Conférence de Durban de 2011 sur les changements climatiques
La Conférence de Durban sur les changements climatiques, d'abord tenue à Durban, Afrique du Sud[1], du 28 novembre au 9 décembre 2011[2], puis prolongée jusqu'au 11 décembre pour espérer trouver un accord[3] - [4], est la 17e Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP 17) et la 7e Réunion des Parties au Protocole de Kyoto (CMP 7).
Ă un an de l'Ă©chĂ©ance de la premiĂšre pĂ©riode d'engagements du Protocole de Kyoto, arrivant Ă Ă©chĂ©ance le 31 janvier 2012, son principal enjeu Ă©tait d'adopter un accord Ă©vitant un vide juridique entre les deux pĂ©riodes dâengagement[5]. Ă cette fin, la COP-17 devait en opĂ©ration les Accords de CancĂșn ce qui nĂ©cessitait l'entrĂ©e en vigueur et le financement rapide du Fonds vert pour le climat promis par les pays dĂ©veloppĂ©s lors de la ConfĂ©rence de Copenhague (COP-15).
COP 17 CMP 7 | ||||||||
Type | Conférence des parties | |||||||
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Ădition | 17e | |||||||
Pays | Afrique du Sud | |||||||
Organisateur | Organisation des Nations unies | |||||||
Date | au | |||||||
Participant(s) | Pays membres de la CCNUCC | |||||||
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La « DĂ©cision de Durban » reconnaĂźt que tous les pays doivent faire face de maniĂšre urgente Ă la menace grave et potentiellement irrĂ©versible des changements climatiques. Elle a permis le lancement d'une plateforme de nĂ©gociation, la « Plateforme de Durban » pour prĂ©parer un accord post-2020 incluant tous les pays et ayant force lĂ©gale[6] pour â comme le recommandait le GIEC â maintenir lâĂ©lĂ©vation de la tempĂ©rature moyenne de la planĂšte Ă moins de 2 °C ou 1,5 °C par rapport au niveau prĂ©industriel.
Pourparlers préparatoires
En amont de la ConfĂ©rence, les dĂ©lĂ©guĂ©s se sont rĂ©unis Ă trois reprises pour dĂ©terminer l'organisation des travaux et nĂ©gocier les Ă©bauches de dĂ©cisions devant ĂȘtre adoptĂ©es Ă Durban :
- les Pourparlers de Bangkok sur le climat ont rĂ©uni, du 3 au 8 avril 2011, le 14e Groupe de travail sur lâaction concertĂ©e Ă long terme (AWG-LCA-14) et le 16e Groupe de travail sur les nouveaux engagements des Parties visĂ©es Ă lâAnnexe I du Protocole de Kyoto (AWG-KP-16)[7] ;
- les Pourparlers de Bonn sur le climat, du 6 au 17 juin 2011 ont rĂ©uni les groupes de travail pour une session de reprise (AWG-LCA-14 bis, AWG-KP-16 bis) en plus de rĂ©unir les deux organes subsidiaires de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques pour la premiĂšre fois depuis la ConfĂ©rence de CancĂșn (COP-16)[8] ;
- les Pourparlers de Panama sur le climat, du 1er au 7 octobre 2011, ont réuni les groupes de travail pour une troisiÚme session de reprise (AWG-LCA-14 ter et AWG-KP-16 ter)[9].
Début des négociations
La Conférence s'est ouverte le 28 novembre 2011 à Durban, en Afrique du Sud[1]. 183 pays membres de l'ONU participent à cette conférence qui a accueilli 12 000 délégués au total. Dans son discours d'ouverture de la Conférence, le Président sud-africain Jacob Zuma a appelé les négociateurs à prendre des décisions efficaces, rappelant que « Pour beaucoup de personnes dans les pays en développement et en Afrique, le changement climatique est une question de vie ou de mort »[10].
DĂšs les dĂ©buts, la confĂ©rence a soulevĂ© du pessimisme. En effet, l'UE s'est montrĂ©e attachĂ©e lors des premiĂšres nĂ©gociations Ă perpĂ©tuer le principe du Protocole de Kyoto, considĂ©rĂ© comme dĂ©suet par les autres pays industrialisĂ©s[1]. Les Ă©cologistes ont Ă©tĂ© eux peu enthousiasmĂ©s par la confĂ©rence[11] Ă l'image du Professeur Mark Maslin, qui a dĂ©clarĂ© qu'il n'y avait« aucune raison de se rĂ©jouir » ni « rien de concret Ă espĂ©rer »[11]. Le Fonds mondial pour la nature (WWF) a dĂ©clarĂ© que « Durban sera un sommet rĂ©ussi si les pays participants sâengagent Ă dĂ©finir un accord lĂ©gal contraignant dâici 2015 »[12].
