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Rail d'Ouessant

Le rail d'Ouessant est le nom communément utilisé pour désigner le dispositif de séparation du trafic (DST) maritime au large de l'île d'Ouessant, l'île française la plus occidentale de métropole qui marque la limite entre l'Atlantique et la Manche.

Il s'agit d'un des passages maritimes les plus frĂ©quentĂ©s du monde oĂą transite, chaque annĂ©e, 70 % du trafic maritime mondial en tonnage (130 navires par jour, soit 45 000 par an en 2018)[1].

Genèse du dispositif

Porte-conteneurs en train de dépasser un navire plus petit sur le rail montant

Dans la deuxième moitiĂ© du XXe siècle, les administrations chargĂ©es de la sĂ©curitĂ© de la navigation s'inquiètent de la multiplication des collisions dans les zones de navigation les plus frĂ©quentĂ©es, en particulier les dĂ©troits. On dĂ©nombre en 1963 pas moins de 21 collisions conduisant Ă  la perte totale du navire[2]. L'annĂ©e suivante, les instituts des navigations allemande, anglaise et française[3] proposent Ă  l'Organisation maritime internationale (OMI) l'adoption de route ou de rail, Ă  l'imitation des transports terrestres. Le Maritime Safety Committee (MSC) de l'OMI adopte une rĂ©solution en ce sens en 1964. Les instituts Ă©tablissent alors une liste de dispositif de sĂ©paration du trafic (DST) Ă  mettre en place, dont le premier sera adoptĂ© en pour le Pas de Calais. Le respect de ce premier DST devient obligatoire en 1971, après une sĂ©rie de collisions meurtrières[4]. En 1972, le règlement international pour prĂ©venir les abordages en mer (ColReg 72) confirme l'obligation de respecter les DST, dont l'OMI publie la liste, dans laquelle figurent Ouessant et les Casquets, en . Le rail d'Ouessant comprend alors une zone cĂ´tière strictement interdite Ă  la navigation de cinq milles marins, un rail montant de quatre milles, une zone de sĂ©paration de deux milles et un rail descendant de quatre milles[5]. La largeur des rails est portĂ©e Ă  5 milles en 1977[6].

Le dispositif, d'une largeur totale de 17 milles, est proche de la cĂ´te pour permettre aux derniers navires qui naviguent encore au sextant et Ă  vue de se positionner prĂ©cisĂ©ment par rapport aux amers d'Ouessant. Le rail montant, celui que doivent emprunter tous les navires faisant route vers la Manche et qui sont souvent les navires prĂ©sentant les risques de pollution les plus importants — notamment les pĂ©troliers — est le plus proche de la cĂ´te car la règle est que les navires doivent de manière gĂ©nĂ©rale se croiser bâbord sur bâbord[7].

Malheureusement aucun dispositif ne permet de veiller au respect du dispositif, dont une bonne partie est alors située hors des eaux territoriales françaises. À cette époque, de nombreux navires « coupent » à travers le dispositif, le prennent à contresens, voire circulent dans la zone côtière ou entre Ouessant et le continent, par le passage du Fromveur, afin de gagner du temps, comme le confirment les témoignages des navigants de l'époque et des gardiens de phare[8].

Amélioration du dispositif après la catastrophe de l'Amoco Cadiz

Ă€ la suite de la mobilisation publique qui a suivi la catastrophe de l'Amoco Cadiz en mars 1978, le dispositif a Ă©tĂ© Ă©loignĂ© de la cĂ´te, modifiĂ© et complĂ©tĂ©. Le rail montant a Ă©tĂ© rĂ©duit Ă  trois milles de large et rĂ©servĂ© aux navires ne transportant pas de marchandises dangereuses, la zone de sĂ©paration a Ă©tĂ© Ă©tendue Ă  huit milles, le rail descendant Ă  cinq milles, une seconde zone de sĂ©paration de six milles a Ă©tĂ© crĂ©Ă©e, isolant un second rail montant qui s'Ă©tend jusqu'Ă  33 milles nautiques d'Ouessant et qui est rĂ©servĂ© et obligatoire pour les pĂ©troliers, chimiquiers, et autres navires transportant des produits dangereux[9]. Mais les principales innovations sont ailleurs.

