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Dominique Desanti

Dominique Desanti, née Anne Persky, est une écrivaine française, journaliste, historienne, biographe et romancière, née le à Moscou[1] et morte le dans le 4e arrondissement de Paris[2] - [3].

Dominique Desanti
Dominique Desanti dans la Revue des travailleuses en septembre 1952.
Biographie
Naissance
Décès
Nom de naissance
Anne Persky
Nationalité
Formation
Activités
Conjoint
Autres informations
Parti politique
Distinctions
Prix Thérouanne ()
Prix Cazes (d)
Archives conservées par

Biographie

Une trajectoire d'immigrante

Anne Persky est la fille de Jacques et d'Irène Persky. Jacques Persky est un avocat au barreau de Moscou né le à Volojine, dans la Biélorussie actuelle. Irène Persky est la fille de Salomon Syrkin et d’Hélène Chasberg. Elle est née le à Bielsk, non loin de Varsovie.

Anne Persky quitte Moscou à l'âge de quatre ans : en effet, en 1918, ses parents décident de se réfugier à Varsovie puis migrent un an plus tard à Berlin où la famille vit jusqu'en 1924.

La fillette découvre la France à l'âge de dix ans : la famille Persky s'installe à Paris dans les beaux quartiers : d'abord au 34 de la rue Laugier (17e arrondissement), puis au 102 avenue Kléber, dans un immeuble neuf du 16e arrondissement à partir de 1931. Son père y établit son bureau de conseiller juridique, profession qu'il exerce jusqu'en 1939. Anne Persky fréquente l’école La Bruyère située au 3 rue Marcel-Renault puis le lycée Molière, prestigieux lycée de jeunes filles où elle obtient son baccalauréat en 1932.

Les années 1930

Jeune fille, Anne Persky affirme un tempérament indépendant et curieux de tout. À l’âge de dix-sept ans, elle rédige un journal dans lequel elle affirme son désir de devenir écrivain. Elle se passionne pour les surréalistes mais aussi pour la danse et pour le théâtre. Grâce à sa trajectoire migratoire et à son don pour les langues, elle maîtrise couramment le russe, l’allemand, le polonais et le français (à la différence de sa mère, à qui elle le reproche), mais également le yiddish, dans lequel ses parents s'exprimaient fort probablement. Elle apprend également à parler couramment l'anglais. Après le baccalauréat, Anne Persky prépare une licence en droit.

En 1937, elle se lie avec de jeunes normaliens de la rue d’Ulm. Le , elle épouse l'un d'eux, Jean-Toussaint Desanti. Né à Ajaccio le , c'est un brillant philosophe, aussi indépendant et atypique qu’elle. Ce mariage lui confère la nationalité française. Le jeune couple vit d’abord chez les parents d’Anne, puis loue jusqu’en 1942 une chambre au 7, rue Campagne Première dans le XIVe arrondissement, chez madame Chauffard.

Ă€ l’époque de son mariage, Anne Desanti travaille pour la compagnie d’assurance « la PrĂ©servatrice Â», puis gagne sa vie comme traductrice pour les Ă©ditions Payot, Gallimard et Albatros.

La RĂ©sistance

Après la débâcle, leur groupe d’amis (parmi lesquels Simone Debout-Oleszkiewicz et François Cuzin) diffuse à Paris leur tract périodique intitulé Sous la Botte qui fusionne en avec l'éphémère revue clandestine Socialisme et liberté à laquelle Maurice Merleau-Ponty et Jean-Paul Sartre collaborent.

Entre-temps, fuyant le nazisme, les parents d'Anne Desanti se sont rĂ©fugiĂ©s dans le Sud de la France oĂą ils retrouvent leurs nombreux compatriotes. Ă€ Nice, ils se sont installĂ©s au grand HĂ´tel Westminster d'oĂą ils correspondent avec leur fille dans un langage codĂ© : ils la surnomment « Cotique Â» (qui veut dire « chaton Â» en Russe).

