Salaire minimum au Québec
Le salaire minimum au Québec est le montant horaire minimal qu'un employeur peut rémunérer un employé pour un travail effectué au Québec. Il est encadré par la Loi sur les normes du travail et le Règlement sur les normes du travail pris en application de cette loi.
Depuis le , le salaire minimum québécois est de 15,25 $ de l'heure, sauf pour les salariés rémunérés au pourboire qui se situe à 12,20 $ de l'heure[1].
Le salaire minimum au Québec est au cinquième rang parmi les provinces et territoires canadiens, derrière le Yukon (16,77 $), le Nunavut (16,00 $), la Colombie-Britannique (15,65 $) et l'Ontario (15,50 $)[2].
La loi sur le salaire minimum veut qu’un employeur se voit obligé de payer un employé ayant un emploi au Québec. Étant une loi garante par la Loi sur les normes du travail et qui défend les conditions des salariés, elle stipule que « les personnes salariées ont le droit de recevoir, en contrepartie du travail effectué, au moins le salaire minimum fixé par règlement par le gouvernement, quel que soit le mode de paiement fixé par l’employeur »[3].
Historique
Année | Salaire ($/h)[4] - [5] | Salaire ($2022/h)[6] |
---|---|---|
1965 | 0,70 | 6,27 |
1970 | 1,35 | 10,18 |
1975 | 2,60 | 12,46 |
1980 | 3,65 | 12,10 |
1985 | 4,00 | 9,55 |
1990 | 5,00 | 9,58 |
1995 | 6,00 | 10,46 |
2000 | 6,90 | 10,92 |
2005 | 7,45 | 10,60 |
2010 | 9,00 | 11,73 |
2015 | 10,35 | 12,53 |
2020 | 12,50 | 13,93 |
Salaire horaire général au 1er janvier. |
La première intervention de l’État en relations de travail fut en 1885, quand le gouvernement du Québec sanctionna l’Acte des manufactures, et introduit des normes minimales de travail. Cette loi était semblable à une loi ontarienne passée l'année précédente, laquelle se réfèrait aux lois britanniques (Factory Act), de 1833 interdisant le travail aux moins de 9 ans et amendées plusieurs fois[7]. La première loi touchant le salaire minimum au Québec est adopté par le Parlement du Québec en 1919 par le gouvernement de Lomer Gouin. Cette loi ne vise que le travail des femmes[8]. Elle ne sera toutefois mise en vigueur qu'entre 1926 et 1928[9] - [10].
Crise de 1929
À la suite du krach de 1929, les salaires « hebdomadaires » (44-55 heures) d'ouvrières expérimentées, qui variaient de 15 à 20 $ avant la crise, furent réduits au minimum légal en 1932, soit de 11 à 12,50 $ à Montréal et de 9 à 10 $ ailleurs. Certaines compagnies engagèrent des hommes ou des femmes non expérimentées, payés encore moins, n'étant pas couverts par la loi[11].
Loi des salaires raisonnables
En 1937, le gouvernement unioniste de Maurice Duplessis adopte la loi des salaires raisonnables permettant un salaire minimum légal. Le gouvernement met également sur pied l'Office des salaires raisonnables[12], un tribunal d'arbitrage évaluant les questions de salaires et de conditions de travail. Modifiée en 1940, le gouvernement d'Adélard Godbout abolit l'Office des salaires raisonnables et le remplaça par la Commission du salaire minimum. La loi du salaire minimum s’applique à tous les salariés du Québec. Son mandat est non seulement d'instaurer des conditions de travail et des salaires, mais aussi d’assurer son bon fonctionnement.
