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Passage du Gois

Le passage du Gois ou Gôa est une chaussée submersible située dans la baie de Bourgneuf, où elle relie l'île de Noirmoutier (commune de Barbâtre) au continent (commune de Beauvoir-sur-Mer), dans le département français de la Vendée.

Passage du Gois
Le Gois à marée basse.
Le Gois à marée basse.

Autres noms D 948
Historique
Ouverture XVIIIe siècle
Caractéristiques
Longueur 4,125 km
Direction est-ouest
Extrémité est Beauvoir-sur-Mer
Extrémité ouest Barbâtre
Territoires traversés
RĂ©gion Baie de Bourgneuf

Le passage n'est praticable en voiture, Ă  bicyclette ou Ă  pied, qu'Ă  marĂ©e basse car il est recouvert Ă  marĂ©e haute. Il existe d'autres sites de ce type, mais le caractère unique du Gois est son exceptionnelle longueur : 4,125 kilomètres[1]. Suivant le coefficient de la marĂ©e, la hauteur d'eau qui le recouvre Ă  marĂ©e haute varie de 1,30 mètre Ă  4 mètres.

Depuis 1971, le pont de Noirmoutier, reliant l'île au continent, est une alternative au Gois.

En 2017, « l'ensemble paysager formé par le passage du Gois, l'île de la Crosnière (côté Beauvoir, sur le continent) et le polder de Sébastopol (côté Barbâtre) » est un site classé[2] - [3], cette reconnaissance étant une première étape vers l'objectif du classement mondial à l'Unesco[4].

Toponymie

Le nom de Gois (Goy, Goï ou Goye en poitevin) remonte à environ 1577. Il est une déformation de gué, terme qui a non seulement attiré très tôt les chemins, mais également suscité villages et villes. Le gué se fixe en toponymie sous deux grandes familles, le rito celte (qui a évolué en vieux gallois rit, en gallois rhyd, en vieux breton rit, ret, se retrouvant dans les toponymes Niort, Chambord, Gisors, etc.) ; le vad(um) latin et son équivalent vieux-francique wad qui a évolué en ga, gas, gaou, gay, gois, goa, goua, gua, va, vez, voua, vuaz, wez[5] - [6].

Histoire

  • Le passage du Gois et le pont de Noirmoutier en arrière-plan
    Le passage du Gois et le pont de Noirmoutier en arrière-plan
  • Noirmoutier-Le passage du Gois par le peintre français RaphaĂ«l Toussaint.
    Noirmoutier-Le passage du Gois par le peintre français Raphaël Toussaint.

Cette chaussée submersible doit son existence à l'effondrement du plateau ayant donné naissance à la baie de Bourgneuf au début de l'ère quaternaire d'une part, et à la rencontre d'autre part, il y a environ mille ans, de deux courants marins opposés qui contournent l'île de Noirmoutier, l'un par le nord, l'autre par le sud, donnant naissance à un banc de hauts-fonds sableux qui s'ancrent sur des écueils rocheux. Le remblaiement s'est exhaussé au fur et à mesure de la transgression flandrienne. Ces fonds sableux se sont continuellement déplacés avant de devenir franchissables à pied au XVIIIe siècle et se stabiliser au XIXe siècle à l'emplacement actuel[7].

On fait référence à ce passage depuis bien plus longtemps, alors que Noirmoutier s'appelait l'île d'Her. Les marins le nomment le Pé, mot emprunté au latin podium, hauteur, parce qu'il constitue un véritable haut-fond[8]. Le gois est pratiqué surtout par les passages « de pied » et les animaux depuis le XVIIIe siècle et est à l'époque beaucoup plus long car les anciennes digues sont plus loin de la côte. C'est en 1701 que ce passage reliant le continent à l'île est pour la première fois mentionné sur une carte géographique. La tradition orale veut qu'il aurait été traversé à cheval pour la première fois en 1766 par Pierre Gauvrit, un cordonnier et aubergiste (ou selon une autre version tailleur) de Barbâtre. En réalité, sa traversée n'aurait été exceptionnelle que parce qu'il était boiteux et bossu[9]. Cornil Guislain Jacobsen, dans son entreprise d'assèchement de grandes portions de l'ïle, a joué un rôle décisif pour que ce passage puisse devenir pérenne.

La grande mobilitĂ© des hauts-fonds rend l'exercice pĂ©rilleux sans guide. Lors de la guerre de VendĂ©e, pendant la RĂ©volution, les royalistes se sont rĂ©fugiĂ©s sur l'Ă®le. Les 18 premières balises de bois jalonnant le trajet sont posĂ©es en 1786, mais l'hiver très rigoureux de 1788 provoque la formation de glaces qui les emportent[10].

Vers 1840, une ligne régulière est assurée par une voiture à cheval.

