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Porte-musc de l'Himalaya

Moschus leucogaster

Moschus leucogaster
Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
Couleurs du pelage spécifique selon la description de Hodgson

EspĂšce

Moschus leucogaster
Hodgson, 1839

Statut de conservation UICN

( EN )
EN : En danger

Répartition géographique

Description de l'image Moschus leucogaster.png.

Le porte-musc de l'Himalaya (Moschus leucogaster) est une espĂšce de mammifĂšres de la famille des Moschidae. Ce mammifĂšre herbivore ruminant forme l'une des sept espĂšces du genre Moschus.

Il vit sur la frange sud de l’Himalaya, Ă  plus de 2 500 m d’altitude. Petit animal, farouche et discret, il est proche de Moschus chrysogaster, avec lequel il a Ă©tĂ© autrefois identifiĂ©.

Le musc qu’il produit est trĂšs recherchĂ© par les humains, jadis pour la fabrication de parfums et d’encens mais de nos jours essentiellement pour la fabrication de mĂ©dicaments des pharmacopĂ©es traditionnelles chinoise, tibĂ©taine et corĂ©enne. L’espĂšce Moschus leucogaster est classĂ©e sur la liste rouge des espĂšces menacĂ©es dans la catĂ©gorie « en danger ».

Étymologie et histoire de la nomenclature

Le nom de genre Moschus est un terme latin signifiant « musc », lui-mĂȘme un emprunt au grec ÎŒÏŒÏƒÏ‡ÎżÏ‚ moskhos, empruntĂ© du persan muĆĄk, qui viendrait soit du sanskrit à€źà„à€·à„à€• muáčŁkĂĄ ayant le sens de « testicule », en raison de la forme de la glande qui le produit soit d’un terme iranien apparentĂ©[1].

L’épithĂšte spĂ©cifique leucogaster est composĂ© de deux Ă©tymons : le premier du grec ancien λΔυÎșός leukĂłs « blanc » et le second du latin gaster (venant du grec ÎłÎ±ÏƒÏ„ÎźÏ gastᾗr) « ventre », soit « au ventre blanc ».

Le naturaliste britannique Brian Houghton Hodgson envoyĂ© au NĂ©pal de 1820 Ă  1843 par la Compagnie anglaise des Indes orientales, y Ă©tudie la faune, les peuples et leurs religions. Dans une note au Journal of the Asiatic Society of Bengal de mars 1839, il attire l’attention de ses collĂšgues sur la diffĂ©rence de couleur de trois cerfs porte-musc du genre Moschus qu’il distingue par les Ă©pithĂštes spĂ©cifiques de Leucogaster, Chrysogaster et Saturatus[2]. L’espĂšce M. leucogaster a « le dessus du corps et les membres brun foncĂ© parsemĂ© de fauve, le dessous de la tĂȘte, le cou et le ventre, ainsi que l’intĂ©rieur des oreilles et les orbites, d’un blanc grisĂątre ».

Description

Le porte-musc de l'Himalaya est un mammifĂšre mesurant entre 86 et 100 cm de long, de 40 Ă  50 cm de hauteur au garrot, pour un poids allant de 11 Ă  18 kg[3]. Contrairement aux cervidĂ©s, le mĂąle ne porte pas de bois sur la tĂȘte et sa mĂąchoire supĂ©rieure est dotĂ©e d'une paire de longues canines qui poussent tout au long de sa vie et peuvent mesurer jusqu'Ă  7 Ă  10 cm de long sur les sujets ĂągĂ©s. La femelle possĂšde aussi des canines mais elles n’ont pas de croissance continue.

Le mĂąle possĂšde aussi une glande qui produit du musc. SituĂ©e entre l’ombilic et le pĂ©nis, la paroi glandulaire secrĂšte un liquide visqueux jaunĂątre, qui s’accumule dans un sac et devient rouge brun en vieillissant puis fonce encore quand il est prĂ©levĂ©. L’ouverture de la poche se trouve au niveau de l’extrĂ©mitĂ© du pĂ©nis permettant Ă  l’animal de mĂ©langer Ă  volontĂ© la sĂ©crĂ©tion musquĂ©e avec son urine [4]. Son odeur puissante sert Ă  attirer les femelles au moment des accouplements. Il sert aussi Ă  marquer le territoire et Ă©carter les mĂąles rivaux au cours de la saison de reproduction. Cette substance convoitĂ©e par les hommes depuis des millĂ©naires est utilisĂ©e dans la fabrication de parfums, savons et prĂ©parations mĂ©dicinales. Les porte-musc de l’Himalaya des deux sexes possĂšdent aussi une glande caudale, Ă  la base de la queue, qui sert Ă  marquer le territoire[3].

Le porte-musc de l'Himalaya est de couleur brun sable, avec une croupe et des membres légÚrement plus foncés. Son caractÚre spécifique, rappelé par Hodgson par son nom M. leucogaster (éty. « porte-musc à ventre blanc ») est la face ventrale de son corps qui va du gris au blanc, à la différence de M. chrysogaster (éty. « porte-musc à ventre jaune ») dont le ventre est rouge doré à orange. La fourrure brun foncé sur les jeunes faons est parsemée de taches blanches, mais prend plus tard une couleur plus uniforme, bien que les adultes peuvent conserver deux taches blanches sur le cou.

