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Bataille d'Ipsos

La bataille d'Ipsos oppose en 301 av. J.-C. les Diadoques, les successeurs d'Alexandre le Grand, en Phrygie près d'Ipsos (en Turquie actuelle) dans le contexte de la quatrième guerre des Diadoques. Antigone le Borgne et son fils Démétrios qui regroupent l'Anatolie, la Syrie, le Levant et les alliés grecs de la Ligue de Corinthe reconstituée en 302, font face à une coalition dirigée par Séleucos Ier Nicator, roi de Babylonie et des satrapies orientales, Lysimaque, roi de Thrace, Cassandre, roi de Macédoine.

Bataille d'Ipsos
Description de cette image, également commentée ci-après
Carte des royaumes des Diadoques avant la bataille d'Ipsos
Informations générales
Date 301 av. J.-C.
Lieu Près d'Ipsos
Issue DĂ©faite d'Antigone
Belligérants
Royaumes de SĂ©leucos et de LysimaqueRoyaume d'Antigone
Forces en présence
64 000 fantassins
10 500 cavaliers
400 Ă©lĂ©phants
120 chars
70 000 fantassins
10 000 cavaliers
75 Ă©lĂ©phants

Quatrième guerre des Diadoques

Batailles

Guerres des Diadoques

CoordonnĂ©es 38° 57′ 00″ nord, 30° 59′ 24″ est

Antigone, d'un âge bien avancé, dispose d'une armée puissante ; ses adversaires possèdent eux une armée moins conséquente mais ils disposent de 400 éléphants de guerre apportés par Séleucos. Les cavaliers commandées par Démétrios l'emportent dans un premier temps, mais au moment de rejoindre Antigone ils ont été bloqués par les éléphants de Séleucos, donnant la victoire aux coalisés. Antigone trouve la mort au combat.

Cette bataille peut être considérée, avec la bataille de Raphia (217 av. J.-C.), comme l'une des plus grandes batailles de l'époque hellénistique et comme la plus grande bataille d'éléphant de guerre de l'histoire « occidentale ». Pour certains historiens et spécialistes de la période, cet évènement marque finalement la fin de l'empire formé par Alexandre.

Sources

La seule source complète dont nous disposons au sujet de cette bataille est la Vie de Démétrios de Plutarque[1]. Le biographe aurait utilisé le récit de Hiéronymos de Cardia dans l'Histoire des Diadoques, ce dernier ayant assisté à la bataille du côté des Antigonides. Quant à Diodore de Sicile, l'une des principales sources pour l'histoire des guerres des Diadoques, il ne livre que peu de renseignement sur le déroulement de la bataille mais les détails livrés sur la quatrième guerre des Diadoques demeurent indispensables à la compréhension du contexte historique de cette bataille

Contexte historique

En 304 av. J.-C., une coalition réunit Ptolémée, Séleucos, Cassandre et Lysimaque contre Antigone le Borgne qui entend établir sa domination sur la Grèce et la mer Égée. Étant donné la richesse de son royaume et la qualité de son armée, il est nécessaire pour les adversaires d'Antigone de faire la jonction de leurs forces. Pour cela, ils organisent la défense de l'Europe contre Démétrios afin de permettre à Lysimaque, qui commande une puissante phalange aguerrie par les guerres aux frontières de la Thrace, de débarquer en Anatolie.

Lysimaque débarque en Phrygie hellespontique, parvient à éviter Antigone et reçoit la soumission des cités du littoral égéen. Mais le débarquement de Démétrios à Éphèse durant l’automne 302 met Lysimaque en difficulté, l'obligeant à se retirer en Bithynie, tandis que les renforts envoyés par Cassandre sont défaits. Séleucos et Lysimaque parviennent à faire leur jonction en Phrygie. Ptolémée, bloqué en Cœlé-Syrie et trompé par une fausse nouvelle annonçant une victoire d'Antigone, n'a pas pu - ou voulu - joindre ses forces à la coalition.