À la rentrée 1942, Anne Desanti suit Jean-Toussaint Desanti à Clermont-Ferrand où il a été nommé professeur. Ils s’engagent alors au Front national de la Résistance, organisation d’obédience communiste.

Le , ses parents, Jacques et Irène Persky, qui vivaient Ă  l’HĂ´tel Moderne Ă  Espalion (Aveyron), sont dĂ©noncĂ©s comme « juifs Â» et ils sont arrĂŞtĂ©s avec Suzanne d'Aramon, Rose et FĂ©lix Loeb par la Gendarmerie française. Ils sont transfĂ©rĂ©s en car Ă  Toulouse, puis dĂ©portĂ©s Ă  Drancy. La seule survivante parmi eux sera Suzanne d'Aramon, fille du banquier Edgard Stern et de Marguerite Fould, et Ă©pouse du comte Bertrand de Sauvan d'Aramon, dĂ©putĂ© de Paris de 1928 Ă  1940, qui vota les pleins pouvoirs Ă  PĂ©tain. Les Ă©poux Persky et Loeb quittent Drancy le par le convoi numĂ©ro 76 (l'avant dernier convoi). Ils sont assassinĂ©s le au camp d’Auschwitz-Birkenau. Dominique Desanti recevra l'avis officiel de leur dĂ©cès en 1948 Ă  son domicile parisien.

Ă€ Clermont-Ferrand, Anne Desanti participe Ă  la LibĂ©ration, en contribuant au Patriote, organe du Front national de la RĂ©sistance et Ă  La Nation, organe du ComitĂ© de LibĂ©ration du Puy de DĂ´me. C’est dans ces journaux qu’elle signe pour la première fois « Dom.Inique Â» qui deviendra son prĂ©nom, Dominique. Elle collabore Ă©galement Ă  Action, journal du Parti communiste français. Ă€ partir de , elle est Ă©galement correspondante de guerre du quotidien RĂ©sistance - La Voix de Paris pour lequel elle couvre la libĂ©ration du camp de Bergen-Belsen en [4].

L'engagement au Parti communiste français

Dans la continuité de son engagement de Résistante, Dominique Desanti met sa plume au service du Parti communiste français. Elle écrit au service de l'Union française de l'information, qui fédère une centaine de quotidiens et hebdomadaires contrôlés par le PCF ou proches de lui, puis appartient à la rédaction de L'Humanité dans les années 1950. Elle contribue à d'autres titres de la presse communiste : Démocratie nouvelle et La Nouvelle Critique.

La militante polyglotte s'investit également avec conviction dans le Mouvement de la paix. Elle participe au premier congrès à Paris en 1949, puis au second à Varsovie en 1950[5]. Son premier livre relate la ferveur des nuits blanches passées au Congrès de Paris[6].

Ă€ cette Ă©poque, elle publie plusieurs ouvrages dans la ligne du Parti. Elle rĂ©dige sur commande un condensĂ© de propagande anti-titiste : Masques et visages de Tito et des siens[7]. Elle Ă©crit Ă©galement des romans populaires Ă  la gloire des valeurs communistes : La grisette Ă  l’hortensia, Le matou dans la neige, Ă€ bras le corps qui sont publiĂ©s sous forme de feuilletons dans la presse communiste.

1956 marque un tournant fort dans sa vie. Après la répression du soulèvement de Budapest et la découverte précoce du Rapport Khrouchtchev au XXe congrès du Parti communiste d'Union soviétique, elle quitte le Parti communiste français[8], tandis que Jean-Toussaint y reste jusqu’en 1962. Quittant la presse communiste, elle doit réorienter sa carrière de journaliste, mais reste fidèle à son engagement à gauche.

La femme de lettres

Détentrice d’une carte de presse jusqu’en 1978, Dominique Desanti est une journaliste engagée dans tous les combats pour la liberté : l'anticolonialisme, le féminisme, la défense des droits de l'homme.

