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Présidence de John Adams

La présidence de John Adams débuta le , date de l'investiture de John Adams en tant que 2e président des États-Unis, et prit fin le . Adams, qui avait servi au poste de vice-président sous le mandat de George Washington, entra en fonction après avoir remporté l'élection présidentielle de 1796, faisant de lui le seul membre du Parti fédéraliste à avoir accédé à la fonction suprême. Sa présidence ne dura que quatre ans car il fut battu à l'élection présidentielle de 1800 par le républicain-démocrate Thomas Jefferson, qui lui succéda à la Maison-Blanche.

Présidence de John Adams

2e président des États-Unis

Description de cette image, également commentée ci-après
Le président John Adams. Huile sur toile de John Trumbull, Maison-Blanche.
Type
Type Président des États-Unis
RĂ©sidence officielle Maison-Blanche, Washington
Élection
Système électoral Grands-électeurs
Mode de scrutin Suffrage universel indirect
Élection 1796
DĂ©but du mandat
Fin du mandat
Durée 4 ans
Présidence
Nom John Adams
Date de naissance
Date de décès
Appartenance politique Parti fédéraliste

Lorsque Adams arriva au pouvoir, la guerre qui se dĂ©roulait entre la France et la Grande-Bretagne causait des difficultĂ©s importantes aux marchands amĂ©ricains en haute mer et divisait profondĂ©ment les factions politiques du pays. Les tentatives de nĂ©gociations avec les Français aboutirent Ă  l'affaire XYZ dans laquelle plusieurs responsables français exigèrent le versement de pots-de-vin avant de consentir Ă  l'ouverture des nĂ©gociations. Ă€ la suite de cette affaire qui scandalisa l'opinion publique amĂ©ricaine, un conflit naval non dĂ©clarĂ©, connu sous le nom de « quasi-guerre Â», Ă©clata entre la France et les États-Unis et domina le reste de la prĂ©sidence d'Adams. Sous son mandat, l'armĂ©e de terre et la marine furent renforcĂ©es et cette dernière obtint plusieurs succès lors de la quasi-guerre.

La hausse des dĂ©penses consĂ©cutive Ă  ces Ă©vĂ©nements rendit nĂ©cessaire une augmentation des recettes fĂ©dĂ©rales et le Congrès vota la Direct Tax de 1798. La guerre et le poids des impĂ´ts furent Ă  l'origine de troubles internes illustrĂ©s par la rĂ©bellion de Fries en 1799. En rĂ©ponse Ă  cette agitation, tant sur le plan intĂ©rieur qu'Ă  l'Ă©chelle internationale, le 5e Congrès adopta une sĂ©rie de textes connus sous le nom de « lois sur les Ă©trangers et la sĂ©dition Â» qui rendaient plus difficile l'obtention de la nationalitĂ© amĂ©ricaine pour les immigrants, permettaient au prĂ©sident d'emprisonner ou d'expulser des non-citoyens considĂ©rĂ©s comme dangereux ou originaires d'une nation hostile aux États-Unis et condamnaient l'usage de fausses dĂ©clarations visant Ă  critiquer l'action du gouvernement fĂ©dĂ©ral. Alors que la majoritĂ© fĂ©dĂ©raliste soutenait que cette lĂ©gislation permettrait de renforcer la sĂ©curitĂ© nationale dans une pĂ©riode de conflit, les dĂ©mocrates-rĂ©publicains s'opposèrent vivement Ă  cette mesure.

