Palaeoloxodon naumanni
ĂlĂ©phant de Naumann
Palaeoloxodon naumanni, ou ĂlĂ©phant de Naumann, est une espĂšce fossile dâĂ©lĂ©phants trouvĂ©e en Chine et dans de nombreux sites de lâarchipel japonais, ayant vĂ©cu au cours du PlĂ©istocĂšne moyen et supĂ©rieur, entre 340 000 et 26 000 ans avant le prĂ©sent (AP). CâĂ©tait un Ă©lĂ©phant de taille petite Ă moyenne, au corps trapu, avec des femelles faisant 2 m et des mĂąles de 2,4 Ă 2,7 m au garrot. Il habitait dans des forĂȘts mixtes de caducifoliĂ©s et de conifĂšres. Il porte le nom du gĂ©ologue et palĂ©ontologue allemand Heinrich Edmund Naumann (1854-1927) qui Ă©tudia les fossiles dĂ©couverts Ă Yokosuka, dans la prĂ©fecture de Kanagawa, au Japon.
Historique
Le nom de genre Palaeoloxodon est un nom formĂ© Ă partir de trois Ă©tymons grecs anciens, qui sâanalysent ainsi 1) ÏαλαÎčÎżÏ palaios « ancien, vieux » 2) Î»ÎżÎŸÏÏ loxĂłs, « oblique, qui est de travers », « incurvĂ© » par opposition à « droit » 3) áœÎŽÏÎœ odĂŽn « dent »[1], soit aprĂšs latinisation Paleao.lox(o).odon, qui peut sâanalyser comme « dent (odon) oblique (loxo) ancienne (palaeo) », le caractĂšre « ancien » suggĂ©rant un ancĂȘtre Ă©teint des Loxodonta, les Ă©lĂ©phants dâAfrique.
LâĂ©pithĂšte spĂ©cifique naumanni est un anthroponyme suivi du suffixe -i indiquant la provenance. Câest un hommage au gĂ©ologue et palĂ©ontologue allemand Heinrich Edmund Naumann, qui fut conseiller Ă©tranger au Japon pendant l'Ăšre Meiji et qui eut l'occasion d'Ă©tudier des fossiles de Palaeoloxodon naumanni.
LâespĂšce a Ă©tĂ© dĂ©crite en 1924 et nommĂ©e Elephas naumanni par JirĆ Makiyama (d) (1896-1986)[2]. Il a divisĂ© les spĂ©cimens du Japon prĂ©cĂ©demment regroupĂ©s sous le nom de Elephas namadicus en deux sous-espĂšces :
- ceux avec une forme similaire Ă E. namadicus continental, ayant une couronne large et des boucles dâĂ©mail non Ă©troitement disposĂ©es, comme les spĂ©cimens trouvĂ©s sur lâĂźle de Shodo dans la mer intĂ©rieure de Seto. Ils ont Ă©tĂ© dĂ©signĂ©s par Elephas naumanni namadi
- ceux avec une forme similaire Ă E. antiquus dâEurope, ayant une couronne Ă©troite et des sinus dĂ©veloppĂ©s, comme les spĂ©cimens trouvĂ©s Ă Sahama, prĂ©fecture de Shizuoka. Ils ont Ă©tĂ© dĂ©signĂ©s par Elephas naumanni naumanni.
En 1924, le palĂ©ontologue japonais HikoshichirĆ Matsumoto (d) (1887-1975) crĂ©e le genre Palaeoloxodon, quâil circonscrit en tant que sous-genre des Loxodonta, les ĂlĂ©phants dâAfrique, et dĂ©signe Palaeoloxodon naumanni Makiyama comme l'espĂšce type[3].
Plusieurs nouvelles espÚces découvertes dans les années 1920-1930 furent dans les années 1970 regroupées sous le genre Palaeoloxodon, de sorte que de nos jours (2023) tous les restes de Palaeoloxodon trouvés au Japon sont maintenant désignés comme P. naumanni[4].
Description
Palaeoloxodon naumanni est un Ă©lĂ©phant de taille moyenne Ă petite, avec une hauteur au garrot dâenviron 2 m pour les femelles et de 2,2 Ă 2,7 m pour les mĂąles, mesurĂ©e sur des squelettes complets reconstruits[4], ce qui est comparable aux 2,19 m dâun cheval de trait actuel mais considĂ©rablement plus petit que les 4 m de Palaeoloxodon namadicus, lâĂ©lĂ©phant proche parent vivant Ă la mĂȘme Ă©poque sur le continent asiatique.
Pour les spĂ©cimens de P. naumanni du lac Nojiri, chez les mĂąles les dĂ©fenses ont montrĂ© une courbure dorsoventrale importante et une torsion, avec une longueur totale de 2,2 Ă 2,4 m. Pour les femelles, les dĂ©fenses nâont ni courbure ni torsion, avec une longueur de 1 m.
Le corps était trapu et les membres généralement plus épais proportionnellement à leur longueur par rapport aux espÚces existantes, ce qui suggÚre de forts mouvements des membres.
Les caractĂšres propres de P. naumanni sont une taille plus petite que celles des espĂšces de Palaeoloxodon continentaux, une inclinaison faciale relativement lĂąche, une crĂȘte pariĂ©to-frontale faible, une symphyse mandibulaire courte[4].
Chronologie
Les fossiles de P. naumanni datĂ©s par tĂ©phrochronologie (datation de dĂ©pĂŽts pyroclastiques), stratigraphie sĂ©quentielle ou datation par le carbone 14 indiquent que lâespĂšce aurait vĂ©cu au Japon entre 340 000 et 26 000 ans avant le prĂ©sent AP[4].
