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Cartographie systématique

La cartographie systĂ©matique est une « mĂ©thode de collecte, d’évaluation et de synthĂšse des connaissances scientifiques et techniques qui s’est dĂ©veloppĂ©e initialement dans le domaine des sciences mĂ©dicales, puis des sciences sociales, puis celles de l'environnement »[1]. Elle s'appuie notamment sur les revues systĂ©matiques.

Dans un monde touchĂ© par de grandes crises globales (climatique et de biodiversitĂ© notamment) et oĂč la science Ă©volue rapidement, ces cartographies sont des « reprĂ©sentations du paysage de la connaissance en rĂ©ponse Ă  une question ou une problĂ©matique trĂšs large. Elles rĂ©pondent Ă  des questions qui s’apparentent Ă  celles des revues systĂ©matiques dans leur structuration (PICO/ PECO). Elles ont pour objectif de mettre en Ă©vidence la rĂ©partition des connaissances selon des critĂšres explicites (mĂ©tadonnĂ©es) »[2].
Ce type d'Ă©tude produit de plus en plus les « Evidence bases »[3] - [4] sur lesquelles s’appuient (ou non) les dĂ©cideurs[5] - [6].

MĂ©thode scientifique d'Ă©valuation de la connaissance

Des institutions (scientifiques et médicales notamment) ont des besoins périodiques de mise à jour de l'évolution des savoirs dans leur domaine, notamment pour répondre à des questions émergentes ou parfois pour remettre en question des paradigmes scientifiques que des études récentes semblent infirmer.

Les dĂ©cideurs et les politiques publiques doivent pouvoir appuyer leurs choix sur une connaissance mise Ă  jour, or la connaissance Ă©volue de plus en plus rapidement, et dans certains domaines elle est particuliĂšrement complexe et doit ĂȘtre vulgarisĂ©e pour les dĂ©cideurs et le public[7].

Outre les techniques de relectures par les pairs, de conférences de consensus, et de revues d'études (méta-analyse) elles peuvent s'appuyer sur des cartographies systématiques des connaissances pour ce faire. L'ensemble de ces techniques permet de mieux détecter et minimiser les biais pour produire des informations complÚtes, mises à jour et objectivées.

Les revues systématiques joignent généralement deux types d'approches :

  • Analyses plutĂŽt quantitatives (mĂ©ta-analyses, modĂ©lisations, etc.)
  • analyses qualitatives et narratives, visant Ă  dĂ©crire le paysage du savoir sur un thĂšme Ă  un moment donnĂ©.

Elles sont facilitées par l'utilisation de l'anglais comme langue de référence pour la recherche, par la généralisation de l'usage de mots-clé et par les moteurs de recherches et un nombre croissant d'études randomisées[8], d'études publiées en open-source et de revues d'études (quand elles existent dans le domaine concerné), mais tous ces éléments peuvent encore contenir ou induire certains biais.
Les documentalistes et spécialistes de la fouille dans le big data apportent également une aide importante à ceux qui font ce travail.
Dans certains domaines (ex : militaire, industriel, financier...ou mĂ©dical), le secret, la confidentialitĂ©/anonymisation sont respectivement deux sources de biais ou de non-accĂšs ou d'accĂšs retardĂ© Ă  certains savoirs (Dans certains domaines, une partie de cette information "grise" peut ĂȘtre nĂ©anmoins rĂ©cupĂ©rĂ©e par l'analyse de base de donnĂ©es de brevets, par exemple pour le domaine de l'Ă©nergie[9]).

Dans certains domaines le travail est nécessairement pluridisciplinaire ; il doit alors réunir des équipes d'experts et de documentalistes spécialisés dans leurs domaines respectifs pour exploiter plusieurs bases de données disciplinaires[2].

Initier la cartographie systĂ©matique d'un sujet est un travail lourd en termes de temps et de ressources financiĂšres, scientifiques et humaines. Cela nĂ©cessite en outre d'avoir accĂšs aux articles sĂ©lectionnĂ©s par la revue bibliographique (en contactant les auteurs d'articles scientifiques, via des prĂȘts inter-bibliothĂšques, des accĂšs particuliers Ă  certaines bases de donnĂ©es, parfois plus facile pour des documentalistes que pour les chercheurs eux-mĂȘmes[2].
Une fois que – grĂące Ă  une premiĂšre Ă©tude - le pĂ©rimĂštre du travail a Ă©tĂ© bien cernĂ© et balayĂ©, et ainsi structurĂ© ; ces Ă©tudes sont ensuite plus facile Ă  mettre Ă  jour au fur et Ă  mesure de l’apparition de nouvelles connaissances[2].

Pour des raisons scientifiques de transparence, de crĂ©dibilitĂ© et de rĂ©plicabilitĂ© et pour faciliter les futures mises Ă  jour « les documentalistes rĂ©digent les dĂ©tails de leurs recherches bibliographiques »[2]. Ces dĂ©tails deviennent des mĂ©tadonnĂ©es qui sont intĂ©grĂ©s dans les « livrables » de la revue systĂ©matique. Les documentalistes peuvent alors ĂȘtre citĂ©s en tant que « co-auteurs des revues et cartographies systĂ©matiques »[2]. L'archivage pĂ©renne (et Ă©ventuellement ouvert) du travail fini est Ă©galement un enjeu important pour sa valorisation immĂ©diate et future[2].

