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Accident de Saint-Pierre-sur-Vence

L'accident de Saint-Pierre-sur-Vence est une collision survenue le au passage Ă  niveau no 70 de la ligne ferroviaire reliant Soissons Ă  Givet, Ă  la limite des territoires des communes de Saint-Pierre-sur-Vence et de Boulzicourt, dans le dĂ©partement français des Ardennes, en rĂ©gion Grand Est. Il implique un convoi exceptionnel, bloquĂ© sur les voies, et un train TER. La collision, violente, fait 11 blessĂ©s dont le conducteur du train.

Accident de Saint-Pierre-sur-Vence
Caractéristiques de l'accident
Date
16 h 12
TypeCollision Ă  un passage Ă  niveau (PN)
SitePassage Ă  niveau no 70 de la ligne de Soissons Ă  Givet
CoordonnĂ©es 49° 41′ 37″ nord, 4° 40′ 38″ est
Caractéristiques de l'appareil
Type d'appareilTrain TER et transport exceptionnel
CompagnieSNCF, ?
Morts0
Blessés11 (dont l'employé de la SNCF)[1]

GĂ©olocalisation sur la carte : Ardennes
(Voir situation sur carte : Ardennes)
Accident de Saint-Pierre-sur-Vence
GĂ©olocalisation sur la carte : Grand Est
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Accident de Saint-Pierre-sur-Vence
GĂ©olocalisation sur la carte : France
(Voir situation sur carte : France)
Accident de Saint-Pierre-sur-Vence

L'événement provoque un vif émoi parmi les conducteurs de trains et les contrôleurs : 65 % à 85 % d'entre eux décident d'exercer leur droit de retrait. Le trafic ferroviaire est fortement perturbé dans toute la France durant les jours qui suivent.

DĂ©roulement

Contexte

Le passage à niveau, no 70, est situé sur la section de la ligne ferroviaire reliant Soissons à Givet comprise entre Mohon et Amagne.

Le convoi routier exceptionnel transportait une betteravière. L'accident s'est produit à peine deux ans après la réforme de 2017, qui interdit la traversée des passages à niveau difficiles aux véhicules de grand gabarit, à la suite de l'accident d'Allinges. Or, le jour de l'accident, le camion devait passer par une autre route, bloquée par un accident[2] - [3]. L'enquête doit déterminer si le chauffeur, un Allemand, a bien compris les consignes concernant le nouvel itinéraire[2]. Le convoi s'est engagé sur une route où les habitants pensaient que ce genre de convoi ne circulait plus[1].

Le TER, une rame automotrice Ă©lectrique tri-caisse, Ă©tait un autorail grande capacitĂ© (AGC)[4] en configuration « Ă©quipement agent seul », c'est-Ă -dire avec un seul agent formĂ© Ă  la sĂ©curitĂ© Ă  bord, le conducteur[1] (pas de contrĂ´leur ni d'accompagnant[4]). Il transporte 62 passagers[5]. Onze sont blessĂ©s, dont le conducteur et deux femmes enceintes[1].

La ligne de chemin de fer est une ligne Ă©lectrifiĂ©e Ă  25 000 volts et 50 Hz. La circulation est rĂ©gie par la signalisation de type block automatique Ă  permissivitĂ© restreinte (BAPR), Ă  « compteur d'essieux », et est non rĂ©gulĂ©e mais supervisĂ©e depuis Nancy. La radio fonctionne par GSM-R[5].

Le passage à niveau est situé à l'intersection du chemin de fer et de la route départementale D28a, appartenant au réseau routier des Ardennes et gérée par le conseil départemental des Ardennes. Le passage à niveau est à « Signalisation Automatique Lumineuse » (SAL) à 2 demi-barrières. Il est classé « avec difficulté de franchissement des véhicules de faible garde au sol[5] ».

Sur la route, le PN est signalĂ© Ă  150 mètres par deux panneaux de dangers, un A2a et un A7, une balise Ă  trois traits (150 mètres) et deux panonceaux indiquant en toutes lettres : « Signal Automatique » et « VĂ©hicules SurbaissĂ©s Attention[5] ».

La signalisation est asymétrique, dans un sens est présent un panneau de danger alors que dans l'autre sens est présent un panneau d’interdiction de circulation libellé « Interdit Aux Véhicules surbaissés[5] ».