Elle publie parallèlement, sous le pseudonyme de Camille Destouches, deux biographies historiques : La Lumière bleue, rĂ©cit de la  vie de Marie Curie, et La Passion de Marie d’Agout, ainsi qu’un roman : Michel le Sombre. En 1960, sous le nom de Dominique Desanti, elle publie un nouveau roman intitulĂ© Les Grands sentiments, puis, en 1968, une troisième biographie de femme, La banquière des annĂ©es folles, Marthe Hanau. En 1970, elle produit un premier essai historique : L’Internationale communiste, suivi par Les Socialistes de l'Utopie en 1971.

En 1974, son essai Les Staliniens est très remarqué. Il est réédité à trois reprises car il donne d'importantes clefs pour comprendre l'engagement de sa génération au Parti communiste français.

Ayant soutenu un doctorat sur travaux, elle suspend son activité de journaliste en 1978 pour partir régulièrement enseigner aux États-Unis où elle transmet l’histoire des mouvements féministes du XIXe et du XXe siècle, tout en poursuivant sa carrière d’écrivain, de romancière et d'essayiste.

Dans son journal de jeune fille, Anne Persky esquissait un premier roman dès l'âge de dix-sept ans. Tout au long de sa vie, elle resta attachée à ce rêve de jeunesse. Ses romans reflètent son parcours et ses curiosités multiples. Après ses deux romans réalistes-socialistes (Visages de partout, A bras le corps), huit romans explorent des thèmes très divers. L’un romance sa jeunesse (Les années passions), un autre touche à la psychanalyse (Un métier de chien), le dernier est publié en 2002 (Les sorcières sont des miroirs). Elle est également connue pour ses dix-sept biographies qu’elle nommait « roman-vrai » : Flora Tristan, femme révoltée (1972) ; Sonia Delaunay (1988) ; Elsa-Aragon, le couple ambigu (1994) ; Robert Desnos, le roman d’une vie (1999), etc[9].

Le couple Desanti

Les Desanti vécurent leur amour de façon «sartrienne », c’est-à-dire en s’autorisant des amours hors mariage et en toute transparence. Ils racontent leurs expériences de vie dans La liberté nous aime encore (2001).

Une enfance et une jeunesse romancées dans les Mémoires

Dominique Desanti voulut aussi se faire biographe d’elle-mĂŞme. Dans Ce que le siècle m’a dit, sous-titrĂ©, MĂ©moires (1997), elle livra un rĂ©cit passionnant de ses engagements, de ses multiples expĂ©riences et rencontres. Mais elle choisit de maquiller l'histoire de ses origines et celle de ses parents. En effet, on y lit qu’elle aurait Ă©tĂ© Ă©levĂ©e Ă  Paris par son père seul, lequel aurait Ă©tĂ© fusillĂ© Ă  Compiègne en 1944. Elle occulta ainsi sa trajectoire de migrante et l’indicible horreur de la mort de ses parents. Dominique, mais aussi Jean-Toussaint, choisirent donc de « rĂ©amĂ©nager Â», ou plutĂ´t de « romancer-vrai Â» la première partie de la vie d’Anne Persky. Les pages des MĂ©moires relatives Ă  la famille de Dominique Desanti – et uniquement celles-ci – sont donc Ă  relire Ă  la lumière des faits Ă©tablis après sa mort Ă  partir de ses archives personnelles.

Le site de l’Association des amis de Dominique et Jean-Toussaint Desanti[10] prĂ©sente une bibliographie de son Ĺ“uvre ainsi que plusieurs documents, et en particulier son journal manuscrit de 1931-1932 que l'Association a Ă©ditĂ© en 2014.