Certains représentants de pays en voie de développement ont été accusés de faire durer les négociations pour percevoir des indemnités importantes, prévues pour chaque journée de participation[13].
De plus, les experts ont estimĂ© que les Ătats-Unis ne seraient pas prĂȘts Ă prendre de grands engagements Ă cette confĂ©rence, Ă l'heure oĂč ils sont talonnĂ©s par la Chine au niveau Ă©conomique[14].
NĂ©gociations
Accord de l'AprĂšs-Kyoto
Les divergences entre les pays se sont portées sur le contenu d'un accord devant succéder au Protocole de Kyoto, qui arrive à échéance en 2012[15]. L'ONU a proposé de lier la poursuite du Protocole de Kyoto à des mécanismes de crédit CO2 et à des projets dans les pays en voie de développement[15].
L'UE a, elle, proposĂ© de mettre en place un calendrier visant Ă instaurer un cadre contraignant de rĂ©duction des Ă©missions de gaz Ă effet de serre pour lutter contre le rĂ©chauffement climatique, ce que la Chine a refusĂ©[16]. Les Ătats-Unis se sont eux aussi opposĂ©s Ă cette idĂ©e[17]. La dĂ©lĂ©gation chinoise a par ailleurs estimĂ© qu'il appartenait aux pays industrialisĂ©s d'apporter des aides financiĂšres et techniques pour l'amĂ©lioration du climat[18] et a apportĂ© son soutien aux demandes des pays en voie de dĂ©veloppement[19].
La Chine s'est dite favorable à une prolongation du Protocole de Kyoto existant, mais cette position a suscité des critiques étant donné que le pays a signé le Protocole mais n'était alors pas concerné par les réductions d'émissions de gaz à effet de serre[14]. Le Brésil s'est aussi dit attaché au Protocole de Kyoto et s'est dit préoccupé de la volonté de certains pays comme le Canada ou le Japon d'abandonner leurs engagements[20]. Les pays africains ont eux aussi insisté sur une prolongation du Protocole de Kyoto. Le président du groupe des négociateurs africains a déclaré que « les pays en développement en font plus que les pays riches. Ils ont promis de réduire leurs émissions de 5,2 gigatonnes, mais les pays développés ne se sont engagés que pour 3,8 gigatonnes.»[21]
Les Ătats insulaires se sont eux inquiĂ©tĂ©s de la lenteur d'entrĂ©e en vigueur d'un Ă©ventuel accord de l'aprĂšs-Kyoto[22], et ont demandĂ© Ă l'image des Ăźles Kiribati que cet accord possible prenne Ă©galement en compte les pays ne participant pas au Protocole de Kyoto[23].
Fonds vert
L'idĂ©e de crĂ©er un « fonds vert » destinĂ© Ă aider les pays en dĂ©veloppement Ă faire face au rĂ©chauffement climatique a Ă©tĂ© un point central de la confĂ©rence. Le projet prĂ©voit un fond dotĂ© de 100 milliards $US par an, dont l'entrĂ©e en vigueur est prĂ©vue Ă l'horizon 2020[24]. Cette idĂ©e, soutenue par les pays du sud, a en revanche rencontrĂ© l'opposition des Ătats-Unis[25]. Ban-Ki-Moon a soutenu le projet et appelĂ© les pays dĂ©veloppĂ©s Ă prendre leurs responsabilitĂ©s[26].
Piétinement des négociations
Le 6 dĂ©cembre 2011, le groupe des 77 pays en voie de dĂ©veloppement, soutenus par la Chine, a rejetĂ© un projet d'accord prĂ©sentĂ© Ă la confĂ©rence, estimant qu'il « flexibilise les mĂ©canismes pour les pays dĂ©veloppĂ©s alors quâil Ă©tablit des mesures de rĂ©glementation et de contrĂŽle plus strictes pour les nations sous- dĂ©veloppĂ©es »[27]. Le 9 dĂ©cembre, un autre projet d'accord final a Ă©tĂ© rejetĂ© par l'UE, les pays africains et les pays insulaires, qui le jugeaient insuffisant[28].