Superbement adaptĂ© Ă  la vie en haute altitude, le porte-musc de l'Himalaya est un ongulĂ© artiodactyle qui possĂšde quatre doigts (2345): les deux doigts centraux (34) larges et les deux latĂ©raux ou ergots (35) situĂ©s plus hauts et plus pointus. Les sabots (ou ongles) des membres arriĂšres sont inĂ©gaux, l’intĂ©rieur (3) Ă©tant beaucoup plus long que l’extĂ©rieur (4); il en est de mĂȘme des ergots, dont l’interne est aussi plus long que l’externe[5] - [n 1]. De mĂȘme pour les membres antĂ©rieurs, deux ergots touchent la terre. Cette configuration lui assure la stabilitĂ© sur les pentes raides. Il court en bondissant comme un liĂšvre.

Il a une couche dense de poils rudes avec des cellules remplies d'air qui l'isolent contre les tempĂ©ratures extrĂȘmes. Le corps est trapu, et les membres antĂ©rieurs sont courts et minces par rapport aux membres postĂ©rieurs plus puissants. La courbure de la colonne vertĂ©brale, ainsi que la diffĂ©rence de taille des membres permet de comprendre pourquoi l'animal court en bondissant comme un lapin, ses deux membres postĂ©rieurs se projetant devant ses membres antĂ©rieurs. Il peut faire des bonds de m[3].

Moschus leucogaster Ă©tait autrefois considĂ©rĂ© comme la mĂȘme espĂšce que Moschus chrysogaster, car les deux espĂšces ont de nombreuses caractĂ©ristiques communes[3]. En 1839, Hodgson avait proposĂ© de les distinguer sur la seule base de la diffĂ©rence de couleur du pelage. En 1995, Groves, Wang et Grubb[6] ont procĂ©dĂ© Ă  une analyse multivariable de la morphologie du crĂąne et de la denture. Leurs rĂ©sultats indiquent qu’il est possible de distinguer M. chrysogaster (avec deux sous-espĂšces, ie chrysogaster et sifanicus) et M. leucogaster (avec une sous-espĂšce). Alors que M. chrysogaster a des rayures blanches distinctes ou une tache blanche sur la gorge, cette caractĂ©ristique est vague chez M. leucogaster, si elle est prĂ©sente. Une analyse gĂ©nĂ©tique du gĂ©nome mitochondrial a confirmĂ© la distinction des deux espĂšces (Tao Pan et al[7], 2015).

RĂ©partition et habitat

Carte de répartition des 7 espÚces de Moschus
M. leucogaster en vert

L'aire de répartition du porte-musc de l'Himalaya se situe dans les montagnes de l'Himalaya : au Bhoutan, au Népal, dans l'Inde du Nord-Est et dans la région sud-ouest de la province du Tibet en Chine.

Cette espĂšce vit dans les prairies, les zones arbustives et les forĂȘts de sapins sur les plateaux de haute altitude au-dessus de 2 500 m d’altitude[3].

Écologie

Timide, discret et solitaire, le porte-musc de l'Himalaya se cache dans la couverture dense pendant la journĂ©e, ne sortant de sa cachette qu'Ă  la nuit tombĂ©e pour se nourrir. Son rĂ©gime herbivore se compose essentiellement de feuilles d’arbres et d’arbustes ayant une haute teneur en protĂ©ines et Ă  faible teneur en fibres. Il consomme aussi de l’herbe, de la mousse, des lichens, de jeunes pousses et des champignons. En hiver, il se rabat sur les lichens, mĂȘme s'il est capable de monter sur les petits arbres pour se nourrir de feuilles qui seraient autrement hors de portĂ©e. Il peut parcourir de 3 Ă  km par nuit mais revient Ă  son territoire habituel au petit-matin[3].

Le porte-musc de l'Himalaya est une espĂšce assez sĂ©dentaire, occupant un domaine d'environ 22 hectares. Les mĂąles occupent un territoire plus grand, qu’ils dĂ©fendent et se battant contre les autres mĂąles qui y pĂ©nĂštrent. Lors des combats, ils rĂ©pandent leur urine mĂ©langĂ©e au musc. Les mĂąles sont farouchement territoriaux, ne laissant que les femelles entrer dans leur territoire. Les territoires sont marquĂ©s par les excrĂ©ments soigneusement placĂ©s aux mĂȘmes endroits et les sĂ©crĂ©tions qui sont frottĂ©es sur la vĂ©gĂ©tation environnante.

