Accueil🇫🇷Chercher

SĂ©bastien Castellion

Sébastien Châteillon, latinisé en Castalio puis devenu Castellio, ou Sébastien Castellion, né en 1515 à Saint-Martin-du-Fresne, en Bugey, anciennement du duché de Savoie, de l'actuel département de l'Ain et mort le à Bâle, est un humaniste, bibliste et théologien protestant savoyard.

SĂ©bastien Castellion
Biographie
Naissance
Décès
Pseudonymes
Martin Bellie, Martinus Bellius, Joannes Theophilus, Basile Montfort
Activités
Autres informations
A travaillé pour
Plaque commémorative

Il fut un grand défenseur de la tolérance religieuse et de la liberté de conscience.

Biographie

Castellion est issu d'une famille pauvre de paysans[1]. Il est possible que sa famille soit d’origine vaudoise. Les disciples de Valdès de Lyon s’étaient réfugiés au XIIIe siècle dans cette région du Bugey.

En 1535, Castellion fait ses études au collège de la Trinité à Lyon, où il acquiert les outils intellectuels de l’humanisme. À cette époque, il découvre l’Institution Chrétienne de Jean Calvin et adhère aux idées de la Réforme[1].

En 1540, on le retrouve à Strasbourg, où il loge quelque temps chez Calvin provisoirement banni de Genève, lui rendant notamment service lors d'une épidémie de peste[1].

En 1541 à Genève[2], Calvin fait appel à Castellion pour devenir recteur du Collège de Rive, qui vient d’être créé. Lui donnant une rétribution annuelle de 450 florins, somme de laquelle il devra tirer la rémunération des deux bacheliers censés l'assister. La cité genevoise manquant de pasteur, il est également appelé à prêcher le dimanche à Vandœuvres[1]. Castellion écrit Dialogues Sacrés.

Vers 1544 se font jour des divergences théologiques entre lui et Calvin qui portent sur deux points en apparence mineurs (statut canonique du Cantique des cantiques, interprétation du Symbole des Apôtres) – mais qui posent en réalité le problème du droit à l’opinion personnelle en matière de foi dans le nouveau régime de l’Église[3].

Ces querelles empêcheront Castellion d’accéder à Genève au ministère pastoral qu'il sollicitait, son salaire de régent ne suffisant pas pour vivre avec femme et enfants, et il choisit donc de quitter Genève pour Bâle en 1545[2] où, il va travailler comme prote chez l'imprimeur Jean Oporin[2]. Vers 1553, il deviendra professeur de grec à l’université[3].

Le , Michel Servet est jugé et brûlé à Genève pour hérésie antitrinitaire. Ce drame consomme la rupture de Castellion avec Calvin. L’année suivante paraît un ouvrage d’un certain Martin Bellie, qui n’est autre que Castellion : le Traité des Hérétiques. C’est le début d’une longue polémique sur la tolérance qui va très vite s’envenimer.

À l'occasion de cette polémique avec Calvin, de savoir s'il est juste ou non de condamner à mort quelqu'un condamné d'hérésie, Castellion écrit dans son Traité des hérétiques de 1554 : « tuer un homme ce n’est pas défendre une doctrine, c’est tuer un homme. Quand les Genevois ont fait périr Servet, ils ne défendaient pas une doctrine, ils tuaient un être humain : on ne prouve pas sa foi en brûlant un homme mais en se faisant brûler pour elle »[4].

En 1560, s’allume la première des huit vagues successives de guerre religieuse en France. Castellion publie un petit ouvrage, Conseil à la France désolée qui, avec trente ans d’avance, annonce la solution politique de l’Édit de Nantes, à savoir deux religions pour un royaume[5] - [6].

Il meurt en 1563 à Bâle ; Michel de Montaigne lui rendra hommage dans ses Essais[7].

