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Port de Gioia Tauro

Le port de Gioia Tauro (porto di Gioia Tauro en italien) est un port de commerce situé sur les rives de la mer Tyrrhénienne, en Calabre, à une soixantaine de kilomètres de l'extrémité méridionale de l'Italie péninsulaire.

Port de Gioia Tauro
Vue aérienne des infrastructures portuaires.
Présentation
Type
Construction
1974-2006
Trafic
2,26 millions d'EVP (2011)[1]
Activités
conteneurs
Places
53e mondial, 10e européen
et 1er italien pour les conteneurs[1]
Équipement
GĂ©ographie
Coordonnées
38° 27′ 37″ N, 15° 54′ 30″ E
Pays
RĂ©gion
Province
Commune d'Italie
GĂ©olocalisation sur la carte : Calabre
(Voir situation sur carte : Calabre)
GĂ©olocalisation sur la carte : Italie
(Voir situation sur carte : Italie)

AmĂ©nagĂ© dans les annĂ©es 1970-1980 pour servir de terminal charbonnier et minĂ©ralier Ă  une usine sidĂ©rurgique jamais construite, le port est reconverti Ă  partir de 1994 pour accueillir un terminal Ă  conteneurs. Il est en 2011 le premier port italien et le cinquième mĂ©diterranĂ©en en termes de trafic conteneurs[1], avec un trafic total de 2,2 millions d'EVP.

Reconversion d'un port

La décision de la construction du port remonte à 1971, comme conséquence des émeutes de 1970 à Reggio de Calabre. Dans l'espoir de réduire les difficultés économiques et sociales de la moitié méridionale de l'Italie (le Mezzogiorno), l'État italien décide de financer une série de grands équipements industriels dans le Sud, dont une usine sidérurgique d'Italsider en Calabre. Une telle usine nécessitant de grandes quantités de charbon et de minerai de fer nécessairement importés, il est décidé de la construire sur le littoral sous la forme d'une zone industrialo-portuaire. L'appel d'offre est lancé en 1974[2].

Mais au cours des annĂ©es 1970-1980, si les infrastructures portuaires sont creusĂ©es (chantier terminĂ© Ă  la fin des annĂ©es 1980)[3] et qu'environ 500 hectares d'oliveraies et d'orangeraies sont nivelĂ©s, le projet sidĂ©rurgique est d'abord rĂ©duit puis abandonnĂ© (en pleine crise de surproduction d'acier en Europe), remplacĂ© temporairement au milieu des annĂ©es 1980 par celui d'une centrale thermique au charbon d'Enel, elle-mĂŞme jamais construite[4]. Le port, vide car surdimensionnĂ© par rapport aux besoins de la rĂ©gion, est alors un exemple de « cathĂ©drale dans le dĂ©sert » et de gaspillage[2].

En 1993, la sociĂ©tĂ© italienne (gĂ©noise) de transport Contship (en) propose d'y construire un terminal dĂ©diĂ© aux conteneurs[5] et obtient un large soutien financier de la part de l'État et du FEDER[3]. La construction en tranches successives s'Ă©tale de 1994 Ă  2006, avec l'entrĂ©e du premier porte-conteneurs dès ; Maersk, le leader du commerce conteneurisĂ©, dĂ©cide de s'y implanter en [6]. Un petit port de plaisance et de pĂŞche est installĂ© Ă  l'extrĂ©mitĂ© orientale du bassin circulaire sud[7], tandis qu'une zone d'activitĂ© s'est dĂ©veloppĂ©e sur une partie de l'ancienne zone destinĂ©e Ă  l'industrie lourde, complĂ©tĂ©e par un projet d'usine de regazĂ©ification du GNL (« LNG Med Gas Terminal ») lancĂ© en 2007 et qui devrait ĂŞtre opĂ©rationnelle en 2015[8]. En , l'État italien dĂ©cide d'abandonner la construction du pont de Messine qui aurait limitĂ© le trafic maritime dans le dĂ©troit du mĂŞme nom aux navires ayant un tirant d'air infĂ©rieur Ă  65 mètres[9].

Dédiés aux conteneurs

L'alignement des portiques Ă  conteneurs, vu depuis San Ferdinando.

La gestion du port est confiée à l'Autorità Portuale Gioia Tauro qui représente l'État italien[10], tandis que le terminal à conteneurs est géré par la compagnie privée « Medcenter Container Terminal S.p.A. » (un partenariat entre l'Italien Contship Containerlines[11], le Néerlandais Terminal Investments Limited et le Danois APM Terminals[12]).

L'entrĂ©e du port se situe sur le territoire de la commune de Gioia Tauro, donnant accès au bassin circulaire sud (de 750 mètres'de diamètre, servant Ă  la manĹ“uvre des navires), puis Ă  l'unique darse qui longe le littoral vers le nord sur trois kilomètres jusqu'au bassin d'Ă©vitement nord (450 m de diamètre) situĂ© sur la commune voisine de San Ferdinando.

La darse est bordĂ©e sur son cĂ´tĂ© oriental par le quai du terminal Ă  conteneurs (le Medcenter Container Terminal). Le quai fait 3 145 mètres de longueur, avec une profondeur minimum Ă  son pied de 15,5 mètres[12], ce qui permet au port d'accueillir les plus grands porte-conteneurs. 22 portiques sont alignĂ©es le long du quai, assurant au port une capacitĂ© maximale de trafic de quatre millions d'EVP ; la zone de stockage de 1 600 000 m2 peut accueillir 75 000 conteneurs[11]. L'extrĂ©mitĂ© septentrionale de la darse accueille un petit terminal roulier. Tout le cĂ´tĂ© occidental de la darse est encore inoccupĂ©.

Servant de hub

La position du port, en plein milieu de la mer Méditerranée (ce qui a inspiré le choix du nom du terminal : « Medcenter »), lui permet de servir de plate-forme de correspondance maritime (un hub) entre d'une part les autres ports méditerranéens et d'autre part le trafic en transit entre le détroit de Gibraltar et le canal de Suez (sur la route la plus directe entre l'Europe et la Chine). Les conteneurs arrivant d'Asie de l'Est, d'Europe du Nord ou d'Amérique sur de grands porte-conteneurs trans-océaniques sont transbordés à Gioia Tauro sur des petits navires collecteurs (feeders)[13], faisant la liaison avec les ports plus excentrés des deux rives de la Méditerranée.

Le port sert aussi d'interface commerciale, c'est-à-dire de porte d'entrée et de sortie (gateway) pour les marchandises, avec comme arrière-pays (Hinterland) immédiat tout le Sud de l'Italie. Une partie du trafic s'écoule par l'autoroute italienne A3, passant à proximité du port et assurant la liaison vers Naples au nord et Reggio de Calabre au sud. L'autre axe de transport terrestre connecté est la ligne de chemin de fer nord – sud qui longe le terminal, correspondant au tronçon italien (Milan – Palerme) d'un des corridors ferroviaires ETCS : l'axe ferroviaire no 1 du réseau transeuropéen de transport.

Le principal armateur utilisant le port est Maersk Line, une filiale du groupe A.P. Møller-Mærsk, qui possède depuis 1999 une participation de 10 % dans le terminal à travers son autre filiale APM Terminals[14]. Gioia Tauro est en 2011 le 5e port à conteneurs de la Méditerranée, derrière les ports de Valence (4,3 millions d'EVP), d'Algésiras (3,6), de Port Saïd (2,6) et de Marsaxlokk (2,3)[1].

Trafic du port[15]
2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011
Conteneurs en EVP 2 488 3322 954 5713 148 6623 261 0343 160 9812 938 1763 445 3373 467 7722 857 4382 851 2612 304 982

Utilisé aussi par la mafia

Le port est utilisé aussi par l'organisation mafieuse calabraise, la 'Ndrangheta, notamment les 'ndrine (subdivisions territoriales, correspondant chacune à un clan) locales, celles des familles Piromalli (it) et Molè (en).

