Breton léonard
Le breton lĂ©onard est le dialecte du breton qui se parle dans le LĂ©on, c'est-Ă -dire le nord-ouest du FinistĂšre. Il se divise en de multiples parlers locaux, eux-mĂȘmes traditionnellement regroupĂ©s en deux aires, Ă lâouest le breton du Bas LĂ©on, Ă lâest celui du Haut LĂ©on.
Breton léonard Brezhoneg Leon | |
Pays | Bretagne |
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RĂ©gion | Leon |
Nombre de locuteurs | environ 33 000 en 2007[1] |
Typologie | V2, flexionnelle, accusative, à accent d'intensité |
Classification par famille | |
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Codes de langue | |
Linguasphere | 50-ABB-bc
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Dialectologie
Le LĂ©on se trouve au cĆur d'une zone dialectale qui s'Ă©tend grosso modo au nord ouest d'une ligne Pontrieux ChĂąteaulin, le nord ouest de la Basse Bretagne, et ignore la mĂ©tathĂšse fixĂ©e au XVe siĂšcle nal < lan (v.g. banal « genĂȘt » en lĂ©onard et trĂ©gorrois Ă cĂŽtĂ© de balan en cornouaillais et vannetais, ce qui correspond au gallois banadl et au cornique banadhel)[2]. Le lĂ©onard est qualifiĂ© de dialecte conservateur.
Les isoglosses dialectales montrent une influence du français, qui se diffuse depuis le sud est, plus ou moins profonde vers le LĂ©on[3]. Il y a ainsi un continuum linguistique dans toute la Bretagne bretonnante, et pas de frontiĂšres fixes dans l'espace ni dans le temps entre les diffĂ©rents dialectes du breton. Ă l'est, vers Morlaix, le lĂ©onard a parfois des ressemblances avec le trĂ©gorois, au sud, en s'approchant de l'Ălorn, avec le cornouaillais, sans que de telles ressemblances ne suivent toujours une seule logique gĂ©ographique[4]. Cependant, par-dessus une riviĂšre comme le Dossen qui sĂ©pare LĂ©on et TrĂ©gor par exemple, les locuteurs savent parfaitement reconnaĂźtre, dans une conversation qui les rĂ©unit, Ă quel canton chacun appartient et quel dialecte il utilise[2].
Il en est de mĂȘme entre deux cantons[5] Ă l'intĂ©rieur du LĂ©on, par exemple entre le parler de TaulĂ© et celui de PlouĂ©nan. Les parlers du Bas LĂ©on, Ă l'extrĂȘme ouest, se distinguent principalement de ceux du Haut LĂ©on, Ă l'est du LĂ©on, par la palatisation des gutturales devant les voyelles fermĂ©es[6]. Ainsi « herbe » se dit geot en Bas LĂ©on, yeot en Haut LĂ©on[6].
Le léonard est l'ensemble des caractéristiques communes à ces seuls parlers de ces deux aires. Il montre une relative plus grande homogénéité[5].
Exemple comparatif
- Français : « Je lui avais dit de venir. ».
- Cornouaillais : « Lart ma daon dont. »
- Trégorrois : « Laret moa d'ean don. »
- Léonard : « Lavaret am eus d'ezan dont. »[7]
Un breton littéraire
Traditionnellement, le LĂ©on est la « terre des prĂȘtres ». Nombre des prĂȘtres qui officiaient en Basse Bretagne puis une quantitĂ© impressionnante de missionnaires Ă©taient formĂ©s au sĂ©minaire de Saint-Pol-de-LĂ©on, capitale de l'Ă©vĂȘchĂ© de LĂ©on qui Ă©tait, pour des raisons historiques particuliĂšres, une Ă©manation directe de la Curie. Un grand nombre des ouvrages de religion y Ă©taient composĂ©s, en lĂ©onard. Le lĂ©onard a ainsi pris un ascendant sur le breton littĂ©raire (hors vannetais) Ă cĂŽtĂ© du trĂ©gorrois, qui a Ă©galement une tradition Ă©crite importante.
Ce fait a été accentué par les travaux de Jean-François Le Gonidec (1775-1838), "reizher ar brezhoneg" (le codificateur de la langue), qui basa ses études linguistiques, lexicographiques et sa réforme orthographique principalement sur le breton de sa région, et qui eurent un impact fort sur le breton littéraire, ceci jusqu'à nos jours.
Morphologie du léonard
- La terminaison des verbes au prĂ©sent de lâindicatif et de lâimpĂ©ratif 2e personne du pluriel est âit (lĂ oĂč ailleurs en Bretagne on dit âet)
- Par suite de la subsistance de v et du z intervocaliques, de nombreux verbes conservent une forme longue, lĂ oĂč lâon a des formes syncopĂ©es dans les autres parlers : lavarout (lĂąret hors du LĂ©on), en devezo (en do), am bezo (am bo), a vezo (a vo), ankounacâhaat (ankouaat, ankoueshaat)âŠ
- Les infinitifs en -out sont généralement développés en -vezout. Ainsi : talvezout, falvezout contre talvout, fallout
- On utilise des formes anciennes du verbe ĂȘtre ez eus « il y a » et edo « se trouver » (au passĂ©) lĂ oĂč elles ont Ă©tĂ© remplacĂ©es par dâautres formes (zo et e oa respectivement) dans la majoritĂ© des autres parlers.
