Affaire Tonglet-Castellano
L'affaire Tonglet-Castellano débute en avec le viol de deux touristes belges, Anne Tonglet (24 ans) et Araceli Castellano (19 ans), dans une calanque près de Marseille (France). Trois hommes seront rapidement arrêtés et leur procès en à Aix-en-Provence marquera une étape dans la prise de conscience par la société de la gravité du viol et de ses conséquences pour les victimes[1].
Affaire Tonglet-Castellano | |
Fait reproché | Viol |
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Chefs d'accusation | Viol et tentative de viol |
Pays | France |
Ville | Calanque de Morgiou |
Date | Nuit du 21 au |
Nombre de victimes | deux : Anne Tonglet et Aracelli Castellano |
Jugement | |
Statut | Affaire jugée : Serge Petrilli condamné à six ans de réclusion ; Guy Roger et Albert Mouglalis condamnés à quatre ans pour tentative de viol |
Tribunal | Cour d'assises des Bouches-du-RhĂ´ne |
Formation | Cour d'appel d'Aix-en-Provence |
Date du jugement | |
Les faits
Le , Anne Tonglet et Araceli Castellano — lesbiennes et vivant alors en couple — s'installent pour camper dans une calanque près de Marseille[2]. Pratiquant le naturisme, elles sont en route pour rejoindre le camp nudiste de Sugiton mais le vent les amène à planter leur tente à Morgiou. Le soir de leur arrivée, Serge Petrilli les aborde pour tenter de les séduire. Éconduit, il retente sa chance le lendemain sans plus de succès. Vexé, il monte alors une « expédition punitive » avec deux amis, Guy Roger et Albert Mouglalis. Dans la soirée du , les trois hommes font irruption dans la tente des campeuses, les frappent puis les violent pendant plusieurs heures. Les sévices sexuels infligés aux touristes durent jusqu'à cinq heures du matin. Araceli Castellano tombe enceinte à la suite du viol. L'IVG est alors interdite en Belgique, mais elle parvient néanmoins à avorter grâce à un médecin qui accepte de la pratiquer[3].
Les deux victimes portent plainte. Leurs agresseurs, rapidement appréhendés, nient le viol en affirmant que leurs victimes étaient consentantes, ce qui conduit le parquet à ne les poursuivre que pour coups et blessures et attentat à la pudeur, délits relevant du tribunal correctionnel. L'avocate Gisèle Halimi obtient du tribunal correctionnel de Marseille qu'il se déclare incompétent en raison de la nature criminelle des faits, le [4]. C'est en raison de la notoriété médiatique de Gisèle Halimi, alors très connue en tant qu'avocate des droits des femmes, que les deux victimes se sont adressées à elle[3].
Le procès
Les avocates des victimes, Anne-Marie Krywin, Marie-Thérèse Cuvelier et Gisèle Halimi, ayant obtenu le renvoi de l'affaire devant une cour d'assises, le procès s'ouvre le devant la cour d'assises des Bouches-du-Rhône, à Aix-en-Provence. Gilbert Collard est un des avocats de la défense. Gisèle Halimi ayant fait le choix de médiatiser l'affaire[3], elle s'emploie à faire du procès une tribune politique et refuse notamment le huis clos. Le procès est à l'époque particulièrement suivi par la presse : les deux victimes reçoivent le soutien de nombreuses personnalités ainsi que des mouvements féministes[5].
Au terme de débats houleux, lors desquels les plaignantes sont accusées d'avoir été « consentantes », voire provocantes, Serge Petrilli, le meneur, est condamné à six ans de prison, Guy Roger et Albert Mouglalis le sont à quatre ans[6]. Petrilli est le seul à être condamné pour viol, les deux autres prévenus étant reconnus coupables de tentative de viol. La circonstance aggravante de crime en réunion n'est pas retenue par le jury[7].
Dans la foulée de l'affaire, Gisèle Halimi, ainsi qu'Agnès Fichot qui avait été sa collaboratrice pendant le procès, défendent d'autres victimes de viol sur l'ensemble du territoire. S'appuyant sur leurs travaux, la sénatrice Brigitte Gros dépose l'année du procès une proposition de loi sur le viol[5] - [8].
En 1980, à la suite du vote de la loi qui remplace la précédente législation datant du Premier Empire (Code pénal de 1810), le viol devient en France un crime puni de quinze ans de réclusion criminelle.
Notes et références
- Virgili 2011.
- VĂ©ran 2014.
- de Montvalon 2018.
- Collectif 2012, p. 46.
- TĂ´n 2018.
- « Viol : les rôles renversés » [PDF], sur referentiel.nouvelobs.com, (consulté le ), p. 48.
- Lestienne 2018.
- Mme Brigitte Gros, sénatrice et al., « Proposition de loi en vue de protéger les femmes contre le viol », document de huit pages [PDF], sur senat.fr, (consulté le ).
Annexes
Bibliographie
- Collectif, Viol : le procès d'Aix-en-Provence (sténotypie intégrale des débats et des témoignages), éditions L'Harmattan, (1re éd. 1978) (ISBN 978-2-296-99444-7).
- Jean-Yves Le Naour et Catherine Valenti, Et le viol devint un crime, Paris, éditions Vendémiaire, , 160 p. (ISBN 978-2-36358-127-3 et 236358127X).
- Georges Vigarello, Histoire du viol : XVIe – XXe siècles, Paris, éditions du Seuil, coll. « Points histoire », (ISBN 978-2-02-040364-1).
- Fabrice Virgili, « Viol (histoire du) », dans Michela Marzano, Dictionnaire de la violence, Paris, PUF, (ISBN 978-2-13-057734-8), p. 1423-1429.
- Gisèle Halimi, Viol, le procès d'Aix, Paris, Gallimard, 1978.
Filmographie
- Le Procès du viol, documentaire de Cédric Condon et Jean-Yves Le Naour, 52 minutes, 2014
- Le Viol, téléfilm d'Alain Tasma, diffusé en 2017
- Amandine Bourgoin, « Le Viol sur France 3 : le procès qui a fait changer la loi », Paris Match,
Articles connexes
Liens externes
- Camille Lestienne, « Gisèle Halimi: l’avocate à l’origine d’une nouvelle loi qualifiant le viol », sur lefigaro.fr, (consulté le ).
- Jean-Baptiste de Montvalon, « En 1978, le procès qui a changé le regard de la France sur le viol », lemonde.fr, (consulté le ).
- Émilie Tôn, « En 1978, le procès de mon viol a fait changer la honte de camp pour la première fois », sur lexpress.fr, (consulté le ).
- Nicole Van de Ven, « Témoignage de France », Les Cahiers du GRIF, nos 14-15,‎ , p. 105-106 (DOI 10.3406/grif.1976.1578).
- Sylvie Véran, « Le procès du viol », sur teleobs.nouvelobs.com, (consulté le ).