Opérations préalables

En 302 av. J.-C., Lysimaque traverse l'Hellespont qui est dĂ©pourvu de troupes antigonides. Il prend possession de Lampsaque, Parion et SigĂ©e (plus difficilement). Il demande Ă  PrĂ©pĂ©laos de conquĂ©rir l'Ionie et l'Éolide avec 7 000 hommes, tandis qu'il se charge du siège d'Abydos. Mais cette offensive est arrĂŞtĂ©e par DĂ©mĂ©trios qui arrive avec des renforts. PrĂ©pĂ©laos et Lysimaque continuent la conquĂŞte en s'emparant de TĂ©os, Éphèse et Sardes. Antigone lance la riposte : il annule la fĂŞte qui devait avoir lieu Ă  Antigonie et amène son armĂ©e en direction de la Phrygie en traversant la Cilicie, la Cappadoce et la Lycaonie. Avec l'arrivĂ©e de l'armĂ©e d'Antigone, Lysimaque prĂ©fère attendre SĂ©leucos et reste sur ses positions dans son camp. Antigone tente de les vaincre en coupant les flux d'approvisionnement. Entre temps, Lysimaque change de camp pour s'installer dans les collines oĂą l'accès Ă  l'eau et la nourriture sont plus aisĂ©s. Finalement, au bout d'un moment, quand les conditions devenant de plus en difficiles, Lysimaque s'enfuit et Antigone dĂ©cide de le pourchasser, chasse qui a Ă©tĂ© de courte durĂ©e en raison de l'arrivĂ©e de l'hiver. Antigone s'installe autour d'HĂ©raclĂ©e du Latmos peu de temps avant l'approche des troupes de SĂ©leucos qui a rĂ©pondu Ă  l'appel de Lysimaque. Antigone rĂ©plique en demandant Ă  DĂ©mĂ©trios de renforcer ses troupes en Asie. Cependant DĂ©mĂ©trios qui vient de terminer sa campagne en Grèce, ne peut rentrer que par voie maritimes en raison du blocus par Cassandre des voies terrestres. Les messages transmis par Antigone lui sont parvenus que bien plus tard, ce qui a entrainĂ© des manĹ“uvres contradictoires entre les deux armĂ©es. Une paix est conclue avec Cassandre mais celui-ci envoie tout de mĂŞme Pleistarchos soutenir Lysimaque, en vain puisque sa flotte est dĂ©truite par DĂ©mĂ©trios.

Finalement, Antigone et Démétrios s'avancent vers l'armée coalisée, regroupée près du village d'Ipsos (aujourd'hui Ipsili) au cœur de la Phrygie.

Forces en présence

D'après Plutarque[2], l'armĂ©e des Antigonides est composĂ© de 70 000 fantassins, 100 000 cavaliers et 75 Ă©lĂ©phants de guerre indiens. Il semblerait que les donnĂ©es fournis par Plutarque font rĂ©fĂ©rence seulement Ă  l'armĂ©e positionnĂ©e en Syrie et non celle de DĂ©mĂ©trios en Grèce. Diodore estime que DĂ©mĂ©trios dispose de 56 000 fantassins dont 15 000 mercenaires. Les historiens estiment que l'armĂ©e antigonide dispose de 40 000 phalangites armĂ©es Ă  la macĂ©donienne.

D'après Plutarque[2], leurs adversaires coalisĂ©s possèdent 64 000 fantassins, dont 10 500 cavaliers, 400 Ă©lĂ©phants de guerre et 120 chars Ă  faux. Diodore Ă©crit que SĂ©leucos a apportĂ© 20 000 fantassins, 12 000 cavaliers, dont des archers montĂ©s, 480 Ă©lĂ©phants et une centaine de char[3]. Les historiens estiment que l'armĂ©e coalisĂ©e compte entre 30 000 et 40 000 hommes dans la phalange, le noyau dur de l'armĂ©e.

DĂ©roulement de la bataille

Schéma du déroulement de la bataille.

Plutarque est le seul auteur antique à fournir un déroulement précis de la bataille[4]. Il s'inspire ici de Hiéronymos de Cardia qui a probablement assisté à la défaite d'Antigone, son protecteur.

La nature exacte du terrain n'est pas connue, mais on peut supposer, au vu du silence des sources au sujet d'un quelconque effet du terrain, qu'il s'agit d'une plaine. L'armĂ©e antigonide comprendrait 70 000 fantassins, 10 000 cavaliers et 75 Ă©lĂ©phants de guerre, face Ă  une force coalisĂ©e de 64 000 fantassins, 10 500 cavaliers, 120 chars Ă  faux et 400 Ă©lĂ©phants de guerre ; SĂ©leucos a en effet reçu une imposante troupe d'Ă©lĂ©phants dans le cadre d'un traitĂ© de paix conclu avec le prince indien Chandragupta Maurya.