La Marine nationale française reçoit une mission de police pour faire respecter la loi dans cette zone. Le prĂ©fet maritime a le pouvoir de dĂ©tourner tout navire dont le comportement le justifie. Un centre de surveillance, le CROSS Corsen, commun Ă  la Marine nationale et Ă  l'administration des Affaires maritimes est mis en place et dispose Ă  partir de 1979 d'un radar longue portĂ©e installĂ© sur un sĂ©maphore d'Ouessant, puis près de lĂ  sur une tour radar de 72 mètres. La circulation des navires de commerce est interdite dans la zone situĂ©e entre le rail montant et le continent. Un remorqueur de haute mer (l’Abeille Flandre puis l'Abeille Bourbon) est Ă  la disposition du CROSS pour toutes les missions d'assistance dans le rail. En cas d'avis de tempĂŞte ou de mer forte (dès que le vent dĂ©passe 25 nĹ“uds, soit environ 40 km/h), le remorqueur se prĂ©positionne près de Camaret pour pouvoir intervenir plus rapidement en cas de nĂ©cessitĂ© ; par temps calme, il reste basĂ© au port de Brest.

Modifications de 2003

Ce dispositif présentait toutefois un défaut majeur. Les navires transportant des marchandises dangereuses ou polluantes pour l'écosystème marin devaient, pour rejoindre leur voie réservée et la quitter, croiser deux fois les navires qui empruntent le rail descendant, une première fois pour les navires faisant route d'Ouessant vers le cap Finisterre, au nord-ouest de la péninsule ibérique, et une deuxième fois pour les navires faisant route du dispositif des Casquets, au nord-est du Cotentin vers Ouessant. Ces croisements se faisaient hors de portée des centres de surveillance du cap Finisterre, de Corsen et de Jobourg. Le dispositif écartait bien les navires transportant des marchandises dangereuses de la côte mais multipliait les risques de collision.

Pour cette raison, depuis 2003, le rail a Ă©tĂ© recomposĂ© Ă  deux voies de navigation pour tous les navires, mais est situĂ© bien plus au large que le dispositif d'origine. La voie montante commence Ă  24 milles de l'Ă®le et est large de cinq milles. Au large se trouve une zone de sĂ©paration de cinq milles, puis une voie descendante de cinq milles de largeur Ă©galement. Les moyens actuels de navigation (système de positionnement par satellites) permettent en effet de se positionner correctement sans ĂŞtre en vue de la cĂ´te, nĂ©anmoins le rail est marquĂ© Ă  son entrĂ©e sud-ouest par une bouĂ©e-phare Ă©quipĂ©e d'un Racon et d'un AIS et Ă  son entrĂ©e nord-est par une bouĂ©e Ă  sifflet Ă©galement Ă©quipĂ©e d'un Racon.

Vidéos

  • Le rail d'Ouessant, une voie maritime dĂ©licate[10].
  • Le rail d'Ouessant sous surveillance internationale, France 3 Bretagne, [11].

Notes et références

  1. « Myriam Sibillotte, première femme directrice d’un Cross en France », sur rennes.maville.com, .
  2. http://www.imo.org/OurWork/Safety/Navigation/Pages/ShipsRouteing.aspx
  3. Site de l'institut de la navigation français
  4. (en) « Cedre », sur Cedre (consulté le ).
  5. Organisation Maritime Internationale, RĂ©solution A284(VIII), 20 novembre 1973
  6. Organisation maritime internationale, RĂ©solution A374(X), 14 novembre 1977
  7. règle 14 a : lorsque deux navires à propulsion mécanique font des routes directement opposées ou à peu près opposées de telle sorte qu'il existe un risque d'abordage, chacun d'eux doit venir sur tribord pour passer par bâbord l'un de l'autre.
  8. Louis Cozan, Un feu sur la mer : MĂ©moires d'un gardien de phare, Les Oiseaux de Papier, 2010 (ISBN 2916359478)
  9. « vigipol.com/letraficenmanche.p… »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?).
  10. « videos.tf1.fr/jt-13h/le-rail-d… »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?).
  11. Antonin Billet, « Le rail d'Ouessant sous surveillance internationale », sur france3.fr, France 3 Bretagne, (consulté le ).

Voir aussi

Bibliographie

  • HervĂ© Hamon, L'Abeille d'Ouessant, Ă©ditions du Seuil, 1999, [ (ISBN 2-02-033331-7)].

Liens externes

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