Lutte contre la pauvreté
C’est en 2002 que l’Assemblée nationale du Québec met de l'avant l’adoption d’une nouvelle loi qui lutte contre la pauvreté ainsi que toutes formes d’exclusion sociale : la loi 112[13]. L’adoption est mise de l’avant par une coalition de divers acteurs sociaux qui se mobilisent face à cette cause et qui cherchent à améliorer les conditions des gens dans la société. La loi est occasionnée par l’intérêt commun des acteurs, intérêt perçu et partagé comme une opinion majoritaire et collective capable d’influencer la politique. Au Québec, les acteurs politiques, étant souvent des syndicats et des organisations, ont la capacité d’obtenir des négociations et des ententes, afin de défendre des intérêts associés tant à l’État qu’à la société. Il s’agit d’instaurer des dispositifs d’interventions conformes, des solutions obtenues grâce à des échanges et des négociations qui consentent à un équilibre entre les deux. Ces organismes communautaires sont aussi une structure qui tentent d’élargir ses rapports avec l’État, notamment pour mettre en place des tables de concertation[13]. Selon la politologue Pascale Dufour, donner un rôle essentiel à ces acteurs en augmentant leur implication devient un atout, l’accessibilité et l’influence qu’ils ont permettent la promotion directe de cette cause. Cette relation avec l’État québécois permet à ces réseaux de répartir des informations communes et d’engendrer des mobilisations. C’est la « structure de représentation » de la société québécoise, les représentants des collectivités font entendre leur voix et réussissent à influencer les décisions publiques sociales sur la Fédération des travailleurs du Québec, indépendamment du gouvernement au pouvoir[13]. Les discussions, les échanges et les négociations suscitent un dialogue et développent des points communs, jusqu’à concevoir des résolutions aux problèmes. En exposant la structure inégale dont les intérêts sont en permanence opprimés, les acteurs s’engagent dans une mobilisation sociale, en relation avec la question de la pauvreté qui permet ensuite de transformer et modifier la loi.
La mobilisation vers la quête de la nouvelle loi 112 expose des revendications, dont éliminer les inégalités et réévaluer le salaire minimum et l’équité salariale[13]. Ces demandes occasionnent la création d’un Comité consultatif qui devra se pencher sur l’économie sociale de la société québécoise, dont le salaire minimum qui connaît une augmentation considérable. La formation de divers programmes et services prend de l’expansion, et elle conduit à une hausse salariale et des normes touchant l’aide sociale. Ces constats donnent naissance au Collectif qui permet une loi sur l’élimination de la pauvreté englobant l’ensemble des requêtes[13]. C’est devant l’Assemblée nationale à Québec que ce Collectif entame des démarches de consultation qui permettront de débattre et d’adopter la nouvelle loi. Toutefois, le projet de loi 112 s’est heurté à quelques débats. L’opposition de certains ministres au sein du Conseil des ministres a été exprimée, notamment un jeune ministre en opposition à une telle loi contre la pauvreté qui signale « pourquoi pas une loi contre la pluie ? »[14]. Des propos où ce ministre explique que la pluie n’étant pas contrôlable, personne ne peut l’arrêter ou l’empêcher de faire surface, tout comme le volet de la pauvreté. Le contraste veut que le projet jouit avec puissance de l’appui du Premier ministre Landry, et de la Vice-première ministre et ministre des Finances, Marois. La couverture médiatique met de l’avant ce projet d’action étant perçu avec méfiance et incertitude. Les commentateurs, dans différents médias, présentent ce projet sous un caractère symbolique et orienté vers un développement de structures plutôt que des engagements réalistes et sensés. La Commission des affaires sociale de l’Assemblée nationale elle, a accordé beaucoup d’importance à ce projet auprès de la société. Elle a accordé plusieurs audiences publiques où plus de 130 groupes et associations en faveur de cette loi ont pu s’exprimer, dont plusieurs faisaient partie du Collectif[14]. Les trois partis présents à l’Assemblée nationale (Parti québécois, Parti libéral du Québec, Action démocratique du Québec) ont unanimement voté la loi.
La stratégie du gouvernement est de mettre en place un ensemble d’actions en partenariat avec les organismes communautaires qui favorise l’inclusion active dans la société québécoise, notamment en respectant la hausse salariale[15]. Le plan établit des activités à réaliser pour améliorer la situation des gens, et des buts à atteindre, dont celui de l’amélioration du revenu des prestataires du Programme d’assistance-emploi, relatif à la Loi sur le soutien du revenu favorisant l’emploi de manière soutenue. Le rapport du plan d’action est exposé au gouvernement à tous les ans, afin que le Comité consultatif et autres participants y soumettent des améliorations stratégiques au cheminement de la société québécoise. Comme le Collectif, plusieurs autres organisations deviennent partenaires et veillent à ce projet : Centrale des syndicats démocratiques (CSD), la Confédération des syndicats nationaux (CSN), la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), le Front de défense des non-syndiquées (FDNS), le Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ) et le Syndicat professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ)[16]. Le Collectif envoie un message pour sensibiliser la population et offre un calendrier d’actions et d’événements pour approfondir le savoir des citoyens et proposer des moyens d’actions pour se défendre, dont des journées de formation sur les inégalités et le salaire minimum à 15 $ l’heure[17]. À ses côtés, l’Observatoire encourage la prise de conscience face à l’ensemble de la société. Les associations offrent des consultations, collectent les opinions, prennent en considération les demandes et les observations selon les conditions de travail et les conditions salariales des gens. La campagne 5-10-15 prend part aux actions : connaître son horaire de travail 5 jours à l’avance, avoir 10 jours de congé payé en cas de maladie ou responsabilités familiales, et un salaire minimum de 15 $ l’heure[18]. Le Collectif offre un contact direct d’informations et d’interactions pour appuyer les organisations : s’abonner aux réseaux sociaux sur Facebook et Twitter, au bulletin du Collectif, joindre le responsable des médias du centre de presse ou les porte-paroles des organisations.
Ces relations ont permis l’inclusion de différents acteurs dans la démarche décisionnelle politique et elles ont aussi permis au Collectif de développer une structure des stratégies communicationnelles pour mieux représenter la société. Le salaire minimum connaît plusieurs variations, jusqu’à l’arrivée de la Loi sur les normes du travail. La Commission des normes du travail (CNT) détient comme obligation fondamentale de veiller à la mise en œuvre ainsi qu’à l’exécution de l’ensemble des normes du travail, plus précisément par le biais de l’article 40 où c’est le « gouvernement qui fixe par règlement le salaire minimum payable à un salarié »[19]. Le , La Commission des normes, de l’équité, de la santé, et de la santé au travail indique que le taux du salaire minimum a été augmenté à 11,25 $ par heure. Deux pôles ont eu des réactions opposées : d’un côté, la chambre de commerce est heureuse ; de l’autre, différentes organisations ne sont pas satisfaites et continuent les revendications pour obtenir un taux à 15 $. Pour la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ), cette hausse est logique et suffisante. Stéphane Forget, PDG, mentionne que « cette augmentation est raisonnable, prévisible, tient compte de la capacité de payer des employeurs et vise un incitatif au travail dans le temps »[20]. D’ici 2020, madame Vien, ministre du Travail, propose un salaire qui atteindra 12,45 $. Le Québec suggère des augmentations répandues sur plusieurs années qui représenteraient près de 50 % du salaire moyen, d’où l’objectif à atteindre 15 $[20]. Le gouvernement Couillard, lui, n’est pas tout à fait partisan d’une telle somme, une telle hausse serait nuisible pour les PME qui n’ont pas les moyens nécessaires pour assurer ce taux. Il stipule qu’il faut cesser d’émettre des comparatifs entre les salaires du Québec et de l’Ontario : « il faut regarder l’ensemble des politiques redistributives québécoises, c’est plus avantageux au Québec compte tenu de l’ensemble des politiques publiques »[21].
Le montant du salaire minimum variant selon le secteur et étant fixé par le gouvernement à la suite de rencontre entre les représentants du secteur (employeurs et employés)[22]. En 1937, il y avait ainsi 153 salaires minimums différents au Québec[23].
