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Max Lingner

Max Lingner né à Leipzig le , mort à Berlin le , est un peintre et illustrateur de presse allemand.

Max Lingner
Max Lingner (au premier plan à gauche) lors d'une exposition d'œuvres de Käthe Kollwitz à Berlin en 1951. À sa gauche Wilhelm Pieck et, pointant un dessin, le peintre Otto Nagel.
Vue de la sépulture.

Biographie

Max Lingner est connu en France, sous la signature de Ling, pour les nombreuses illustrations qu'il réalise dans la presse antifasciste française entre 1930 et 1939.

Débuts en Allemagne

Fils d'un xylographe[1], dont il est le cinquième et dernier enfant, il effectue de 1907 à 1913 ses études à l'Académie des Beaux-Arts de Dresde. En 1912 il obtient le Prix d'État de Saxe. Il se marie en et avec son épouse il poursuit des voyages d'études en France, en Angleterre, en Belgique et en Hollande[2]. De 1914 à 1918 il effectue la Première Guerre mondiale sur tous les fronts allemands. Il en sort pacifiste et révolutionnaire : en 1918 il est membre du Conseil des soldats de Kiel en Allemagne du nord. Il s'installe en 1919 aux bords de la Mer Baltique puis revient en 1922 en Saxe à Weissenfels près de Leipzig d'où est originaire sa femme. Il exerce son métier de peintre et dessinateur et dessine ce qu'il voit : les ouvriers et les ouvrières de l'industrie de cette région d'Allemagne, notamment ceux du complexe de Leuna. Selon lui[3] c'est au contact de cette classe ouvrière qu'il prend conscience de la lutte des classes et la traduit dans son art dans les pages de deux journaux communistes locaux Leunaprolet et Klassenkampf[4].

En France

La signature Ling

Dessinateur de la presse antifasciste à Paris

Sur les conseils de Käthe Kollwitz, il vient à Paris en 1928 et collabore de 1930 jusqu'en 1935 au magazine hebdomadaire Monde, dirigé par Henri Barbusse[5] Antifasciste et communiste, il reste en exil en France[6] après l'arrivée au pouvoir de Hitler. Il participe comme dessinateur de presse aux titres de la presse communiste française. Membre de l'Association des écrivains et artistes révolutionnaires (AEAR), il adhère en 1934 au Parti communiste français. À partir de 1936 il dessine pour L'Humanité[7], l'organe du PCF, pour L'Avant-Garde organe de la Fédération des jeunesses communistes de France, pour La Vie ouvrière, pour Regards et des journaux belges. Il crée aussi des décors pour la fête de L'Humanité[8] - [9]. Il illustre notamment les campagnes de solidarité[10] en faveur de la République espagnole[11].

Internement et résistance

Bien qu'anti nazi convaincu et connu le gouvernement français l'interne en : il séjourne au Stade Roland-Garros transformé en camp de prisonniers, aux camps de Villerbon (Loir-et-Cher), de Cepoy (Loiret) puis au Camp des Milles en Provence avant d'être transféré au camp de concentration français de Gurs, dont il a laissé de nombreuses illustrations de la vie quotidienne[12]. Il participe ensuite à la Résistance où il sert d'agent de liaison en raison de sa connaissance de la langue allemande.

Dans la France libérée

À la Libération il reprend sa collaboration à L'Humanité[13]. Il participe aux événements organisés par le Parti communiste français dont il est membre depuis 1934[14]. Ainsi il offre un dessin à Maurice Thorez, pour son 47e anniversaire[15]. Au début de l'année 1949, il rentre dans sa patrie, en Allemagne[16], peu avant la création de la République démocratique allemande. Dernier legs de sa présence militante en France, il illustre le livre Visages de partout, publié par Dominique Desanti pour le 3e festival mondial de la jeunesse qui a lieu en 1951 à Berlin[17].

Expositions à Paris

  • Trois expositions de ses Å“uvres ont lieu à Paris quand il y séjourne, en 1933, en 1939, toutes deux à la galerie Billiet-Worms[18] et en 1947 à la galerie La Boétie[19].