L'opposition Ă  la quasi-guerre et aux lois sur les Ă©trangers et la sĂ©dition, ainsi que la rivalitĂ© entre Adams et Alexander Hamilton au sein-mĂŞme du Parti fĂ©dĂ©raliste, contribuèrent Ă  la dĂ©faite d'Adams contre Jefferson lors de l'Ă©lection prĂ©sidentielle de 1800. Les historiens ont des difficultĂ©s Ă  Ă©valuer la prĂ©sidence d'Adams. Samuel Eliot Morison Ă©crivit qu'« il Ă©tait par tempĂ©rament inadaptĂ© Ă  la prĂ©sidence. Il en savait plus que n'importe quel AmĂ©ricain en matière de science politique, y compris James Madison, mais il Ă©tait mal Ă  l'aise en tant qu'administrateur Â». Adams sut nĂ©anmoins Ă©viter la guerre avec la France, estimant qu'un conflit armĂ© ne devait ĂŞtre que l'ultime recours de l'action diplomatique, un positionnement qui lui valut d'ĂŞtre respectĂ© y compris parmi ses adversaires politiques. Bien qu'abondamment critiquĂ© pour la ratification des lois sur les Ă©trangers et la sĂ©dition, il n'encouragea ni leur adoption ni leur mise en Ĺ“uvre et il accorda sa grâce aux instigateurs de la rĂ©bellion de Fries. Pour l'historien C. James Taylor, « vu sous cet angle, l'hĂ©ritage d'Adams est un hĂ©ritage de raison, de gouvernance morale, de primautĂ© du droit, de compassion et d'une politique Ă©trangère prudente mais active visant Ă  garantir l'intĂ©rĂŞt de la nation et une paix honorable Â».

Élection présidentielle de 1796

Le , le président George Washington déclara officiellement qu'il n'était pas candidat à un troisième mandat. Presque aussitôt, les partisans des deux grandes factions du pays, le Parti fédéraliste et le Parti républicain-démocrate, se lancèrent dans une bataille acharnée pour tenter d'influencer le vote du collège électoral. Comme pour les deux élections précédentes, les États choisirent leurs grands électeurs respectifs et ces derniers devaient ensuite élire le président[1]. Le principal favori chez les républicains-démocrates était Thomas Jefferson même si celui-ci était très réticent à se présenter[2]. Chez les fédéralistes, la candidature du vice-président John Adams fut largement plébiscitée[1].

Au Congrès, les républicains-démocrates organisèrent un caucus nominatif et désignèrent Jefferson et Aaron Burr comme candidats du parti à l'élection présidentielle. Jefferson déclina dans un premier temps la nomination mais accepta finalement de concourir quelques semaines plus tard. Les parlementaires fédéralistes tinrent un rassemblement similaire et choisirent Adams et Thomas Pinckney comme candidats[2] - [3]. La campagne se déroula dans l'ensemble de façon décousue et sporadique et se borna à des attaques par journaux interposés, des pamphlets et divers ralliements de personnalités[1] ; des quatre prétendants, Burr fut le seul à faire activement campagne[4].

Au dĂ©but du mois de novembre, l'ambassadeur de France aux États-Unis Pierre Auguste Adet afficha publiquement son soutien Ă  Jefferson. Il fit plusieurs dĂ©clarations Ă  caractère anglophobe tout en suggĂ©rant qu'une victoire de Jefferson permettrait d'amĂ©liorer les relations avec la France[5]. Plus tard dans la campagne, le fĂ©dĂ©raliste Alexander Hamilton, souhaitant « un prĂ©sident plus souple qu'Adams Â», tenta de faire basculer l'Ă©lection en faveur de Pinckney. Il contraignit ainsi les Ă©lecteurs fĂ©dĂ©ralistes de Caroline du Sud Ă  voter pour Pinckney et fit en sorte que leur deuxième voix aille Ă  des candidats autres qu'Adams. Plusieurs Ă©lecteurs de la lĂ©gislature de Nouvelle-Angleterre eurent nĂ©anmoins vent de ce projet et dĂ©cidèrent après s'ĂŞtre concertĂ©s de ne pas voter pour Pinckney, faisant Ă©chouer la manĹ“uvre d'Hamilton[6].

Les votes du collège électoral furent comptés durant une session conjointe du Congrès le . Adams fut élu de justesse avec 71 votes contre 69 pour Jefferson, qui devint ainsi le vice-président[7]. Venaient ensuite Thomas Pinckney (59 votes), Aaron Burr (30 votes), Samuel Adams (15 votes), Oliver Ellsworth (11 votes), George Clinton (7 votes), John Jay (5 votes), James Iredell (3 votes), John Henry (2 votes), Samuel Johnston (2 votes), George Washington (2 votes) et Charles Cotesworth Pinckney (1 vote)[8].

