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Bernard Erasme von Deroy

Bernard Erasme von Deroy, né le à Mannheim en Palatinat du Rhin et mort le à Polotsk en Russie, est un général de division bavarois du Premier Empire. Issu d'une famille de militaires, Deroy fut admis très jeune en tant qu'officier au sein de l'armée, peu après le déclenchement de la guerre de Sept Ans. Il obtint par la suite tous les grades jusqu'à celui de général peu avant le début des guerres de la Révolution française. Servant d'abord dans les rangs de la Coalition, il défendit sa ville natale de Mannheim contre les troupes françaises jusqu'à sa reddition en 1795, puis combattit de nouveau comme allié de l'Autriche en 1800 à la tête d'une brigade bavaroise.

Bernard Erasme von Deroy
Bernard Erasme von Deroy
Le général Bernard Erasme von Deroy. Lithographie de Franz Hanfstaengl, 1829.

Naissance
Mannheim, Palatinat du Rhin
Décès
Polotsk, Russie
Mort au combat
Origine Bavarois
Allégeance Drapeau du Royaume de Bavière Royaume de Bavière
Arme Infanterie
Grade Général de division
Années de service 1750 – 1812
Conflits Guerre de Sept Ans
Guerres de la Révolution française
Guerres napoléoniennes
Faits d'armes Bataille de Hohenlinden
Bataille d'Abensberg
Bataille de Wörgl
Première bataille de Bergisel
Deuxième bataille de Bergisel
Troisième bataille de Bergisel
Première bataille de Polotsk
Distinctions Comte de l'Empire
Grand-croix de la LĂ©gion d'honneur
Grand-croix de l'ordre militaire de Maximilien-Joseph de Bavière
Autres fonctions Conseiller d'État

Lorsque Napoléon fut couronné empereur des Français, la Bavière s'était rangée du côté de la France et Deroy dirigea une division avec compétence lors des guerres napoléoniennes. Il prit part aux campagnes de 1805 à 1807 en Allemagne et en Pologne, contribua à réprimer l'insurrection du Tyrol en 1809 et participa en 1812 à la campagne de Russie, au cours de laquelle il fut mortellement blessé le à la bataille de Polotsk. Deroy et son homologue Carl Philipp von Wrede sont parfois considérés comme les meilleurs généraux bavarois de l'époque.

Biographie

Jeunesse et carrière militaire

Bernard Erasme von Deroy naquit le à Mannheim, dans l'électorat de Palatinat[1], du mariage de Matthaüs Wilhelm Bertram de Roye, général, et de Christina Hofstatt. Son père était le représentant d'une lignée de militaires qui, en un siècle et demi, avait donné six généraux et plusieurs colonels. La famille de Roye de Wichen était originaire de Picardie et son existence remontait au XIIIe siècle. D'abord installée dans les Pays-Bas, elle avait dû quitter cette région au XVIe siècle à cause de sa fidélité à la foi catholique, mal perçue dans le contexte de la Réforme, et s'était alors fixée dans le Palatinat où plusieurs de ses membres étaient entrés au service de l'électeur. Le père de Deroy, en récompense de sa valeur à la tête des armées palatines, fut admis au sein de la noblesse impériale allemande le [2].

Le jeune Deroy embrassa la carrière militaire dès l’âge de sept ans, en entrant comme enseigne dans le régiment du comte palatin commandé par le duc Charles II Auguste de Palatinat-Deux-Ponts. Il participa à la guerre de Sept Ans et notamment à la bataille de Rossbach en 1757. Promu lieutenant en 1761, il devint capitaine en 1763 à la suite de la paix de Hubertusbourg puis commanda une compagnie de grenadiers à partir de 1774. Il fut ensuite nommé major de son régiment avant d'être transféré au régiment d'infanterie de Rodenhausen avec le grade de lieutenant-colonel en 1784. En 1787, il fut fait colonel commandant du régiment de Deux-Ponts, son ancienne unité, qui fut transformé la même année en 1er régiment d'infanterie bavarois. Deroy se fit alors remarquer comme un officier dévoué et efficace[3].

Parcours durant les guerres de la Révolution française

Il fut Ă©levĂ© au grade de gĂ©nĂ©ral-major en 1794. La mĂŞme annĂ©e, il fut nommĂ© commandant militaire de Mannheim auprès du gouverneur baron von Belderbusch et fut chargĂ© du commandement de la tĂŞte de pont de cette ville. Le , la division française du gĂ©nĂ©ral Martial Vachot arriva sur les lieux et bombarda Ă  partir de la mi-dĂ©cembre les positions ennemies. Deroy, qui disposait de 3 000 hommes et de 67 canons, fit de son mieux pour rĂ©sister et repoussa une offre de reddition, mais sa position devint de plus en plus prĂ©caire Ă  mesure que le bombardement s'intensifiait et il entra en nĂ©gociation avec les Français le [4]. Ă€ l'issue des pourparlers, la tĂŞte de pont fut remise aux troupes rĂ©publicaines et quatre bataillons autrichiens furent faits prisonniers[5]. L'annĂ©e suivante, Mannheim fut assiĂ©gĂ©e et Belderbusch capitula le . Toute la garnison, composĂ©e exclusivement de troupes bavaroises Ă  l'exception d'un bataillon autrichien, et 471 canons tombèrent aux mains des Français[6]. Deroy fut autorisĂ© Ă  quitter la ville le [7].

Au début de la campagne d'Allemagne en 1800, Deroy prit le commandement de la 1re brigade du corps auxiliaire palatino-bavarois dirigé par le lieutenant-général Christian de Deux-Ponts, destiné à servir aux côtés des troupes autrichiennes. Il avait sous ses ordres le bataillon de grenadiers Reuss, le bataillon d'infanterie légère Metzen et les bataillons de ligne Minucci, Zettwitz, Spreti et Schlossberg. Le , à Thionville, il résista à l'offensive des divisions françaises de Richepanse et de Ney et permit au reste de l'armée de faire retraite en bon ordre. Le , lors du combat de Neubourg, Deroy s'engagea dans la plaine entre Oberhausen et Unterhausen face à la division française du général Montrichard. Le général Carl Philipp von Wrede se porta dans le même temps avec ses troupes sur l'aile droite des Français, contraignant ces derniers à reculer. Le commandant en chef de l'armée autrichienne, Pál Kray, ne sut pas tirer parti de la situation et Montrichard, qui avait reçu le renfort de la division Grandjean, reprit sa progression. Insuffisamment soutenue, la brigade Deroy fut contrainte de battre en retraite[8].

Deroy fut fait prisonnier par les Français à la bataille de Hohenlinden, le . Tableau d'Henri Frédéric Schopin, château de Versailles.

Cette sĂ©rie de dĂ©faites autrichiennes prit fin avec la conclusion d'une trĂŞve le [9]. Un armistice fut signĂ©e Ă  la fin du mois de novembre, Ă©poque Ă  laquelle l'archiduc Jean d'Autriche, un homme jeune et inexpĂ©rimentĂ©, concentra 15 762 Bavarois et Wurtembergeois derrière l'Inn Ă  l'ouest de Braunau. Le gros de l'armĂ©e de Jean, soit 65 500 hommes, Ă©tait stationnĂ© Ă  l'est[10]. Au sein de la division bavaroise de Deux-Ponts, Deroy commandait le bataillon de grenadiers Reuss, le bataillon d'infanterie lĂ©gère Mentzen et les bataillons de ligne Schlossberg, Stengel et Minucci. Avec la brigade Wrede, le contingent bavarois alignait 7 071 fantassins, 828 cavaliers et 26 pièces d'artillerie[11].

À la bataille de Hohenlinden, le , les Bavarois marchaient avec la colonne de centre-gauche, placée sous le commandement de Johann Kollowrat et de l'archiduc Jean en personne. En début de matinée, Kollowrat refoula la 108e demi-brigade de ligne française et engagea trois des bataillons de Deroy pour permettre à l'attaque de continuer. Les forces alliées entrèrent toutefois rapidement en contact avec la principale ligne de résistance sous les ordres du général Emmanuel de Grouchy et furent refoulées par une puissante contre-attaque. Deux-Ponts envoya également deux bataillons bavarois au sud à la recherche de la colonne de gauche du général Johann von Riesch, qui tardait à arriver sur les lieux[12]. À la place de Riesch, la division française du général Richepanse émergea des bois situés dans le dos des troupes de Kollowrat. Après un combat acharné, la colonne de Kollowrat fut encerclée de trois côtés par les divisions Richepanse, Grouchy et Ney. Dans la débâcle qui s'ensuivit, Deroy et 18 autres officiers bavarois furent faits prisonniers, tout comme des milliers de soldats autrichiens et bavarois. Deux-Ponts parvint à s'enfuir en enfourchant un cheval d'artillerie et l'archiduc lui-même n'échappa que de justesse à la capture[13].

1805-1807

En 1801, Deroy devint membre d'une commission créée à l'instigation du prince-électeur de Bavière Maximilien IV afin de procéder à une réorganisation de l'armée. Dans l'exercice de ses fonctions, il introduisit en 1804, conjointement avec Wrede, de nouvelles réglementations militaires inspirées des réformes menées en 1788 par un certain Karl Theodor. Parallèlement à cette activité, il commanda à partir de 1803 la brigade de Basse-Bavière, composée du bataillon léger Metzen et de quatre bataillons de ligne, avec quartier-général à Landshut. À partir du , il se vit également confier la charge d'inspecteur de la Basse-Bavière, dans une zone regroupant les garnisons de Landshut, Straubing, Passau, Amberg et Ingolstadt. Il fut promu lieutenant-général la même année[14].

Un régiment d'infanterie bavarois en marche, par Felician Myrbach.

En 1805, la Bavière se rallia Ă  la France et Deroy fut fait grand-aigle de la LĂ©gion d'honneur par NapolĂ©on le de la mĂŞme annĂ©e. Il prit alors la tĂŞte d'une division de l'armĂ©e bavaroise qui Ă©tait rassemblĂ©e Ă  Amberg et Ulm pour s'opposer Ă  une Ă©ventuelle agression de l'Autriche. Cette division, cantonnĂ©e Ă  Amberg, Ă©tait forte de 17 bataillons d'infanterie, 10 escadrons de cavalerie et trois batteries d'artillerie, rĂ©partis en trois brigades sous les ordres des gĂ©nĂ©raux Minucci, Marsigli et Mezanelli[15]. Au mois de septembre, face Ă  la progression des troupes autrichiennes, l'armĂ©e bavaroise se replia au nord de la rivière Main[16]. S'Ă©tant retirĂ© sur Bamberg entre le 24 et le , Deroy fit sa jonction avec le corps français du marĂ©chal Bernadotte au dĂ©but du mois d'octobre[17]. La Grande ArmĂ©e de NapolĂ©on contraignit rapidement les forces autrichiennes du gĂ©nĂ©ral Mack Ă  capituler dans Ulm le , ce qui permit au contingent bavarois d'aller combattre dans le Tyrol[18]. La division Deroy participa dans un premier temps Ă  la poursuite du corps de Kienmayer et atteignit Salzbourg Ă  la fin du mois d'octobre, oĂą elle fut chargĂ©e de lutter contre les forces autrichiennes de l'archiduc Jean qui occupaient les montagnes[19]. Le , le colonel bavarois Pompei s'empara d'un certain nombre de positions Ă  proximitĂ© de Lofer, au sud-ouest de Salzbourg. EncouragĂ© par ce succès, Deroy ordonna une attaque sur le col de Strub, Ă  km Ă  l'ouest de Lofer. L'endroit Ă©tait dĂ©fendu par les 1 500 hommes de la brigade autrichienne Saint-Julien (en), soutenue par de la milice et des irrĂ©guliers tyroliens. L'assaut se solda par un Ă©chec sanglant : entre 1 200 et 1 800 Bavarois furent mis hors de combat[20], parmi lesquels Deroy, blessĂ© d'une balle de pistolet[21]. De son cĂ´tĂ©, Saint-Julien ne perdit que 200 hommes et un canon[20]. Conduit Ă  Lofer puis Ă  Munich pour sa convalescence, Deroy prit ensuite le commandement des troupes d'occupation du Tyrol et du Vorarlberg[22].

RentrĂ© Ă  Munich avec ses troupes le [23], Deroy fut dĂ©corĂ© de l'ordre militaire de Maximilien-Joseph de Bavière fondĂ© par le nouveau roi[24]. Il travailla Ă  la mĂŞme Ă©poque avec d'autres gĂ©nĂ©raux Ă  un projet de renforcement de l'armĂ©e bavaroise[23]. Avec le dĂ©but de la campagne contre la Prusse, celle-ci entra en campagne Ă  la fin du mois de septembre et la division Deroy fut intĂ©grĂ©e au IXe corps du prince JĂ©rĂ´me Bonaparte, le plus jeune frère de NapolĂ©on[25]. En novembre, la 1re division bavaroise de Deroy mit le siège devant Glogau. Après que les Bavarois eurent Ă©tĂ© remplacĂ©s par une division wurtembergeoise, la place capitula le . Deroy marcha ensuite sur Breslau, oĂą sa division arriva le . Les 22 000 hommes du corps de JĂ©rĂ´me encerclèrent la ville jusqu'au , date Ă  laquelle la forteresse se rendit, livrant 5 300 prisonniers et 268 aux assiĂ©geants. Les pertes bavaroises ne s'Ă©levaient qu'Ă  259 hommes. Deroy continua sa progression et, avec 13 000 hommes, fit le siège de Brieg, dont les 1 450 dĂ©fenseurs capitulèrent Ă  leur tour le [26]. Le gĂ©nĂ©ral bavarois assiĂ©gea alors Kosel Ă  partir du 24 de ce mois, mais la ville rĂ©sista Ă  toutes les attaques[27]. Le , Deroy reçut l'ordre de transformer le siège en simple blocus et de transfĂ©rer les canons de siège Ă  Breslau[28]. PassĂ© sous les ordres du gĂ©nĂ©ral Dominique RenĂ© Vandamme, il contribua Ă  la prise de Glatz le avant de faire mouvement avec 6 500 hommes contre Silberburg, qu'il bombarda les 28 et , mais lĂ  encore la garnison prussienne refusa de dĂ©poser les armes. La paix de Tilsit mit fin aux engagements[29]. Ă€ cette pĂ©riode, la division Deroy, constituĂ©e de trois brigades aux ordres des gĂ©nĂ©raux Rechberg, Raglovich et Zandt, alignait 10 400 fantassins, 1 000 cavaliers et 24 canons. Vers la fin de l'annĂ©e 1808, il fut fait membre du Conseil privĂ© de Bavière[30].

1809 et 1812

Napoléon haranguant les troupes bavaroises et wurtembergeoises à Abensberg, le . Huile sur toile de Jean-Baptiste Debret, 1810.

Au commencement de la guerre de la Cinquième Coalition en 1809, Deroy transmit le commandement de la 1re division au prince hĂ©ritier Louis de Bavière pour prendre la tĂŞte de la 3e division du VIIe corps d'armĂ©e. Son unitĂ© se composait des 5e, 9e, 10e et 14e rĂ©giments d'infanterie de ligne, des 5e et 7e bataillons d'infanterie lĂ©gère, du rĂ©giment de dragons Taxis, du rĂ©giment de chevau-lĂ©gers Bubenhoven et de 18 canons[31]. Après l'invasion du royaume par les troupes autrichiennes, Deroy occupa la rive ouest de l'Isar en face de Landshut le . Au cours d'un engagement très bref, chaque camp perdit entre 150 et 200 tuĂ©s ou blessĂ©s. Lorsqu'une colonne autrichienne franchit la rivière en amont Ă  Moosburg, Deroy recula sur Siegenburg en passant par Pfeffenhausen[32]. Sous les ordres du marĂ©chal François Joseph Lefebvre, il assista sans ĂŞtre engagĂ© Ă  la bataille d'Abensberg le [33]. Le , tandis que NapolĂ©on remportait la bataille de Landshut au sud, Deroy fut confrontĂ© au IVe corps d'armĂ©e autrichien du prince Franz Seraph von Rosenberg-Orsini. S'avançant Ă  la droite du IIIe corps français commandĂ© par le marĂ©chal Louis Nicolas Davout, ses troupes s'emparèrent du village de Schierling. Les Bavarois ne progressèrent pas plus loin ce jour-lĂ  et les attaques de Davout furent Ă©galement interrompues. Les Bavarois comptaient environ 150 hommes hors de combat, les Français 1 500 et les Autrichiens 3 000[34].