Publications

Biographies

  • Visages de femmes, Paris, Éditions sociales, 1955
  • La Banquière des annĂ©es folles : Marthe Hanau, Paris, Fayard, 1968
  • Flora Tristan : La Femme rĂ©voltĂ©e, Paris, Hachette, 1972 (1re Ă©dition)
  • Flora Tristan, Vie, Ĺ“uvres mĂŞlĂ©es, Paris, 10/18 no 782, 1973.
  • Drieu la Rochelle, le sĂ©ducteur mystifiĂ©, Paris, Flammarion, 1978
  • Daniel, ou le visage secret d'une comtesse romantique, Marie d'Agoult, Paris, Stock, 1980 (ISBN 978-2234012110)
  • Sacha Guitry, cinquante ans de spectacle, Paris, Grasset, 1982 (ISBN 978-2253037477)
  • Les ClĂ©s d'Elsa Aragon-Triolet, Paris, Ramsay, 1983
  • Sonia Delaunay : magique magicienne, Paris, Ramsay, 1988 (ISBN 978-2859566678)
  • Vladimir Nabokov, Paris, Julliard, 1994 (ISBN 978-2260012320)
  • Le Roman de Marina, Paris, Belfond, 1994 (ISBN 978-2714431509) (Prix Femina de l'Essai)
  • Elsa-Aragon : le couple ambigu, Paris, Belfond, 1994 (ISBN 978-2714432285)
  • Les Aragonautes - Les cercles du poète disparu, Paris, Calmann-LĂ©vy, 1997
  • Ce que le siècle m'a dit, Paris, Plon, 1997 (ISBN 978-2259028059)
  • Robert Desnos, le roman d'une vie, Paris, Mercure de France, 1999 (ISBN 978-2715221222)
  • Flora Tristan, Paris, Hachette-LittĂ©rature, 2001 (ISBN 978-2-01-235558-3)
  • La libertĂ© nous aime encore, avec Jean-Toussaint Desanti, Paris, Odile Jacob, 2001 (ISBN 978-2738115621). Lire en ligne
  • La Sainte et l'Incroyante. Ma rencontre avec Mère Marie, Paris, Bayard, 2007 (ISBN 978-2227476554)
  • Sacha Guitry, itinĂ©raire d'un joueur, entretiens avec Karin MĂĽller, Paris, ArlĂ©a, 2008 (ISBN 978-2869598713)
  • Les Yeux d'Elsa au siècle d'Aragon, avec Karin MĂĽller, Paris, Ă©ditions GuĂ©na, 2010 (ISBN 978-2918320067)

Essais, histoire

Romans

(roman stalinien narrant les amours d'un jeune ouvrier communiste et d'une fille émancipée des beaux quartiers, dans le contexte des grèves de 1952).

Notes et références

  1. Association des amis de Dominique et Jean-Toussaint Desanti
  2. « Dominique Desanti est décédée », Le Daily Neuvième.
  3. Insee, « Extrait de l'acte de décès d'Anne Persky », sur MatchID
  4. « Bergen-Belsen n'a provoqué en moi, en plus de l'horreur et de la douleur, qu'une seule réaction : plus jamais ça, donc lutter dans le Parti pour la paix et la vie. » (Les Staliniens, p. 18)
  5. Anna Trespeuch, Dominique et Jean-Toussaint Desanti, une éthique à l'épreuve du vingtième siècle, L'Harmattan, 2003
  6. Dominique Desanti, Nous avons choisi la paix, Paris, P. Seghers, , 183 p.
  7. Dominique Desanti, Masques et visages de Tito et des siens, Paris, Pavillon,
  8. « J'ai feint d'oublier ma carte de 1957. Mon voisin l'a glissée sous ma porte le lendemain. Donc je l'avais, il en était témoin. Elle resta vierge de timbres » (in Ce que le Siècle m'a dit, p. 529)
  9. Entretien avec Christine Goémé, émission À voix nue sur France Culture, mars 2002
  10. « Association des amis de Dominique et Jean-Toussaint Desanti »

Voir aussi

Bibliographie

Liens externes

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