Certains auteurs comme Van Kammen & al. (2006) promeuvent un "courtage de connaissances" (Knowledge brokering) comme moyen de répondre aux lacunes de savoir [10] via un nouveau métier d'intermédiateur (Knowledge broker).

Objectifs

Le paysage dressĂ© par la "cartographie systĂ©matique" s'appuie sur une revue systĂ©matique qui cherche Ă  prendre en compte toutes la connaissance disponible sur un sujet prĂ©cis (au moment oĂč elles se font) pour rĂ©pondre Ă  un besoin de savoir et savoir-faire prĂ©sentĂ© sous forme d’une question claire et structurĂ©e en Ă©lĂ©ments prĂ©cis.

Ces revues puis les "cartographies" servent gĂ©nĂ©ralement Ă  appuyer un choix en fournissant aux dĂ©cideurs des arguments Ă©tayĂ©s montrent l’existence de faits avĂ©rĂ©s ou, au contraire de niveaux d’incertitudes ou de lacunes de connaissances (permettant d'orienter ou rĂ©orienter des prioritĂ©s d'action et de recherche).

Dans des domaines trÚs complexes comme la médecine, et plus encore dans ceux du climat et la biodiversité une grande diversité de méthodes d'analyses, de travail, d'échelles spatiales et temporelles et de modélisations, ainsi que l'importance du flux d'études nouvelles rend tout travail de synthÚse difficile.

Formations

La méthode scientifique (enseignée de maniÚre plus ou moins poussée dans les universités et grandes écoles) apporte les bases de ces méthodes.

En Europe, certains organismes ont une accrĂ©ditation pour produire des formations aux mĂ©thodes de la cartographie systĂ©matique (c'est par exemple le cas en France de la FRB qui a Ă©tĂ© dĂ©signĂ©e Centre français de la Collaboration for Environmental Evidence[11] - [1]). Le CESAB est aussi « Centre d’analyse et de synthĂšse »).

Utilisations

Certaines Ă©tudes montrent que les revues systĂ©matiques disponibles pour les dĂ©cideurs ne sont pas toujours suivies d'effets Ă  court ou moyen termes ; des lobbies politiques et industriels notamment peuvent (pour dĂ©fendre leurs intĂ©rĂȘts acquis, perçus et/ou rĂ©els) freiner la bonne rĂ©alisation ou utilisation de revues d'Ă©tude par exemple en limitant l'accĂšs Ă  leurs donnĂ©es ou en orientant les Ă©tudes par exemple dans le domaine des Ă©nergies fossiles, du mĂ©dicament, du tabac, des pesticides, de la pĂȘche (halieutique), de l'agriculture, du climat et de la biodiversitĂ© en particulier[12]; et les rĂ©sultats et solutions proposĂ©es par les scientifiques sont parfois complexes et difficiles Ă  comprendre, notamment en raison des acronymes et jargons utilisĂ©s.
Pour répondre à ce problÚme, des « résumés pour les décideurs » et les médias sont parfois produits (par le GIEC notamment)[12].

Notes et références

  1. La FRB centre français de la Collaboration for Environmental Evidence
  2. "Si la revue ou la cartographie couvre diffĂ©rentes disciples il sera sans doute nĂ©cessaire de faire appel Ă  plusieurs documentalistes", in Revues systĂ©matiques ; Participation d’experts : l’appui prĂ©cieux des documentalistes, FRB
  3. Gray J.M (2004) Evidence based policy making.
  4. Sanderson I (2002). Evaluation, policy learning and evidence‐based policy making. Public administration, 80(1), 1-22.
  5. Laurent C & al. (2009). Pourquoi s’intĂ©resser Ă  la notion d’Evidence based policy ?
  6. Pullin A.S (2015) Why is the evidence base for effectiveness of win-win interventions to benefit humans and biodiversity so poor ? Environmental Evidence Journal 4: 19 DOI 10.1186/s13750-015-0045-4
  7. Laurent C, Labarthe P, Trouvé A, Berriet-Solliec M & Bonnafous P (2009, December). Les connaissances scientifiques, une ressource de plus en plus rare pour la décision publique ?. In Forum de la régulation: défis analytiques posés en économie par les crises et les problÚmes de régulation, Paris, FRA, 2009-12-01-2009-12-02
  8. Labrousse A (2010) Nouvelle Ă©conomie du dĂ©veloppement et essais cliniques randomisĂ©s: une mise en perspective d’un outil de preuve et de gouvernement. Revue de la rĂ©gulation. Capitalisme, institutions, pouvoirs.
  9. Johnstone N, Haơčič I & Popp D (2010). Renewable energy policies and technological innovation: evidence based on patent counts. Environmental and resource economics, 45(1), 133-155.
  10. Van Kammen, J., de Savigny, D., & Sewankambo, N. (2006). Using knowledge brokering to promote evidence-based policy-making: the need for support structures. Bulletin of the World Health Organization, 84(8), 608-612.
  11. www.environmentalevidence.org
  12. Likens G.E (2010). The role of science in decision making : does evidence‐based science drive environmental policy ?. Frontiers in Ecology and the Environment, 8(6) | rĂ©sumĂ©.

Articles connexes

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