Cérémonie d'investiture

Adams fut investi le devant les représentants réunis au Congress Hall de Philadelphie. Le juge en chef Oliver Ellsworth administra le serment présidentiel, faisant d'Adams le premier président à prêter serment sous l'autorité du juge en chef de la Cour suprême[9]. Le nouveau chef d'État commença son discours inaugural par un passage en revue du combat pour l'indépendance de la nation :

« Quand a été perçu pour la première fois, dans les temps anciens, ce sentiment qu'aucune voie médiane ne s'offrait à l'Amérique entre la soumission illimitée à une législature étrangère et l'indépendance totale de ses revendications, les hommes de réflexion étaient moins craintifs du danger constitué par la formidable puissance des flottes et des armées auxquelles ils devaient faire face que de ces contestations et dissensions qui surgiraient certainement à propos des formes de gouvernement à instituer sur l'ensemble et sur les parties de ce vaste pays. S'appuyant, cependant, sur la pureté de leurs intentions, la justesse de leur cause et l'intégrité et l'intelligence du peuple, ainsi que sur la bénédiction supérieure de la Providence qui avait si clairement protégée ce pays des premières, les représentants de cette nation, alors peuplée d'un peu plus de la moitié de son effectif actuel, ont non seulement brisé les chaînes qui les enserraient et la barre de fer qui les menaçaient, mais ont rompu franchement les liens qui les retenaient, pour se jeter dans un océan d'incertitude. »

Le discours, long de 2 308 mots[10], contenait aussi un vibrant hommage Ă  George Washington, un appel Ă  l'unitĂ© politique et une promesse de soutien au dĂ©veloppement des institutions du savoir. Adams affirma Ă©galement son intention d'Ă©viter la guerre Ă  tout prix et, Ă  la dĂ©ception de certains de ses alliĂ©s fĂ©dĂ©ralistes, fit l'Ă©loge de la France[11].

Au moment de son entrĂ©e en fonction, la population des États-Unis s'Ă©levait Ă  environ 5 millions d'individus, dont les deux tiers vivaient Ă  moins de 160 km de la cĂ´te Est[12]. Les rĂ©gions situĂ©es Ă  l'ouest des Appalaches connaissaient toutefois un taux d'accroissement de la population supĂ©rieur au reste du pays, et Ă  la fin de la prĂ©sidence d'Adams, 500 000 personnes originaires principalement de Nouvelle-Angleterre, de Virginie et du Maryland s'Ă©taient installĂ©es dans le Kentucky, le Tennessee et le territoire du Nord-Ouest[13].

Composition du gouvernement

Cabinet

En dehors du processus de nomination, la Constitution n'évoquait que brièvement le fonctionnement des départements fédéraux. Le terme de « cabinet » commença à être utilisé pour désigner les responsables des différents départements à la fin du premier mandat de George Washington, lequel n'avait accordé à ceux-ci qu'un rôle consultatif[14]. La Constitution disposait que les individus nommés à la tête des départements étaient responsables devant le président mais aucune précision n'était fournie quant à la durée du service au sein du cabinet[15]. Lorsque Adams accéda à la présidence, rien ne permettait en l'occurrence de savoir si les ministres du précédent gouvernement devaient ou non rester en poste. Plutôt que d'avoir recours au patronage pour se doter d'un groupe de conseillers loyaux, Adams fit le choix de conserver le cabinet de Washington même s'il ne comptait en son sein aucun ami proche[16].

Parmi les ministres maintenus en fonction, Timothy Pickering, James McHenry et Oliver Wolcott, Jr. Ă©taient dĂ©vouĂ©s Ă  l'ancien secrĂ©taire au TrĂ©sor Alexander Hamilton, qu'ils tenaient informĂ©s de toutes les questions politiques importantes dans son fief de New York. En retour, ils transmettaient Ă  Adams les recommandations d'Hamilton et s'efforçaient de contrecarrer l'action du prĂ©sident[17] - [18]. Dans une lettre rĂ©digĂ©e en , Jefferson Ă©crivit que « les hamiltoniens dont il [Adams] est entourĂ© lui sont Ă  peine moins hostiles qu'envers moi Â»[19]. Une autre figure importante de l'administration Washington, le procureur gĂ©nĂ©ral Charles Lee, travailla en Ă©troite collaboration avec Adams et demeura au sein du cabinet pendant toute la durĂ©e du mandat prĂ©sidentiel[20]. En 1798, Benjamin Stoddert du Maryland devint le premier secrĂ©taire Ă  la Marine des États-Unis et fut l'un des conseillers les plus Ă©coutĂ©s du prĂ©sident[21].