La nuit précédant la bataille, Antigone a fait un rêve : Alexandre le Grand lui-même, bardé d'une magnifique armure, vient lui demander quel serait son cri de ralliement lors de la bataille, à quoi le souverain borgne répond : « Zeus et la victoire ». Alexandre lui tourne alors le dos, et part vers le camp ennemi en lançant : « Alors je pars pour tes adversaires, car eux me recevront avec les honneurs qui me sont dus »[5].

Après quelques escarmouches d'infanterie lĂ©gère et d'Ă©lĂ©phants, DĂ©mĂ©trios, Ă  la tĂŞte de la cavalerie lourde sur le flanc droit, charge impĂ©tueusement Antiochos, le fils de SĂ©leucos, et le met en dĂ©route. Mais, plutĂ´t que de retourner sur la phalange adverse, DĂ©mĂ©trios continue sa poursuite et bientĂ´t les Ă©lĂ©phants adverses, postĂ©s Ă  l'arrière de la phalange, lui interdisent de retourner sur le champ de bataille. Voyant l'infanterie Antigonide privĂ©e du soutien de sa cavalerie, l'armĂ©e coalisĂ©e lance l'assaut victorieux, cavalerie en tĂŞte. La cavalerie lĂ©gère de SĂ©leucos contourne le flanc gauche d'Antigone et charge la phalange tandis que l'infanterie de Lysimaque s'avance de front. Antigone, qui commande la phalange, est percĂ© de plusieurs traits et meurt bravement. DĂ©mĂ©trios parvient Ă  fuir avec 4 000 cavaliers et 5 000 fantassins.

Conséquences

Les royaumes des Diadoques après la bataille d'Ipsos.

Antigone est enterré par les vainqueurs avec tous les honneurs dignes de son rang royal. Démétrios, qui s'est enfui du champ de bataille, rejoint Éphèse avec pour projet de prendre Athènes ; mais les citoyens ont voté une loi qui interdit l'entrée des rois sur le territoire athénien. Il demande le retour de ses navires stationnés dans le port du Pirée et décide de partir vers l'isthme de Corinthe. À chaque endroit où il souhaite s'installer, ses troupes sont rejetées ; quant à ses anciens alliés ils sont maintenant au service d'autres rois, alors que les cités grecques ont décidé de se ranger du côté de Cassandre.

L'espoir pour les Antigonides de rétablir l'unité de l'empire d'Alexandre le Grand disparait avec la bataille d'Ipsos. Les vainqueurs se partagent le royaume d'Antigone : Ptolémée établit sa domination sur la Cœlé-Syrie. Cassandre maintient sa présence en Macédoine et en Grèce continentale. Lysimaque annexe l'Anatolie jusqu'aux Monts Taurus. Séleucos, le grand vainqueur, s'empare de la partie orientale de l'Asie Mineure et de la Syrie. Ce partage est à l'origine des six guerres de Syrie disputées entre les Lagides et les Séleucides. Démétrios conserve quelques places fortes en Phénicie, en Asie Mineure et dans les Cyclades ainsi que Chypre, pour quelques années encore[6].

La dernière grande guerre entre Diadoques a lieu en 281 av. J.-C. : Séleucos défait Lysimaque à la bataille de Couroupédion mais ce succès est de courte durée car il est assassiné à Lysimacheia, marquant la fin de la période des Diadoques.

Notes et références

  1. Plutarque, Vie de Démétrios, 28-30.
  2. Plutarque, Vie de Démétrios, 28.
  3. Diodore, XX, 113.
  4. Plutarque, Démétrios, 28-30.
  5. Plutarque, Démétrios, 29.
  6. Will 2003, p. 85-87.

Annexes

Sources antiques

Bibliographie.

  • Édouard Will, Histoire politique du monde hellĂ©nistique 323-, Paris, Seuil, coll. « Points Histoire », (ISBN 2-02-060387-X)
  • (en) Bob Bennet et Mike Roberts, The Wars of Alexander's Successors 323–281 BC, vol. 1 : Commanders & Campaigns, Pen and Sword Books, .
  • (en) Bob Bennet et Mike Roberts, The Wars of Alexander's Successors 323–281 BC, vol. 2 : Battles and Tactics, Pen and Sword Books, .
  • (en) Richard A. Billows, Antigonos the One-Eyed and the creation of Hellenistic State, University of California Press, , 515 p..
  • (en) Paul K. Davis, 100 Decisive Battles from ancient time to the present, Oxford University Press, , 462 p..

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