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Porte-musc alpin

Moschus chrysogaster

Moschus chrysogaster
Description de l'image Moschus chrysogaster.jpg.

EspĂšce

Moschus chrysogaster
Hodgson, 1839

Statut de conservation UICN

( EN )
EN A2cd : En danger

Statut CITES

Sur l'annexe  I  de la CITES Annexe I , RĂ©v. du 29/07/1983

Répartition géographique

Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
Chine centrale et du sud, Himalaya du Sud-Est

Le Chevrotain porte-musc alpin (Moschus chrysogaster) est une espĂšce de mammifĂšres de la famille des Moschidae. Ce mammifĂšre herbivore forme l'une des sept espĂšces du genre Moschus.

Le mĂąle possĂšde une glande qui produit du musc, destinĂ© Ă  attirer les femelles et repousser les mĂąles rivaux. Cette substance trĂšs convoitĂ©e par les hommes depuis des millĂ©naires est utilisĂ©e dans la fabrication des parfums, de l’encens mais surtout pour la fabrication de mĂ©dicaments des pharmacopĂ©es traditionnelles chinoise, tibĂ©taine et corĂ©enne. Un prĂ©lĂšvement excessif de musc par les chasseurs a mis en danger d’extinction l’espĂšce.

Il vit en Chine centrale et mĂ©ridionale et dans l’Himalaya du Sud-Ouest Ă  2 000–5 000 m d'altitude, oĂč il est considĂ©rĂ© comme une espĂšce distincte de M. leucogaster.

Étymologie et histoire de la nomenclature

Le nom de genre Moschus est un terme latin signifiant « musc », lui-mĂȘme un emprunt au grec ÎŒÏŒÏƒÏ‡ÎżÏ‚ moskhos, empruntĂ© du persan muĆĄk, qui viendrait soit du sanskrit à€źà„à€·à„à€• muáčŁkĂĄ ayant le sens de « testicule », en raison de la forme de la glande soit d’un terme iranien apparentĂ©[1].

L’épithĂšte spĂ©cifique chrysogaster est composĂ© de deux Ă©tymons du grec ancien : χρυσός khrusĂłs « or » et ÎłÎ±ÏƒÏ„ÎźÏ gastᾗr « ventre », soit « Ă  ventre dorĂ© ».

Le naturaliste britannique Brian Houghton Hodgson, envoyĂ© au NĂ©pal de 1820 Ă  1843 par la Compagnie anglaise des Indes orientales, y Ă©tudie la faune, les peuples et leurs religions. Dans une note au Journal of the Asiatic Society of Bengal de , il attire l’attention de ses collĂšgues sur la diffĂ©rence de couleur de trois cerfs porte-musc du genre Moschus qu’il distingue par les Ă©pithĂštes spĂ©cifiques de Leucogaster, Chrysogaster et Saturatus[2]. Il dĂ©crit le Moschus chrysogaster en ces termes: « brun sepia tachetĂ© de rouge dorĂ© ; couverture et base des oreilles, tout le dessous du corps, d’une riche couleur rouge dorĂ© ou orange ; l’arriĂšre-train brun noir ; les membres dessous la flexion centrale, flavescents ».

Description

Le porte-musc alpin M. chrysogaster ressemble Ă  un petit chevreuil. Mais Ă  la diffĂ©rence des cervidĂ©s, le mĂąle ne porte pas de bois sur la tĂȘte et sa mĂąchoire supĂ©rieure est dotĂ©e d'une paire de longues canines qui poussent tout au long de sa vie et peuvent mesurer jusqu'Ă  7 Ă  10 cm de long sur les sujets ĂągĂ©s. Lorsque les mĂąles se battent pour dĂ©fendre leur territoire, ils peuvent s’infliger de sĂ©rieuses blessures avec leurs canines acĂ©rĂ©es. Les femelles possĂšdent aussi des canines mais elles n’ont pas de croissance continue.