Dans la seconde partie de son mandat, Adams se brouilla avec la branche hamiltonienne du Parti fédéraliste et Pickering, McHenry et Wolcott se retrouvèrent de fait marginalisés[22]. Le président mit peu après au jour le double jeu de ces derniers avec Hamilton et congédia Pickering et McHenry au cours de l'année 1800 ; ils furent remplacés respectivement par John Marshall et Samuel Dexter[23].

Le président John Adams. Huile sur toile de Gilbert Stuart, National Gallery of Art, Washington, D.C..

Vice-présidence

Adams entretenait des relations cordiales avec Jefferson depuis qu'ils avaient siégé ensemble au second Congrès continental. Le jour précédant leur investiture, les deux hommes se rencontrèrent brièvement pour discuter de la possibilité d'envoyer Jefferson en France afin d'apaiser les tensions entre les deux pays. Ils en arrivèrent toutefois à la conclusion que ce rôle était inapproprié pour le vice-président et ils décidèrent de confier cette mission à James Madison, allié de Jefferson sur le plan politique. Peu après la cérémonie d'investiture, Jefferson informa Adams que Madison n'était pas intéressé par l'offre. Le nouveau président répondit qu'il n'aurait de toute façon pas pu nommer Madison en raison des pressions exercées par son cabinet pour que fût désigné un fédéraliste. Ce fut la dernière fois qu'Adams consulta Jefferson sur une question politique d'importance nationale. De son côté, le vice-président se consacra exclusivement à ses responsabilités politiques en tant que chef des républicains-démocrates et à ses fonctions de président du Sénat[24].

Nominations judiciaires

Adams nomma trois juges à la Cour suprême des États-Unis. En , le Sénat confirma la nomination de Bushrod Washington, neveu de l'ancien président, pour succéder au juge associé James Wilson. Une deuxième vacance se produisit un an plus tard avec la mort du juge James Iredell et le président choisit Alfred Moore pour le remplacer. Enfin, en , Adams désigna John Marshall au poste de juge en chef des États-Unis en remplacement d'Oliver Ellsworth, démissionnaire pour raisons de santé. Adams avait dans un premier jeté son dévolu sur John Jay, 1er juge en chef de la Cour de 1789 à 1795, mais ce dernier avait décliné l'offre[25]. Marshall, qui servait à l'époque comme secrétaire d'État, fut facilement confirmé par le Sénat et prit ses fonctions le , tout en continuant de diriger le département d'État jusqu'à la fin de la présidence d'Adams le [26].

Politique étrangère

Affaire XYZ

La prĂ©sidence d'Adams fut marquĂ©e par la reprise de la guerre en Europe, notamment entre la France et l'Angleterre, et le fait de savoir si les États-Unis devaient s'impliquer ou non dans ce conflit. Hamilton et les fĂ©dĂ©ralistes soutenaient la Grande-Bretagne tandis que Jefferson et les rĂ©publicains-dĂ©mocrates Ă©taient partisans de la France[27]. La difficile ratification du traitĂ© de Jay en 1795, en plus d'avoir attisĂ© les clivages politiques Ă  l'Ă©chelle du pays, avait fortement dĂ©plu aux Françaischap. 17_28-0">[28]. Si le traitĂ© en question n'avait certes pas mis fin Ă  l'enrĂ´lement forcĂ© de marins amĂ©ricains par les Britanniques, entre autres dolĂ©ances restĂ©es lettre morte, le prĂ©sident Washington estimait l'accord prĂ©fĂ©rable Ă  une guerre contre Londres[29]. Tout Ă  leur indignation cependant, les Français commencèrent Ă  s'emparer des navires marchands amĂ©ricains qui commerçaient avec les Britanniques. Au cours de l'Ă©lection prĂ©sidentielle de 1796, Paris soutint la candidature de Jefferson dont la dĂ©faite engendra une nouvelle escalade des tensions[30]. NĂ©anmoins, le souvenir de l'aide apportĂ©e par la France durant la guerre d'indĂ©pendance faisait qu'un puissant courant francophile Ă©tait toujours prĂ©sent lorsque Adams entra en fonctionchap. 13_31-0">[31] - [32].

