Proclamation de la République française du 4 septembre 1870
La proclamation de la République française du est la proclamation au Peuple français par laquelle la République est rétablie après le Second Empire, fondant ainsi la Troisième République.
Contexte
Le , l'empereur Napoléon III capitule à l'issue de la bataille de Sedan, dans le cadre de la guerre franco-allemande. Il est fait prisonnier. La nouvelle est connue à Paris le , y déclenchant des troubles.
Déroulement
Réunion du Corps législatif
Les députés du Corps législatif sont convoqués d'urgence au Palais Bourbon par leur président, Eugène Ier Schneider. La séance commence à 1 h du matin ce et s'achève une demi-heure plus tard. Le député Jules Favre prononce ces mots : « Louis-Napoléon Bonaparte et sa dynastie sont déclarés déchus du pouvoir. Il sera nommé par le Corps législatif une commission [...] investie de tous les pouvoirs du gouvernement et qui aura pour mission expresse de résister à outrance à l'invasion et de chasser l'ennemi du territoire. [...] Le général Trochu est maintenu comme gouverneur général de Paris »[1].
La séance reprend quelques heures plus tard. Les journaux ayant exhorté la foule à venir nombreuse devant le palais pour exiger la déchéance de l'empereur, un service d'ordre de grande ampleur a été détaché en vue d'assurer la sécurité des députés ; c'est en effet quelque 5 000 hommes (sergents de ville et inspecteurs de police, gendarmes à pied et à cheval, soldats de la garnison) qui sont massés à proximité de l'édifice par le chef du gouvernement, Cousin-Montauban[2].
Dans l'hémicycle, Léon Gambetta exige la déchéance de l'empereur tandis qu'Adolphe Thiers veut seulement créer un « comité de gouvernement et de défense nationale ». La séance est agitée et le public, jusque-là sagement assis dans les tribunes, profite d'une suspension de celle-ci pour sortir du palais et agiter mouchoirs et chapeaux du haut des marches. À 14 h 30, on entrouvre les grilles pour laisser entrer quelques députés et une centaine de gardes mais, très vite, une foule de Parisiens force l'entrée et s'engouffre dans l'enceinte du palais ; aucune résistance n'est opposée et bientôt la foule s'entasse dans les tribunes. Gambetta demande alors à l'assistance de ne troubler les débats « ni par des cris, ni par des applaudissements ». Le député Crémieux demande à Cousin-Montauban de renvoyer les gendarmes, leur présence étant perçue comme une provocation ; celui-ci obtempère et, quelques minutes plus tard, les émeutiers envahissent l'hémicycle. Les députés tentent de tempérer la foule et ainsi ramener le calme : « c'est comme représentant de la Révolution française que je vous adjure d'assister avec calme au retour des députés sur leur banc ! », hurle Gambetta. Ces tentatives d'apaisement sont vouées à l'échec ; devant la clameur incoercible de la foule criant à la déchéance de l'empereur et à l'instauration de la République, Schneider fait lever la séance et se retire. Renonçant à faire voter ses collègues, Favre interpelle la foule en lui criant que ce n'est pas ici qu'il faudra proclamer la République ; et Gambetta de conclure du haut de la tribune : « Allons à l'hôtel de ville ! »[3].
Événements à l'hôtel de ville
Depuis l'hôtel de ville, accompagné d'autres députés, Léon Gambetta proclame la République.
Texte intégral
« Français !
Le Peuple a devancé la Chambre, qui hésitait. Pour sauver la Patrie en danger, il a demandé la République.
Il a mis ses représentants non au pouvoir, mais au péril.
La République a vaincu l'invasion en 1792, la République est proclamée.
La Révolution est faite au nom du droit, du salut public.
Citoyens, veillez sur la Cité qui vous est confiée ; demain vous serez, avec l'armée, les vengeurs de la Patrie !
Hôtel de ville de Paris, le .
Signé : Emmanuel Arago, Adolphe Crémieux, Pierre-Frédéric Dorian, Jules Favre, Jules Ferry, Antoine-Léonce Guyot-Montpayroux, Léon Gambetta, Louis-Antoine Garnier-Pagès, Joseph-Pierre Magnin, Francisque Ordinaire, Pierre-Albert Tachard, Eugène Pelletan, Ernest Picard, Jules Simon. »
Antécédents
Avant le , Troisième République, la République a déjà été proclamée en France, à deux reprises :
- au cours de la Révolution française, la proclamation de l'abolition de la royauté par la Convention nationale, le , crée la Première République ;
- au cours de la Révolution de 1848, le Gouvernement provisoire, le , proclame la Deuxième République.
Majorité politique d'opposition
Une majorité des Français ayant le droit de vote s'opposent à la République, si bien qu'en 1873 les antirépublicains sont élus et entreprennent le projet de Troisième Restauration. Ensuite les républicains deviennent majoritaires et en 1875 des lois constitutionnelles sont adoptées, parmi lesquelles celle qui établit que le président de la République peut être jugé par le Sénat, ce qui rend théoriquement plus difficile les tentatives de restauration d'un empire ou d'une monarchie. Finalement la République perdure jusqu'à nos jours (IVe et Ve République) malgré l'aparté du régime de Vichy entre 1940 et 1944.
Galerie
- Rue du Quatre-Septembre à Paris, commémorant la proclamation de la République, comme de nombreuses rues du Quatre-Septembre en France.
- Plaque commémorative de la proclamation de la République près de la tombe du Soldat inconnu.
Notes et références
- Pierre Miquel, La Troisième République, Paris, Fayard, , 739 p. (ISBN 2-213-02361-1), p. 27.
- Miquel 1989, p. 27.
- Miquel 1989, p. 28-29.
Voir aussi
Bibliographie
- Pierre Cornut-Gentille, Le : L'invention de la République, Paris, Perrin, , 222 p. (ISBN 978-2-262-07209-4), rééd. dans la coll. « Tempus » (no 810), 2020, 237 p. (ISBN 978-2-262-08776-0) [lire en ligne].
- Olivier Le Trocquer, « Des rites de l'événement à l'événement ritualise : L'effacement interprétatif d'une révolution, », Hypothèses, no 1, , p. 31–39 (DOI 10.3917/hyp.971.0031, lire en ligne).
- Olivier Le Trocquer, « Le ou l'image déplacée », dans Christian Delporte (dir.) et Annie Duprat (dir.), L'événement : Images, représentations, mémoire, Grânes, Créaphis, , 265 p. (ISBN 2-913610-29-3), p. 49–66.
- Olivier Le Trocquer, « Mémoire et interprétation du : Le sens de l'oubli », Temporalités, no 5 « Mémoire et Histoire », (DOI 10.4000/temporalites.283, lire en ligne).
Article connexe
Liens externes
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :