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Droit archivistique en France

En France, le droit archivistique est régi par des dispositions législatives et des décrets ministériels applicable sur l'ensemble du territoire national. Depuis la Révolution française se sont succédé un grand nombre de lois et circulaires sur les archives, au fur et à mesure que l'archivistique française s'est développée. Ces textes ont été rassemblés et unifiés par la loi sur les archives promulguée en 1979, insérée en 2004 dans le code du patrimoine et remaniée par la loi du .

Le corpus juridique actuel porte sur l'ensemble des archives françaises, qu'elles soient publiques ou privées. Sont considérés comme « archives privées » les fonds d'archives ou les documents qui, par défaut, ne possèdent pas la qualité juridique d'« archives publiques », au sens de la loi du . Cette qualité est à la fois le résultat d'une histoire et la consécration d'un principe : les archives produites par l'administration publique de l'État et des collectivités - et de ses agents dans l'exercice de leurs fonctions - sont des archives publiques.

Historique

L'historique du droit des archives commence par la prise en compte par l'État royal, au moment de la réorganisation administrative de l'État imposé par la Révolution française, de la nécessité de conserver les documents des anciennes administrations supprimées par les réformes. La fin du règne de Louis XVI inaugure donc le début de l'encadrement législatif du droit archivistique français.

Les lois et décrets révolutionnaires (1789-1800)

Le législateur révolutionnaire n'a pas le souci de la conservation des archives pour elles-mêmes. L'archivistique n'en est qu'à ses balbutiements et est quasi inconnue en France. Les premières lois concernant les archives sont la conséquence pratique d'autres lois révolutionnaires : celles visant à supprimer d'anciennes institutions religieuses ou les administrations royales.

  • Par ses lettres patentes du , en consĂ©quence des dĂ©crets de l'AssemblĂ©e nationale des 7 et , Louis XVI prescrit Ă  tous les monastères et chapitres de dresser l'inventaire de leur bibliothèque et de leurs archives, puis de les dĂ©poser aux greffes des tribunaux ou municipalitĂ©s[1].
  • Le , par proclamation du roi, les administrations royales supprimĂ©es doivent remettre leurs comptes et leurs archives Ă  leurs remplaçantes[2].
  • Par la loi du , l'AssemblĂ©e nationale crĂ©e les Archives nationales pour conserver ses papiers[3].

Ces trois premières lois montrent les trois axes de la future politique des archives, à partir des trois sources d'archives concernées : les archives de l'Église de France, les archives royales, et les archives du nouveau pouvoir. Les lois et décrets suivants vont ainsi préciser, avec divers aléas, comment l'État va prendre en charge au fur et à mesure les documents liés à l'exercice des cultes, à l'histoire de l'Ancien Régime, et à celle de sa nouvelle administration.

  • Par la loi du , en consĂ©quence de la suppression des abbayes et des vĹ“ux religieux, il est dĂ©cidĂ© que les archives des Ă©tablissements religieux soient dĂ©posĂ©es aux chefs-lieux des districts (futurs arrondissements). Dans les faits, les fonds des bibliothèques monastiques forment l'origine des bibliothèques municipales : la plupart ont conservĂ© jusqu'Ă  aujourd'hui (dans leurs fonds anciens) les manuscrits mĂ©diĂ©vaux de ces Ă©tablissements. Les liasses et registres d'archives vont en ĂŞtre sĂ©parĂ©s, Ă  la faveur de la loi du 7 messidor an II.
  • Les 19 et , l'AssemblĂ©e nationale dĂ©crète la destruction des titres gĂ©nĂ©alogiques de la noblesse qui seraient conservĂ©s dans les archives rĂ©unies dans les « dĂ©pĂ´ts publics », considĂ©rant dispendieuse et inutile leur conservation par la Nation.
  • La chute de la monarchie entraĂ®na le vote du dĂ©cret du 17 juillet 1793, soumettant tous les propriĂ©taires et dĂ©tenteurs de papiers terriers et autres titres fĂ©odaux Ă  les dĂ©poser aux greffes des municipalitĂ©s, pour ĂŞtre brĂ»lĂ©s solennellement le suivant (anniversaire de l'institution de la RĂ©publique).

La première partie de la Révolution avait surtout été marquée par les suppressions institutionnelles, mais l'extinction progressive ou la conservation de plusieurs droits nécessitait la conservation de la plupart des archives, notamment comptables, d'où leur prise en charge par l'administration des arrondissements, subdivision des départements. La nécessité vint assez tôt de réorganiser la gestion matérielle de ses fonds et il fut jugé plus pratique de la confier aux nouveaux départements.

  • La loi du 7 messidor an II, demanda en premier lieu le rattachement des dĂ©pĂ´ts publics des chefs-lieux de district aux Archives de la nation. Des tris et des Ă©liminations provoquèrent alors des « dĂ©gâts irrĂ©parables » selon Victor Carrière (loi abrogĂ©e par la loi du ).
  • Puis vint la loi du 5 brumaire an V, qui ordonna de manière plus pragmatique la rĂ©union des archives au chef-lieu du dĂ©partement. Cette loi porta donc crĂ©ation des Archives dĂ©partementales, (abrogĂ©e par la loi du ).
  • Enfin, par la loi du 28 pluviĂ´se an VIII, l’État confĂ©ra Ă  ses prĂ©fets « la garde des papiers ». Les archives dĂ©partementales restèrent ainsi pendant plusieurs dĂ©cennies une administration annexe des prĂ©fectures, jusqu'Ă  la dĂ©centralisation qui transfĂ©ra cette compĂ©tence aux conseils gĂ©nĂ©raux.

La Révolution, en modifiant profondément le paysage des archives institutionnelles françaises, créa en même temps une administration centralisée pour en imaginer la destinée, en promouvoir la connaissance par le public, et en régler l'utilisation.

Les lois et décrets archivistiques (1838-1970)

La seconde période dans l'élaboration législative et ministérielle est davantage marquée par l'introduction de l'archivistique dans les moyens et les objectifs poursuivis par l'administration des archives. On pourrait la faire débuter par la création de l'École des chartes sous Louis XVIII, chargée de la formation de ceux qui vont avoir en charge les archives publiques françaises et leurs administrations centrales et départementales. Elle marque à cet égard l'affermissement de la centralisation en matière d'archives : Paris, avec les Archives nationales installées dans le Marais, est le centre de décision ; les départements sont les lieux d'exécution.

  • La première loi de cette sĂ©rie, Ă  l'initiative du ministère de l'Instruction publique, est celle du , qui avec le règlement gĂ©nĂ©ral du mettent les frais de conservation des archives Ă  la charge des dĂ©partements.
  • Les instructions ministĂ©rielles du sont importantes car elles mettent en place le cadre de classement des Archives dĂ©partementales. Ces instructions prĂ©voient la mise en ordre et le classement des archives et leur rattachement au ministère de l'intĂ©rieur (bureau des archives, rattachĂ© au ministère de l'intĂ©rieur puis Ă  l'Instruction publique). Ce bureau ne sera regroupĂ© avec les archives nationales qu'en 1897.
  • Les instructions du et du organisent le cadre de classement pour les archives communales.

La mise en place de ces cadres de classements vont permettre aux archivistes des départements de mener à bien le classement de nombreux fonds restés en cartons depuis la Révolution.

Les circulaires ministérielles se précisent en donnant un encadrement de travail, pour notamment éviter les écueils subis par les fonds des Archives nationales.

  • La circulaire du impose le classement unique et consacre en France le principe fondamental du respect des fonds.
  • Instructions ministĂ©rielles du : cadre de classement des archives hospitalières ; elles sont placĂ©es sous le contrĂ´le des directeurs des Archives dĂ©partementales.
  • Instruction du : classement des archives communales antĂ©rieures Ă  1790.
  • En 1897, crĂ©ation d'une Direction des Archives chargĂ©e des Archives nationales, dĂ©partementales, communales et hospitalières. Services particuliers :
  • Circulaire du : dĂ©placement de pièce exceptionnel.
  • Circulaire du concernant le rĂ©pertoire numĂ©rique, analyse article par article ; elle proscrit la formule de l'inventaire sommaire par Ă©chantillonnage instituĂ© en 1854.
  • ArrĂŞtĂ© ministĂ©riel du portant règlement gĂ©nĂ©ral des Archives dĂ©partementales (remplaçant celui de 1843), assimilable Ă  une charte des Archives dĂ©partementales.
  • Loi du autorisant les communes Ă  dĂ©poser leurs archives de plus de cent ans.
  • 1926 : versement obligatoire des documents centenaires des justices de paix, tribunaux de première instance et d'appel.
  • ArrĂŞtĂ© ministĂ©riel portant règlement du : règlement des archives communales.
  • Loi du : avec accord des conseils gĂ©nĂ©raux, possibilitĂ© de versements des archives notariales de plus de cent vingt-cinq ans.
  • DĂ©cret interministĂ©riel du faisant obligation aux services des administrations de l'État ayant leur siège dans le dĂ©partement de verser leurs archives aux Archives dĂ©partementales. Certains ministères et administrations publiques ne sont pas tenus de verser leurs archives aux Archives nationales :
  • 1938 : État des inventaires des Archives dĂ©partementales au . Paris, Didier, 1938.
  • Circulaire du crĂ©ant la sĂ©rie J destinĂ©e aux documents entrĂ©s par voies extraordinaires, (auparavant sĂ©rie F).
  • ArrĂŞtĂ© du et du (archives hospitalières).
  • 1945 : la Direction des archives de France a autoritĂ© sur l'ensemble des archives publiques.
  • ArrĂŞtĂ© du : fonctionnaire (avant bibliothĂ©caire ou conservateur du musĂ©e).
  • Circulaire du fixant la clĂ´ture des sĂ©ries modernes des Archives dĂ©partementales au (fin de la Troisième RĂ©publique).
  • Loi du : dĂ©pĂ´t obligatoire de certains documents pour les communes de moins de 2 000 habitants.