Pendant la saison de reproduction, le mĂąle produit du musc qui, mĂ©langĂ© avec son urine, a une couleur rose et une forte odeur qui pourrait stimuler la femelle Ă  entrer en Ɠstrus. La glande caudale sert aussi Ă  marquer le territoire. De novembre Ă  dĂ©but juillet, les mĂąles se disputent les femelles. Les naissances ont lieu gĂ©nĂ©ralement entre mai et juin, aprĂšs une pĂ©riode de gestation de 178 Ă  198 jours. Les deux premiers mois de sa vie, le jeune porte-musc reste cachĂ© dans le sous-bois. Le petit se dĂ©veloppe rapidement, devenant totalement indĂ©pendant aprĂšs 6 mois. La maturitĂ© sexuelle est gĂ©nĂ©ralement atteinte au bout de 18 mois, bien que la femelle peuvent se reproduire dĂšs leur premiĂšre annĂ©e. L'espĂ©rance de vie de l'espĂšce est de 10 Ă  14 ans et jusqu'Ă  20 ans au maximum.

Reproduction[3]
Intervalle de reproductionSaison de reproductionPortée
1 fois/annovembre-janvier1 Ă  2
DurĂ©e de gestationÂge du sevrageMaturitĂ© sexuelle ♂♀
185 Ă  195 jours6 mois16 Ă  24 mois

Menaces

Ses prĂ©dateurs sont le lĂ©opard (Panthera pardus), le lynx (Lynx lynx), la martre Ă  gorge jaune (Martes flavigula), le renard roux (Vulpes vulpes), le loup gris (Canis lupus), le chien sauvage et le principal l’Homme (Homo sapiens). De grands oiseaux de proie peuvent occasionnellement tuer des jeunes[3].

La chasse par les humains est la principale menace pesant sur le porte-musc de l'Himalaya. Son musc est trĂšs prisĂ© pour la fabrication de parfums, d'encens et de mĂ©dicaments traditionnels[n 2]. Bien que la demande de musc ne soit plus aussi importante pour la fabrication de parfums dans lesquels il est remplacĂ© par des produits synthĂ©tiques, il est encore trĂšs demandĂ© pour la fabrication de prĂšs de 300 mĂ©dicaments chinois et corĂ©ens, et peut se vendre jusqu’à 65 000 $ le kilo[8]. Il n’y a que 25 g de musc par animal[3].

En raison de sa haute valeur ainsi que la mauvaise situation économique de nombreuses communautés au sein de son aire de répartition, la chasse au porte-musc de l'Himalaya est excessive. Les animaux sont capturés à l'aide de piÚges sans discernement, et bien que seuls les mùles adultes produisent du musc, les femelles et les juvéniles sont également capturés. Dans certaines régions, il est également chassé pour sa viande, tandis que son habitat est menacé par la progression du pastoralisme. Il existe un important commerce des poches de musc en Chine et ailleurs en Asie du Nord-Est[9].

L’espĂšce Moschus leucogaster est classĂ©e sur la liste rouge des espĂšces menacĂ©es de l'UICN dans la catĂ©gorie« en danger »[9], depuis 2008. Cette espĂšce est inscrite Ă  l'Annexe II de la CITES (en Chine) et Ă  l'Annexe I (dans tous les autres pays), mais ça n’empĂȘche pas un commerce effrĂ©nĂ© du cerf porte-musc. Il est considĂ©rĂ© comme rare en Chine.


Voir aussi

Liens externes

Notes

  1. la longueur des sabots peut ĂȘtre comparĂ©e Ă  la longueur des doigts chez l'homme, l'index (3) est plus long que l'annulaire (4)
  2. voir Histoire de l’utilisation du musc

Références

  1. (direction) Alain Rey, Dictionnaire historique de la langue française (tome I, II), Le Robert,
  2. Hodgson B.H., « On three new species of Musk (Moschus) inhabiting the Hemalatan districts », The Journal of the Asiatic Society of Bengal, vol. VIII, no 87 March,‎ (lire en ligne)
  3. (en) Référence Animal Diversity Web : Moschus leucogaster
  4. Shrestha M., « Musk deer Moschus chrysogaster: musk extraction from live deer », Journal of the Bombay Natural History Society, vol. 86,‎ , p. 438-440
  5. Guibourt, Gaston (1790-1867), Histoire naturelle des drogues simples, ou Cours d'histoire naturelle professĂ© Ă  l'École supĂ©rieure de pharmacie de Paris., Paris, J-B. BaillĂšre et fils, (lire en ligne)
  6. (zh) Groves C P, Wang Yingxiang, Grubb P., « Taxonomy of musk-deer, genus Moschus (Moschidae, Mammalia) », Shou lei xue bao = Acta Theriologica Sinica, vol. 15, no 3,‎ , p. 181-197
  7. Tao Pan, Hui Wang, [...], and Baowei Zhang, « Species Delimitation in the Genus Moschus (Ruminantia: Moschidae) and Its High-Plateau Origin », PloS One, vol. 10, no 8,‎ (lire en ligne)
  8. Richard Ellis, Tiger Bone & Rhino Horn: The Destruction Of Wildlife For Traditional Chinese Medicine, Shearwater Books, US, , 312 p.
  9. (en) Référence UICN : espÚce Moschus leucogaster (consulté le )
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