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Aprilis

Aprilis ou mensis Aprilis (avril) est le quatrième mois du calendrier romain, après Martius (mars) et avant Maius (mai). Dans l'ancien calendrier romain, qui commençait avec le mois de mars, Aprilis était le deuxième des dix mois dans l'année. Aprilis avait 30 jours dans le calendrier de la République romaine, avec un jour ajouté lors de la réforme produite par le calendrier julien, au milieu des années 40 av. J.-C.

Aprilis était marqué par une série de fêtes consacrées à des aspects de la vie rurale en relation avec les nombreuses occupations des agriculteurs en ce mois[1]. Avec l'urbanisation de Rome, la signification des cérémonies s'est élargie, notamment celle des Parilia, série de fêtes pastorales très anciennes, célébrées comme l'anniversaire (dies natalis) de la fondation de Rome. Le mois était essentiellement consacré à des divinités de sexe féminin ou ambigu, s'ouvrant aux Calendes sur la fête de Vénus[2].

Panneau Aprilis de la mosaïque des mois d'El Djem, Tunisie, première moitié du IIIe siècle.

Nom du mois

Les Romains pensaient que le nom d'Aprilis Ă©tait dĂ©rivĂ© de aperio, aperire, verbe qui signifie « ouvrir Â». Les Fasti Praenestini offrent une explication plus dĂ©veloppĂ©e, prĂ©cisant que « les fruits, les fleurs, les animaux, les mers et les terres s'ouvrent Ă  ce moment-lĂ  Â».

Certains antiquaires, ainsi qu'Ovide, dans son poème sur le calendrier romain, donnent une autre origine d'après Aphrodite, l'homologue grecque de VĂ©nus, dont les fĂŞtes marquent le dĂ©but de ce mois. Aprilis pourrait ĂŞtre dĂ©rivĂ© de la forme Ă©trusque Apru/AphrĂ´, qui serait une Aphrodite Ă©trusquisĂ©e[3], mais chez les Étrusques, ce mois Ă©tait appelĂ© Cabreas[1]. Certains linguistes modernes font venir Aprilis du mot Ă©trusque Ampile ou Amphile, basĂ© sur une glose mĂ©diĂ©vale, conjecturant une origine dans le nom du mois thessalien Aphrios. Une origine indo-europĂ©enne a Ă©galement Ă©tĂ© proposĂ©e, Ă  comparer au sanskrit âpara et au latin alter « l'autre de deux Â», en rĂ©fĂ©rence Ă  sa position d'origine comme le deuxième mois de l'annĂ©e[4]. Varron et Cincius rejettent tous deux le rapport du nom d’Aprilis avec celui d’Aphrodite, si bien que l'Ă©tymologie populaire romaine Ă  partir d’aperire est peut-ĂŞtre la bonne[1] - [4].

Dans les dernières années du règne de Néron, le Sénat a brièvement renommé le mois d'avril Neronius en son honneur[5].

Dans l'année agricole

Les  almanachs agricoles (menologia rustica) sont d'accord pour dire que VĂ©nus, dĂ©esse des jardins dans la religion romaine, Ă©tait la divinitĂ© tutĂ©laire du mois d'avril, et que les moutons devaient y ĂŞtre purifiĂ©s (oves lustrantur)[1]. Dans son traitĂ© d'agriculture, Varron Ă©numère des fonctions telles que le dĂ©sherbage des cultures, le labourage de la terre, la coupe des saules, la clĂ´ture des prĂ©s, ainsi que la plantation et la taille des oliviers[6] - [1].

La deuxième moitié du mois d'avril donnait lieu à des festivités en rapport avec les activités agricoles :

  • : les Fordicidia, fĂŞtes de la fertilitĂ© et de l'accouplement des bĂŞtes ;
  • 21 : les Parilia, une fĂŞte de bergers ;
  • 23 : les Vinalia, l'une des deux fĂŞtes du vin (l'autre ayant lieu le ) dans l'annĂ©e religieuse ;
  • 25 : les Robigalia, pour la protection des cultures contre les moisissures[7].

Parmi ces festivitĂ©s, les Fordicidia et les Robigalia sont probablement les plus anciennes. William Warde Fowler, dont les travaux du dĂ©but du XXe siècle sur les fĂŞtes romaines restent un ouvrage de rĂ©fĂ©rence, affirme que les Fordicidia Ă©taient « sans aucun doute l'un des plus anciens rites sacrificiels de la religion romaine »[8]. La dernière partie du mois d'avril Ă©tait consacrĂ©e Ă  des jeux (ludi) en l'honneur de CĂ©rès, dĂ©esse des moissons, dont le pouvoir s'Ă©tendait Ă  la croissance et au cycle de vie des plantes. La fin du mois voyait se dĂ©rouler le dĂ©but des jeux de Flore, dĂ©esse de la floraison, rĂ©pertoriĂ©e par Varron comme l'une des douze principales divinitĂ©s agricoles.

