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Manifeste de VĂ©rone

Le manifeste de Vérone, approuvé le lors du congrès de Vérone, est un texte programmatique dans lequel sont exposés en dix-huit points les axes principaux de la politique du Parti fasciste républicain, né des cendres du Parti national fasciste. Dans ce manifeste, qui peut être qualifié d'acte constitutif de la République sociale italienne (RSI), se trouvent citées en particulier les mesures réglementaires nécessaires à la mise en œuvre de la socialisation de l'économie.

Genèse et contexte

En 1943, alors que le sud de l'Italie a Ă©tĂ© libĂ©rĂ© par les AlliĂ©s après leur dĂ©barquement dans la pĂ©ninsule (opĂ©ration Avalanche), le reste de l'Italie est encore aux mains des fascistes italiens alliĂ©s Ă  l'Allemagne nazie. Du 14 au , la première assemblĂ©e nationale du Parti fasciste rĂ©publicain, rĂ©unie dans la forteresse de Castelvecchio Ă  VĂ©rone, approuve un « manifeste programmatique Â» qui, se dĂ©veloppant en dix-huit points, traite tour Ă  tour de la politique intĂ©rieure, extĂ©rieure et sociale.

Le manifeste, s'il fut préparé et requis, puis approuvé par Benito Mussolini, et si la rédaction en fut dévolue officiellement à Manlio Sargenti (it), futur chef de cabinet du ministère de l'Économie corporative, aidé des contributions d'Angelo Tarchi, Carlo Alberto Biggini (it) et Francesco Galanti, il fut en fait dans une large mesure rédigé par l'un des fondateurs du Parti communiste italien (PCI), Nicola Bombacci. Celui-ci, qu'une étroite amitié liait au Duce, accepta d'apporter son concours à ce projet de politique économique de la RSI, et s'inspira des théories anarcho-communistes de Nestor Makhno, des idées de la Société fabienne, et du distributionnisme.

Le principe sous-jacent Ă©tait d'approfondir l'anticapitalisme et l'autarcisme national propres au fascisme italien, afin d'« aller au peuple Â» et d'opĂ©rer une rĂ©volution sociale Ă  l'intĂ©rieur de l'ordre lĂ©gal.

Ă€ propos du rapport entre le programme rĂ©volutionnaire mussolinien et les programmes rĂ©volutionnaires socialistes ou de gauche, Mussolini lui-mĂŞme devait prĂ©ciser :

« Nos programmes sont en tous points en accord avec nos idĂ©es rĂ©volutionnaires, et celles-ci appartiennent Ă  ce qu'en rĂ©gime dĂ©mocratique on appelle la « gauche Â» ; nos institutions sont le rĂ©sultat direct de nos programmes, et notre idĂ©al est l'État du Travail. Il n'y a pas Ă  cet Ă©gard de doute possible : nous sommes la classe laborieuse en lutte pour la vie et la mort, contre le capitalisme. Nous sommes les rĂ©volutionnaires en quĂŞte d'un ordre nouveau. Dès lors, invoquer l'aide de la bourgeoisie en agitant le pĂ©ril rouge est une absurditĂ©. L'Ă©pouvantail authentique, le vĂ©ritable danger, la menace contre laquelle il y a lieu de lutter sans relâche, vient de la droite. Cela ne nous intĂ©resse en rien d'avoir la bourgeoisie capitaliste comme notre alliĂ©e contre la menace du pĂ©ril rouge, car, mĂŞme dans le meilleur des cas, celle-ci serait une alliĂ©e infidèle, s'efforçant d'obtenir que nous servions ses fins, comme elle l'a dĂ©jĂ  fait plus d'une fois avec un certain succès. Je serai Ă©conome de mes mots, car ils seraient totalement superflus. De fait, cela est prĂ©judiciable, parce que cela nous fait confondre les types authentiques de rĂ©volutionnaires de toute tonalitĂ©, avec l'homme de la rĂ©action, Ă  qui il arrive d'utiliser jusqu'Ă  notre propre langage. »

— Benito Mussolini, Milan, le .

Les rĂ©dacteurs du manifeste, qui indiquent par ailleurs leur intention de reconduire les lois raciales fascistes, dĂ©clarent dans le prĂ©ambule vouloir « s'engager pour la poursuite de la guerre aux cĂ´tĂ©s de l'Allemagne et du Japon jusqu'Ă  la victoire finale et pour la rapide reconstitution des Forces armĂ©es, destinĂ©es Ă  atteindre, auprès des valeureux soldats du FĂĽhrer, ceux-lĂ  des buts qui dĂ©passent tous les autres en importance et en urgence Â»[1].

Résumé point par point

Les dix-huit points du manifeste de Vérone (dit aussi ou charte de Vérone) se répartissent en trois parties.