Postérité

Son inlassable dénonciation du fanatisme, au nom de la liberté de conscience, fait de Castellion l'un des premiers promoteurs de la tolérance religieuse, tant catholiques que protestants, comme le chancelier Michel de l'Hospital et d'autres érasmiens[8].

Sébastien Castellion est également connu pour ses travaux bibliques qui font de lui l’un des fondateurs de la critique moderne. Sa Bible latine parue en 1551 restera une référence dans le monde savant jusqu’au XIXe siècle et sa traduction française (1555) est rééditée pour la première fois en 2005[9].

En 1936, l'écrivain autrichien Stefan Zweig lui consacre une biographie intitulée Conscience contre violence. À travers l'évocation du combat de l'humaniste contre Jean Calvin, Zweig démontre l'exemple de tolérance qu'était Castellion. Le livre traite également de la liberté d'expression; Zweig y évoque avec le prisme du calvinisme, la lutte contre le nazisme[10].

Le Cercle Sébastien Castellion de Bourg-en-Bresse a été fondé en 1995 ; il a pour objet la promotion du pluralisme des idées et de la liberté de conscience. Une loge maçonnique « Sébastien Castellion la Liberté de conscience » fait partie du Grand Orient de France[11].

Le 23 juin 2022, la Ville de Genève fait poser une plaque épigraphique à sa mémoire sur un mur longeant le collège Calvin, au passage Isaac-Casaubon[12].

Ĺ’uvres

  • Jonas propheta, heroico carmine latino descriptus, Basileae, ex officina J. Oporini, 1545
  • Mosis institutio Reipublicae graecolatina, ex Josepho in gratiam puerorum decerpta, ad discendam non solum graecam verum etiam latinam linguam, Basileae, 1546
  • Dialogorum sacrorum ad linguam simul et mores puerorum formandos libri quatuor, Coloniae, J. Aquensis, 1551
  • De Haereticis, an sint persequendi et omnino quomodo sit cum eis agendum, doctorum virorum tum veterum, tum recentiorum sententiae, Magdeburgi (i.e. Basilae), per G. Rausch (i. e. Oporinus), 1554
  • La Bible nouvellement translatĂ©e, avec la suite de l'histoire depuis le tems d'Esdras jusqu'aux MaccabĂ©es : e depuis les MaccabĂ©es jusqu'Ă  Christ. Item avec des annotacions sur les passages difficiles. Ă€ Bale, pour Jehan Hervage, l'an M.D.LV
  • Conseil Ă  la France dĂ©solĂ©e, auquel est monstrĂ© la cause de la guerre prĂ©sente et le remède qui y pourroit estre mis, et principalement est avisĂ© si on doit forcer les consciences, (s. l.), 1562
  • Contra libellum Calvini in quo ostendere conatur haereticos jure gladii coercendos esse, A. Domini, 1612,
  • De arte dubitandi et confitendi, ignorandi et sciendi, Reale Academia d'Italia (studi e documenti VII 1937, p. 277-430)