Le mĂąle possĂšde aussi une glande qui produit du musc. SituĂ©e entre l’ombilic et le pĂ©nis, la paroi glandulaire secrĂšte un liquide visqueux jaunĂątre, qui s’accumule dans une poche et devient rouge brun en vieillissant puis fonce encore quand il est prĂ©levĂ©. L’ouverture de la poche se trouve au niveau de l’extrĂ©mitĂ© du pĂ©nis permettant Ă  l’animal de mĂ©langer Ă  volontĂ© la sĂ©crĂ©tion musquĂ©e avec son urine (Shrestha[3], 1989).

Son odeur puissante sert à attirer les femelles au moment des accouplements. Mélangé à l'urine, le musc sert aussi à marquer le territoire et écarter les mùles rivaux au cours de la saison de reproduction. Cette substance convoitée par les hommes depuis des millénaires est utilisée dans la fabrication de parfums, savons et préparations médicinales. Les porte-muscs alpins des deux sexes possÚdent aussi une glande caudale, à la base de la queue, qui sert à marquer le territoire[4]

L'animal mesure de 85 Ă  100 cm de long et de 40 Ă  50 cm de hauteur au garrot, pour un poids de 10 Ă  15 kg[5]. C’est un animal robuste, avec de longues oreilles, le dos courbĂ©, des membres antĂ©rieurs plus courts que les membres postĂ©rieurs. Comme tous les porte-muscs, il a quatre doigts (2345): les deux doigts centraux (34) larges et les deux latĂ©raux ou ergots (35) situĂ©s plus hauts et plus pointus. Les sabots (ou ongles) des membres arriĂšres sont inĂ©gaux, l’intĂ©rieur (3) Ă©tant beaucoup plus long que l’extĂ©rieur (4); il en est de mĂȘme des ergots, dont l’interne est aussi plus long que l’externe[6]. De mĂȘme pour les membres antĂ©rieurs, deux ergots touchent la terre. Cette morphologie lui assure une prise ferme sur un sol escarpĂ© ou mĂȘme sur un tronc d’arbre inclinĂ© et limitent l’enfoncement dans la neige. Il court en bondissant comme un lapin.

Morphologiquement proche de Moschus leucogaster, le porte-musc alpin s’en distingue par un charactĂšre spĂ©cifique de son pelage : la couleur orangĂ© de sa face ventrale qui lui a valu le nom de chrysogaster « Ă  ventre dorĂ© », alors que M. leucogaster a une face ventrale qui va du gris au blanc.

Sa queue trĂšs courte est glabre, Ă  l’exception de l’extrĂ©mitĂ© qui possĂšde une petite touffe de poils.

RĂ©partition et habitat

Carte de répartition des 7 espÚces de Moschus
M. chrysogaster en mauve

Les populations du porte-muscs alpins se trouvent sur les hauts plateaux de Chine centrale et mĂ©ridionale (S Gansu, S Ningxia, Qinghai, W Sichuan, S Tibet et N Yunnan), dans l’Himalaya du Sud-Ouest : Inde du Nord-Est, Bhoutan et NĂ©pal. Les porte-muscs prĂ©sents en Afghanistan et au Pakistan sont des Moschus cupreus[7].

En 1842, Hudgson indiquait qu’il vivait dans les « hautes montagnes de l’intĂ©rieur du Tibet, en particulier vers la frontiĂšre chinoise, oĂč se trouve presqu’exclusivement le premier et plus beau Chrysogaster »[8].

L’espĂšce vit sur les hauts plateaux dĂ©nudĂ©s de montagne entre 2 000 et 5 000 m d’altitude. Elle occupe les prairies, les broussailles ou les forĂȘts de sapins, prĂ©fĂ©rant gĂ©nĂ©ralement les pentes ombragĂ©es plus abruptes avec moins de perturbations humaines. Dans l’Ouest du Sichuan, lĂ  oĂč il est en prĂ©sence de Moschus berezovskii, il habite les altitudes les plus Ă©levĂ©es, au-dessus de 2 000 m, gĂ©nĂ©ralement de 4 000 Ă  4 500 m par rapport aux 1 000–2 500 m de M. berezovskii[7].

Écologie

Le porte-musc alpin est un animal solitaire, timide et crépusculaire[7].

