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Opis

Opis (Akkadien UpĂź ou Upija, Grec ancien : áœźÏ€Îčς) est une ancienne citĂ© babylonienne situĂ© prĂšs du Tigre, non loin de Bagdad. Les textes akkadiens et grecs indiquent qu’elle Ă©tait situĂ©e Ă  l’est du Tigre, prĂšs de la riviĂšre Diyala. Des enquĂȘtes rĂ©centes situent Opis sur le tertre appelĂ© Tall al-Mujailāt (ou TulĆ«l al-Mujaili), Ă  32 km au sud-est en ligne droite du centre de Bagdad et Ă  76 km au nord-est en ligne droite de l’ancienne Babylone[1].

Opis
GĂ©ographie
Pays
Coordonnées
33° 11â€Č N, 44° 42â€Č E
Carte

À l'Ă©poque hellĂ©nistique, Opis est un port fluvial de premiĂšre importance. XĂ©nophon parle d'une ville considĂ©rable. D'aprĂšs des tablettes datant de Cyrus, la ville aurait constituĂ© un trĂšs grand marchĂ©, oĂč des reprĂ©sentants de la maison des Egibis venaient acheter et vendre des esclaves. Opis est traversĂ©e par les Dix-Mille et par Alexandre de retour d'Inde. La ville est un petit village sans importance Ă  l'Ă©poque de Strabon.

Opis : enjeu des conquĂȘtes hellĂ©nistiques (VIe – IIe siĂšcle av. J.-C.)

PremiĂšre mention d'Opis

Opis est mentionnĂ©e pour la premiĂšre fois au dĂ©but du deuxiĂšme millĂ©naire av. J.-C. Au XIVe siĂšcle av. J.-C., elle devient la capitale administrative de la rĂ©gion de Babylone. Les Babyloniens ont creusĂ© le « Canal Royal » entre l’Euphrate et le Tigre, qui se termine prĂšs d’Opis. Le roi babylonien Nabuchodonosor II (605-562 av. J.-C.) construit un mur entre les deux riviĂšres pour se protĂ©ger d'une potentielle invasion mĂšde. La ligne fortifiĂ©e continue vers l’est au-delĂ  du Tigre et finit prĂšs d’Opis.

ConquĂȘte perse

En octobre av. J.-C., les troupes du roi babylonien Nabonide (556-539 av. J.-C.) dĂ©fendent Opis contre les Perses commandĂ©s par Cyrus le Grand (559-530 av. J.-C.). Les Babyloniens sont vaincus et la population se rĂ©volte contre son gouvernement. Cyrus en profite pour capturer Babylone. Opis Ă©tait situĂ©e prĂšs de la route royale persane, qui reliait l’ancienne capitale Ă©lamite Suse au centre de l’Assyrie autour d’Erbil et, plus Ă  l’ouest, la capitale lydienne, Sardes.

ConquĂȘte macĂ©donienne

En septembre 331 av. J.-C., le roi de MacĂ©doine Alexandre le Grand (336-323 av. J.-C.) remporte la bataille de GaugamĂšles, face Ă  Darius III (336-330 av. J.-C.) et prend probablement possession en mĂȘme temps d’Opis. Quelque temps plus tard, au printemps 324 av. J.-C., Ă  la suite d'une mutinerie de ses soldats Ă  la riviĂšre Hyphase (la riviĂšre Beas maintenant) qui contestent la part croissante des nouvelles recrues perses et craignent de voir le roi Ă©tablir le centre de son royaume en Asie, il est obligĂ© de faire machine arriĂšre en Inde (c'est la sĂ©dition d'Opis). DĂ©sireux d’unir durablement ses sujets macĂ©doniens et perses, il fait un serment d’unitĂ© devant 9000 soldats perses et grecs Ă  Opis. Dans la mĂȘme idĂ©e, il se marie avec Stateira, la fille de Darius, et cĂ©lĂšbre de nombreuses alliances entre ses officiers de haut-rang et des nobles venues de Perse ou de l’est.