Caricature britannique de 1798 sur l'affaire XYZ : l'Amérique est dépeinte sous les traits d'une femme dépouillée sans vergogne par les Français.

Soucieux de maintenir des relations amicales avec la France, Adams envoya à Paris une délégation, composée de John Marshall, Charles Cotesworth Pinckney et Elbridge Gerry, pour réclamer une compensation aux attaques françaises sur les navires américains. À leur arrivée en France en , les plénipotentiaires durent patienter plusieurs jours avant d'obtenir un entretien de quinze minutes seulement avec le ministre français des Relations extérieures, Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord. Peu après cette entrevue, la délégation américaine fut approchée par trois émissaires de Talleyrand qui exigèrent, avant toute discussion préalable, le versement par les États-Unis de gigantesques pots-de-vin, l'un pour le compte personnel de Talleyrand et l'autre à destination de la République française[33]. Les Américains, outrés par le procédé, refusèrent de négocier dans ces conditions[34]. Marshall et Pinckney regagnèrent leur pays dans la foulée, seul Gerry demeurant sur place[35].

Dans un discours prononcé en devant le Congrès, Adams révéla publiquement les machinations de Talleyrand, ce qui suscita une vague d'indignation à l'égard des Français[36]. Les républicains-démocrates émirent néanmoins des doutes sur la version des faits présentée par le gouvernement au sujet de l'« affaire XYZ », ainsi que fut baptisé cet épisode chaotique des relations franco-américaines ; par la suite, nombreux furent les partisans de Jefferson à ferrailler contre les mesures prises par Adams pour se prémunir d'une éventuelle agression française[37]. De leur point de vue, une guerre avec la France risquait de favoriser une alliance avec l'Angleterre, laquelle ne manquerait de faciliter l'application du programme de politique intérieure d'un président volontiers taxé de monarchiste par les jeffersoniens. Pour leur part, une bonne partie des fédéralistes, et en particulier les « ultra-fédéralistes » conservateurs, redoutaient l'influence des bouleversements sociaux engendrés par la Révolution française. L'économie était également un motif de discorde entre les fédéralistes et les républicains-démocrates, les premiers souhaitant consolider les relations financières avec l'Angleterre tandis que les seconds se méfiaient de la trop grande dépendance du pays envers les créanciers britanniques[38].

« Quasi-guerre Â»

Combat de l'USS Constellation et de la frégate Insurgente le 9 février 1799 (par John W. Schmidt, 1981).

Ne voyant aucun avantage Ă  rejoindre l'alliance menĂ©e par les Britanniques contre la France, Adams dĂ©cida Ă  la place d'utiliser la marine amĂ©ricaine pour harceler les navires français et enrayer les prĂ©judices infligĂ©s par ces derniers aux intĂ©rĂŞts amĂ©ricains. Cette initiative marqua le dĂ©but d'une guerre navale non dĂ©clarĂ©e connue sous le nom de « quasi-guerre »chap. 17_28-1">[28]. Soucieux d'amĂ©liorer la dĂ©fense du pays en cas d'invasion des troupes françaises, le prĂ©sident demanda au Congrès d'autoriser un renforcement significatif de la marine ainsi que la mise sur pied d'une armĂ©e de 25 000 hommes. Les parlementaires ne consentirent toutefois qu'Ă  porter les effectifs de l'armĂ©e Ă  10 000 soldats tandis que la taille de la flotte, qui ne comptait Ă  cette date qu'un seul navire douanier dĂ©sarmĂ©, fut augmentĂ©e quoique dans une proportion infĂ©rieure aux attentes de la prĂ©sidence[39] - [12]. Le commandement suprĂŞme de l'armĂ©e fut confiĂ© Ă  l'ancien prĂ©sident George Washington qui obtint, en dĂ©pit des rĂ©ticences d'Adams, d'ĂŞtre secondĂ© par Hamilton dans cette tâche[40]. Il devint toutefois rapidement clair que, compte tenu de l'âge avancĂ© de Washington, la direction effective de l'armĂ©e Ă©tait entre les mains d'Hamilton, ce qui dĂ©plut fortement Ă  Adamschap. 17_28-2">[28].