Dates du mois

Dessin de l'assemblage des fragments des Fasti Antiates, un pré-calendrier julien montrant Aprilis (abrégé en APR) dans la partie supérieure de la quatrième colonne.

Les Romains ne comptaient pas les jours du premier jusqu'au dernier comme dans l'usage moderne. Au lieu de cela, ils avaient trois repères fixes pour chaque mois : les Nones (le 5e jour du mois, mais le 7e jour en mars, mai, juillet, octobre), les Ides (le 13e jour, mais le 15e en mars, mai, juillet, octobre), et les Calendes, qui sont le 1er jour du mois suivant. Les Nones d'avril tombaient donc le 5e jour, et les Ides le 13e. Le dernier jour d'avril était le pridie Kalendas Maias soit « la veille des Calendes de mai ». Le comptage romain est inclusif, ce qui veut dire qu'on comptait (sur ses doigts) le jour de départ et le jour d'arrivée : par exemple, pour les Romains, le était ante diem V Idūs Apriles, soit « le 5e jour avant les Ides d'avril », généralement abrégé en a. d. V Id. Apr. (ou V Id. Apr., avec a. d. complètement omis), alors que pour nous, avec notre façon de compter, ce serait le quatrième jour ; de même, le était a. d. IX Kal. Mai., « le 9e jour avant les Calendes de mai », alors qu'il est le huitième pour nous, et aussi pour le calendrier pré-julien (VIII Kal. Mai.), mais pour une autre raison : c'est parce que, dans cet ancien calendrier, le mois d'avril ne comptait que 29 jours.

Fragment des Fasti Praenestini pour le mois d'avril, montrant les abréviations pour les Vinalia et les Robigalia (VIN et ROB), et les lettres nundinales sur le bord gauche. Musée national romain, Palais Massimo alle Terme.

Sous la République romaine et au début de l'Empire, le calendrier attribuait à chaque jour une lettre qui désignait son statut religieux légal.

En avril, on a :

  • F pour les dies fasti, jours oĂą il Ă©tait lĂ©gal d'engager une action devant les tribunaux de droit civil ;
  • C pour les dies comitiales, jours oĂą le peuple romain pouvait tenir des assemblĂ©es (comitia), des Ă©lections et certains types de procĂ©dures judiciaires ;
  • N pour dies nefasti, lorsque les activitĂ©s politiques et l'administration de la justice Ă©taient interdites ;
  • NP dont le sens reste insaisissable, mais qui marquait les feriae, jours fĂ©riĂ©s.

Vers la fin du IIe siècle, les calendriers abandonnent ces marques, probablement en partie en raison des réformes calendaires entreprises par Marc Aurèle[9].

Les jours étaient également marqués par les lettres nundinales, selon un cycle A B C D E F G H, suivant la semaine de marché[10] : elles n'ont pas été notées dans le tableau ci-dessous.

Sauf indication contraire, les dates et observances sur le tableau suivent celles indiquées par Howard Hayes Scullard, Festivals and Ceremonies of the Roman Republic, Cornell University Press, 1981, p. 96–115. Après les Ides, les dates suivent celles du calendrier julien ; les dates pré-juliennes sont indiquées entre parenthèses.