C’est un ruminant qui se nourrit principalement d’arbustes, de plantes herbacĂ©es, de feuilles, de mousses, de lichens, de jeunes pousses, et de brindilles (Green[9], 1987). La proportion de feuilles et de pousses tendres dans l'alimentation est la plus Ă©levĂ©e au printemps et en Ă©tĂ©, puis viennent les bourgeons et les fleurs Ă  la fin de l'Ă©tĂ©, et les feuilles, les brindilles et les fleurs des plantes herbacĂ©es et des arbustes plus tard dans l'annĂ©e[7].

Ses principaux prĂ©dateurs sont la martre Ă  gorge jaune, le renard, le loup, le lynx et surtout l’Homme.

La densitĂ© de population est de 3,9 aux km2 dans les habitats arides et monte jusqu’à 71 aux km2 dans les zones Ă  fortes prĂ©cipitations. La densitĂ© est plus faible dans les zones oĂč il y a une forte couche de neige, et oĂč ils entrent en compĂ©tition avec le goral, le saro et les animaux domestiques.

La saison des accouplements se fait en novembre-décembre. Cinq à six mois plus tard, les naissances ont lieu. Les nouveau-nés restent cachés dans un endroit isolé, pendant deux mois, visités seulement par leur mÚre au moment des repas[7].

Le porte-musc alpin est sĂ©dentaire, il a tendance Ă  garder le mĂȘme territoire. Le territoire de la femelle fait environ 10 ha et celui du mĂąle est plus grand puisqu’il recouvre les territoires de plusieurs femelles. Les mĂąles adultes sont territoriaux.

La communication entre individus est basĂ©e avant tout sur l’odorat. Les individus dĂ©fĂšquent toujours aux mĂȘmes endroits appelĂ©s « latrines ». Ils s’accroupissent pour uriner et dĂ©fĂ©quer[5]. MĂąles et femelles marquent leur territoire en se frottant l’arriĂšre-train le long d’arbres ou de rochers pour laisser l’empreinte olfactive de la sĂ©crĂ©tion visqueuse de leur glande caudale. Au moment du rut, quand le mĂąle urine, il mĂ©lange du musc Ă  son urine qui prend une couleur rougeĂątre et dĂ©veloppe une forte odeur.

La durĂ©e de vie moyenne des individus sauvages est de 3,1 ans. En captivitĂ©, certains peuvent vivre jusqu’à 17 ans.

Reproduction[5]
Intervalle de reproductionSaison de reproductionPortée
1 fois/annovembre-décembre1
DurĂ©e de gestationÂge du sevrageMaturitĂ© sexuelle ♂♀
150 Ă  195 jours3-4 mois16 Ă  24 mois

Menaces

D’aprĂšs l’UICN, l’espĂšce M. chrysogaster a Ă©tĂ© classĂ©e comme « en danger » sur la Liste rouge des espĂšces menacĂ©es[7], en raison d’un dĂ©clin considĂ©rable de sa population estimĂ© Ă  plus de 50 % en trois gĂ©nĂ©rations (sur environ 21 ans). Les causes sont la surexploitation, le rĂ©trĂ©cissement de la distribution, la destruction et la dĂ©gradation de l’habitat. D’aprĂšs une estimation largement rĂ©pĂ©tĂ©e mais mal documentĂ©e, il y aurait eu 180 000 individus sauvages en Chine dans les annĂ©es 1960 et 1970 puis environ 100 000 dans les annĂ©es 1990 (Sheng[10] 1998). Aucune information substantielle n’a Ă©tĂ© reçue depuis.

M. chrysogaster est inscrit Ă  l’Annexe I de la CITES en Afghanistan, Inde, NĂ©pal et Pakistan, et Ă  l’Annexe II (moins menacĂ©e) au Bhoutan et en Chine[5].