La marine des États-Unis remporta plusieurs victoires pendant la quasi-guerre parmi lesquelles la capture de l'Insurgente, un puissant navire de guerre français. Les vaisseaux de la flotte américaine ouvrirent également des relations commerciales avec Saint-Domingue (actuelle Haïti), une colonie française de la mer des Caraïbes alors en proie à la rébellion[41]. Contre l'avis d'un grand nombre de fédéralistes, Adams refusa cependant toute escalade du conflit et soutint les efforts d'Elbridge Gerry, un plénipotentiaire républicain-démocrate que le président avait envoyé en France au début de son mandat, pour négocier la cessation des hostilités avec la France[42]. L'influence toujours prégnante d'Hamilton au sein du département de la Guerre contribua à accroître la scission entre les partisans fédéralistes du président et ceux de l'ancien secrétaire au Trésor, alors même que les inquiétudes soulevées par la création d'une vaste armée permanente ne pouvaient que bénéficier aux républicains-démocrates[43].

En , Adams créa la surprise en annonçant l'envoi en France du diplomate William Vans Murray pour mettre un terme au conflit. Le départ de la délégation fut cependant retardé de quelques mois afin de permettre l'entrée en service, dans l'intervalle, de plusieurs navires de guerre américains susceptibles de renforcer la position stratégique des États-Unis dans les Caraïbes. Finalement, en novembre de la même année, Murray et les autres membres de la délégation s'embarquèrent pour la France, au grand dam d'Hamilton et des fédéralistes radicaux[44]. Cette initiative diplomatique accentua les dissensions au sein du Parti fédéraliste dont plusieurs chefs de file songèrent désormais à remplacer Adams par un autre candidat en vue de l'élection présidentielle de 1800[45]. Simultanément, les perspectives d'une paix entre la France et les États-Unis s'améliorèrent avec l'arrivée au pouvoir de Napoléon Bonaparte en . Ce dernier, aux prises avec les puissances européennes liguées contre la France dans le cadre de la Deuxième Coalition, était en effet pressé de mettre fin à la quasi-guerre et il chargea son frère Joseph Bonaparte d'entamer des pourparlers avec la délégation américaine. Les discussions entre les deux parties s'ouvrirent au printemps 1800[46].

Les affrontements cessèrent au mois de septembre avec la signature du traitĂ© de Mortefontaine mĂŞme si les Français refusèrent de reconnaĂ®tre l'annulation du TraitĂ© d'alliance de 1778 qui avait scellĂ© l'entente franco-amĂ©ricaine[47]. Les concessions obtenues par les États-Unis furent quant Ă  elles loin d'ĂŞtre substantielles ; pourtant, le traitĂ© se rĂ©vĂ©la en dĂ©finitive ĂŞtre une aubaine pour la jeune nation amĂ©ricaine dans la mesure oĂą la France devait, quelque temps plus tard, bĂ©nĂ©ficier elle-mĂŞme d'un rĂ©pit dans sa lutte contre l'Angleterre grâce au traitĂ© d'Amiens de 1802[48]. La nouvelle de la signature du traitĂ© de Mortefontaine ne parvint aux États-Unis qu'après l'Ă©lection de 1800 mais Adams, surmontant l'opposition d'un certain nombre de fĂ©dĂ©ralistes, parvint Ă  faire ratifier le traitĂ© par le SĂ©nat en [49]. La guerre Ă©tant finie, l'une des dernières tâches du prĂ©sident sortant fut de procĂ©der Ă  la dĂ©mobilisation de l'armĂ©echap. 18_50-0">[50].

Relations avec l'Espagne

En 1795, les États-Unis et l'Espagne avaient signé le traité de San Lorenzo qui délimitait la frontière avec la Louisiane, alors sous contrôle espagnol. Cependant, alors que la perspective d'un conflit armé entre la France et les États-Unis se profilait à l'horizon, les autorités de Madrid ne se pressèrent pas de faire appliquer les dispositions du traité, qui comprenait la cession par l'Espagne des terres de Yazoo et le désarmement des forts espagnols le long du fleuve Mississippi. Peu après l'investiture d'Adams, les projets élaborés par le sénateur William Blount pour chasser les Espagnols de la Louisiane et de la Floride furent rendus publics, ce qui eut pour effet de détériorer les relations avec l'Espagne. Un patriote vénézuélien, le général Francisco de Miranda, s'efforçait dans le même temps de galvaniser l'opinion en faveur d'une intervention américaine contre l'Espagne, avec le possible concours des Britanniques. Ce plan, quoique soutenu par Hamilton, fut rejeté par Adams qui refusa de s'entretenir avec Miranda. Ayant de la sorte évité la guerre avec la France et l'Espagne, l'administration Adams se contenta de superviser la mise en œuvre du traité de San Lorenzo[51].