Lors de la bataille d'EckmĂĽhl le , NapolĂ©on attaqua les forces de Rosenberg par le sud tandis que Davout et Deroy s'avançaient vers l'est. Les Autrichiens occupaient une position stratĂ©gique clĂ©, le Bettel Berg, dĂ©fendu par 3 000 fantassins et 16 pièces d'artillerie. La brigade de cavalerie attachĂ©e Ă  la division Deroy, menĂ©e par le gĂ©nĂ©ral-major Seydewitz, partit Ă  l'attaque la première mais la cavalerie autrichienne, bien commandĂ©e, la repoussa. Un deuxième tentative menĂ©e par l'infanterie de Deroy se solda Ă©galement par un Ă©chec[35]. Quelque temps plus tard, une nouvelle charge impliquant trois escadrons bavarois fut dĂ©cimĂ©e par les tirs des canons ennemis. Alors que les survivants se repliaient pour Ă©chapper au feu meurtrier des canons, un fort contingent de cuirassiers français fit son apparition. Les cavaliers bardĂ©s de fer Ă©crasèrent leurs homologues autrichiens qui tentaient de s'interposer et rĂ©ussirent Ă  prendre le Bettel Berg[36]. Une partie de la brigade de cavalerie de Deroy participa ensuite au fameux combat de cavalerie qui eut lieu cette nuit-lĂ  au clair de lune Ă  Alteglofsheim[37].

Deroy parvint à dégager la forteresse de Kufstein le 11 mai 1809.

Après Eckmühl et la petite bataille de Neumarkt-Sankt Veit le , Napoléon demanda au maréchal Lefebvre de s'emparer de Salzbourg et d'aller secourir la garnison bavaroise de la forteresse de Kufstein[38]. Au début du mois de mai, des irréguliers autrichiens et tyroliens défirent une brigade de la 3e division bavaroise commandée par le général-major Vincenti, qui tentait de rejoindre Kufstein. En réaction, l'Empereur ordonna à Lefebvre d'organiser une opération de secours de grande ampleur[39]. Le , Deroy dégagea les 576 hommes de la garnison qui résistaient depuis un mois[40]. Avec les divisions Wrede et Deroy, Lefebvre infligea ensuite une défaite au général autrichien Jean-Gabriel du Chasteler à la bataille de Wörgl le . Chasteler, qui était chargé de soutenir la rébellion du Tyrol, reçut l'ordre d'abandonner la région peu après[41].

Innsbruck fut occupĂ©e dans la foulĂ©e, mais la 3e division de Deroy fut attaquĂ©e le lors de la première bataille de Bergisel. Sur un effectif total de 4 000 soldats et 12 canons, les Bavarois perdirent entre 20 et 70 tuĂ©s et de 100 Ă  150 blessĂ©s. Les Autrichiens et les Tyroliens commandĂ©s par Andreas Hofer dĂ©plorèrent de leur cĂ´tĂ© 50 tuĂ©s et 30 blessĂ©s. DĂ©couragĂ©s par le manque de soutien de la population locale, les Tyroliens se replièrent au sud[42]. Ils repartirent toutefois Ă  l'attaque le au cours de la deuxième bataille de Bergisel. Deroy, avec 5 240 soldats et 18 canons, parvint malgrĂ© tout Ă  dĂ©fendre sa position, au prix de 87 tuĂ©s, 156 blessĂ©s et 53 disparus. Les troupes adverses, composĂ©es de 1 200 rĂ©guliers autrichiens et de 13 600 Tyroliens, laissèrent sur le terrain 90 tuĂ©s et 160 blessĂ©s[43]. Ă€ court de vivres et de munitions, Deroy dut cependant Ă©vacuer Innsbruck le et se retira sur Kufstein[44].

Après la victoire de NapolĂ©on Ă  Wagram les 5 et , Lefebvre et Deroy rĂ©occupèrent Innsbruck. Lors de la troisième bataille de Bergisel le , 18 000 Tyroliens infligèrent une sĂ©rieuse dĂ©faite aux 3 000 soldats de Deroy. Les Bavarois comptèrent 200 tuĂ©s et 250 blessĂ©s dans leurs rangs alors que les insurgĂ©s perdirent 100 morts et 220 blessĂ©s. Emmenant avec lui plusieurs otages, Lefebvre ordonna la retraite et le Tyrol fut entièrement Ă©vacuĂ© par les Bavarois Ă  partir du [45]. Le , les Tyroliens furent nĂ©anmoins surpris et sĂ©vèrement battus Ă  Bodenbichl par les troupes du gĂ©nĂ©ral-major Rechberg. Ă€ la suite de cet Ă©vĂ©nement, les trois divisions du VIIe corps reprirent le contrĂ´le du Tyrol[46]. Les troupes du gĂ©nĂ©ral Wrede triomphèrent Ă  la quatrième bataille de Bergisel le 1er novembre et la rĂ©bellion fut Ă©crasĂ©e[47]. Deroy fut Ă©levĂ© au grade de General der Infanterie (gĂ©nĂ©ral de l'infanterie) le [48].