Le salaire minimum général en 1965 était de 0,70 $ par heure.
Personnes touchées
Tous les salariés ont le droit de recevoir le salaire minimum. Cela ne comprend pas les personnes qui ne sont pas soumis à la Loi sur les normes du travail (domestiques, cadre supérieur, etc.).
Selon une étude, en 2019, 62 % des personnes rémunérées au salaire minimum travaillent à temps partiel, et 61 % sont âgées de 15 à 24 ans[24].
Montant
Depuis le , le salaire minimum au Québec est de 15,25 $, et ce, pour toutes les entreprises du Québec. Toutefois, pour les employés qui peuvent recevoir un pourboire, le montant est de 12,20 $[1].
Il existe aussi un salaire minimum spécifique en matière de cueillette de petits fruits. Celui est de 4,53 $ par kilogramme pour les framboises et de 1,21 $ par kilogramme pour les fraises[1].
Notes et références
- CNESST, « Salaire - Commission des normes de l'équité de la santé et de la sécurité du travail - CNESST » (consulté le )
- (en) Retail Council of Canada, « Minimum Wage by Province », sur Retail Council of Canada, (consulté le )
- « Le salaire »
- « Historique du salaire minimum », Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail, s.d. (consulté le ).
- Ministère des Finances, Comparaison de l'évolution du salaire minimum au Québec, en Ontario et aux États-Unis, Québec, Gouvernement du Québec, .
- Calculé à partir de « Feuille de calcul de l'inflation », sur Banque du Canada (consulté le ).
- https://www.parliament.uk/about/living-heritage/transformingsociety/livinglearning/19thcentury/overview/factoryact/
- Ledoux 2010, p. 2-4.
- « Dépôt d'une loi sur le salaire minimum des femmes », sur Bilan du siècle éditeur=Université de Sherbrooke (consulté le ).
- Ledoux 2010, p. 5.
- https://www.travail.gouv.qc.ca/fileadmin/fichiers/Documents/regards_travail/vol07-01/L_histoire_du_salaire_minimum.pdf
- https://bilan.usherbrooke.ca/bilan/pages/evenements/580.html
- « L’adoption du projet de loi 112 au Québec : le produit d’une mobilisation ou une simple question de conjoncture politique ? », Dans Politique et Sociétés,‎
- « Une loi contre la pauvreté : la nouvelle approche québécoise de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale », Dans Lien social et Politiques,‎
- « Projet de loi no 112 : Loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale. », Éditeur officiel du Québec,‎
- « Campagne 5-10-15 »
- « Collectif pour un Québec sans pauvreté : actions et événements »
- « Il nous faut plus que ça : Campagne 5-10-15 »
- « L’histoire du salaire minimum au Québec », Dans Regards sur le travail,‎
- « Le salaire minimum passe à 11,25$ l’heure : Des organisations promettent de poursuivre leur campagne pour un taux à 15$. »
- « Salaire minimum à 15$ l’heure en Ontario ! Et le Québec ? »
- Ledoux 2010, p. 4-5.
- Ledoux 2010, p. 7.
- (en) Joel Goldenberg The Suburban, « Quebec right to avoid significant minimum wage hike: MEI », sur The Suburban Newspaper (consulté le )
Bibliographie
- Denis Ledoux, « L'histoire du salaire minimum au Québec », Regards sur le travail, vol. 7, no 1,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- Canada, Québec. « Règlement sur les normes du travail », RLRQ, chap. N-1.1, r. 3 [lire en ligne (page consultée le 18 avril 2016)].
Voir aussi
Article connexe
Liens externes
- « Salaire », Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail, s.d. (consulté le ).
- « Le salaire minimum », Éducaloi, (consulté le ).
- « CNESST »
- « Légis Québec »
- « Histoire du Collectif »