Politique intérieure

Déménagement de la capitale fédérale à Washington, D.C.

Gravure de 1807 représentant la façade nord de la résidence présidentielle (future Maison-Blanche) à Washington.

En 1790, le Congrès avait voté le Residence Act qui prévoyait la fondation d'une capitale nationale permanente le long du fleuve Potomac ; l'échéance pour l'achèvement des bâtiments gouvernementaux était fixée à . La nouvelle ville fut baptisée en l'honneur du président Washington tandis que le district fédéral dont elle faisait partie reçut le nom de Columbia, qui était une allégorie poétique très en vogue à l'époque pour qualifier les États-Unis. En vertu de cette même loi, la capitale provisoire, initialement implantée à New York, fut transférée à Philadelphie à partir de 1791[52].

Le Congrès ajourna sa dernière session à Philadelphie le et la ville cessa d'être le siège officiel du gouvernement de la nation à compter du [53]. Au cours de ce mois, Adams visita pour la première fois Washington et trouva que les bâtiments publics, sis au milieu d'un paysage urbain « brut et inachevé », étaient « dans un état d'achèvement beaucoup plus avancé que prévu » ; l'aile nord du Capitole — qui abriterait plus tard le Sénat — était presque achevée, tout comme la résidence présidentielle, la future Maison-Blanche[54]. Le président emménagea dans cette dernière demeure le et fut rejoint quelques semaines plus tard par son épouse Abigail Adams. À son arrivée, Adams écrivit à sa femme : « je prie le Ciel d'accorder sa meilleure bénédiction à cette maison et à tous ceux qui l'habiteront dans l'avenir. Puisse-t-il faire que seuls des hommes honnêtes et sages règnent sous ce toit »[55].

Le Sénat du 6e Congrès se réunit pour la première fois dans le bâtiment du Capitole le . Le 22 de ce mois, Adams prononça son quatrième discours sur l'état de l'Union devant une session conjointe du Congrès, dans la salle du Sénat[56]. Il commença son allocution en félicitant les parlementaires pour leurs nouveaux locaux et « pour la perspective d'une résidence qui ne sera pas changée ». Il ajouta que, « bien qu'il y ait quelque raison de craindre que les aménagements ne soient pas, dès à présent, aussi complets qu'on pourrait le souhaiter, il y a cependant de grandes raisons de croire que cet inconvénient cessera avec la présente session ». Ce fut la dernière fois qu'un président discourut en personne devant le Congrès jusqu'en 1913[57]. En fut adoptée une loi qui organisait officiellement le district de Columbia, dont l'administration, conformément à la Constitution, relevait directement de la compétence du Congrès[52].

Lois sur les étrangers et la sédition

La quasi-guerre intensifia les querelles partisanes et le prĂ©sident faisait l'objet de nombreuses attaques dans la presse. Bon nombre d'immigrĂ©s de fraĂ®che date, et en particulier les Irlandais, ne cachaient pas leurs sympathies pour la France rĂ©volutionnaire et l'un de leurs reprĂ©sentants au Congrès, le dĂ©putĂ© irlando-amĂ©ricain Matthew Lyon, en vint mĂŞme aux mains avec un parlementaire fĂ©dĂ©raliste. Afin de rĂ©primer toute vellĂ©itĂ© subversive parmi les immigrĂ©s hostiles Ă  la politique gouvernementale, les fĂ©dĂ©ralistes votèrent en 1798 les lois sur les Ă©trangers et la sĂ©dition (en anglais Alien and Sedition Acts)chap. 17_28-3">[28]. La question de savoir si Adams Ă©tait favorable ou non Ă  cette lĂ©gislation ― qu'il consentit Ă  promulguer ― continue de faire dĂ©bat chez les historiens. Dans ses mĂ©moires, l'ancien prĂ©sident nia que ce fĂ»t le cas mais son agacement rĂ©pĂ©tĂ© face aux critiques « diffamatoires » portĂ©es Ă  l'encontre de son administration ne fut peut-ĂŞtre pas, en la circonstance, Ă©tranger Ă  l'adoption de ces lois[58].