Accident

Selon la SNCF, le TER accidentĂ© est parti de Sedan Ă  15 h 41, Ă  destination de la gare de Champagne-Ardenne TGV, en transportant 62 passagers. Il est arrivĂ© Ă  proximitĂ© du PN 70, sur le territoire de la commune de Boulzicourt, Ă  une vitesse de 136 km/h, sur une voie limitĂ©e Ă  140 km/h, soit près de 38 mètres par seconde. Compte tenu de la configuration de la voie, en courbe avant d'arriver sur le passage Ă  niveau, le conducteur ne voit celui-ci que 250 mètres avant l'obstacle, soit 6 s avant de heurter le convoi routier[5].

Lorsqu'il voit le convoi routier, le conducteur de train dĂ©clenche Ă  la fois l'arrĂŞt d'urgence et l'avertisseur sonore Ă  200 mètres[5]. Ă€ la suite de la seconde utilisation de ce dernier, le conducteur routier Ă©vacue son tracteur[5]. Le conducteur de train se protège derrière son siège[5].

La collision se produit Ă  16 h 12, Ă  une vitesse rĂ©duite Ă  118 km/h. Le tracteur du convoi routier se dĂ©tache de la remorque et se couche. Le TER, dont les deux premiers bogies dĂ©raillent, s'immobilise Ă  400 mètres après le lieu de la collision. Le TER dĂ©passe alors du gabarit de circulation qui lui est allouĂ©, et prĂ©sente un danger pour les trains arrivant en sens inverse (risque de collision frontale)[5] - [6].

L'alerte par signal radio ne fonctionne pas, et le tĂ©lĂ©phone portable du conducteur de train ne fonctionne pas[5]. Il se trouve alors Ă  devoir sĂ©curiser l'accident et doit, malgrĂ© une blessure Ă  la jambe, marcher sur 1,5 km pour Ă©viter un risque de suraccident par un autre train[4]. Muni de son gilet de haute visibilitĂ©, il rĂ©alise une procĂ©dure de « couverture d'obstacle » Ă  l'aide d'une torche Ă  flamme rouge, d'un signal d’arrĂŞt Ă  main et de pĂ©tards. Il appelle ensuite la gare de Charleville-MĂ©zières avec son tĂ©lĂ©phone portable Ă  16 h 16[5]. Au mĂŞme moment, un passager du train et un tĂ©moin prĂ©sent au passage Ă  niveau appellent les secours pour signaler l'accident[5].

Dix minutes après l'accident[6], vers 16 h 22[6], le train venant en sens inverse est arrêté à trois kilomètres du lieu du train accidenté[5], du fait de plusieurs coupures électriques et à la suite du signalement de l'accident par la régulation[5].

Certains passagers se sont blessés en brisant les fenêtres pour évacuer[1].

Les secours arrivent vers 16 h 40[5]. L'accident fait 11 blessés[2] ; 5 blessés sont évacués, dont deux femmes enceintes et le conducteur[5].

EnquĂŞte

La SNCF a réalisé une enquête interne immédiate indépendant de tous groupes de production dont le rapport a été rendu public[7] - [5].

Le BEA-TT a ouvert une enquête. Le procureur de la République de Charleville-Mézières estime que l'enquête sera longue[2].

L'enquête de la SNCF établit que les agents SNCF ont agi conformément aux procédures auxquelles ils sont soumis, et que le fonctionnement de chacun des éléments du passage à niveau, y compris son téléphone, est correct et usuel au moment de l'accident[5] : le train croiseur a été arrêté dans les dix minutes suivant le premier accident et une minute avant le sur-accident redouté.

Pour son enquête, l'autorité judiciaire saisit l'enregistrement de vidéosurveillance embarquée[5].

Conséquences

Au passage Ă  niveau

À la suite de l'accident, le service TER a été interrompu entre Charleville et Reims[8]. La betteravière n'a pu être relevée que vers 9 h 30. Le , le camion a été enlevé, mais la voie n'était pas encore réparée[2].

Au niveau national

Le drame provoque une importante émotion parmi les cheminots. Le conducteur du train, blessé, était seul pour sécuriser l'accident et prendre en charge les passagers.

CGT-Cheminots, FO-Cheminots, SUD rail et la Fgaac-CFDT estiment que la prĂ©sence d'un seul agent par train constitue un danger qui avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© signalĂ©[1] - [4]. Entre 15 000 et 20 000 conducteurs et contrĂ´leurs (sur 23 000, soit 65 Ă  85 % des effectifs)[9] dĂ©cident d'exercer leur droit de retrait dans la journĂ©e et le lendemain[1]. La CGT demande le retour des contrĂ´leurs pour tous les trains[4]. Le mouvement social devient national et dure plusieurs jours[4] et est une des consĂ©quences du malaise social que ressentent les cheminots depuis le printemps 2018, notamment liĂ© Ă  la rĂ©forme du statut de cheminot et l'ouverture Ă  la concurrence[9].

