1934 en dadaïsme et surréalisme
Éphémérides
Salvador Dali et Man Ray à Paris en 1934 (photographie de Carl Van Vechten)
Février
Salvador Dalí frôle l'exclusion du groupe surréaliste pour son tableau L'Énigme de Guillaume Tell[1] représentant un Lénine avec une fesse molle, et aussi, pour avoir tenu des propos réactionnaires.
Convoqué chez André Breton, Dalí, accompagné de Gala, arrive fiévreux, un thermomètre dans la bouche qu'il consulte dès que la discussion s'échauffe, et couvert de plusieurs couches de vêtements qu'il enlève une à une au fur et à mesure de sa plaidoirie qu'il termine torse nu[2].
En réaction aux violentes manifestations fasciste qui se sont déroulées à Paris, autour de l'Assemblée nationale, le , Breton prend l'initiative de réunir un grand nombre d'intellectuels autour du texte Appel à la lutte et rend visite à Léon Blum pour lui demander son appui. Ce dernier lui refuse tout débat politique. « Toute une matinée, dans son cabinet de travail de l'île Saint-Louis, je m'efforçai en vain de détourner la conversation du plan littéraire où il se mouvait d'ailleurs avec une aisance et une finesse extrêmes : malheureusement, ce n'était pas pour cela que j'étais venu. Il m'accabla de gentillesses, mais chaque fois que j'entrepris de le ramener à l'objet de ma visite, il s'en tint à des propos dilatoires[3]. »
Mars
Le groupe Rupture. 1er rg: Havrenne, Lorent, Bovy,Chavée. 2e rg: Deplus, Lefrancq. 3e rg: Michotte, Malva. Tête de Rimbaud par Van de Spiegele
Guy Mangeot, Histoire du surréalisme, ouvrage publié à Bruxelles.
Fondation du groupe Rupture à La Louvière par Achille Chavée, Albert Ludé, André Lorent et Marcel Parfondry. Ils seront ensuite rejoints par Fernand Dumont, Marcel Havrenne, Jean Dieu, André Bovy, Marcel Lefrancq, Bob Deplus, Max Michotte, Constant Malva (Alphonse Bourlard), René Lefebvre, Max Servais, Armand Simon, Pol Bury[4].- Création du groupe surréaliste de Prague par le poète Vítězslav Nezval, l'écrivain Karel Teige et les peintres Jindřich Štyrský et Toyen[5] - [6].
Avril
Antonin Artaud, Héliogabale ou l'anarchiste couronné, avec six vignettes d'André Derain[7]
Mai
- À Bruxelles, l'éditeur Albert Skira et E. L. T. Mesens organisent l'exposition Minotaure au Palais des Beaux-arts[8].
Invité par Messens et Paul Nougé à l'occasion de l'exposition Minotaure, Breton donne une conférence : Qu'est-ce que le surréalisme ? : « Les propos malséants qu'on nous impute, les attaques soi-disant inconsidérées, les injures, les ruptures, les scandales - tout ce qu'on nous reproche tant - nous les avons trouvés sur la même route que les poèmes […] Aujourd'hui plus que jamais la libération de l'esprit, fin expresse du surréalisme, aux yeux des surréalistes, exige pour première condition la libération de l'homme, ce qui implique que toute entrave à celle-ci doit être combattue avec l'énergie du désespoir, qu'aujourd'hui plus que jamais les surréalistes comptent pour cette libération de l'homme en tout et pour tout sur la Révolution prolétarienne. »[9] - [10] - [11].
Pour l'édition de ce texte, René Magritte signe la couverture du livre[12].
Breton rencontre Jacqueline Lamba. Quelques jours plus tard, il se souvient du poème Tournesol, écrit en 1923[13], qui évoque, à peu de chose près, les circonstances de cette rencontre à l'ombre de la Tour Saint-Jacques[14].