JourDate romaineStatutObservances
1erKalendae AprilesF• Veneralia, en l'honneur de Vénus et Fortuna Virilis
2a.d. IV Non. Apr.[11]F
3III Non. Apr. [12]C• dies natalis du temple de Quirinus, avec jeux du cirque (après le milieu du Ier siècle)[13]
4pridie Nonas Apriles
(prid. Non. Apr.)
C* Ludi megalenses (jeux de la Grande Mère) (début)
5Nonae AprilesN• dies natalis du temple de Fortuna Publica
• Ludi megalenses (suite)
6VIII Id. Apr.N• Ludi megalenses (suite)
7VII Id. Apr.N• Ludi megalenses (suite)
8VI Id. Apr.[14]N• dies natalis du temple de Castor et Pollux (après la première moitié du Ier siècle[13]
)• Ludi megalenses (suite)
9V Id. Apr.N• Ludi megalenses (suite)
10IV Id. Apr.N• dies natalis du temple de la Grande Mère sur le Palatin ; Ludi Megalenses (fin)
11III Id. Apr.N• dies natalis de Septime Sévère divinisé, avec jeux du cirque[15]
12pridie Idūs Apriles
(abrév. prid. Id. Apr.)
N• Ludi Ceriales (jeux en l'honneur de Cérès) (début)
13Idūs AprilesNP• Feriae Iovis mensuelles : procession et sacrifice d'un bélier, en l'honneur de Jupiter, sur le Capitole
• dies natalis du temple de Jupiter Victor et du temple de Jupiter Liberator
• Ludi Ceriales (suite)
14XVIII Kal. Mai.N• Ludi Ceriales (suite)
• supplication à Victoria Augusta pour commémorer la première victoire d'Auguste (Feriale Cumanum, 4–14 ap. JC)[16]
15XVII Kal. Mai.NP• FORDICIDIA (XVI Kal. Mai. du calendrier pré-julien)
• Ludi Ceriales (suite)
16XVI Kal. Mai.[17]N• Ludi Ceriales (suite)
• supplication à Felicitas Imperii pour commémorer le jour où Auguste reçut le titre d' imperator (Feriale Cumanum)[18]
17XV Kal. Mai.N• Ludi Ceriales (suite)
18XIV Kal. Mai.N• Ludi Ceriales (suite)
19XIII Kal. Mai.NP• CERIALIA en l'honneur de Cérès, Liber et Libéra (XII Kal. Mai. du calendrier pré-julien); Ludi Ceriales (fin)
20XII Kal. Mai.N
21XI Kal. Mai.NP• PARILIA (X Kal. Mai. du calendrier pré-julien)
• Roma condita, avec jeux du cirque (après le milieu du Ier siècle)[13]
22X Kal. Mai.N
23IX Kal. Mai.F• VINALIA en l'honneur de Venus Erycina (VIII Kal. Mai. du calendrier pré-julien)
24VIII Kal. Mai.C
25VII Kal. Mai.NP• ROBIGALIA (VI Kal. Mai. du calendrier pré-julien)
• Serapia, festivités impériales (après le milieu du Ier siècle)
26VI Kal. Mai.C• dies natalis de Marc Aurèle, avec jeux du cirque[19]
27V Kal. Mai.C
28IV Kal. Mai.C• Ludi Florae, début des jeux de Flore (le 27 dans le calendrier pré-julien)
29III Kal. Mai.C
30pridie Kalendas Maias
(abrév. prid. Kal. Mai.)
C

Sources

  1. Howard Hayes Scullard, Festivals and Ceremonies of the Roman Republic (Cornell University Press, 1981), p. 96.
  2. William Warde Fowler, The Roman Festivals of the Period of the Republic (London, 1908), p. 66–67.
  3. Émile Benveniste, Revue de la société de Linguistique, 1931, p. 71, repris par Robert Schilling, La religion romaine de Vénus, 1951, pp. 17-184, et par Jean Bayet, La religion romaine, histoire politique et psychologique, Paris, Payot, 1999 (1re éd. 1956), (ISBN 2-228-89213-0), p. 92
  4. Interprétations résumées par Gary Forsythe, Time in Roman Religion: One Thousand Years of Religious History (Routledge, 2012), p. 10.
  5. Tacite, 15.74 et 16.12; Forsythe, Time in Roman Religion, p. 39.
  6. Varron, De re rustica 1.30
  7. Mary Beard, J.A. North, and S.R.F. Price, Religions of Rome: A History (Cambridge University Press, 1998), vol. 1, p. 45.
  8. Fowler, Roman Festivals, p. 71.
  9. Michele Renee Salzman, On Roman Time: The Codex Calendar of 354 and the Rhythms of Urban Life in Late Antiquity (University of California Press, 1990), p. 17, 122.
  10. Jörg Rüpke, The Roman Calendar from Numa to Constantine: Time, History, and the Fasti, traduit par David M.B. Richardson (Blackwell, 2011, d'abord publié en allemand en 1995), p. 6.
  11. Forme abrégée de ante diem IV Nonas Apriles.
  12. Forme abrégée de ante diem III Nonas Apriles.
  13. Salzman, On Roman Time, p. 122.
  14. Forme abrégée de ante diem VI Idūs Apriles, avec ante diem omis à partir de ce point.
  15. Mary Beard, J.A. North, and S.R.F. Price, Religions of Rome: A Sourcebook (Cambridge University Press, 1998), vol. 2, p. 68.
  16. Beth Severy, Augustus and the Family at the Birth of the Roman Empire (Routledge, 2003), p. 129.
  17. Forme abrégée de ante diem XVII Kalendas Apriles avec ante diem omis, ainsi que pour tout le reste du mois.
  18. Severy, Augustus and the Family, p. 129.
  19. Beard et al., Religions of Rome, vol. 2, p. 68.

Voir aussi

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