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Élision

L’élision est l’effacement d’une voyelle en fin de mot devant la voyelle commençant le mot suivant. En termes de phonĂ©tique, c'est un type d’apocope consistant en l’amuĂŻssement de la voyelle finale d’un mot devant un autre mot Ă  initiale vocalique.

C'est une forme particuliÚre de synalÚphe, c'est-à-dire de prononciation en une seule syllabe de deux voyelles consécutives appartenant à des syllabes différentes (voyelles dites en hiatus).

Le terme, du genre féminin, provient du latin elisio (génitif : elisionis, féminin), du supin elisum, du verbe elidere (« Îter »).

Élision en français

L’élision est obligatoire en français pour le phonĂšme /ǝ/ (dit « e caduc » ou « e muet ») en fin de mot devant une voyelle ; elle est alors parfois notĂ©e dans l’orthographe par une apostrophe. L’élision n’est en effet reprĂ©sentĂ©e graphiquement que pour certains mots, parmi lesquels :

  • le : le + arbre → l’arbre ;
  • de : de + arbre → d’arbre ;
  • ce (pronom) : ce + Ă©tait → c’était.

Dans la plupart des cas, elle n’est pas Ă©crite mais bien prononcĂ©e : chante avec moi → chant’avec moi, ils chantent + avec moi → ils chant’avec moi. Dans le vers poĂ©tique français, l’élision du « e caduc » suit des rĂšgles strictes (dĂ©crites dans l’article sur le vers), pour des raisons mĂ©triques, en fin de mot devant voyelle ou en fin de vers :

Quand vous serez bien vieille, au soir, Ă  la chandelle (Pierre de Ronsard)
=
Quand vous serez bien vieill’, au soir, à la chandell’

La lecture correcte d’un vers passe par celle des liaisons. Or, s’il est normal aujourd'hui de prononcer tu manges enfin comme tu mang’enfin (le s de -es n’appelle pas une liaison obligatoire dans le français actuel), dans un vers classique il faudra lire tu mange-z-enfin, avec e « caduc » et liaison.

D’autres voyelles peuvent ĂȘtre concernĂ©es, comme /i/ dans si : si + il → s’il. Les Ă©lisions d’autres voyelles que le e « caduc » sont rares et toujours Ă©crites, sauf dans la langue parlĂ©e, dans un registre courant : tu es sera rĂ©alisĂ© [te], qu’on pourrait transcrire t’es.

L’élision permet donc d’éviter le hiatus mais ce n’est pas le seul procĂ©dĂ© disponible. En français toujours, le hiatus peut aussi ĂȘtre Ă©liminĂ© par l’insertion d’une consonne euphonique. Par exemple, ce, quand il est dĂ©terminant devient cet (par imitation du fĂ©minin) : ce + arbre → cet arbre, ou bien dans donne-t-il.

Disjonction

Certains mots dĂ©butant par une voyelle ne peuvent ĂȘtre prĂ©cĂ©dĂ©s d’un autre mot Ă©lidĂ©. On dit dans ce cas qu’il y a disjonction. Les disjonctions les plus frĂ©quentes en français sont dues Ă  la prĂ©sence d’un h « aspirĂ© », qui interdit tout enchaĂźnement entre deux mots (liaison ou Ă©lision). Par exemple, haricot commence par un tel h : on doit donc dire le haricot /lə aʁiko/ et non *l'haricot /laʁiko/ (dans la langue familiĂšre, le h « aspirĂ© » est souvent omis).

D’autres empĂȘchent l’élision sans commencer par un tel h : ce sont des mots frĂ©quents et monosyllabiques dont on a voulu conserver l’identitĂ© : onze (ainsi que onziĂšme), un (quand il est numĂ©ral et non article), huit (ainsi que huitiĂšme, huitante et huitantiĂšme – mais on fait la liaison dans les nombres composĂ©s : dix-huit /diz‿Ʉit/, vingt-huit /vɛ̃t‿Ʉit/). Par exemple, on dira le Onze de France, je compte de un Ă  trois, numĂ©ro gagnant : le huit).

Orthographe

L’apostrophe est le symbole typographique propre Ă  l’élision. MĂȘme si toutes les Ă©lisions n’en sont pas marquĂ©es, toute apostrophe procĂšde de l’élision.

