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Mythe de l'utilisation incomplète du cerveau

Le mythe de l’utilisation incomplète du cerveau est une légende urbaine selon laquelle la plupart des êtres humains n'utiliseraient que dix pour cent (pour la valeur la plus couramment citée) de leur cerveau.

Mythe

Cette idĂ©e est souvent attribuĂ©e sans justification Ă  plusieurs personnes. Une origine possible remonte Ă  l'Ă©poque victorienne au cours de laquelle apparaĂ®t la thĂ©orie de la « rĂ©serve d’énergie » des psychologues de Harvard William James et Boris Sidis dans les annĂ©es 1890. Pour vĂ©rifier leur thĂ©orie, ils Ă©lèvent un enfant prodige, William James Sidis, rĂ©putĂ© avoir un prĂ©tendu QI de « 250-300 Â»[alpha 1].

On a également prêté à Albert Einstein la déclaration selon laquelle ses hautes capacités intellectuelles seraient dues à son aptitude à utiliser plus de 10 % de son cerveau[1].

Par association avec ce mythe, il est également dit qu’il serait possible d’exploiter ce potentiel par diverses méthodes et ainsi développer son intelligence[2]. Cette thèse a été abondamment reprise dans le New Age, avec des méthodes pour prétendument développer les 90 % manquants[3] - [4].

Plusieurs facteurs participant à l’intelligence peuvent être développés par l’entraînement. Cependant l’idée que l'essentiel du cerveau reste inutilisé ne repose sur aucune observation ; s’il reste de nombreuses questions à propos du fonctionnement du cerveau, on sait néanmoins que chacune de ses aires possède une fonction connue[5] - [6] - [7].

Le mythe pourrait venir d'une suite de confusions journalistiques, à la suite de la découverte des cellules gliales qui constitueraient 90 % du cerveau, selon une croyance erronée[8] (50 % en réalité). Ces cellules n'étant pas des neurones, cela a pu laisser croire à une époque que 10 % seulement de notre cerveau nous servaient à penser.

Il a été exploité au sein d'un genre littéraire en vogue dans les années 1990 et 2000, mélangeant fiction et science, sans pour autant s'inscrire dans un cadre de science-fiction. Dan Brown et L'Encyclopédie du savoir relatif et absolu de Bernard Werber relayent par exemple cette idée reçue sans l'étayer de preuves scientifiques. En 2011, le film Limitless contribue à ancrer cette légende.

En 2014, l'argument du film Lucy de Luc Besson repose entièrement sur ce mythe[9].

RĂ©futation

Illustration du mythe des « 10 % Â».

Le neurologue Barry Beyerstein (en)[10] propose sept types de preuves qui réfutent le mythe des dix pour cent :

  1. les études des lésions cérébrales : si 90 % du cerveau étaient inutilisés, alors les lésions cérébrales de ces zones ne devraient pas détériorer son fonctionnement. Au contraire, il n'existe presque aucune zone cérébrale dont la lésion n'est pas incapacitante. De plus, une légère lésion dans des zones très petites peut avoir de lourdes conséquences ;
  2. l'évolution : le cerveau représente un coût énorme comparativement au reste du corps, en matière de consommation de dioxygène et de nutriments. Il peut nécessiter 20 % de l'énergie corporelle – plus que tout autre organe – alors qu'il ne représente que 2 % de la masse corporelle. Si 90 % étaient inutiles, un cerveau plus efficace et plus petit aurait représenté un avantage sélectif énorme. En conséquence, le processus de sélection naturelle aurait éliminé les cerveaux inefficaces ;
  3. l'imagerie cérébrale : les technologies telles que la tomographie par émission de positrons (TEP) et l'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) permettent de suivre l'activité cérébrale d'un humain vivant. Elles démontrent que chaque partie du cerveau est en activité, au moins partiellement, même pendant le sommeil. Les seules zones qui sont inactives sont des zones lésées gravement ;
  4. la localisation des fonctions : au lieu d'être un ensemble qui agit d'un seul tenant, le cerveau possède des zones différentes qui effectuent différents traitements de l'information. Les dizaines d'années de recherches effectuées dans la cartographie fonctionnelle cérébrale n'ont pas révélé de zone sans fonction ;
  5. l'analyse micro-structurale : dans la technique d'enregistrement unitaire, les chercheurs introduisent une électrode minuscule dans le cerveau pour enregistrer l'activité d'une seule cellule. Si 90 % des cellules étaient inutilisées, cette technique l'aurait mis en évidence ;
  6. les études métaboliques : une autre technique scientifique comprend le suivi des molécules de 2-deoxyglucose (en) marquées radioactivement. Si 90 % du cerveau était inactif, alors ces cellules inactives seraient mises en évidence en blanc dans cette scintigraphie du cerveau. Là encore, cette technique ne montre pas un tel résultat ;
  7. les maladies cérébrales : les cellules du cerveau qui ne sont pas utilisées ont tendance à dégénérer. En conséquence, si 90 % du cerveau étaient inactifs, l'autopsie des cerveaux des adultes aurait dû révéler une dégénérescence majeure.