La direction de la SNCF considère que le mouvement social inopiné est lié à l'émotion compréhensible des agents. Le directeur de TER estime qu'il est illégal[1]. Elle invite les voyageurs a privilégier les modes de transport alternatifs[8].

Le Premier ministre Édouard Philippe dénonce un « détournement du droit de retrait qui s’est transformé en grève sauvage » et demande à la SNCF d'examiner de possible poursuites judiciaires[4]. Le secrétaire d’État aux transports Jean-Baptiste Djebbari estime que les syndicats ont organisé tout cela. La CGT estime que le problème aurait pu être résolu en quelques heures et que le premier ministre « veut le pourrissement [du mouvement] et use de provocations pour cela[4] ». Muriel Pénicaud, ministre du travail, estime que le danger n'était pas imminent et que la cessation du travail n'était pas justifiée. Le , la SNCF renonce à des poursuites judiciaires du fait de la reprise du travail, mais des retenues sur salaire seront effectuées[10]. Les poursuites sont finalement abandonnées début novembre[11].

La SNCF décide à titre exceptionnel d'indemniser les personnes n'ayant pas pu poursuivre leur voyage en raison de l'arrêt des trains[12]. Plusieurs élus régionaux, affiliés aux Républicains, expriment leur mécontentement concernant les services ferroviaires régionaux et demandent des indemnisations pour les abonnés des TER affectés[12].

Recommandations de la SNCF

Dans son rapport interne, la SNCF Ă©met quatre recommandations[5] :

  • le recours Ă  un tĂ©lĂ©phone portable professionnel, pouvant utiliser la technologie GSM, judicieusement programmĂ© ;
  • l'interrogation de la pertinence d'un supplĂ©ment de protection des circuits Ă©lectriques ;
  • l'interrogation de la pertinence du dispositif radio ;
  • l'enrichissement des prescriptions du « mĂ©tier conduite » relatives aux gestes mĂ©tiers Ă  mettre en Ĺ“uvre dans les situations oĂą une collision est inĂ©vitable.

Inspection du travail

Deux inspecteurs du travail, en Alsace et en Champagne-Ardenne, estiment que le droit de retrait était légitime, du fait du danger que constituent les trains avec un seul agent[13]. Muriel Pénicaud rappelle qu'il ne s'agit que d'avis individuels[10].

Un mois après l'accident, les services de l'inspection du travail de la région Hauts-de-France mettent en demeure la SNCF pour non respect du droit du travail car lorsque le conducteur est seul à bord, et doit abandonner le train et les passagers lors de la procédure de « couverture d’obstacle ». La SNCF réagit en signalant que l'ensemble des circulations sont conformes à la réglementation en vigueur[11].

Notes et références

  1. « SNCF : les images du spectaculaire accident dans les Ardennes qui paralyse le trafic en France », La Voix du Nord,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  2. « L'enquête avance après la collision entre un train et un camion à St Pierre-sur-Vence », sur France Bleu, (consulté le ).
  3. accident d'Yvernaumont.
  4. « Perturbations SNCF: retour sur cet accident qui a décidé les cheminots à exercer leur droit de retrait », Le Nouvel Obs,‎ (lire en ligne).
  5. https://www.sncf.com/sites/default/files/press_release/Rapport-denquete-DAS-Collision-PN70-Boulzicourt.pdf
  6. « Accident de TER dans les Ardennes: il a fallu 10 minutes pour stopper les autres trains », Le Parisien,‎ (lire en ligne).
  7. « Accident de TER: la SNCF va renforcer sa chaine d'alerte en cas d'accident », Le Parisien,‎ .
  8. « Ardennes : après la collision à Saint-Pierre-sur-Vence, trafic TER interrompu entre Charleville et Reims », sur France 3 Grand Est (consulté le )
  9. « SNCF: un conflit sur fond de malaise social persistant », sur Challenges (consulté le )
  10. Le Figaro avec AFP, « Grève surprise : la SNCF renonce aux poursuites judiciaires mais pas aux retenues sur salaires », sur Le Figaro.fr, (consulté le ).
  11. « Après l’accident du TER sans contrôleur, la SNCF des Hauts-de-France mise en demeure par l’inspection du travail », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )
  12. « La grève SNCF ravive le mécontentement dans certaines régions », sur Les Echos, (consulté le ).
  13. « Bataille juridique autour de la « grève surprise » de la SNCF », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le ).
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