Or, dans certains mots composĂ©s, elle est utilisĂ©e sans ĂȘtre logiquement justifiĂ©e. Presqu’üle est logique, mais les graphies anciennes grand’mĂšre, grand’rue ou la graphie actuelle prud’homme ne sont pas motivĂ©es. En effet, il n’y a Ă©tymologiquement pas de -e Ă©lidĂ© que l’apostrophe remplacerait. Grand dans les mots composĂ©s dont le deuxiĂšme terme est fĂ©minin (mĂšre, rue) est un ancien fĂ©minin (grant en ancien français, Ă©crit grand plus tard). Grand-mĂšre et grand-rue sont donc des constructions archaĂŻques qui ne nĂ©cessitent pas l’apostrophe. Le 9e dictionnaire de l’AcadĂ©mie française continue d'autoriser la graphie grand’mĂšre[1]. Quant Ă  prud'homme, il devrait (Ă©tymologiquement) s’écrire soit prud homme soit prudhomme car c'est un mot composĂ© d’une forme archaĂŻque de preux, Ă  savoir prod, sans e final (c’est un masculin).

Création de nouveaux mots par élision

L’élision peut ĂȘtre Ă  l’origine de nouveaux mots issus d’une agglutination puis d’une mĂ©tanalyse : moyen français ma + amie → m’amie est interprĂ©tĂ© en français moderne mamie, rĂ©interprĂ©tĂ© ensuite par mĂ©tanalyse en ma + mie.

Dans d’autres langues

L’élision ne se limite pas au français ; de nombreuses langues la pratiquent, comme le latin (sans notation particuliĂšre ; l’élision se dĂ©couvre grĂące Ă  la scansion de vers), le grec (notĂ©e par une apostrophe), le gaĂ©lique, l’italien (avec apostrophe Ă©crite), etc.

Notez que l’apostrophe ne reprĂ©sente pas systĂ©matiquement une Ă©lision : celle de l’anglais I’m « je suis » sert Ă  remplacer la voyelle a de am, tombĂ©e par aphĂ©rĂšse, celle dans doesn’t (pour does not) l’étant par amuĂŻssement au sein d’un groupe de mots univerbĂ©s. Aucune n’est une voyelle finale devant voyelle initiale.

Références

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Pierre Pellegrin (dir.) et Myriam Hecquet-Devienne, Aristote : ƒuvres complĂštes, Éditions Flammarion, , 2923 p. (ISBN 978-2081273160), « RĂ©futations sophistiques », p. 457. Ouvrage utilisĂ© pour la rĂ©daction de l'article
  • Quintilien (trad. Jean Cousin), De l'Institution oratoire, t. I, Paris, Les Belles Lettres, coll. « BudĂ© SĂ©rie Latine », , 392 p. (ISBN 2-2510-1202-8).
  • Antoine Fouquelin, La RhĂ©torique françoise, Paris, A. Wechel, (ASIN B001C9C7IQ).
  • CĂ©sar Chesneau Dumarsais, Des tropes ou Des diffĂ©rents sens dans lesquels on peut prendre un mĂȘme mot dans une mĂȘme langue, Impr. de Delalain, (rĂ©impr. Nouvelle Ă©dition augmentĂ©e de la Construction oratoire, par l’abbĂ© Batteux.), 362 p. (ASIN B001CAQJ52, lire en ligne)
  • Pierre Fontanier, Les Figures du discours, Paris, Flammarion, (ISBN 2-0808-1015-4, lire en ligne).
  • Patrick Bacry, Les Figures de style et autres procĂ©dĂ©s stylistiques, Paris, Belin, coll. « Collection Sujets », , 335 p. (ISBN 2-7011-1393-8).
  • Bernard Dupriez, Gradus, les procĂ©dĂ©s littĂ©raires, Paris, 10/18, coll. « Domaine français », , 540 p. (ISBN 2-2640-3709-1).
  • Catherine Fromilhague, Les Figures de style, Paris, Armand Colin, coll. « 128 Lettres », 2010 (1re Ă©d. nathan, 1995), 128 p. (ISBN 978-2-2003-5236-3).
  • Georges MoliniĂ© et MichĂšle Aquien, Dictionnaire de rhĂ©torique et de poĂ©tique, Paris, LGF - Livre de Poche, coll. « EncyclopĂ©dies d’aujourd’hui », , 350 p. (ISBN 2-2531-3017-6).
  • Michel Pougeoise, Dictionnaire de rhĂ©torique, Paris, Armand Colin, , 228 p., 16 cm × 24 cm (ISBN 978-2-2002-5239-7).
  • Olivier Reboul, Introduction Ă  la rhĂ©torique, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Premier cycle », , 256 p., 15 cm × 22 cm (ISBN 2-1304-3917-9).
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