L'Afrique du Sud a alors proposĂ© de nouveaux textes, plus Ă©quilibrĂ©s, mais les nĂ©gociations se sont enlisĂ©es dans des questions de procĂ©dure[28]. Face aux divergences et Ă l'enlisement des nĂ©gociations, la confĂ©rence s'est dirigĂ©e vers un Ă©chec[28]. Des nĂ©gociateurs ont mĂȘme quittĂ© la ConfĂ©rence, dĂ©sespĂ©rant de trouver une solution[29].
Le Japon a lui annoncĂ© qu'il allait sortir du Protocole de Kyoto, justifiant cette dĂ©cision contestĂ©e en disant qu'« il n'y avait pas de raison de prolonger Kyoto tant que les Ătats-Unis et la Chine qui sont aujourd'hui les deux pays les plus pollueurs de la planĂšte ne s'associent pas Ă un accord mondial »[30]. Le Canada a fait de mĂȘme, estimant que le principe du Protocole de Kyoto « ne fonctionnait pas »[31].
Finalement, la Conférence a été prolongée dans l'espoir de trouver un accord[32].
Accord final
Un accord final a été trouvé le dimanche 11 décembre 2011, avec 36 heures de retard[33].
Le texte final prévoit[34] :
- un accord sur la poursuite du protocole de Kyoto Ă compter du 1er janvier 2013 ;
- un accord sur la mise en place d'un mécanisme de fonctionnement du futur fonds vert. Néanmoins, la question de l'alimentation du fonds n'a pas été élucidée[35] ;
- une procĂ©dure de nĂ©gociations, dite Plate-forme de Durban « Durban Platform for Enhanced Action », visant Ă Ă©laborer un engagement juridique, dont la nature prĂ©cise n'est pas encore connue, et s'appliquant Ă tous les Ătats. Cet engagement serait signĂ© en 2015 pour une entrĂ©e en vigueur en 2020[36]. Cet accord souple modulable permet Ă chaque pays d'y adhĂ©rer tout en permettant aux pays Ă©mergents le souhaitant de dĂ©marrer leurs engagements dans le cadre du futur accord post-2020, alors que les pays dĂ©veloppĂ©s contribueraient dĂšs 2013 (dans le cadre de la Convention de Rio ou dâune deuxiĂšme pĂ©riode du Protocole de Kyoto). Une seconde pĂ©riode dâengagement dans le cadre du Protocole de Kyoto est actĂ©e, avec un niveau dâambition devant ĂȘtre augmentĂ©. La nĂ©gociation n'a pas Ă©tĂ© jusqu'Ă dĂ©finir un caractĂšre contraignant ou volontaire au futur protocole. Ce nouveau rĂ©gime, qui pourrait prendre la forme d'un protocole, dâun instrument juridique ou dâun rĂ©sultat concertĂ© ayant force de loi, doit ĂȘtre achevĂ© au plus tard en 2015 et entrer en vigueur en 2020[37].
Ce texte, a minima par rapport à ce qui était attendu, est considéré par certains experts comme une déclaration d'intention plus que comme un accord[38].
Critiques
Cet accord a soulevé de nombreuses critiques.
Il n'est pas juridiquement contraignant[39], et les Ătats-Unis ont fait insĂ©rer dans le texte final une « clause de sortie » qui permet d'Ă©viter que tout nouvel accord le soit[40].
Les promesses de rĂ©ductions de gaz Ă effet de serre faites par les pays sont insuffisantes et ne couvrent au total que 60 % des efforts nĂ©cessaires pour tenir le rĂ©chauffement en dessous du seuil de 2 degrĂ©s celsius[33] d'ici Ă 2100, par rapport Ă lâĂšre prĂ©-industrielle (sommet de Copenhague). Au vu des additions des promesses des diffĂ©rents pays, il se dirigerait vers une hausse de 3,5 degrĂ©s[41]. Le financement du futur fonds vert est pour le moment trĂšs hypothĂ©tique[41].
Le Canada a Ă©tĂ© trĂšs critiquĂ© pour ĂȘtre sorti du Protocole de Kyoto, notamment par la Chine, l'Inde et l'Union europĂ©enne[42]. Le premier ministre canadien Stephen Harper a dĂ©clarĂ© qu'entrer dans le Protocole de Kyoto avait Ă©tĂ© une erreur pour le Canada[40].