En 1939, lors de l'exposition d'œuvres de Max Lingner, le critique d'art Georges Besson pouvait écrire dans Ce soir[22] :

« Les croquis de Max Lingner sont depuis dix ans l'ornement de la presse prolétarienne (...) Lingner dispersa plus de 6 000 dessins d'une sensibilité très particulière et d'un trait expressif. Une occasion se présente de découvrir un autre aspect non moins humain de Lingner car il est le peintre de graves paysages parisiens (...) et de compositions à la gloire d'une jeunesse dont les attitudes disent la joie de vivre et la santé. »

1949 retour en République démocratique allemande

Reconstruction de la République (Aufbau der Republik), mosaïque murale monumentale de 24 m sur 3 m, réalisée par Max Lingner à Berlin en 1952-1953, pour la « Detlev-Rohwedder-Haus »

Désireux de participer à la construction d'une Nouvelle Allemagne[23] il rentre à Berlin en , où il est professeur à l'École des Beaux-arts et des Arts appliqués. Le la « une » du quotidien Neues Deutschland est illustrée d'un dessin de Ling[24]. L'année suivante il entre à l'Académie des Arts de Berlin (RDA), chargé d'une classe de maître à l'Académie. Il reçoit notamment la commande de l'État pour une œuvre destinée[25] à l'ornementation de la Maison des ministères à Berlin. Cette œuvre monumentale de Lingner, dont le projet initial de 1950 fut considérablement remanié dans un sens plus « réaliste socialiste »[26], est inaugurée en , peu de temps avant la révolte berlinoise de . Elle subira la censure lors de la réunification en 1990[27]. Il réalise entre 1951 et 1955 un tableau sur la Guerre des Paysans allemands (Der Grosse Deutsche Bauernkrieg)[28] pour lequel il obtient une seconde fois, après l'avoir déjà reçu en 1952, le Prix national de la RDA.

Il poursuit à Berlin son travail de dessinateur illustrateur pour des auteurs allemands ou traduits en allemand, tels Willi Bredel, Anna Seghers, Howard Fast et Paul Tillard[29].

« Ling » meurt à Berlin en . Il y est inhumé.

Expositions en Allemagne après sa mort

  • Juin - à Berlin : « Max Lingner in Frankreich, Gemälde, Aquarelle, Pressezeichnungen, 1929-1949 ».
  • Septembre - à Rostock : « Max Lingner, Gemälde, Aquarelle, Pressezeichnungen »
  • - à Berlin : Exposition Max Lingner, à l'occasion du centenaire de sa naissance.

Les titres de la presse francophone auxquels a collaboré Max Lingner

  • Monde, dont il réalise plus d'une dizaine de "unes"[30] - [31] - [32] entre le et le et de nombreuses illustrations en pages intérieures à partir de 1930.
  • L'Avant-garde, dont il réalise plusieurs dessins en "une" de 1935 à 1939.
  • La Vie ouvrière, dont il réalise notamment la "une" du numéro du [33]
  • L'Humanité, de 1936 à 1939 et de 1944 à 1949. Il y réalise de nombreux dessins en "une", et illustre plusieurs séries d'articles en pages intérieures sur Paris. Il illustre également avant la guerre des feuilletons d'Alexandre Dumas publiés dans ce journal, La reine Margot[34], Le comte de Monte Cristo[35]. Ce feuilleton au long cours ne sera pas terminé du fait de l'interdiction de parution du journal après le [36]. En 1946 il illustre un autre feuilleton : Les aventures de Thyl Ulenspiegel et de Lanime GÅ“dzak, de Charles De Coster. L'année suivante ce sont deux romans dont ses dessins accompagnent la parution en feuilleton : Gouverneurs de la rosée[37] de Jacques Roumain, et Martin Eden de Jack London[38].
  • Regards, où il illustre des nouvelles et des romans, tels Fièvre au village de Ludovic Massé[39] ou Deux villes (A Tale of two cities) un roman de Charles Dickens qui paraît durant l'été 1936[40].
  • Jeunes filles de France, journal de l'Union des jeunes filles de France.
  • Le Drapeau Rouge, organe du Parti communiste belge.
  • Almanach Ouvrier et Paysan de L'Humanité, entre 1936 et 1949 il participe à cette publication en[41] :
    • 1936 : illustrations d'une nouvelle, Acier, de Philippe Logier.
    • 1937 : 26 illustrations pour un roman prolétarien, L'étau, écrit par Pierre Bochot (60 pages)
    • 1938 : illustration pour un poème chanson d'Eugène Pottier, La Commune n'est pas morte.
    • 1939 : 26 illustrations pour un roman de Tristan Rémy, Une nuit de réveillon (40 pages)
    • 1948 : illustrations pour deux nouvelles, Une mère russe de Tatiana Oks, un Jeu d'Albert Maltz.
    • 1949 : 3 illustrations pour une nouvelle de la soviétique Wanda Wassiliewska, Le dernier conte de Schéhérazade.