L'autorité hellénistique

SĂ©leucos Ier Nicator (306-281 av. J.-C.), l’un des successeurs d’Alexandre, fonde l’empire sĂ©leucide et construit une capitale Ă  SĂ©leucie, Ă  l’est du Tigre, Ă  19 km au sud-ouest d’Opis. La citĂ© hellĂ©nistique de SĂ©leucie du Tigre Ă©clipse rapidement les anciens centres mĂ©sopotamiens de la rĂ©gion, comme Babylone, Sippar et Opis. Au deuxiĂšme siĂšcle av. J.-C., l’empire parthe conquiert les provinces est de l’empire sĂ©leucide, dont SĂ©leucie et Opis. Ces deux villes sont Ă  leur tour Ă©clipsĂ©es par l’émergence de la capitale parthe de CtĂ©siphon, situĂ©e entre les deux villes.

Un Ă©pisode marquant : la bataille d'Opis (539 av. J.-C.)

Sources

La principale source d’information concernant la campagne de Cyrus en MĂ©sopotamie en 539 av. J.-C. est la chronique de Nabonide qui fait partie d’une sĂ©rie de tablettes en argile appelĂ©e les chroniques babyloniennes qui narrent l’histoire de l’ancienne Babylone. Des dĂ©tails additionnels sont apportĂ©s par des documents datant de l’époque de Cyrus ayant survĂ©cu, le cylindre de Cyrus. D’autres informations nous sont connues grĂące aux Ă©crivains de la GrĂšce antique, HĂ©rodote et XĂ©nophon, dont les Ă©crits diffĂšrent des sources perses et babyloniennes. Bien que la chronique de Nabonide soit fragmentaire, la section relatant la derniĂšre annĂ©e du rĂšgne de Nabonide (539 av. J.-C.) est plutĂŽt intacte. La chronique s’intĂ©resse surtout aux Ă©vĂšnements relevant directement de Babylone et de ses dirigeants.

La puissance perse

À l’époque, la Perse est la puissance dominante au Proche-Orient. Elle a assis sa domination grĂące au roi Cyrus II qui a conquis un large territoire permettant de crĂ©er un empire qui couvre les pays actuels de Turquie, ArmĂ©nie, AzerbaĂŻdjan, Iran, Kirghizistan et Afghanistan. La seule puissance qui rĂ©siste alors est l’empire nĂ©o-babylonien qui contrĂŽle la MĂ©sopotamie et assujettit des royaumes comme la Syrie, la JudĂ©e, la PhĂ©nicie et une partie de l’Arabie. À l’époque, Babylone ne jouit pas d’une situation confortable : l’empire perse l’entoure au nord, Ă  l’est et Ă  l’ouest. Elle connait, qui plus est, de graves problĂšmes Ă©conomiques que la famine et la peste viennent aggraver, tandis que le roi Nabonide souffre d’impopularitĂ© Ă  cause de sa politique religieuse non conventionnelle. Selon Mary Joan Winn Leith, « le succĂšs de Cyrus est Ă  crĂ©diter Ă  sa perspicacitĂ© militaire, sa corruption judicieuse, et une intense campagne de publicitĂ© Ă  travers la Babylonie qui le montrait tel un suzerain indulgent et tolĂ©rant vis-Ă -vis de la religion ». D’un autre cĂŽtĂ©, Max Mallowan note : « La tolĂ©rance religieuse Ă©tait un formidable trait des rĂšgles perses et il n’y aucun doute sur le fait que Cyrus lui-mĂȘme Ă©tait assez ouvert d’esprit pour promouvoir cette politique ». On dit que Cyrus a rĂ©ussi Ă  persuader un gouverneur d’une province babylonienne nommĂ© Gobryas de combattre Ă  ses cĂŽtĂ©s. Gutium, la rĂ©gion gouvernĂ©e par Gobryas, est un territoire frontalier d’une taille considĂ©rable et d’une grande importance stratĂ©gique.