RĂ©actions
Gouvernements
Les rĂ©actions au sein des gouvernements ont Ă©tĂ© trĂšs diverses : Les Ătats-Unis et l'Inde, pays les plus rĂ©ticents Ă des engagements internationaux, se sont dĂ©clarĂ©s satisfaits par cet accord[33]. La Chine s'est aussi dĂ©clarĂ©e satisfaite, estimant que « la confĂ©rence a amenĂ© Ă des dĂ©cisions sur les arrangements de la seconde pĂ©riode de mise en application du Protocole de Kyoto, qui constitue la question la plus prĂ©occupante pour les pays en dĂ©veloppement »[43].
La commissaire européenne pour le climat Connie Hedegaard a elle déclaré que « l'essentiel est que toutes les grandes économies, toutes les parties en présence se sont légalement engagées sur l'avenir »[33]. Ban-Ki-Moon a qualifié l'accord de significatif[44].
Le gouvernement des Iles Tuvalu, menacĂ©es par le rĂ©chauffement climatique, a lui implicitement dĂ©clarĂ© n'ĂȘtre pas satisfait par l'accord, car selon lui, « la communautĂ© internationale devrait prendre des dĂ©cisions importantes contre le rĂ©chauffement climatique maintenant, pas demain ni en 2015.»[45]
Partis politiques et ONG
Les ONG écologistes ont généralement mal accueilli les résultats de la Conférence de Durban. Greenpeace a estimé qu'avec cet accord, « les pollueurs avaient gagné, les peuples avaient perdu »[46]. L'ONG « Les Amis de la Terre » a estimé que l'accord de Durban avait « touché le fond » et constituait « une ruse pour détourner l'attention du monde de l'échec des pays développés à respecter les engagements existants de réduire leurs émissions »[47].
Oxfam a dĂ©clarĂ© qu'« on peut rĂ©sumer Durban Ă une Ă©norme dĂ©ception, dont la faute (...) pĂšse directement sur les Ă©paules des Ătats-Unis et d'autres pays (...) » [48].
Corinne Lepage a qualifié l'accord de Durban d'« accord de façade »[49]. La candidate écologiste française à l'élection présidentielle Eva Joly a elle estimé que l'« accord représentait l'échec collectif des dirigeants mondiaux »[50].
Le Parti vert Néo-Zélandais a estimé que l'accord était un « mécanisme diplomatique (...) qui ne réduira pas les émissions de gaz à effet de serre. »[51]
Suites
La ConfĂ©rence suivante est la 18e ConfĂ©rence des Parties de la Convention Cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), Ă Doha (Qatar), du 26 novembre au 7 dĂ©cembre 2012, Ă©tape-charniĂšre entre la premiĂšre pĂ©riode dâengagement du Protocole de Kyoto et la fin de la nĂ©gociation pour 2012-2020 et la prĂ©paration dâun futur accord post-2020.
Notes et références
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- (en) United Nations Framework Convention on Climate Change - Calendar
- « Nouvelle nuit incertaine aux négociations marathon de Durban », sur Cyberpresse.ca (consulté le )
- (en) « Calendar », sur UN Framework Convention on Climate Change (consulté le )
- Objectif Terre, En profondeur
- « Decides that the Ad Hoc Working Group on the Durban Platform for Enhanced Action shall complete its work as early as possible but no later than 2015 in order to adopt this protocol, legal instrument or agreed outcome with legal force at the twenty-first session of the Conference of the Parties and for it to come into effect and be implemented from 2020 »
- Objectif Terre, vol. 13, n°2
- Objectif Terre, vol. 13, n° 3
- Objectif Terre, vol. 13, n°4
- « Conférence sur le climat à Durban: appel pressant des pays les plus vulnérables », sur L'internaute, (consulté le )
- « Durban, la confĂ©rence qui ne fait pas rĂȘver les Ă©cologistes », (consultĂ© le )
- « Blog 1: et c'est parti! », sur WWF,
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- « De retour de Durban, des leçons à tirer derriÚre un accord de façade », sur Rue89 (consulté le )
- « Pour Joly, Durban représente "l'échec collectif des dirigeants mondiaux" », sur Le Point, (consulté le )
- http://www.scoop.co.nz/stories/PA1112/S00085/durban-agreement-not-enough-to-stop-climate-change.htm
Voir aussi
Articles connexes
- Organisation des Nations unies
- Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques
- Protocole de Kyoto
- Conférence des parties
- Convention sur la diversité biologique
- Conférence des Nations unies sur l'environnement et le développement
- Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification
- Convention internationale
- Participation de la Francophonie à la 18e Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (IEPF)