Éditions récentes

  • La Genèse (1555), Ă©ditĂ©, introduit et annotĂ© par Jacques Chaurand, Nicole Geunier, Carine Skupien Dekens, avec la collaboration de Max Engammare, Coll. Textes littĂ©raires français, 553, Genève, Librairie Droz, 2003, 323p.
  • Les livres de Salomon : Proverbes, EcclĂ©siaste, Cantique des cantiques (1555), Ă©ditĂ©s, introduits et annotĂ©s par Nicole Geunier et Max Engammare, Coll. Textes littĂ©raires français, 595, Genève, Librairie Droz, 2008, 334p.
  • La Bible, nouvellement translatĂ©e par SĂ©bastien Castellion (1555), prĂ©face Pierre Gibert et Jacques Roubaud, notes et commentaires Marie-Christine Gomez-GĂ©raud, Bayard, 2005 (ISBN 2-227-47544-7)
  • Dialogues sacrĂ©s. Premier livre, Ă©dition critique par David Amherdt et Yves Giraud, Genève, Droz, 2004 (ISBN 2-600-00930-2)
  • Contre le libelle de Calvin après la mort de Michel Servet, traduit du latin, annotĂ© et prĂ©sentĂ© par Étienne Barilier, Genève, ZoĂ©, 1998 (ISBN 2-88182-329-7)
  • De l'impunitĂ© des hĂ©rĂ©tiques, texte latin inĂ©dit publiĂ© par Bruno Becker, texte français inĂ©dit publiĂ© par M. Valkhoff, Genève, Droz, 1971
  • TraitĂ© des hĂ©rĂ©tiques
  • Conseil Ă  la France dĂ©solĂ©e, prĂ©face et notes explicatives par Marius F. Valkhoff, Genève, Droz, 1967
  • Conseil Ă  la France dĂ©solĂ©e, Ă©ditĂ© par Florence Alazard, StĂ©phan Geonget, Laurent Gerbier, Paul-Alexis Mellet et Romain Menini, Genève, Droz, 2017 (137 pages d'introduction, 114 pages de texte).Voir la prĂ©sentation sur le site de l'Ă©diteur.

Notes et références

  1. Phillipe Vassaux, « Introduction », p. 13
  2. Hans R. Guggisberg, « Sébastien Castellion », sur Dictionnaire historique de la Suisse, (consulté le )
  3. Phillipe Vassaux, « Introduction », p. 15
  4. Collectif, Laïcité et défense de l'État de droit, Presses de l’Université Toulouse 1 Capitole, (ISBN 978-2-37928-092-4, lire en ligne), p. 215
  5. « Le (...) conseil que je veux donner c'est de permettre en France deux Églises » - Sébastien Castellion, Conseil à la France désolée, p. 57.
  6. Sandrine Landeau, Raison, tolérance et foi. Un parcours dans l’oeuvre de Sébastien Castellion, (lire en ligne), p. 11.
  7. Michel de Montaigne, Essais, « Livre I, chapitre 35 »
  8. Joseph Lecler, Histoire de la tolérance au siècle de la Réforme, Albin Michel, 1994, p. 322-340
  9. « La Bible sulfureuse de Castellion », Le Temps,‎ (ISSN 1423-3967, lire en ligne, consulté le )
  10. Brigitte Bon-Saliba, « « Conscience contre violence » la force de l’exemple ? », Tiers, vol. 17, no 2,‎ (ISSN 2112-6984, lire en ligne, consulté le )
  11. Pascal Bajou, « Sébastien Castellion. Penseur de la tolérance & de la liberté de conscience: Christian Buiron avec le concours de Samuël Tomei. Éditions Theolib 2015, collection Libres pensées protestantes, 158 p. 18 €. », Humanisme, vol. N° 312, no 3,‎ , p. 120–121 (ISSN 0018-7364, DOI 10.3917/huma.312.0120, lire en ligne, consulté le )
  12. « Une plaque en souvenir de Sébastien Castellion (1515-1563) », sur Ville de Genève, (consulté le )

Sources

  • Thierry Dubois, « Castellion dans nos murs », sur Bibliothèque de Genève Le Blog, (consultĂ© le ). Ouvrage utilisĂ© pour la rĂ©daction de l'article
  • SĂ©bastien Casteillon (trad. du latin, prĂ©f. Philippe Vassaux), De l’Art de Douter et de Croire, d’Ignorer et de Savoir, Carrières-sous-Poissy, Éditions La Cause, , 266 p. (ISBN 2-87657-017-3). Ouvrage utilisĂ© pour la rĂ©daction de l'article