- Lâadjectif possessif 1re personne du singulier (mon, ma, mes en français) est souvent va (forme mutĂ©e de ma dans les autres dialectes)
- La terminaison 2e personne du sing. des prĂ©positions « conjuguĂ©es » (voir plus loin) est souvent âez en LĂ©on (qui est une terminaison verbale Ă lâorigine ; les autres dialectes utilisent en gĂ©nĂ©ral âit pour ces prĂ©positions)
- La terminaison 3e personne du pl. des prĂ©positions conjuguĂ©es est âo en LĂ©on (lĂ oĂč lâon a âe pour les autres dialectes).
- Les pluriels internes sont nombreux : azen « Ăąne » > ezen, oan « agneau » > einâŠ
Syntaxe du léonard
Le systĂšme des mutations est celui du breton classique ou littĂ©raire (car ce dernier est surtout basĂ© sur le breton du LĂ©on Ă lâorigine), on le trouve ainsi dans tous les livres dâapprentissage du breton.
- le possessif az est suivi parfois de la mutation adoucissante (au lieu de la durcissante en breton classique)
- les particules verbales sont rarement élidées
- devant les formes du verbe bezañ « ĂȘtre » et du verbe mont « aller » commençant par une voyelle, les particules verbales « a » et « e » prennent les formes « ay » et « ez » respectivement.
- Hennezh ay oa bras. Da va bro ez an.
- on utilise parfois les adjectifs possessifs comme pronoms personnels COD (câest aussi le cas en vannetais, mais pas dans les autres dialectes); cet emploi est dominant devant le nom verbal (« infinitif »).
- le son câh issu de la mutation de g est diffĂ©rent de celui issu de la mutation de k. Le premier est sonore et se prononce /ÉŁ/, le second est sourd: /Ï/.
Phonologie du léonard
- Lâancienne diphtongue Ă©crite aujourdâhui <ao> se prononce /aw/ en LĂ©on : ur paotr /ËĄĆr pawtr/.
- Les e accentuĂ©s sont souvent diphtonguĂ©s en /ea/ en LĂ©on. KĂȘr /ËĄkear/
- La diphtongue historique <we> devient /oa/ (deux syllabes) : koad /ËĄkoat/, bezâ ez oa /ËĄbed ez ËĄoa/âŠ
- Les /o/ sont fermĂ©s en /u/ devant les nasales et parfois devant l et r. Don /ËĄdu:n/, brezhoneg /breËĄzunÉk/, dorn /ËĄdurn/âŠ
- Les anciennes voyelles nasales Ă©crites <añ> et < iñ > sont dĂ©nasalisĂ©es en LĂ©on, sauf parfois pour les prĂ©positions conjuguĂ©es : diwezhañ /diËĄveËza/, gwerzhañ /gÞ˥Érza/, mais gantañ, souvent /ËĄgÉÍntÉÍ/.
- Le <w> prĂ©cĂ©dant i ou e se prononce /v/. Ar wezenn /ar ËĄveËzÉn/
- Les « z lĂ©onards » (z issus de lâĂ©volution dâun /Ă°/ historique) sont prononcĂ©s. Nevez /ËĄneËvÉs/
- Les h Ă©tymologiques ne sâentendent jamais en LĂ©on. Hadañ /ËĄaËda/
- Le <câh> est prononcĂ© comme une rude fricative uvulaire sourde. Câhoari /ËĄÏwaËri/
- Les terminaisons pluriel <toĂč>, <doĂč> deviennent /Êu/ et /Êu/ respectivement. PontoĂč /ËĄpuÍËÊu/, koadoĂč /ËĄkwaËÊu/
- Les <z> et <zh> prĂ©cĂ©dant un < i > se prononcent souvent /Ê/. Gwrizienn /ËĄgriËÊÉn/
- En Haut-Léon, on observe une contamination vocalique dans certains mots : leveret (<lavaret), diskiñ (<deskiñ), livirit (<lavarit)
- De nombreux verbes montrent une mĂ©tathĂšse dans leur nom verbal : dalcâh- > nom verbal dercâhel, taol- > nom verbal teurelâŠ
- Les r sont généralement roulés.
- La suite <gwr> se prononce /gr/ en LĂ©on. Gwreg /grÉk/
Bibliographie
- MADEG Mikael, KentelioĂč distagadur brezhoneg Bro-Leon [Leçons de prononciation du breton du LĂ©on], Nadoz-Vor EmbannadurioĂč, Brest, 2020. (ISBN 9791093241067)
Notes
Sources
- « Parler breton au XXIe siÚcle : les chiffres-clés », sur www.langue-bretonne.com (consulté le )
- F. Gourvil, Langue et littérature bretonnes, Que sais-je ? n° 527, p. 97-98, PUF, Paris, 1976.
- F. Falc'hun, La dialectologie bretonne : problÚmes, méthodes et résultats., Institut de linguistique de la Faculté des lettres de Paris, 1956;
- F. Gourvil, Langue et littérature bretonnes, Que sais-je ? n° 527, p. 101, PUF, Paris, 1976.
- F. Gourvil, Langue et littérature bretonnes, Que sais-je ? n° 527, p. 98, PUF, Paris, 1976.
- F. Gourvil, Langue et littérature bretonnes, Que sais-je ? n° 527, p. 103, PUF, Paris, 1976.
- L.Priser, Une PoignĂ©e d'ajoncs, p. 67-68, Ăditions universitaires, Paris, 1984 (ISBN 2-7113-0259-8)