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Suxaméthonium

Le suxaméthonium (ou succinylcholine) est le seul curare dépolarisant utilisé en médecine, sous forme de chlorure ou d'iodure de suxaméthonium (Anectine, Célocurine). Sa puissance et son délai d'action très court permettent de réaliser rapidement et dans d'excellentes conditions l'intubation endotrachéale, ce qui en fait un médicament de choix dans le cadre de la médecine d'urgence, en réanimation et en anesthésie. La brièveté de son action permet une reprise rapide de la respiration, ce qui en fait également un agent utile en cas d'intubation difficile. Toutefois, ses effets adverses, rares mais redoutables, en limitent ses indications.

Suxaméthonium
Image illustrative de l’article Suxaméthonium
Chlorure de suxaméthonium
Identification
Nom UICPA 2,2'-[(1,4-dioxobutane-1,4-diyl)bis(oxy)]bis(N,N,N-triméthyléthanaminium)
Synonymes

Succinylcholine

No CAS 306-40-1
71-27-2 (2Cl−)
No CE 200-747-4 (Cl)
Code ATC M03AB01
PubChem 5314
SMILES
InChI
Propriétés chimiques
Formule C14H30N2O42+
Masse molaire[1] 290,399 ± 0,014 9 g/mol
C 57,9 %, H 10,41 %, N 9,65 %, O 22,04 %,
Données pharmacocinétiques
Biodisponibilité 100 %
Métabolisme Hydrolyse par les
pseudocholinestérases plasmatiques
Demi-vie d’élim. 2 à 4 minutes
Excrétion

rénale (10 %)

Considérations thérapeutiques
Classe thérapeutique Curare dépolarisant
Voie d’administration Intraveineuse

Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire.

Propriétés

Effets pharmacologiques

Le suxaméthonium est un dimère d'acétylcholine. Il agit en se fixant de façon non compétitive sur les récepteurs nicotiniques au sein de la plaque motrice, entraînant une dépolarisation prolongée de la membrane musculaire et la rendant ainsi inexcitable ; la particularité du suxaméthonium est de résister à l'action de l'acétylcholinestérase qui, de façon physiologique, dégrade l'acétylcholine et annule son effet en quelques millisecondes. À l'inverse, le suxaméthonium reste fixé sur le récepteur, n'étant inactivé par les pseudocholinestérases du plasma qu'après plusieurs minutes.

Effets cliniques

Le suxaméthonium induit une paralysie totale de la musculature volontaire dans un délai de 30 à 60 secondes et pour une durée brève, n'excédant pas 10 minutes (hors déficit constitutionnel[2] ou acquis en pseudocholinesthérases[3]). En raison de son activité dépolarisante, son premier signe clinique d'action est l'apparition de fasciculations musculaires.

Utilisation en médecine

Indications

En raison de son délai d'action exceptionnellement court et de sa faible durée d'action, le suxaméthonium est le curare de choix pour l'intubation en séquence rapide chez un patient préalablement sédaté, en l'absence de contre-indications et dans certaines situations bien codifiées (notamment patients à risque d'inhalation de liquide gastrique comme au cours d'une césariennes en urgence). Le suxaméthonium est indiqué pour la curarisation des patients traités par sismothérapie. Il est également possible, mais non recommandé par la SFAR[4] de l'utiliser pour intuber dans les interventions chirurgicales programmées de courte durée. En contrepartie, il faut lui préférer ou lui adjoindre un curare non dépolarisant pour les interventions nécessitant une curarisation de plus de dix minutes.

Ampoule de Suxaméthonium ou succinylcholine (Celocurine)

Contre-indications

Le suxaméthonium ne peut être utilisé qu'en présence de matériel d'anesthésie permettant l'intubation et l'assistance respiratoire. Il est formellement contrindiqué en cas d'hyperkaliémie (risque d'aggravation aigüe avec conséquences cardiaques), d'allergie à ce produit ou à un curare non dépolarisant (risque de choc anaphylactique), d'antécédent personnel ou familial de maladie de l'appareil neuromusculaire (hyperthermie maligne, myopathie, paraplégie…), de déficit en pseudocholinestérases (risque de curarisation prolongée), d'immobilisation prolongée (patients hospitalisés depuis plus de 48 h).