Juin
Rupture entre Artaud et Roger Vitrac à la suite de la création au Théâtre de l'Atelier de la pièce de Le Coup de Trafalgar dont la mise en scène est confiée à Marcel Herrand. Artaud : « Entre le surréalisme gratuit mais poétique des Mystères de l'amour et la satire explicite d'une pièce de boulevard ordinaire, Roger Vitrac n'a pas su choisir ; et sa pièce sent le parisianisme, l'actualité, le boulevard […] La pièce porte la peine d'appartenir à un système et à un monde condamné, et elle doit disparaître avec ce monde. »[15].- Petite anthologie poétique du surréalisme qui rassemble les surréalistes du moment de Breton à Tristan Tzara à l'exception des poètes édités chez Gallimard[16].
Juillet
- René Char, Le Marteau sans maître[17]
- Publication à Bruxelles du premier numéro de Documents 34 (directeur Jean Stéphane et rédacteur en chef Mesens) consacré au surréalisme. Nombreux dessins d'Yves Tanguy et un dialogue avec Breton : « B. Qu'est-ce que ta peinture ? T. C'est une petite fumée blanche. B. Qu'est-ce que la Bretagne ? T. C'est un fruit mangé par les guêpes. B. Qu'est-ce que tu préfères ? T. C'est un reflet sur l'eau. B. Qu'est-ce que l'amour physique ? T. C'est la moitié du plaisir. B. Qu'est-ce que la vieillesse ? T. C'est un lâche. »[18].
- Document 34 publie Intervention surréaliste, texte écrit par René Magritte, Mesens, Paul Nougé, Scutenaire et André Souris, dans lequel ils s'interrogent sur les conditions d'une activité révolutionnaire hors du parti communiste[19].
Août
- Benjamin Péret, De derrière les fagots, avec une eau-forte de Pablo Picasso[20].
Septembre
- André Breton, Point du jour[16]
Octobre
- Antonin Artaud
- Appel à la jeunesse : « Je ne peux rien avec de l'opium qui est bien la plus abominable tromperie, la plus redoutable invention de néant qui ait fécondé des sensibilités humaines. Mais je ne peux rien sans à un moment donné en moi-même cette culture de néant. »
- Le Théâtre et la peste[21] publié dans la NRF.
Décembre
Hans Bellmer, Poupée : variations sur le montage d'une mineure articulée[22], série de photos parues dans la revue Minotaure.- Première exposition parisienne de Victor Brauner à la Galerie Pierre. Le catalogue est préfacé par André Breton[20].
- Paul Eluard, La Rose publique[20].
Cette année-là
- Rencontre Breton / Oscar Dominguez.
- Aimé Césaire, Léon-Gontran Damas et Léopold Sédar Senghor créent la revue L'Étudiant noir où le surréalisme est considéré comme un allié plus qu'un modèle.
- En découvrant le tableau de Giorgio De Chirico Mélancolie et mystère d'une rue, le peintre belge Paul Delvaux a la révélation du surréalisme.
- Robert Desnos adhère et participe à divers mouvements d'intellectuels antifascistes.
- Max Ernst rencontre Alberto Giacometti et commence à sculpter.
- Étudiant à Paris, Georges Henein, Égyptien d'origine copte, adhère au groupe surréaliste[23].
- Adhésion de Pierre Mabille.
- À quatorze ans, Gisèle Prassinos est présentée à Breton, René Char et Eluard.
- Adhésion au surréalisme du peintre et écrivain suisse Kurt Seligmann.
- Fondation du Groupe des surréalistes en Tchécoslovaquie.