Dans la culture populaire

Cinéma

  • Dans PhĂ©nomène (1996) de Jon Turteltaub, le personnage principal, George Malley, se dĂ©couvre des pouvoirs extraordinaires et apprend plus tard qu'il s'agit des consĂ©quences d'une tumeur qui aurait activĂ© certaines zones de son cerveau.
  • Dans L'Apprenti Sorcier (2010) de Jon Turteltaub, le sorcier Balthazar Blake explique que c'est l'accès Ă  la partie non utilisĂ©e du cerveau qui permet de recourir Ă  la magie.
  • Dans Inception (2010) de Christopher Nolan, il est fait allusion Ă  une utilisation incomplète du cerveau lors de la scène oĂą Dominic Cobb et Ariane sont Ă  la terrasse d'un cafĂ©. Don Cobb y dit Ă©galement que l'on utilise qu'une fraction de notre cerveau lorsque l'on est Ă©veillĂ©, mais lorsqu'on dort, le cerveau est capable de presque tout.
  • Dans Limitless (2011) de Neil Burger, une pilule dĂ©nommĂ©e NZT permet de dĂ©cupler le QI d'un individu en lui rendant accessible la partie du cerveau inutilisĂ©e. Le film suggère aussi que certains grands dirigeants doivent leur rĂ©ussite Ă  cette drogue.
  • Dans Lucy (2014) de Luc Besson, Ă  la suite de l'infiltration accidentelle d'une drogue dans son corps, une jeune femme voit ses capacitĂ©s intellectuelles et physiques se dĂ©velopper. Cette substance « colonise » son cerveau, et lui octroie de nouveaux pouvoirs, jusqu'Ă  ce qu'elle atteigne 100 % de ses capacitĂ©s.

Télévision

  • Dans la sĂ©rie Kyle XY, le hĂ©ros de la sĂ©rie, Kyle, possède la capacitĂ© de se passer de sommeil en utilisant la totalitĂ© de son cerveau. Mais ce faisant, il s'expose Ă  la menace permanente d'un AVC.
  • Dans la sĂ©rie Stargate SG-1, l'Ă©pisode « Prototype Â» rĂ©vèle qu'un individu capable d'utiliser plus de la moitiĂ© de son cerveau dĂ©tient des pouvoirs tĂ©lĂ©kinĂ©tiques. Ă€ partir de 100 % de taux d'utilisation, il peut mĂŞme rĂ©aliser l'ascension spontanĂ©ment. On retrouve aussi cette idĂ©e avec le personnage de Cassandra, lors d'une maladie cĂ©rĂ©brale[11].
  • Dans la sĂ©rie Les 4400, l'organisation de Jordan Collier se promeut auprès du public en allĂ©guant que chacun a le pouvoir de rĂ©veiller en lui la partie inutilisĂ©e de son cerveau.

Bande dessinée et manga

  • Deathstroke, un personnage de comics de l'univers de DC Comics, a la capacitĂ© d'utiliser les 90 % restants de son cerveau, le rendant plus intelligent, puissant et rapide.
  • Dans JoJo's Bizarre Adventure (2005), le masque de pierre libère la capacitĂ© totale du cerveau, ce qui transforme les gens l'utilisant en vampires dotĂ©s d'une grande puissance de frappe, de saut, etc.

Notes et références

Notes

(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Ten percent of brain myth » (voir la liste des auteurs).
  1. Ce qui est impossible, puisque sur les deux échelles de référence les plus employées pour les tests de QI, le maximum pour l'un est de 160 (Welscher) et pour l'autre 180 (Cattell), ce qui est son équivalent ; aucun test dépassant ces deux seuils n'est réputé fiable scientifiquement.

Références

  1. (en) Christian Jarrett, « All You Need To Know About the 10 Percent Brain Myth, in 60 seconds », sur Wired.com, .
  2. (en) Robynne Boyd, « Do People Only Use 10 Percent Of Their Brains? », sur Scientific American.com, .
  3. Frédéric Monneyron et Martine Xiberras, Le monde hippie : de l'imaginaire psychédélique à la révolution informatique, Imago, 2008, p. 81.
  4. Jean-Luc Porquet, La France des mutants, Flammarion, 1994, p. 128.
  5. (en) Benjamin Radford, « The Ten Percent Myth », sur Snopes.com.
  6. (en) Eric Chudler, « Myths About the Brain: 10 Percent and Counting », sur positscience.com. Version enregistrée par Internet Archive.
  7. (en) « A Piece of Our Mind - About Ten Percent », sur twopercentco.com, .
  8. « Mot du jour — Cellules gliales » [archive du ], sur La Recherche.fr, .
  9. « "Lucy" de Luc Besson : Le mythe du cerveau utilisé à 10 % a la vie dure », sur Le Huffington Post.fr,
  10. (en) Barry L. Beyerstein, « Whence Cometh the Myth that We Only Use 10% of our Brains? », dans Sergio Della Sala, Mind Myths: Exploring Popular Assumptions About the Mind and Brain, Wiley, 1999 (ISBN 0-471-98303-9), p. 3-24.
  11. Voir Saison 5 de Stargate SG-1, Ă©pisode 6 : « Rite initiatique Â».

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

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