Face au nombre croissant d'accidents, le Gois est stabilisé afin d'empêcher les bancs de sable de se déplacer. Pour résister aux assauts des vagues et des marées, il est à plusieurs reprises surhaussé, empierré. Il est balisé (balises jalons plantées tous les cent mètres) et macadamisé en 1924. En 1930, l'ingénieur Louis Brien fait élever trois balises à hunes et six balises dites « mâts de perroquets » (tous les cinq cents mètres) en charpente de bois et avec des échelons et des garde-corps métalliques fixés sur des socles de maçonnerie talutés, qui offrent une sécurité relative aux piétons comme aux automobilistes surpris par la marée[10]. Aujourd'hui, ces neuf balises-refuges et des balises à cages éclairées brillant durant la nuit à chaque kilomètre, jalonnent le Gois et permettent aux personnes surprises de se repérer et de se réfugier. Malgré de très nombreux panneaux indiquant les horaires de marée, il y a chaque année des incidents, mais très rarement mortels.

Des petits passages sont construits en face des balises. Les pêcheurs à pied garent leur voiture en empruntant ce passage s'ils ne veulent pas abîmer leur moyen de locomotion ou s’enliser[11].

Le Gois est une partie de l'ancienne route nationale 148 qui reliait Noirmoutier à Limoges, devenue aujourd'hui la départementale 948. Le , le Gois et ses dépendances (chaussées, digues et balises) sont inscrits à l'inventaire des monuments historiques.

GĂ©ographie

Le Gois se dĂ©couvre pendant 4 heures en mortes-eaux et 5 heures en vives-eaux. Suivant le coefficient de la marĂ©e, la hauteur d'eau qui le recouvre Ă  marĂ©e haute varie de 1,30 mètre Ă  4 mètres[7].

Risques et accidents

Pendant des années, le Gois a été emprunté par les Noirmoutrins, avant la construction du pont. De nombreux accidents ont été répertoriés. Deux croix gardent l'entrée et la sortie du Gois.

Aujourd'hui, sa traversée représente certains risques si le voyageur ne respecte pas les horaires des marées de basses eaux. Il est convenu que l'on peut passer par beau temps et fort coefficient de 1 h 30 min avant et après basse mer. À partir de 1830, les marées sont affichées près du passage. Le brouillard peut devenir très dangereux, surtout pour les pêcheurs à pied qui perdent tout sens de l'orientation et peuvent se faire piéger par la marée montante.

  • Passage impraticable (cĂ´tĂ© Ă®le).
    Passage impraticable (côté île).
  • Horaires des marĂ©es.
    Horaires des marées.
  • Balise du Passage du Gois.
    Balise du Passage du Gois.
  • ChaussĂ©e submersible.
    Chaussée submersible.
  • Risque de noyade.
    Risque de noyade.

En 1936, Clément Charbonnier, un notaire des Sables-d'Olonne qui possédait une maison sur l'Île de Noirmoutier, décède avec sa bonne, alors qu'ils traversaient, en voiture, le passage du Gois malgré la marée montante[12].

En 2009, le corps sans vie d'une Machecoulaise est découvert sur des rochers de l'île de Noirmoutier. Sa voiture vide avait été retrouvée sur le passage. Elle aussi a péri en traversant alors que la marée était montante[13].

En , une conductrice meurt noyée sur cette route alors qu'elle s'est retrouvée prise au piège par la marée avec des amis. Ces derniers ont pu s'enfuir à temps mais elle a été emportée[14].

Le pavage de la chaussée

Pavés du passage du Gois.

La chaussĂ©e Ă©tant Ă  refaire, l'ingĂ©nieur Louis Brien conçoit, avec l'aide des entreprises Philbert Dupont de Noirmoutier et Jean Cornu de Bouin, un pavage et dote la chaussĂ©e d'une largeur permettant le passage de deux voitures de front. Les travaux qui durent de 1935 Ă  1939 ont lieu deux fois par jour, dans un laps de temps de deux heures Ă  marĂ©e basse. Ă€ leur issue, le passage du Gois est devenu carrossable. Aujourd'hui encore, on peut observer ce pavage caractĂ©ristique (dalles en ciment fondu de 40 Ă— 40 Ă— 12 cm) sur une grande portion du passage, mĂŞme si une partie a Ă©tĂ© goudronnĂ©e[10].

Les pavĂ©s sont posĂ©s en diagonale sur un lit de sable et plusieurs couches de pierre. Les dalles de rive triangulaires sont bloquĂ©es sur les bords de la chaussĂ©e par des palplanches, pieux en bois battus dans le sable de chaque cĂ´tĂ© de l’ouvrage. Les joints, d’une largeur de 12 Ă  15 mm, sont remplis de brai. Depuis les travaux de Brien, des tronçons ont fait l'objet de plusieurs essais de revĂŞtement, peu concluants (enrobĂ© Ă  froid, Ă  chaud, enduit, bicouche)[15].

Autour du Gois

Le Gois et le sport

Une course à pied, Les Foulées du Gois, y est organisée chaque année depuis le . Le signal de départ est donné lorsque les premières eaux montantes franchissent la route. Certains concurrents arrivent avec de l'eau aux genoux.

Le Tour de France est passé plusieurs fois par le passage du Gois : en 1993 (2e étape, ), 1999 (2e étape, ) et 2011 (1re étape, 2 juillet)[16].

Le Gois dans la littérature et au cinéma

En 1961, dans Maléfices, Boileau-Narcejac présentent l'insolite passage du Gois.