Œuvres
- Antonin Artaud
- Héliogabale ou l'anarchiste couronné, avec six vignettes d'André Derain
- Hans Bellmer
- Poupée : variations sur le montage d'une mineure articulée, série de photographies
- Ejler Bille
- Picasso, surréalisme, abstraction, ouvrage critique publié au Danemark[24]
- Vilhelm Bjerke-Petersen
- L'Animalité dans la femme appartient à la nuit, huile sur toile
- Maurice Blanchard
- Malebolge, poèmes : « La plus belle sculpture / C'est le pavé de grès / C'est le pavé cubique / Le lourd pavé qu'on jette
Sur la gueule des flics / Par les chants et le prières / Par le sang le fer et l'art / De s'en servir »[25]
- Malebolge, poèmes : « La plus belle sculpture / C'est le pavé de grès / C'est le pavé cubique / Le lourd pavé qu'on jette
- Victor Brauner
- L'Étrange K de Monsieur K, huile sur toile. Breton : « La grande marmite nocturne et immémoriale gronde au loin et à chaque coup de gong frappé - c'est son couvercle qui bat - glissent par l'entrebâillement toutes sortes d'êtres et d'objets douteux qui se répandent dans la campagne mentale. »[26]
- Hitler, huile sur carton[27]
- Portrait d'André Breton[28]
- Les Prestiges de l'air[29], huiles sur toile
- André Breton
- Page-Objet à Marcelle Ferry, boîte surréaliste[30]
- Point du jour, essais
- René Char
- Le Marteau sans maître : « Mains obscures mains si terribles / Filles d'excommuniées / Faites saigner les têtes chastes / Derrière les embruns on a nommé le sang / La chair toute puissante ranimée dans les rêves / Nourricière du phénix / Mort minuscule de l'été / Dételle-moi mort éclairante / À présent je sais vivre »
- Salvador Dalí
- Paul Delvaux
- Femmes en dentelle, huile sur toile
- Le Paravent, huile sur toile
- Oscar Dominguez
- L'Arrivée de la Belle Époque, huile sur toile[33]
- Paul Eluard
- La Rose publique
- Max Ernst
- Habakuk, sculpture
- Pétales et jardin de la nymphe Ancolie, peinture à la résine synthétique sur plâtre, transférée sur bois[34].
- Alberto Giacometti
- L'Objet invisible ou Mains tenant le vide, plâtre[35]
- Roger Gilbert-Lecomte
- La Vie l'amour la mort le vide et le vent[36]
- Valentine Hugo
- Rêve du , huile sur toile
- Guy Mangeot
- Histoire du surréalisme[37]
- René Magritte
- E. L. T. Mesens
- Intervention surréaliste
- Joan Miró
- Homenaje à Prats, collage, crayon graphite et fusain sur papier[40]
- Henry Moore
- Figure, sculpture
- Richard Oelze
- Tourments quotidiens, huile sur toile
- Benjamin Péret
- De derrière les fagots, avec une eau-forte de Pablo Picasso
- Pablo Picasso
- Composition (au papillon), collage[41]
- Nu dans un jardin, huile sur toile
- Man Ray
- L'Échiquier surréaliste, photomontage des portraits de Breton, Ernst, Dalí, Jean Arp, Tanguy, René Char, René Crevel, Eluard, Giorgio De Chirico, Alberto Giacometti, Tzara, Picasso, René Magritte, Brauner, Péret, Guy Rosey, Joan Miró, Mesens, Georges Hugnet, Man Ray.
- Kurt Seligmann
- Vagabondages héraldiques
- Philippe Soupault
- Yves Tanguy
- Toyen
- La Voix de la forêt, huile sur toile[45]
- Alois Wachsman
- Œdipe se lavant, huile sur toile[46]
Notes et références
- René Passeron, Surréalisme, Terrail, 2005, p. 114.
- Henri Béhar, André Breton le grand indésirable, Paris, Fayard, 2005, p. 303.
- André Breton, Œuvres complètes, tome 3, Bibliothèque de la Pléiade, éditions Gallimard, Paris, p. 541.
- S. Alarcia, Le Groupe Rupture, in Cahiers marxistes n° 174, juin-juillet 1990.
- Adam Biro & René Passeron, Dictionnaire général du surréalisme et de ses environs, Genève et Paris, Office du livre et Presses universitaires de France, 1982, p. 405.
- Notice biographique, dans Vítězslav Nezval : poèmes choisis, éditions Seghers, Paris, 1954, p. 85.
- Évelyne Grossman, Chronologie d'Antonin Artaud, dans Artaud Œuvres, Gallimard, Quarto, Paris, 2004, p. 1741.
- Xavier Canonne, Le Surréalisme en Belgique. 1924-2000, Arles, Actes Sud, 2007, p. 29 : « […] - même si elle ne dit pas son nom - la première exposition internationale du surréalisme dans le monde. » et Alain & Odette Virmaux, Les Grandes figures du surréalisme international, Bordas, Paris, 1994, p. 31.
- Béhar, op. cit., p. 305.
- André Breton, Œuvres complètes, tome 2, Bibliothèque de la Pléiade, Éditions Gallimard, Paris, p. 230.