Le général Deroy, mortellement blessé, est transporté à l'arrière par ses soldats. Détail d'une peinture de Wilhelm von Kobell représentant la bataille de Polotsk, le , conservée au palais de la Résidence à Munich.

Lorsque débuta l'invasion de la Russie par Napoléon en 1812, Deroy commandait la 19e division d'infanterie appartenant au VIe corps du général Laurent de Gouvion-Saint-Cyr[49]. Découragé, le général écrivit une lettre au roi Maximilien-Joseph le dans laquelle il se demandait comment lui et ses hommes allaient bien pouvoir survivre[50]. L'avancée en territoire russe était difficile et il rapporta à son souverain que la nourriture était mauvaise et les uniformes et les chaussures des soldats usés jusqu'à la corde. Pour toutes ces raisons, écrivait-il, la discipline s'était considérablement dégradée, le moral des troupes s'était effondré et les soldats étaient beaucoup moins enclins à obéir aux ordres[51].

Statue du général Deroy sur la Maximilianstraße de Munich, réalisée par Johann Halbig.

La première bataille de Polotsk s'engagea le . Le marĂ©chal Nicolas-Charles Oudinot y menait les IIe et VIe corps de la Grande ArmĂ©e contre le Ier corps russe du gĂ©nĂ©ral Pierre Wittgenstein[52]. Le premier jour des combats, les 30 000 soldats russes dĂ©firent les 24 000 hommes du camp d'en face et Oudinot fut blessĂ©. Saint-Cyr prit alors le commandement et replia la plus grande partie de son armĂ©e sur la rive sud de la Dvina dans la nuit du 17 au . Ă€ 15 h, Saint-Cyr attaqua les Russes par surprise, avec le VIe corps bavarois Ă  droite, le IIe corps français au centre et la cavalerie française Ă  gauche. Soutenue par le feu de 30 pièces d'artillerie, la 19e division de Deroy prit d'assaut le village de Spas tandis que la 20e division de Wrede progressait plus Ă  droite[53]. Au cours de cette attaque, Deroy fut frappĂ© Ă  l'abdomen par une balle de fusil et dut ĂŞtre remplacĂ© au pied levĂ© par le gĂ©nĂ©ral Wrede. Il succomba Ă  sa blessure le Ă  7 h du soir. Selon son biographe Heilmann, ses derniers mots furent : « je meurs dans l'exercice de mon devoir, et m'abandonne dĂ©sormais Ă  la volontĂ© du Tout-Puissant. Dieu sauve le roi ! » Il fut inhumĂ© dans le cimetière de l'Ă©glise Saint-Xavier de Polotsk. En reconnaissance de ses services, un titre de noblesse fut attribuĂ© Ă  sa femme et Ă  son fils aĂ®nĂ©. Le jour mĂŞme de sa mort, NapolĂ©on le nomma comte de l'Empire français avec une donation de 30 000 francs. Le dĂ©cret, signĂ© quatre jours après le dĂ©cès du gĂ©nĂ©ral, fut confirmĂ© et Ă©tendu Ă  tous les membres de sa famille en 1820[54].

Deroy est considéré par l'historien John H. Gill comme un soldat compétent, consciencieux et populaire parmi ses hommes, ainsi que comme l'un des meilleurs généraux bavarois de l'époque avec Carl Philipp von Wrede[55]. Il est le plus vieux général de la Grande Armée à mourir durant la campagne de Russie[56].