Effets indésirables

Les effets indésirables du suxaméthonium sont le principal obstacle à son utilisation routinière. Les plus fréquents sont aussi les moins graves : ils sont représentés par la bradycardie (prévenue par l'atropine), l'hypotension artérielle, le spasme des masséters, l'augmentation transitoire de la pression intraoculaire, intraabdominale et intracrânienne, et par des courbatures au réveil. Les autres sont bien plus rares, et certains peuvent être fatals : rhabdomyolyse aiguë avec hyperkaliémie massive en cas de fragilité musculaire, réaction allergique pouvant aller jusqu'au choc anaphylactique, déclenchement d'une crise d'hyperthermie maligne chez les sujets prédisposés en cas d'association aux anesthésiques halogénés, curarisation prolongée chez les sujets présentant un déficit en pseudocholinestérases plasmatiques.

Avancées

Depuis des années la recherche se focalise sur la mise au point d'un curare non-dépolarisant qui présenterait les avantages du suxaméthonium (délai d'action rapide, durée d'action courte, très bonnes conditions d'intubation) sans en avoir les effets indésirables. À ce jour, aucune molécule ne réunit tous ces critères. En cas de contre-indication au suxaméthonium, le rocuronium (qui agit en 90 secondes) semble actuellement le meilleur choix pour intuber en cas d'estomac plein, au prix d'une curarisation de plus de 40 minutes.

Divers

Le suxaméthonium fait partie de la liste des médicaments essentiels de l'Organisation mondiale de la santé (liste mise à jour en )[5].

L'assassin américain David Davis a tué son épouse Shannon Davis le dans l'Ohio en lui injectant de la succinylcholine dans l'épaule[6]. Après une cavale dans les Samoa américaines[7], le meurtrier est condamné à l'emprisonnement à perpétuité. Il est mort au sein du service hospitalier de la prison d'Etat de Jackson dans le Michigan, le [8].

Dans le livre de Tom Clancy, Les Dents Du Tigre, la succinylcholine est mentionnée et utilisée comme un poison très efficace.

Dans Whitechapel, saison 2 épisode 3, les frères Kray entreprennent d'assassiner le capitaine Chandler à l'aide d'une malette piégée au cholure de suxaméthonium.

Notes et références

  1. Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  2. Elsevier Masson, « Curarisation prolongée et mémorisation après succinylcholine : déficit en butyrylcholinestérase », sur EM-Consulte (consulté le )
  3. V. Koseoglu, J. Chiang et K. W. Chan, « Acquired pseudocholinesterase deficiency after high-dose cyclophosphamide », Bone Marrow Transplantation, vol. 24, no 12,‎ , p. 1367–1368 (ISSN 0268-3369, PMID 10627651, DOI 10.1038/sj.bmt.1702097, lire en ligne, consulté le )
  4. Bureau Admin, « Curarisation et décurarisation en anesthésie - La SFAR », sur Société Française d’Anesthésie et de Réanimation, (consulté le )
  5. WHO Model List of Essential Medicines, 18th list, avril 2013
  6. (en) « Medical investigators found a lethal drug in the body... », sur UPI (consulté le )
  7. (en) Christopher P. Holstege, Thomas Neer, Gregory B. Saathoff et R. Brent Furbee, Criminal Poisoning : Clinical and Forensic Perspectives, Jones & Bartlett Publishers, , 352 p. (ISBN 978-1-4496-7152-5, lire en ligne)
  8. (en) « Man infamous for killing wife with horse tranquilizer in 1980 dies in Jackson prison hospital », sur mlive, (consulté le )

Lien externe

https://sfar.org/curarisation-et-decurarisation-en-anesthesie/

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