Le musc de meilleure qualitĂ© est produit durant la saison des accouplements, de dĂ©cembre Ă  janvier. Il se prĂ©sente alors comme une poudre granuleuse d’un brun rouge foncĂ©, pourvue d’une forte odeur. En novembre, avril-mai-juin, la qualitĂ© du musc est infĂ©rieure. Il se prĂ©sente sous une forme pĂąteuse, d’un blanc crĂ©meux, et d’une odeur moins puissante[3]. Pour prĂ©lever le musc, les animaux sauvages sont tuĂ©s, en posant des collets ou en utilisant des armes Ă  feux et des chiens[11]. En gĂ©nĂ©ral, sont mis Ă  mort indistinctement femelles, juvĂ©niles et mĂąles, bien que ces derniers soient les seuls Ă  produire du musc. La poche de musc est dĂ©coupĂ©e sur l’animal ; elle contient environ 25 g de musc. Le musc se vend sur le marchĂ© international jusqu’à 45 000 $ le kilo[7] (pour 40 porte-muscs tuĂ©s). Ce genre de braconnage est facile Ă  accomplir et difficile Ă  stopper.

Pour Ă©viter le braconnage, des efforts pour dĂ©velopper l’élevage en captivitĂ© des porte-muscs alpins ont Ă©tĂ© dĂ©ployĂ©s. Le musc est prĂ©levĂ© en procĂ©dant Ă  un curetage de la glande Ă  musc avec une cuillĂšre. L’animal n’est pas tuĂ© mais traumatisĂ©[3]. Il y a une forte mortalitĂ© dans les fermes d’élevage en raison du trauma, de la pneumonie et des diarrhĂ©es[12].

Les fermes d’élevage servent aussi Ă  fournir des individus pour les rĂ©introduire dans des populations sauvages.

Liste des sous-espĂšces

Il existe 2 sous-espĂšces vivant en Chine :

  • Moschus chrysogaster chrysogaster (Hodgson 1839) distribuĂ© dans les zones alpines du Nord-Est de l’Inde, NĂ©pal, Bhoutan, et Sud du Tibet, entre 2 800 et 4 000 m. En Inde, il est prĂ©sent au Sikkim, Arunachal Pradesh et peut-ĂȘtre Uttarakhand
  • Moschus chrysogaster sifanicus (Buechner 1891) distribuĂ© en Chine dans le Sud Gansu, O Sichuan, Qinghai, N Ningxia, SE Tibet et N Yunnan[13].


Voir aussi

Liens externes

Notes et références

  1. (direction) Alain Rey, Dictionnaire historique de la langue française (tome I, II), Le Robert,
  2. Hodgson B.H., « On three new species of Musk (Moschus) inhabiting the Hemalatan districts », The Journal of the Asiatic Society of Bengal, vol. VIII, no 87 March,‎ (lire en ligne)
  3. Shrestha M., « Musk deer Moschus chrysogaster: musk extraction from live deer », Journal of the Bombay Natural History Society, vol. 86,‎ , p. 438-440
  4. (en) Référence Animal Diversity Web : Moschus leucogaster
  5. (en) Référence Animal Diversity Web : Moschus_chrysogaster (consulté le )
  6. Guibourt, Gaston (1790-1867), Histoire naturelle des drogues simples, ou Cours d'histoire naturelle professĂ© Ă  l'École supĂ©rieure de pharmacie de Paris., Paris, J-B. BaillĂšre et fils, (lire en ligne)
  7. (en) Référence UICN : espÚce Moschus chrysogaster (consulté le )
  8. Hodgson , 1842, J. Asiatic Soc. Bengal, 6: 285
  9. Green M.J.B., « Some ecological aspects of a Himalayan population of musk deer », dans C.M. Wemmer (ed.), The Biology and Management of Cervidae, Washington DC, Smithsonian Institution Press,
  10. Sheng H.L., « Moschus chrysogaster », dans Wang S. (ed.), China Red Date Book of Endangered Animals, Beijing, Science Press,
  11. Aryal Achyaut, « Himalayan Musk Deer in Annapurna Conservation Area, nepal », Tiger paper (FAO), vol. 33, no 2,‎ (lire en ligne)
  12. Sathyakumar, S., S. Prasad, S. Walker, « Status of captive Himalayan forest musk deer Moschus c. chrysogaster in India », International Zoo Yearbook, vol. 32,‎
  13. Sathyakumar Sambandam, Gopal S. Rawat, A.J.T. Johnsingh, « chap. 42 Order Artiodactyla Family Moschidae Evolution, Taxonomy and Distribution », dans A.J.T. Johnsingh and Nima Manjrekar, Mammals of South Asia, Vol. 2, Universities Press,
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