Politique fiscale et rébellion de Fries

Pour financer les dépenses militaires engendrées par la quasi-guerre, Adams et ses alliés fédéralistes promulguèrent l'impôt direct de 1798. D'une manière générale, les taxes prélevées par le gouvernement fédéral n'étaient pas très populaires aux États-Unis ; sous la présidence de Washington, les revenus du gouvernement provenaient ainsi principalement des taxes d'accise et des droits de douane. Si Washington était parvenu à maintenir le budget en équilibre grâce à la forte croissance de l'économie, la hausse des dépenses militaires menaçait de creuser le déficit. Adams, Hamilton et le secrétaire au Trésor Wolcott élaborèrent en conséquence un plan d'imposition destiné à accroître les recettes fédérales. La nouvelle taxation votée en 1798 instituait un impôt progressif sur la valeur des terres qui pouvait atteindre % de la valeur d'une propriété. Les contribuables de l'est de la Pennsylvanie, hostiles à ce prélèvement supplémentaire, réservèrent cependant un très mauvais accueil aux collecteurs d'impôts fédéraux : en éclata la rébellion de Fries — du nom de son meneur John Fries, un vétéran de la guerre d'indépendance. À l'instigation de ce dernier, les fermiers ruraux germanophones se révoltèrent contre ce qu'ils estimaient être une atteinte à leurs droits civiques et à leurs églises[59]. Par crainte d'assister à une résurgence de la lutte des classes, le gouvernement dépêcha sur place une armée commandée par Hamilton afin de mater la rébellion. Fries fut traduit en justice à l'occasion d'un procès qui suscita l'engouement de la nation tout entière, accusé de trahison et condamné, avec deux autres individus, à la peine capitale. Celle-ci ne fut en définitive pas appliquée car Adams décida d'accorder sa grâce aux trois hommes. Le trouble suscité par cet épisode, le recours par le gouvernement à la force armée et les suites juridiques de l'affaire coûtèrent toutefois au président de nombreuses voix en Pennsylvanie ainsi que dans d'autres États traditionnellement acquis au Parti fédéraliste, compromettant de fait ses chances de réélection[60].

Nomination des « juges de minuit Â»

Au dĂ©but de sa prĂ©sidence, Adams avait plaidĂ© en faveur de la crĂ©ation de nouveaux postes de juges fĂ©dĂ©raux mais ses suggestions avaient Ă©tĂ© rejetĂ©es par le Congrès. Après la perte de contrĂ´le de la prĂ©sidence et du Congrès par les fĂ©dĂ©ralistes lors de l'Ă©lection de 1800, bon nombre de membres du parti vaincu se rallièrent cependant aux propositions d'Adams dans l'espoir que ces nouveaux postes — dont les titulaires Ă©taient nommĂ©s Ă  vie ― fussent attribuĂ©s Ă  des fĂ©dĂ©ralistes. Dans la pĂ©riode qui sĂ©para l'Ă©lection de Jefferson de son investiture, le 6e Congrès approuva le Judiciary Act of 1801 qui instaurait un Ă©chelon judiciaire intermĂ©diaire entre les cours de district et la Cour suprĂŞme. La taille de cette dernière fut Ă©galement rĂ©duite de six Ă  cinq sièges Ă  compter de la prochaine vacance. Cela signifiait que Jefferson devrait attendre non pas une mais deux vacances avant de pouvoir nommer un juge au sein de la Cour. Adams consacra les derniers jours de son administration Ă  combler les nouveaux emplois de juges prĂ©vus par la loi ; les responsables politiques et les journaux de l'opposition ne tardèrent pas Ă  dĂ©noncer la nomination de ces « juges de minuit ». La plupart de ces magistrats furent dĂ©mis de leur fonction Ă  la suite du vote par le 7e Congrès (dominĂ© par les rĂ©publicains-dĂ©mocrates) du Judiciary Act of 1802 qui abolissait les cours intermĂ©diaires nouvellement crĂ©Ă©es et rĂ©tablissait le système judiciaire fĂ©dĂ©ral dans sa structure antĂ©rieurechap. 17_28-4">[28] - [61].

Bibliographie

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