En 1966, l'intrigue du film Les Créatures, d'Agnès Varda, se déroule sur l'île de Noirmoutier, et le passage sert de décor à deux scènes.

En 2010, dans son roman Boomerang, la romancière Tatiana de Rosnay situe une partie de l'intrigue sur l'Ă®le de Noirmoutier ; Antoine, l'un des protagonistes, est fascinĂ© depuis l'enfance par le passage du Gois. François Favrat rĂ©alise, en 2015, le film Boomerang, tirĂ© du roman. En 2022, le roman de JĂ©rĂ´me Zolma, « Le noyĂ© du Gois Â», editions Ouest France-Collection Empreintes commence par la dĂ©couverte d'un homme attachĂ© Ă  l'un des refuges du passage du Gois. La victime est morte noyĂ©e lors de l'ultime marĂ©e haute.

Le Gois dans la bande dessinée

Le passage du Gois a servi d'inspiration pour le Pas-du-Malin dans l'album La Voiture immergée de la série de bande dessinée Gil Jourdan de Maurice Tillieux[17].

En 1980, dans l'album Le Ponton des Passagers du vent de François Bourgeon, les protagonistes traversent le passage du Gois à pied[18].

La pêche à pied et l'ostréiculture

La pêche à pied près du passage.

Lors des grandes marées, le lieu est réputé pour la pêche à pied. Dans la baie autour du Gois, on peut récolter des palourdes, des coques ou des huîtres.

L'ostréiculture y est aussi développée, car le Gois permet l'accès à marée basse aux emplacements ostréicoles.

Le tourisme

Le tourisme est très développé autour du Gois. C'est un accès privilégié vers l'île de Noirmoutier. Il est également très fréquenté lors de la basse mer pour la pêche à pied par des passionnés, des habitués ou des vacanciers.

Notes et références

  1. « Le Gois, la route sous la mer », sur mairie-beauvoirsurmer.fr
  2. Décret du 2 novembre 2017 publié au journal officiel du 4 novembre 2017
  3. Le passage du Gois est site classé
  4. « Le Gois, site d'intérêt national et patrimonial », sur ouest-france.fr,
  5. Pierre Gauthier, Noms de lieux du Poitou : introduction Ă  la toponymie, Bonneton, , p. 206
  6. Stéphane Gendron, La toponymie des voies romaines et médiévales, Errance, , p. 69-70
  7. Fernand Verger, « Le Gois. Étude de géographie historique », Revue Bas-Poitou, t. 69,‎ , p. 122-132.
  8. Ch.-F. Aubert, V. Vattier d'Ambroyse, Le littoral de la France, Victor Palmé, , p. 499
  9. Dominique Guillemet, Les îles de l'Ouest : de Bréhat à Oléron, du Moyen Âge à la Révolution, Geste, , p. 145
  10. Eric Coutureau et Hubert Maheux, Yeu et Noirmoutier, L'Inventaire, , p. 108
  11. « Au Gois, quand l’eau se retire, les pêcheurs arrivent », sur ouest-france.fr (consulté en ).
  12. https://www.lereportersablais.com/histoire-les-sables-dolonne-1936-mort-tragique-dun-notaire-sablais-dans-le-gois/
  13. https://saint-nazaire.maville.com/actu/actudet_-Une-Machecoulaise-perit-en-traversant-le-passage-du-Gois-_-1195349_actu.Htm
  14. https://www.ladepeche.fr/2020/09/22/vendee-piegee-par-la-maree-montante-une-automobiliste-meurt-noyee-9088934.php
  15. « Le Gois », sur 12sur12.org, .
  16. « Passage du Gois de Noirmoutier », sur ina.fr, .
  17. Maurice Tillieux et Hugues Dayez (commentaires), La voiture immergée, Bruxelles, Niffle, coll. « Collection 50-60 », (réimpr. 1960) (1re éd. 1958), 96 p. (ISBN 978-2-87393-057-8, BNF 43494567)
  18. François Bourgeon, Le Ponton, Grenoble, Éditions Glénat, , 47 p. (ISBN 2-7234-0164-2), p. 43, 44 et 45 de l'édition originale

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie et vidéographie

  • Johan Vincent, Le passage du Gois menacĂ© : un grand projet d'endiguement de la baie de Bourgneuf durant la Seconde guerre mondiale, SiloĂ«, coll. « Pour mĂ©moire », , 80 p.
  • Christophe Belser, VendĂ©e, Le passage du Gois, Montreuil-Bellay, CMD, coll. « Questions de mĂ©moire » (no 8), , 55 p.
  • Manuel ThiĂ©ry, Le Gois : Histoire et lĂ©gendes d'un phĂ©nomène unique au monde, Saint-Gabriel, L'Étrave, , 21 p. (ISBN 978-2-909599-07-6)
  • Henri Martin, Extraordinaire histoire du passage du Gois, Chantonnay, Gaultier, , 332 p.
  • Jean Loiseau, Jean Michel Destang, Henri Martin, Maurice Gautier, « Le passage du Gois », dans Thalassa, , sur France 3, reproduit sur le site de l'INA

Liens externes

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