Accueil🇫🇷Chercher

René Pichon

René Pichon (Le Mans, - Paris, [1]) est un latiniste français, auteur de travaux concernant la littérature latine, dont une Histoire de la littérature latine (1897).

Il est le père de l'homme de lettres Charles Pichon.

Vie professionnelle

Ancien Ă©lève de l'École normale supĂ©rieure, normalien en 1888, il a eu comme maĂ®tres Gaston Boissier et Ferdinand Brunetière. Premier Ă  l’agrĂ©gation des lettres en 1891, Il enseigne le Latin et le thème grec dans les khâgnes des lycĂ©es, notamment pendant près de vingt ans Ă  celle du lycĂ©e Henri-IV.

Longtemps membre du jury de l’agrégation.

Il soutient une thèse de doctorat sur Lactance en 1902 : Étude sur le mouvement philosophique et religieux sous le règne de Constantin, 1901.

Ses travaux scientifiques auraient pu le mener vers une chaire d’enseignement supérieur et sa carrière en Khâgne procède, semble-t-il, d’un choix délibéré :

Il dirige pour l'Ă©diteur Hatier une collection d'auteurs latins d'après la mĂ©thode historique, des Ĺ“uvres choisies que leurs mĂ©rites ont bientĂ´t rendus classiques, en particulier, le CicĂ©ron de R. Beauchot, qui inaugure la collection, suivi du CĂ©sar de Gonchont et du Virgile de R. Pichon lui-mĂŞme.

On peut dans les Comptes rendus des séances de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, année 1914; volume 58, numéro 5, p. 521, relever son souci de corriger les erreurs historiques commises par ses prédécesseurs dans leurs commentaires sur Virgile.

Histoire de la littérature latine

Caractère général

RenĂ© Pichon a publiĂ© son Histoire de la littĂ©rature latine en 1897, c'est-Ă -dire Ă  vingt huit ans, un âge remarquablement jeune pour un tel livre. Pour l'Ă©crire, il a lu toute la littĂ©rature latine, auteurs chrĂ©tiens inclus. Il s'est inspirĂ© de l'Histoire de la littĂ©rature française de Gustave Lanson, oĂą il croyait apercevoir l'idĂ©al de la critique littĂ©raire : « l'alliance de l'Ă©rudition et de rĂ©flexions gĂ©nĂ©rales Â». Cette approche a rĂ©sultĂ© en un livre d'une lecture agrĂ©able, qui offre une abondance d'informations, et oĂą les remarques gĂ©nĂ©rales sont appuyĂ©es par des citations latines (suivies d'une traduction approximative).

Un de ses points de dĂ©part est l'idĂ©e que « les Ĺ“uvres littĂ©raires valent en proportion des idĂ©es solides et sincères qu'elles contiennent (...), de leur portĂ©e morale ou philosophique. (...) C'est faute de philosophie que la littĂ©rature s'alanguit sous l'Empire, et c'est grâce Ă  la philosophie, soit stoĂŻcienne, soit chrĂ©tienne, qu'elle se relève partiellement Â». Cette attitude explique probablement son peu de goĂ»t pour Martial et PĂ©trone.

Ses caractéristiques d'auteurs individuels sont en général excellents. Il note ce qui distingue un auteur d'avec ses devanciers, ou ce qui lui est particulier dans l'histoire de la littérature latine. Avec beaucoup d'empathie il approche chaque auteur, essaie d'entrer dans sa personnalité, sans, néanmoins, ménager ses critiques. Exemples :

  • Son observation Ă  propos de Salluste : « Il n'a pas rĂ©ussi Ă  Ă©galer Thucydide sous le double rapport de l'impartialitĂ© et de la profondeur. L'impartialitĂ© de Salluste consiste surtout Ă  frapper Ă©galement sur les deux parties, et vient de ce que l'auteur est Ă©galement mĂ©content des nobles et du peuple. Ce n'est pas l'impartialitĂ© de la science, qui comprend tout, mais celle de la mauvaise humeur, qui critique tout Â».
  • En parlant de Quintilien : c'est « un esprit timide, et comme tous les modĂ©rĂ©s, il voit ce qu'il y aurait Ă  faire, sans oser le dire trop haut Â».
  • Ou Ă  propos de Perse : « C'est comme un jeune prĂ©dicant puritain qui entreprend de dire leur fait aux choses et aux hommes de son temps. Il frappe toujours, comme un sourd, et sur tout le monde Â».

On pourrait objecter que de tels jugements portant sur l'auteur comme individu sont une gageure, puisqu'on parle d'auteurs morts depuis longtemps, et que souvent une grande partie de leur œuvre est perdue. Mais ils peuvent jeter une lumière particulière sur les auteurs, dont il est utile de prendre connaissance, surtout pour des auteurs qu'on n'apprécie pas tellement soi-même.

Pichon offre aussi des remarques sur le style des auteurs, comme Ă  propos de CĂ©sar : « Ă€ part la puretĂ© du vocabulaire et la nettetĂ© de la syntaxe, il n'y a absolument rien Ă  remarquer dans son style, dont le grand mĂ©rite est de ne pas exister, d'avoir une transparence absolue Â». On pourrait y voir un exemple de ce que Roland Barthes appellera le 'degrĂ© zĂ©ro de l'Ă©criture'.

À plusieurs endroits, pour éclaircir tel caractère de certains auteurs latins, Pichon croit bon d'établir un parallèle avec un auteur français, supposé connu. (Il s'adresse aux professeurs et aux étudiants). Étant admis qu'un tel procédé puisse servir à illuminer certains aspects, on peut néanmoins se demander si Pichon n'est pas allé trop loin, et si toutes ses comparaisons sont valides. Témoin également ses idées préconçues sur le cours qu'a dû suivre la littérature latine, et qui est supposé plus ou moins comparable à celui de la littérature française, avec par exemple une période classique, où Virgile tiendrait la place de Racine.