Nouveaux cadres juridiques (1979-aujourd'hui)

  • Loi du , intĂ©grĂ©e en 2004 au code du patrimoine, et dĂ©crets d'application du
  • Circulaire du confirmant la clĂ´ture du sauf pour les sĂ©ries E, J et Fi (et la sĂ©rie K du Journal officiel) : la cote est formĂ©e du numĂ©ro d'ordre du versement suivi de la lettre W et du numĂ©ro d'ordre de l'article dans le versement. La notion de base n'est plus la sĂ©rie mais le versement : un fonds virtuel est reprĂ©sentĂ© par la rĂ©union des bordereaux de versement provenant de la mĂŞme origine (service producteur ou dĂ©tenteur). Il est procĂ©dĂ© Ă  des Ă©liminations et des Ă©chantillonnages sur une base chronologique (une annĂ©e sur dix par exemple).
  • Instruction du ministre de la Culture du : pour les communes, clĂ´ture des sĂ©ries A Ă  S Ă  la date du et sĂ©rie continue pour les versements ultĂ©rieurs
  • Loi du art. 66, la gestion des archives dĂ©partementales est confiĂ©e au dĂ©partement, tout en continuant Ă  ĂŞtre soumise au contrĂ´le scientifique et technique de la Direction des archives de France.
  • Projet de loi sur la sociĂ©tĂ© de l'information de 2001[4] : le dĂ©lai de droit commun de communicabilitĂ© de ces documents est ramenĂ© de 30 Ă  25 ans (art. 7 et 8).
  • Loi 2008-696 du , complĂ©tĂ©e par l'ordonnance 2009-483 du , modifiant les dispositions du code du patrimoine sur les archives. DĂ©crets d'application des (ministère des affaires Ă©trangères), (ministère de la culture) et (ministère de la dĂ©fense). Cette loi crĂ©e notamment une catĂ©gorie d'archives dites « incommunicables » (qui ne pourront jamais ĂŞtre divulguĂ©es), s'agissant des documents relatifs aux armes de destruction massive, suscitant alors la protestation de nombreux chercheurs et historiens[5] - [6] - [7].
  • DĂ©cret no 2009-1393 du portant crĂ©ation de la « direction gĂ©nĂ©rale des patrimoines » au sein du ministère de la Culture : la direction des Archives de France (DAF), qui en dĂ©pend dĂ©sormais, devient le Service interministĂ©riel des Archives de France[8].

Sources et références

  1. Cf. le texte des L.P..
  2. Cf. Dalloz, Jurisprudence générale: Répertoire méthodique et alphabétique de législation, de doctrine, et de jurisprudence en matière de droit civil, commercial, criminel, administratif, de droit des gens et de droit public, Vol. 5, 1847, p. 213 q.v..
  3. Voir le document conservé aux Archives nationales (Paris)
  4. Projet de loi sur la société de l'information de 2001. Voir CNIL, Délibération no 01-018 du 3 mai 2001 portant avis sur le projet de loi sur la société de l’information (sur Légifrance).
  5. Clarisse Fabre, « Le gouvernement crée une catégorie d'archives "incommunicables" », sur lemonde.fr, (consulté le ).
  6. Sonia Combe, « Le législateur, les archives et les effets de censure », Histoire@Politique, no 6,‎ (lire en ligne, consulté le ). Via Cairn.info.
  7. Bruno Delmas et Gilles Morin, « Les archives en France. Bouleversements et controverses », Histoire@Politique, no 5,‎ (lire en ligne, consulté le ). Via Cairn.info
  8. JORF no 0265 du 15 novembre 2009, texte n° 17.

Articles connexes

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