Pour Takahashi, il semble raisonnable de supposer que P. naumanni aurait migrĂ© au Japon durant lâĂ©pisode glaciaire relativement long et froid du stade isotopique de lâoxygĂšne SIO 10, soit entre 375 000 et 337 000 ans AP.
P. naumanni est présent en Chine au moins depuis le PliocÚne tardif. Les sites du PléistocÚne moyen et tardif avec cette espÚce sont largement distribuées en Chine.
Pendant la période froide du PléistocÚne supérieur (SIO 4 à 2), qui était la derniÚre étape de l'existence de P. naumanni, la faune de mammouths est arrivée de la route du nord via Sakhaline.
L'espĂšce s'est Ă©teinte avant la fin du PlĂ©istocĂšne supĂ©rieur[5]. Takahashi et dâautres palĂ©ontologues pensent que vers 27 000â26 000 ans AP, lâespĂšce Ă©tait Ă©teinte au Japon[4].
Les causes de lâextinction nâont pas Ă©tĂ© Ă©tablies avec assurance. Pour certains chercheurs, les changements environnementaux seraient la cause principale, pour dâautres, lâimpact des humains aurait jouĂ© un rĂŽle majeur.
Habitat
LâĂ©tude des palĂ©overtĂ©brĂ©s et des pollens effectuĂ©e lors de la fouille au lac Nojiri, dans la prĂ©fecture de Nagano oĂč a Ă©tĂ© trouvĂ© P. naumanni, a permis dâen dĂ©duire que la rĂ©gion connaissait un climat tempĂ©rĂ©. Le climat y Ă©tait relativement chaud et humide, avec des prairies et des forĂȘts de caducifoliĂ©es et de conifĂšres[6]. La pĂ©riode d'extinction de P. naumanni, il y a environ 23 000 ans, a coĂŻncidĂ© avec l'expansion des conifĂšres Ă feuilles persistantes et une diminution des feuillus Ă feuilles caduques, en raison d'un climat plus froid.
Distribution
P. naumanni est largement distribuĂ© sur les Ăźles japonaises sur plus de 300 sites, allant de HokkaidĆ au nord Ă la prĂ©fecture de Kagoshima au sud, entre 44° et 33° de latitude Nord. En dehors des zones terrestres, cette espĂšce a Ă©tĂ© trouvĂ©e dans les eaux cĂŽtiĂšres y compris la mer intĂ©rieure de Seto et le banc de Yamato au centre de la mer du Japon, Ă une Ă©poque oĂč la mer sâĂ©tait retirĂ©e.
Certains fossiles trouvĂ©s en Chine et qui furent analysĂ©s dans un premier temps comme des sous-espĂšces de P. namadicus furent par la suite considĂ©rĂ©s comme des P. naumanni. Pour Tong et Patou-Mathis[5], lâespĂšce P. naumanni est prĂ©sente en Chine depuis au moins le PliocĂšne tardif et sâest Ă©teinte avant la fin du PlĂ©istocĂšne supĂ©rieur.
Liste des espĂšces du genre
EspĂšces notables de Palaeoloxodon :
- Palaeoloxodon antiquus (Europe, Moyen-Orient, Asie), Ă©tait un peu plus grand que les ĂlĂ©phants d'Afrique modernes
- Palaeoloxodon chaniensis (CrĂȘte), un Ă©lĂ©phant nain
- Palaeoloxodon cypriotes (Chypre), un éléphant nain
- Palaeoloxodon falconeri (Sicile et Malte), un éléphant nain
- Palaeoloxodon mnaidriensis (Sicile), un éléphant nain
- Palaeoloxodon namadicus (Asie)
- Palaeoloxodon naumanni (Sud du Japon)
- Palaeoloxodon recki (Afrique de l'est), le plus ancien et l'une des plus grandes espÚces (a vécu il y a 4 à 0,6 millions d'années)[7].
- Palaeoloxodon lomolinoi
Références
- Anatole Bailly, « Dictionnaire grec-français : áœÎŽÏÎœ, ÏÎœÏÎżÏ (áœ) ion. c. áœÎŽÎżÏÏ, dent, HDT. 6, 107 » (consultĂ© le )
- JirĆ Makiyama, Notes on a fossil elephant from Sahama, Totomi, Mem Col Sci, Kyoto Imp Univ Ser B. 1:255â264
- Matsumoto H., « æ„æŹçŁćçłè±ĄăźçšźéĄ(ç„ć ±) [Note prĂ©liminaire sur les Ă©lĂ©phants fossiles au Japon (en japonais)] », ć°èłȘćŠéèȘ The Journal of the Geological Society of Japan, vol. 31, no 371,â , p. 255â272 (lire en ligne)
- Keiichi Takahashi, « An overview of Palaeloxodon naumanni, the Palaeoloxodon (Elephantidae) of the far east: distribution, morphology and habitat », Historical Biology, vol. Ahead-of-Print,â , p. 1-18 (lire en ligne)
- Tong Haowen et MarylÚne Patou-Mathis « Mammoth and other proboscideans in China during the Late Pleistocene » ()
âAdvances in Mammoth Research
â « (ibid.) », dans Proceedings of the Second International Mammoth Conference, Reumer, J.W.F., De Vos, J. & Mol, D. (eds.), rotterdam, may 16-20, 1999 - Nojiri-ko Excavation Research Group (2018). Naumannâs elephant in Lake Nojiri â Ice age examined by civic participation. Tokyo:Shin nihon syuppansya Co Ltd. Japanese
- Turner, A. (2004) Prehistoric Mammals. Larousse
Liens externes
- (en) RĂ©fĂ©rence The Taxonomicon : â Elephas naumanni Makiyama, 1924 (consultĂ© le )
- Ressources relatives au vivant :