon le type de culture ou d'exploitation de ses terres que le pays en amont aura dĂ©cidĂ© d'adopter. L'idĂ©e d'eau virtuelle doit donc ĂȘtre prise en compte dans les coopĂ©rations rĂ©gionales entre pays.
En 2008, le Royaume-Uni est le sixiĂšme plus grand importateur net d'eau au monde derriĂšre le BrĂ©sil, le Mexique, le Japon, la Chine et l'Italie. Seulement 38% de la consommation totale d'eau du Royaume-Uni provient de ses propres ressources; le reste dĂ©pend des systĂšmes dâeau dâautres pays, dont certains font dĂ©jĂ face Ă de graves pĂ©nuries. Les Britanniques consomment en eau potable environ 150 litres par personne, mais ils consomment environ 30 fois plus d'eau virtuelle (4 645 litres par personne par jour), utilisĂ©e dans la production d'aliments et de textiles importĂ©s. Des quantitĂ©s Ă©normes de denrĂ©es alimentaires et de coton y sont consommĂ©s, cultivĂ©s dans les rĂ©gions les plus sĂšches du monde oĂč les ressources en eau sont dĂ©jĂ trĂšs sollicitĂ©es. Le WWF identifie lâEspagne, les pays dâAfrique du Nord, notamment lâĂgypte et le Maroc, lâAfrique du Sud, IsraĂ«l, le Pakistan et lâOuzbĂ©kistan comme les pays confrontĂ©s Ă stress hydrique aigu fournissant au Royaume-Uni des exportations substantielles en eau[3].
Le Belge dĂ©passerait ce chiffre avec 7 400 litres par personne par jour consommĂ©s, dans des produits dâimportation tels que coton, cafĂ©, soja et blĂ©[4].
Notes et références
- (en) Virtual Water Trade - Conscious Choice (E-Conference Synthesis), Conseil mondial de l'eau, , 31 p. (ISBN 92-95017-10-2, lire en ligne [PDF]), p. 4.
- La documentation française - Les échanges d'eau virtuelle via les produits agricoles, 1997-2001
- Felicity Lawrence. Revealed: the massive scale of UK's water consumption Each Briton uses 4,645 litres a day when hidden factors are included sur theguardian.com. 20 août 2008
- Le Belge consomme 7.400 litres d'eau par jour 22/03/11 Ă 11:50 - Mise Ă jour Ă 11:50 Source: Le Vif. lire en ligne
Voir aussi
Bibliographie
- Hoekstra, A.Y. (2003) (ed) â'Virtual water trade: Proceedings of the International Expert Meeting on Virtual Water Tradeâ' Value of Water Research Report Series No.12, UNESCO-IHE, Delft, the Netherlands
- Chapagain, A.K. and Hoekstra, A.Y. (2004) Water footprints of nations, Value of Water Research Report Series No.16, UNESCO-IHE, Delft, the Netherlands
- Diana Hummel, Thomas Kluge, Stefan Liehr, Miriam Hachelaf : Virtual Water Trade. Documentation of an International Expert Workshop. July 3-4, 2006. Frankfurt am Main. ISOE-Materialien Soziale Ăkologie No. 24 (2006)