Leur activité sur la zone portuaire concerne le détournement des fonds publics (provenant de l'État italien et du FEDER), l'extorsion (perception d'une « taxe » sur chaque conteneur)[16], la participation financière aux entreprises, le contrôle du marché du travail, l'importation de cocaïne (le port en serait la plaque tournante de 80 % des importations provenant de Colombie)[17] et de contrefaçons[18] et l'exportation de déchets[19]. En échange, la 'Ndrangheta garantit la sécurité des installations, la résolution des problèmes avec les syndicats et la complaisance de l'administration calabraise[20].

Notes et références

  1. (en) American Association of Port Authorities, « World Port Ranking 2011 » [PDF], sur aapa.files.cms-plus.com, .
  2. Jean-Louis Briquet (dir.) et Gilles Favarel-Garrigues (dir.), Milieux criminels et pouvoir politique : Les ressorts illicites de l'État, Paris, Karthala, coll. « Recherches internationales », , 318 p. (ISBN 978-2-8111-0017-9, lire en ligne), p. 225.
  3. « La Commission adopte le grand projet du port de Gioia Tauro en Calabria (Italie) », sur http://presseeuropa.fr/, .
  4. Bergeron 1999, p. 99.
  5. Bergeron 1999, p. 100.
  6. Bergeron 1999, p. 107.
  7. « Porto di Gioia Tauro (Italia) », sur http://www.sea-seek.com/.
  8. (en) « Gioia Tauro LNG Terminal (Gioia Tauro) », sur http://www.lngmarket.com/.
  9. « Gioia Tauro craint le pont de Messine », sur http://www.econostrum.info/, .
  10. Bergeron 1999, p. 102.
  11. (en) « MCT - Gioia Tauro », sur http://www.contshipitalia.com/.
  12. (en) « Medcenter Container Terminal », sur http://www.apmterminals.com/.
  13. Le nom des navires feeders vient de l'anglais to feed, « alimenter », car ces navires collecteurs alimentent en fret les autres ports ainsi que les gros navires trans-océaniques (les mothers-ship).
  14. (en) « Maersk Line in Italy », sur http://www.maerskline.com/.
  15. (it) [PDF] « Variazione in percentuale » [archive du ], sur http://www.portodigioiatauro.it/, .
  16. (it) [PDF] Camera dei Deputati, Commissione parlamentare di inchiesta sul fenomeno della criminalità organizzata mafiosa o similare, « Relazione annuale sulla 'Ndrangheta », sur http://www.camera.it/, , p. 91.
  17. L'importation et la réexportation de la cocaïne via le port de Gioia Tauro sont connues à travers les quelques saisies par les forces de l'ordre. Par exemple : « Une tonne de cocaïne saisie dans un port italien », sur http://www.lapresse.ca/, ; « 560 kg de cocaïne d'une valeur de 135 millions d'euros saisis au sud de l'Italie », sur http://www.aufaitmaroc.com/, ; « Saisie de 114 kg de cocaïne dans un port de Calabre », sur http://www.lavenir.net/, .
  18. « La taxe mafieuse sur les contrefaçons », sur http://www.mafias.fr/, .
  19. « Ecomafia de Bari au Pakistan en passant par Gioia Tauro », sur http://rizzoli-mafias.over-blog.com/.
  20. Briquet et Favarel-Garrigues 2008, p. 225-228.

Voir aussi

Bibliographie

  • Robert Bergeron, « Croissance des flux de conteneurs et avènement d'un mĂ©gaport : Gioia Tauro en Calabre », Information gĂ©ographique, Paris, Sedes, vol. 63, no 3,‎ , p. 99-111 (lire en ligne).
  • (en) G. Borzani et S. Stura, « The container ports of Genova-Voltri and Gioia Tauro », Bulletin of the Permanent International Association of Navigation Congresses, no 94,‎ , p. 24-32 (ISSN 0374-1001, rĂ©sumĂ©).

Liens externes

Articles connexes

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