Constitution et de politique intérieure

  1. Il y aura lieu de convoquer une constituante, laquelle abolira la monarchie et donnera corps Ă  la RĂ©publique sociale italienne.
  2. La constituante sera composée de membres des syndicats fascistes et de représentants de toutes les circonscriptions, y compris des provinces occupées, à travers des délégations d'évacués et de réfugiés.
  3. La constituante devra garantir au citoyen le droit de contrôle et de critique sur l'administration publique et sur la nomination du chef de la République. Aucun citoyen ne pourra être arrêté ou détenu plus d'une semaine sans l'autorisation de l'autorité judiciaire. La magistrature sera indépendante.
  4. La composition de la chambre des Fasci et des Corporations sera soumise Ă  Ă©lection populaire, cependant que la nomination des ministres sera la prĂ©rogative du Duce ; au sein du Parti fasciste rĂ©publicain, il est prĂ©conisĂ©, par analogie, que les Fasci soient Ă©lus, tandis que le directoire national soit dĂ©signĂ© par le Duce.
  5. Le parti devra ĂŞtre pur, gardien de la « rĂ©volution fasciste Â» engagĂ©e le . ĂŠtre titulaire d'une carte du PFR ne pourra ĂŞtre exigĂ© pour occuper quelque emploi ou charge que ce soit.
  6. La religion officielle sera la catholique ; toutefois, les autres cultes seront tolĂ©rĂ©s pour autant qu'ils ne vont pas Ă  l'encontre de la loi.
  7. Ceux appartenant Ă  la « race juive Â» (razza ebraica) seront considĂ©rĂ©s Ă©trangers et, pendant la durĂ©e de la prĂ©sente guerre, comme appartenant Ă  la nationalitĂ© ennemie.

Politique extérieure

8. Les frontières de la République sociale italienne sont les limites alpines et maritimes, limites marquées par la nature, le sang, l'histoire, mais aussi menacées par les gouvernements réfugiés à Londres. Il sera nécessaire de faire reconnaître à l'Europe que l'Italie a besoin de son espace vital. En outre, il conviendra de fonder une Communauté européenne qui accepte comme principes d'éliminer l'influence britannique dans les États européens, d'abolir le système capitaliste, de lutter contre les ploutocraties, et de valoriser, au bénéfice tant des Européens que des indigènes, les ressources naturelles de l'Afrique, dans le respect des peuples indigènes, plus particulièrement musulmans, lesquels, comme en Égypte, constituent déjà des sociétés organisées.

Politique sociale

9. Base et objet premier de la RSI est le travail dans chacune de ses manifestations.

10. La propriété privée est garantie par l'État, mais ne doit pas servir de moyen d'exploitation du travail.

11. Tout ce qui, dans l'économie nationale, est intérêt de l'individu devient intérêt pour la collectivité et, à ce titre, de l'État. Les services publics et les industries de guerre doivent être gérés par la RSI.

12. Dans chaque entreprise, techniciens et ouvriers devront collaborer à obtenir une équitable répartition des bénéfices et une équitable fixation des salaires, en particulier par la voie d'une participation aux bénéfices y compris par les ouvriers (principe fasciste de la socialisation de l'industrie).

13. Dans l'agriculture, l'initiative privée s'est heurtée à ses propres limites là où, justement, elle a fait défaut. Les terres incultes ou mal gérées pourront, après expropriation, être cédées aux ouvriers agricoles pour que ceux-ci deviennent des agriculteurs directs, ou aux exploitations agricoles parasyndicales ou parastatales, en fonction des nécessités de l'agriculture.

14. Ce doit être un droit des travailleurs d'exercer leurs propres activités productives à domicile (sous forme d'entreprises familiales, sauf à apporter à la réserve nationale la quantité de produits prévue par la loi et à soumettre au contrôle ses propres tarifs).

15. Le logement constituant un droit, il sera créé un Office national du Logement du Peuple, qui aura pour objectif de donner un logement à chaque travailleur, soit en en construisant de neufs, soit par le rachat de logements, donnés ensuite en location aux travailleurs, et devenant, une fois payés, la propriété du travailleur.

16. Le travailleur sera inscrit d'office au syndicat fasciste, mais pourra en changer s'il répond aux conditions pour ce faire. Tous les syndicats feront partie de la Confédération générale du Travail, de la Technique et des Arts ; pourront également en faire partie les anciens propriétaires, à condition qu'ils ne soient pas dirigeants ou techniciens. La Charte du travail est le contrat fondamental liant travailleurs, dirigeants et État.

17. Un salaire minimum sera garanti aux travailleurs. Les employeurs récalcitrants se verront contraints, s'il y a lieu, de verser le salaire en nature au prix officiel, dans le but de stabiliser les prix et la monnaie et d'assainir le marché. Les spéculateurs du marché noir seront, au même titre que les traîtres et les défaitistes, condamnés à mort.

18. Le parti entend, par le prĂ©sent prĂ©ambule Ă  la Constituante, dĂ©montrer non seulement qu'il va vers le peuple, mais aussi qu'il est aux cĂ´tĂ©s du peuple. Le peuple italien, s'il veut prĂ©server ses acquis, doit se dĂ©fendre contre l'occupation menĂ©e par la ploutocratie anglo-amĂ©ricaine, laquelle manifestement veut rendre la vie des Italiens encore plus rĂ©trĂ©cie et plus misĂ©rable. Le mot d'ordre, dès lors, est triple : combattre, travailler, vaincre.

Notes et références

  1. Pugliese, Italian Fascism and Antifascism, p. 191.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Giovanni G. Pugliese, Italian Fascism and Antifascism: a critical anthology, Manchester University Press, 2001, pp. 191-195.

Liens externes

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