Bibliographie

  • Jacques Charavay, Les gĂ©nĂ©raux morts pour la patrie, 1792-1871 : notices biographiques, Au siège de la sociĂ©tĂ©, , 160 p. (lire en ligne).
  • (en) James R. Arnold, Napoleon Conquers Austria : the 1809 campaign for Vienna, Westport, Praeger Publishers, , 247 p. (ISBN 978-0-275-94694-4).
  • (en) James R. Arnold, Marengo & Hohenlinden, Barnsley, Pen & Sword, (ISBN 978-1-473-81621-3, lire en ligne).
  • (en) F. Loraine Petre, Napoleon and the Archduke Charles, New York, Hippocrene Books, (1re Ă©d. 1909).
  • (en) Gunther Rothenberg, Napoleon's Great Adversaries : The Archduke Charles and the Austrian Army, 1792–1814, Stroud, Spellmount, (ISBN 978-1-86227-383-2).
  • (en) Digby Smith, The Greenhill Napoleonic Wars Data Book : Actions and Losses in Personnel, Colours, Standards and Artillery, 1792-1815, Londres, Greenhill Books, , 582 p. (ISBN 1-85367-276-9, BNF 38973152).
  • (en) Adam Zamoyski, Moscou 1812 : Napoleon's Fatal March, Londres, Harper, , 644 p. (ISBN 0-06-108686-X).
  • (de) Johann von Heilmann, Leben des Grafen Bernhard Erasmus v. Deroy : k. b. Generals der Infanterie [« Vie du comte Bernhard Erasmus v. Deroy : gĂ©nĂ©ral de l'infanterie »], Augsbourg, Librairie M. Rieger, , 130 p. (lire en ligne).

Notes et références

  1. Charavay 1893, p. 85.
  2. Heilmann 1855, p. 1 et 2.
  3. Heilmann 1855, p. 2 Ă  4.
  4. Heilmann 1855, p. 4 Ă  6.
  5. Smith 1998, p. 96.
  6. Smith 1998, p. 104 et 105.
  7. Heilmann 1855, p. 6.
  8. Heilmann 1855, p. 6 Ă  9.
  9. Arnold 2005, p. 203.
  10. Arnold 2005, p. 212 et 213.
  11. Arnold 2005, p. 277.
  12. Arnold 2005, p. 230 Ă  232.
  13. Arnold 2005, p. 247.
  14. Heilmann 1855, p. 9 Ă  12.
  15. Heilmann 1855, p. 13 Ă  16.
  16. Rothenberg 2007, p. 88.
  17. Heilmann 1855, p. 15 et 16.
  18. Rothenberg 2007, p. 92 et 93.
  19. Heilmann 1855, p. 16 et 17.
  20. Smith 1998, p. 210 et 211.
  21. Heilmann 1855, p. 20.
  22. Heilmann 1855, p. 21.
  23. Charavay 1893, p. 86.
  24. Heilmann 1855, p. 23.
  25. Heilmann 1855, p. 23 et 24.
  26. Smith 1998, p. 239.
  27. Smith 1998, p. 251.
  28. Heilmann 1855, p. 31 et 32.
  29. Smith 1998, p. 252 et 253.
  30. Heilmann 1855, p. 42 Ă  44.
  31. (en) Scotty Bowden et Charlie Tarbox, Armies on the Danube 1809, Arlington, Empire Games Press, , p. 62.
  32. Petre 1976, p. 87.
  33. Smith 1998, p. 290.
  34. Petre 1976, p. 159 et 163.
  35. Arnold 1995, p. 162 et 163.
  36. Arnold 1995, p. 166 et 167.
  37. Petre 1976, p. 180 et 181.
  38. Petre 1976, p. 221.
  39. Petre 1976, p. 247 et 248.
  40. Smith 1998, p. 301.
  41. (en) Robert M. Epstein, Napoleon's Last Victory and the Emergence of Modern War, Lawrence, University Press of Kansas, (ISBN 0-7006-0751-X), p. 124.
  42. Smith 1998, p. 311 et 312.
  43. Smith 1998, p. 313.
  44. Heilmann 1855, p. 62 Ă  64.
  45. Smith 1998, p. 331.
  46. Smith 1998, p. 333.
  47. Smith 1998, p. 336.
  48. Heilmann 1855, p. 80 et 81.
  49. Heilmann 1855, p. 86.
  50. Zamoyski 2004, p. 144.
  51. Zamoyski 2004, p. 191.
  52. Smith 1998, p. 386 et 387.
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