Structure

Sa conception de ce qu'il appelle 'classique' : « Les Ă©crivains du siècle d'Auguste sont appelĂ©s classiques, simplement parce qu'ils sont plus conformes Ă  un certain idĂ©al d'Ă©quilibre ou d'harmonie. Ces dons ne leur appartiennent pas en propre; ils les possèdent puisqu'ils vivent en un temps donnĂ©, Ă  un moment favorable. Ils sont classiques sans le vouloir ni le savoir Â».

  • Livre III. L'Ă©poque impĂ©riale (couvre la pĂ©riode de SĂ©nèque le Père jusqu'Ă  Tacite et SuĂ©tone).

Sa bête noire ici c'est les lectures publiques, dont l'influence désastreuse est cause que la littérature de l'empire ne produit que des fleurs compliquées et maladives. Comme dans ces lectures à haute voix on ne peut saisir le plan d'un ouvrage, l'écrivain fait bon marché de ce mérite, pour ne soigner que les détails. En plus, chaque méditation abstraite paraîtrait ennuyeuse au public mondain de ces lectures publiques.

  • Livre IV. L'Ă©poque chrĂ©tienne (Tous les auteurs de l'Ă©poque de Marc Aurèle et après, non seulement les auteurs chrĂ©tiens).

Comparaisons

Une comparaison avec d'autres Histoire de la Littérature latine peut mieux mettre en lumière ce qui est spécifique dans le livre de Pichon.

Celle de Karl Büchner (Römische Literaturgeschichte, 1957) a visiblement pour but de prouver que la littérature latine n'est pas qu'un simple calque de la littérature grecque. À cet effet il prête beaucoup d'attention aux manifestations culturelles de la Rome d'avant 240, fêtes de mariage et usages concernant les morts, pour y montrer des traits 'romains' qui réapparaîtront plus tard dans la littérature postérieure.

En général, il semble s'intéresser plus à la littérature de la république qu'à celle de l'empire, là où Pichon est plus équitable. Büchner parle beaucoup des premiers écrivains (dont il ne nous reste que des fragments), voulant établir leur importance dans le développement de la littérature romaine.

Le livre de Büchner se veut plus 'scientifique', décrivant un objet d'étude historique. De là vient qu'il traite aussi d'auteurs romains écrivant en grec (Fabius Pictor, Polybe), et qu'il parle longuement du Cercle des Scipions, parce qu'il veut positionner la littérature latine comme un objet dans son contexte social.

Pichon, ayant en vue un public lettré aimant la bonne littérature, consacre en général plus de pages que Büchner aux auteurs connus, illustrant ses idées à l'aide de citations nombreuses. De de ce point de vue il est souvent plus informatif. En revanche il parle peu et négligemment de l'historien Nepos, dont l'œuvre (ou ce qui nous en reste) ne vaut guère la peine d'être lu. Büchner lui accorde une place plus importante, disant qu'il était apprécié par ses collègues, que c'était donc une figure importante, déjà du simple fait qu'il a été l'initiateur du genre biographique.

Le style de Pichon est plus agréable.

Éditions

  • 1re Ă©dition : 1897
  • 2e Ă©dition : 1898
  • 3e Ă©dition : 1903
  • 4e Ă©dition : 1908
  • 5e Ă©dition : 1912
  • 6e Ă©dition : 1916
  • 7e Ă©dition : 1919
  • 8e Ă©dition : 1921
  • 9e Ă©dition : 1924
  • 10e Ă©dition : 1926
  • 11e Ă©dition : 1928
  • 12e Ă©dition : 1930

Après il y a eu plusieurs réimpressions.

Le texte est resté le même à travers toutes ces éditions; seules les notes en bas de page ont changé, contenant des ajouts (notamment les nouvelles éditions des auteurs traités, ou de nouvelles études apparues).

Ĺ’uvres en ligne

Bibliographie succincte

  • Lucrèce, Morceaux choisis. Texte latin publiĂ© avec une introduction, des analyses et des notes. 1891
  • Édition de Tacite : De vita et moribus Julii Agricolae liber. 1895.
  • Histoire de la littĂ©rature latine, Paris, Hachette, 1898 consultable sur BNF.
  • Lactance. Étude sur le mouvement philosophique et religieux sous le règne de Constantin. 1901.
  • De Sermone Amatorio apud Latinos Elegiarum Scriptores (thèse de doctorar). 1902.
  • Les Derniers Écrivains profanes. Les panĂ©gyristes, Ausone, Le Querolus, Rutilius Namatianus. Paris. 1906.
  • CicĂ©ron : Extraits des traitĂ©s de rhĂ©torique. Introduction et notes en français. 1910.
  • Hommes et choses de l'ancienne Rome. (contenant: Le mariage religieux, La lĂ©gende d'Hercule; L'histoire sociale d'une montagne romaine; Un philosophe ministre sous l'Empire romain; Les polĂ©miques de saint JĂ©rĂ´me; Un historien de Rome au XIXe siècle : M. Gaston Boissier.) 1911.
  • Les sources de Lucain. 1912.
  • Édition de : Virgile, Ĺ“uvres complètes. 1916.(Ă  propos de la mĂ©thode historique , cf les comptes rendus des sĂ©ances de l'AcadĂ©mie des Inscriptions et Belles-Lettres AnnĂ©e 1914 Volume 58 NumĂ©ro 5 p. 521).
  • Contiones Latinae - Discours extraits des historiens latins (Tite-Live, Salluste, CĂ©sar, Tacite, Ammien Marcellin) et des documents originaux. PubliĂ©s avec une Intro. et des Notes.

Notes et références

Liens externes

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.