Voir aussi

Bibliographie complémentaire

  • Christian Buiron, SĂ©bastien Castellion (1515-1563), dĂ©fenseur de la tolĂ©rance et de la libertĂ© de conscience. Histoire du monument de Saint-Martin-du-Fresne, M & G Editions, 2010 (ISBN 978-2-354110253).
  • Christian Buiron, SĂ©bastien Castellion (1515-1563) Penseur de la tolĂ©rance et de la libertĂ© de conscience, ThĂ©olib, 2015 (ISBN 978-2-365001090)
  • Christian Buiron, SĂ©bastien Castellion Ă  Saint-Martin-du-Fresne (1515-2015), ThĂ©olib, 2016 (ISBN 978-2-365001304)
  • Ferdinand Buisson, SĂ©bastien Castellion, sa Vie et son Ĺ“uvre (1515-1563) : Ă©tude sur les origines du protestantisme libĂ©ral français, Paris, Librairie Hachette et Cie, 2 vol. XIX-440 + 512 p., 1892, lire en ligne. Les Ă©crits de Ferdinand Buisson ont Ă©tĂ© repris dans l'Abeille du Bugey et du Pays de Gex, lors de la constitution, en 1904, d'un comitĂ© pour Ă©lever un monument Ă  la mĂ©moire de SĂ©bastien Castellion
  • Auguste Arène, « Les Hommes cĂ©lèbres du DĂ©partement de l'Ain - SĂ©bastien CHATILLON de St Martin du Fresne », Issuu,‎ diffĂ©rents articles entre 1892 et 1942 (lire en ligne, consultĂ© le ).
  • Max Engammare, Pasteur Philippe Fromont, Marie-Christine Gomez-GĂ©raud, Michel Granjean, Castellion Ă  VandĹ“uvres (1515-2015), Genève, Librairie Droz, coll. « Varia », no 25, 2017, 978-2-600-04764-7
  • Laurent Gagnebin, « SĂ©bastien Castellion », Évangile et libertĂ©, en ligne.
  • Marie-Christine Gomez-GĂ©raud (Ă©d.), SĂ©bastien Castellion : des Écritures Ă  l'Ă©criture, Classiques Garnier, 2013 (ISBN 978-2812409240).
  • AndrĂ© Gounelle, « Un manifeste libĂ©ral au XVIe siècle », Évangile et libertĂ©, en ligne.
  • Nicole Gueunier, SĂ©bastien Castellion ou la libertĂ© de la conscience, en ligne.
  • « SĂ©bastien Castellion (1515-1563) », notice du MusĂ©e virtuel du protestantisme, en ligne.
  • Joseph Lecler, Histoire de la tolĂ©rance au siècle de la RĂ©forme, Albin Michel, 1994, p. 322-342 et 458-462.
  • Philippe Vassaux, « Michel Servet (1509-1553) », Évangile et libertĂ©, en ligne.
  • Stefan Zweig, Conscience contre violence, 2010, Livre de Poche, (ISBN 2253153710) ; Une conscience contre la violence Le Castor Astral, 1997, prĂ©face d'HervĂ© Le Tellier.
  • SamuĂ«l Tomei, « Renaissance et RĂ©forme : l’humanisme de SĂ©bastien Castellion (1515-1563) », Humanisme, 2011/3 (N° 293), p. 66-71.
  • Mario Turchetti, « Calvin face aux tenants de la concorde (moyenneurs) et aux partisans de la tolĂ©rance (castellionistes) », dans Olivier Millet (dir.), Calvin et ses contemporains : actes du colloque de Paris, 1995, Genève, Librairie Droz, coll. « Cahiers d'humanisme et Renaissance » (no 53), , 314 p. (ISBN 2-600-00255-3, prĂ©sentation en ligne), p. 43-56.
  • Etienne Giran, SĂ©bastien Castellion et la RĂ©forme calviniste. Les deux RĂ©formes, [1914] 2015, ThĂ©olib, collection Libres pensĂ©es protestantes, avec une prĂ©face de Pierre-Yves Ruff. Édition originale en ligne.
  • Le livre des Seaumes, - Extrait de la Bible traduite par SĂ©bastian Castellion (Samizdat - PDF) avec l'orthographe original et mise en page inspirĂ©e par le XVIe s.

Banques de données, dictionnaires et encyclopédies

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.