Distinctions

Å’uvres

  • Philatélie

La République démocratique allemande a émis 5 timbres-poste reprenant des dessins de Max Lingner. Parmi eux une série de quatre valeurs commémore en 1988 le centième anniversaire de la naissance de l'artiste, en appui à l'exposition qui lui est consacrée.

  • Livres
    • (de) Der Ziegenhirt (en français, Le chevrier) texte de Henri Barbusse, dessins de Max Lingner, Alfred Holz Verlag, Berlin, 1973.
    • Le livre d'heure du travailleur, poèmes (bilingues) de Jacques Gaucheron, 24 dessins de Max Lingner, co édition Éditeurs français réunis, Paris et Verlag Philipp Reclam, Leipzig, 1978.
    • (de) Max Lingner, Gurs. Bericht und Aufruf. Zeichnungen aus einem französischen Internierungslager 1941, Dietz Verlag, , 37 p. (ISBN 3-87682-757-4).

Bibliographie

Elle est essentiellement germanophone :

  • (de) Max Lingner, Ling mein Leben und meine Arbeit, VEB Verlag der Kunst, Dresden 1955. 96 pages, 87 illustrations. Ce livre autobiographique est doté d'une préface de Marcel Cachin, son directeur à L'Humanite.
  • (de) Boris Taslitzky, Vladimir Pozner, Max Lingner in Paris, Deutsche Akademie der Künste ,Berlin, 1965, 48 p.
  • (de) Max Lingner als Pressenzeichner, brochure journal de 16 pages, Zentrum für Kunstausstellungen der DDR, 1974. L'illustration de couverture est une reprise de L'Avant-garde, du .
  • (de) Max Lingner 1888 - 1959. Gemälde-Zeichnungen-Pressegraphik, catalogue de l'exposition tenue à Berlin du au , Ostsee-Druck Rostock, 1988. 223 p.
  • (de) Thomas Flierl (dir.), Max Lingner. Das Spätwerk 1949-1959, Lukas Verlag, Berlin, 2012. 222 p. (ISBN 978-3-86732-154-9)
  • (bilingue) Max Lingner in der « Humanité », introduction de Roland Leroy, 1985, 68 p. (édité pour la fête de « Neues Deutschland », Berlin, 8 et ).
  • (en français) René Grosso, Max Lingner : illustrateur de la presse syndicale et politique française, article de 4 pages dans le Bulletin de l'Institut CGT d'histoire sociale du Vaucluse, no 10, .
  • (pour ordre, tant elle est brève) Notice « Max Lingner », article 118628, par Michel Dixmier, in Le Maitron en ligne.

Références

  1. Le père de Max Lingner travaille pendant quarante ans pour le journal Leipziger Illustrierten Zeitung. Cf le livre autobiographique de Max Lingner cité en bibliographie
  2. Plaquette Un peintre allemand en France Max Lingner 1929 peintures et dessins 1949, éditée par l'Académie allemande des Beaux-Arts de Berlin (RDA) à l'occasion de l'exposition des œuvres de Ling en France de mars à septembre 1970.
  3. Max Lingner, Mein Lebend und meine Arbeit, p. 24, voir en sources.
  4. Max Lingner als Pressenzeichner, Berlin, 1974
  5. Le rédacteur en chef de Monde est alors l'écrivain Léon Werth. Le Comité directeur comprend entre autres, Albert Einstein, Upton Sinclair, Maxime Gorki, Miguel de Unamuno. Voir Philippe Baudorre, Henri Barbusse le pourfendeur de la Grande Guerre, Flammarion, Paris, 428 p., 1995.
  6. cf books.google, Gilbert Badia et alii, Les bannis de Hitler, EDI-Presses universitaires de Vincennes, 1984.
  7. L'Humanité, 1er août 1936, le premier dessin de Ling paru dans le journal
  8. Max Lingner, fête de L'Humanité 1938
  9. Pascal Ory, La belle illusion. Culture et politique sous le signe du Front populaire 1935-1938, Plon, 1994, p. 988
  10. Cf article de Jutta Held, Das Bild der Mutter bei Max Lingner und Salvador Dali, books.google.
  11. L'Humanité, 10 juin 1937, L'Espagne républicaine appelle, dessin d'une mère espagnole, signée Ling
  12. Gurs : Bericht und Aufruf, Zeichnungen aus einem französichen Internierungslager 1941 Préface de Gerhard Strauss, éd. Dietz, 1982. 37 p.
  13. L'Humanité, 17 novembre 1944. Le premier dessin d'après-guerre de Max Lingner dans L'Humanité.
  14. Max Lingner 1888-1959, catalogue 1988, p. 193
  15. Fonds Thorez-Vermeersch, archives communales d'Ivry-sur-Seine
  16. Le territoire de la Saxe, où il est né, fait partie de la RDA
  17. Dominique Desanti, Visages de partout, édition de l'Avant-garde, Paris, 1951. 221 p. Max Lingner y livre le dessin de couverture et quatre illustrations , dont l'une (p. 96) le montre photographié « au travail » devant une de ses œuvres. Les trois autres dessins ont pour titre : La jeunesse libre allemande défile (la FDJ), L'Alexander-Platz à Berlin (p. 112), Jeune fille au marché. Le livre est introduit par un message de Frédéric Joliot-Curie et un poème de Nazim Hikmet.
  18. L'Humanité, 13 mai 1939 : article du critique d'art Georges Besson.
  19. L'Humanité, 21 mai 1947: Marcel Cachin et Max Lingner au vernissage de l'exposition.
  20. Exposition présentée par Jean Rollin, conservateur en chef du musée et critique d'art à L'Humanité de 1952 à 1999, sous le titre : Retour d'un ami.
  21. Musée de l'Histoire vivante, -.
  22. Ce soir, 4 juin 1939
  23. Comme de nombreux antifascistes allemands il n'imagine pas la nature de l'État qui se met en place, mais sa place en tant qu'artiste dans le régime se pose. Voir Thomas Flierl, Le retour de Max Lingner en Allemagne, books.google
  24. T. Flierl, Max Lingner. Das Spätwerk 1949-1959, p. 53
  25. Allemagne d'aujourd'hui, N° 205, 2013/3, Artistes plasticiens de retour d'exil en pays germanophones après 1945 : article d'Eckart Gillen, « Max Lingner et la logique de l'histoire ».
  26. T. Flierl, op. cit., pp. 72-97, De la décoration festive parisienne à la métaphore de la fondation de la RDA
  27. https://www.humanite.fr/node/10635 Yves Moreau, Jours pesants à Berlin, in L'Humanité, 2 octobre 1990.
  28. Esquisse pour la guerre des paysans, 1954
  29. De Paul Tillard il illustre Les Combattants de la nuit, publié en 1957 sous le titre Nacht über Paris.
  30. Monde, N° 247, 25 février 1933.
  31. Monde, N° 316, 21 décembre 1934.
  32. Monde, N° 317, 4 janvier 1935.
  33. Cette première page est reproduite dans le livre de Denis Cohen & Valère Staraselski, 1909-2009 Un siècle de Vie ouvrière, éditions Le cherche midi, Paris, 2009, page 45.
  34. L'Humanité annonce la parution du feuilleton La Reine Margot illustré par Max Lingner à partir du 19 décembre 1937.
  35. L'Humanité, 14 août 1938, le début du feuilleton Le comte de Monte Cristo, illustré par Lingner
  36. https://www.humanite.fr/un-journal-saisi-et-interdit-613264 L'Humanité, 6 août 2016, Alexandre Courban : Un journal saisi et interdit
  37. L'Humanité, 26 janvier 1947, début du feuilleton Gouverneurs de la rosée
  38. L'Humanité, 22 juin 1947, début du feuilleton Martin Eden
  39. Regards, 28 janvier 1937, N° 159, Fièvre au village, début du roman de Ludovic Massé, illustré par Lingner.
  40. Regards, N° 130, 9 juillet 1936, début de la parution du roman sous titré La Révolution française vue par Charles Dickens, illustré par Lingner
  41. Consultation de L'Almanach Ouvrier et Paysan de L'Humanité publié les années concernées.

Voir aussi

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