- Cannone, op. cit., p. 29 date cette conférence du 1er juin.
- Alain Cueff dans Beaux Arts magazine n° 104, septembre 1992, p. 62.
- Clair de terre
- Béhar, op. cit., p. 311.
- Grossman, op. cit.,{p. 1741.
- Behar, op. cit., p. 305.
- Marcelle Dumas & Lucien Scheler, Paul Eluard, Œuvres complètes, Chronologie, tome 1, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1968, p. LXVIII.
- Agnès Angliviel de la Beaumelle, Yves Tanguy, Centre Pompidou, Paris, 1982, p. 201.
- Biro & Passeron, op. cit., p. 279 et Cannone, op. cit., p. 29, situe la parution en juin.
- Dumas & Scheler, op. cit., p. LXVIII.
- Grossman, op. cit., p. 1742.
- Reproduction dans Werner Spies, La Révolution surréaliste, p. 76.
- Biro & Passeron, op. cit., p. 205.
- Biro & Passeron, op. cit., p. 57.
- Jean-Louis Bédouin, La Poésie surréaliste, Seghers, Paris, 1964, p. 53.
- Paris, Centre Pompidou, Musée national d'art moderne. Citation dans André Breton, Le Surréalisme et la Peinture [LSELP], Gallimard, 1928-1965, p. 120 et reproduction dans Didier Ottinger (sous la direction de), Dictionnaire de l'objet surréaliste, Gallimard & Centre Pompidou, Paris, 2013, p. 162.
- 22 × 16 cm, Musée d'art moderne Centre Georges-Pompidou, Paris. Don de Aube Breton-Elléouët. Reproduction dans Artpress n° 333, avril 2007, p. 32.
- Reproduction dans Philippe Audoin, Les Surréalistes, p. 48.
- Reproduction dans Gabriele Crepaldi, L'Art moderne 1900-1945, Gründ, 2006, p. 217
- 10 × 6,5 cm. Rome, galleria nazionale d'arte moderna e contemporanea. Reproduction dans Beaux Arts magazine n° 90, mai 1991, p. 61.
- Reproduction dans René Passeron, Surréalisme, Terrail, 2005, p. 113.
- 17,9 × 13,9 cm. Fondation Gala-Salvador-Dalí. Reproduction dans Artension n° 116, nov.-déc. 2012, p. 71.
- Reproduction dans Breton, [LSELP], p. 81.
- Peinture réalisée pour le Corso Bar de Zurich. 415 × 531 cm, Kuntshaus, Zurich. Reproduction dans L'Œil n° 597, décembre 2007 p. 86.
- Saint-Paul-de-Vence, fondation Marguerite et Aimé Maeght. Reproduction dans Breton, [LSELP], p. 70 et description complète dans Ottinger, op. cit., p. 211.
- Biro & Passeron, op. cit., p. 183.
- René Henriquez éditeur, Bruxelles, In-8°, 103 p. Ouvrage disponible sur
- 74 × 116 cm, collection particulière. Reproduction dans Jacques Meuris, René Magritte, Taschen, Cologne, 1997, p. 37.
- 25 × 18 cm, Galerie Isy Brachot, Bruxelles. Reproduction dans Meuris, op. cit., p. 38.
- 63,3 x 47 cm. Fundació Joan Miró, Barcelone. Reproduction dans Parcours des arts n° 44, octobre 2015, p. 7. Joan Prats, ami de Miró et galeriste.
- Reproduction dans Breton, [LSELP], p. 102.
- "Autour des thèmes de l'enfance et de la mort, c'est l'histoire d'une poursuite inscrite dans une géographie parisienne, qui en fait le plus surréaliste de tous les poèmes cinématographiques", Biro & Passeron, op. cit., p. 99.
- Reproduction dans Angliviel de la Beaumelle, op. cit., p. 111.
- Reproduction dans Angliviel de la Beaumelle, op. cit., p. 55.
- 111,5 × 84 cm. Musée d'art et d'histoire, Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Reproduction dans Connaissance des arts n° 714, avril 2013, p. 65.
- Galerie régionale Hradie Králové. Reproduction dans Biro & Passeron, op. cit., p. 426.
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