Le déroulement de la bataille

La chronique de Nabonide rapporte que la bataille a eu lieu durant le mois de Tashritu (27 septembre - 27 octobre). Cependant, elle ne donne aucun dĂ©tail sur le cours de la bataille, la disposition des forces de part et d’autre ou les victimes. L’armĂ©e perse sous Cyrus a combattu « l’armĂ©e d’Akkad » (signifiant les Babyloniens en gĂ©nĂ©ral, pas la ville de ce nom). L’identitĂ© du commandant babylonien n’est pas renseignĂ©e mais on a traditionnellement supposĂ© que Balthazar, le fils de Nabonide, Ă©tait au commandement. Son destin n’est pas clair et il peut avoir Ă©tĂ© tuĂ© durant la bataille. Le combat se solde par une dĂ©faite babylonienne, voire une dĂ©route. AprĂšs la bataille, les forces perses ont « pillĂ© » les babyloniens vaincus. La plupart des traductions de la Chronique rĂ©fĂšrent aussi Ă  un « massacre » du peuple d’Akkad, bien que les traducteurs ne soient pas d’accord sur qui en est responsable et qui a Ă©tĂ© tuĂ© – la population d’Opis ou l’armĂ©e babylonienne en retraite. Pierre Briant commente : « Cette victoire a Ă©tĂ© suivie d’une immense portĂ©e de butin et du massacre de ceux qui ont tentĂ© de rĂ©sister ». Maria Brosius interprĂšte le massacre comme une action punitive « faisant un exemple de ville qui essaie de rĂ©sister Ă  l’armĂ©e perse ». W. G. Lambert pense au contraire qu'il n’y aurait eu aucun massacre. La bataille n’est pas mentionnĂ©e dans le Cylindre de Cyrus, qui dĂ©peint Cyrus comme le libĂ©rateur pacifique de Babylone.

Les conséquences

La dĂ©faite d’Opis semble avoir mis fin Ă  toute rĂ©sistance sĂ©rieuse Ă  l’invasion perse. Les troupes perses ont pris le contrĂŽle de la ville, bien que la chronique de Nabonide fournisse peu de dĂ©tail sur comment cela s'est dĂ©roulĂ©. Le 29 octobre, Cyrus entre dans Babylone, oĂč il est proclamĂ© roi, et nomme des gouverneurs pour ses royaumes nouvellement conquis. Les descriptions cunĂ©iformes d’une reddition pacifique de Babylone sont corroborĂ©es par les preuves archĂ©ologiques de la ville, car aucune preuve de destruction n’a Ă©tĂ© trouvĂ©e dans les couches correspondant Ă  la chute de la ville aux Perses.

La dĂ©faite babylonienne Ă  Opis et l’entrĂ©e apparemment sans opposition de la Perse dans Babylone ont mis fin Ă  l’indĂ©pendance de Babylone. L’effondrement babylonien a Ă©tĂ© rapide et total. Un certain nombre d’explications ont Ă©tĂ© avancĂ©es pour expliquer cet effondrement rapide. Le cylindre de Cyrus et la Chronique de Nabonide, attribuent l’échec de Nabonide au dĂ©sir du dieu Marduk, pour punir un rĂ©gime qui s’est opposĂ© Ă  sa volontĂ©. D’autres auteurs ont avancĂ© un certain nombre d’explications pour expliquer la dĂ©faite babylonienne. M. A. Dandamaev pense que le rĂ©gime souffrait d’un manque d’alliĂ©s, un manque de soutien parmi la population, l’opposition de peuples sujets tels que les Juifs, qui ont pu voir les Perses envahisseurs comme des libĂ©rateurs, et l’incapacitĂ© des forces babyloniennes Ă  rĂ©sister Ă  des adversaires numĂ©riquement supĂ©rieurs et mieux Ă©quipĂ©s.

Notes et références

  1. Högelmann and Buschmann (1986) ; Parpola and Porter (2001) map 32, glossary p. 18 ; Talbert (2000) map 91 F4.

Bibliographie

  • O. Battistini, Alexandre le Grand : histoire et dictionnaire, Paris, 2004
  • P. Briant, Histoire de l'empire perse de Cyrus Ă  Alexandre, Paris, 1996
  • P. Brun, A. Sartre-Fauriat, M. Sartre, Dictionnaire du monde grec antique, Paris, 2009
  • P. Högelmann, K. Buschmann, "Östlicher Mittelmeerraum. Das achĂ€menische Westreich von Kyros bis Xerxes (547–479/8 v. Chr.)," in TĂŒbinger Atlas des Vorderen Orients, B IV 23, 1986.
  • A. T. Olmstead, History of the Persian Empire, Chicago 1948.
  • S. Parpola, M. Porter, The Helsinki Atlas of the Near East in the Neo-Assyrian Period, Helsinki 2001.
  • G. Roux, La MĂ©sopotamie. Essai d'histoire politique, Ă©conomique et culturelle, Paris, 1985
  • R. J. Talbert, Barrington Atlas of the Greek and Roman World, Princeton 2000.
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