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Maladie périodique

La maladie périodique (fiÚvre méditerranéenne familiale - (FMF), ou encore maladie arménienne) désigne une maladie génétique autosomique récessive qui se manifeste notamment par des poussées inflammatoires survenant à intervalles variables.

Maladie périodique
Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
Structure 3D de la colchicine, molécule qui a changé le pronostic de la maladie périodique
Traitement
MĂ©dicament (+/-)-Colchicine (d)
Spécialité Rhumatologie

Wikipédia ne donne pas de conseils médicaux Mise en garde médicale

C'est la premiÚre maladie découverte (en 1945) et le chef de file du groupe des maladies auto-inflammatoires. Sa fréquence est la plus élevée chez les sujets originaires du pourtour méditerranéen (surtout juifs séfarades, sépharades, turcs et arméniens).

La maladie se manifeste dÚs l'enfance avec des accÚs fébriles et douloureux de périodicité variable. Sur le long terme, elle peut évoluer vers une insuffisance rénale grave par amylose. Un traitement continu par colchicine est efficace, dans plus de 90 % des cas, dans la prévention des accÚs inflammatoires et la survenue d'une amylose.

Histoire

La premiĂšre observation de maladie pĂ©riodique date de 1908 aux États-Unis : il s'agissait d'une jeune fille juive de 16 ans prĂ©sentant une fiĂšvre intermittente avec douleurs abdominales. En 1945, une description partielle de la maladie, rĂ©alisĂ©e Ă  partir de 10 cas, est faite Ă  New York[1]. La maladie est alors dĂ©crite comme finalement bĂ©nigne, malgrĂ© des accĂšs aigus.

Elle est nommée « maladie périodique » en 1951 par Hobart Reimann (en), qui insiste sur son caractÚre cyclique[2]. L'année suivante les auteurs français Henry Mamou et Roger Cattan[3] en donnent la premiÚre description complÚte, en mentionnant son caractÚre familial et la gravité de l'atteinte rénale (amylose rénale)[4].

En 1956, Henry Mamou propose le terme Ă©panalepsie (du grec áŒÏ€Î±ÎœÎŹÎ»Î·ÏˆÎčς [epanĂĄlĂȘpsis] qui signifie rĂ©pĂ©tition)[5] dans son ouvrage La maladie pĂ©riodique[6], mais le terme Ă©panalepsie mĂ©diterranĂ©enne restera inusitĂ© et finalement dĂ©conseillĂ©[7]. De nombreux synonymes ont Ă©tĂ© proposĂ©s dont maladie des armĂ©niens, polysĂ©rite rĂ©cidivante ou familiale paroxystique, syndrome ou maladie de Siegal-Cattan-Mamou, etc.[7] - [8]

En anglais, elle est appelée « Familial Mediterranean Fever » en 1958, à cause de sa plus grande fréquence dans le bassin méditerranéen[1].

À partir de 1972, le rîle favorable de la colchicine comme traitement de fond est reconnu[9] - [10] - [11], ce qui transforme le pronostic de la maladie.

Dans les années 1980, des auteurs israéliens complÚtent l'étude clinique de la maladie et précisent son mode de transmission héréditaire et l'atteinte préférentielle de certaines ethnies[4].

En 1992, le gÚne de la maladie est localisé sur le bras court du chromosome 16[12]. En 1997, deux groupes de recherches identifient simultanément et séparément le gÚne de la maladie (identification de sa séquence génétique)[13].

ÉpidĂ©miologie

La maladie pĂ©riodique touche les populations du pourtour mĂ©diterranĂ©en, principalement les turcs, les armĂ©niens, les juifs sĂ©farades et les juifs sĂ©pharades. Dans ces populations, la frĂ©quence des porteurs du gĂšne mutĂ© (porteurs sains) est de l'ordre de 1/7, de 1/3 Ă  1/20[14]. Cette prĂ©valence Ă©levĂ©e explique une transmission pseudo-dominante dans ces populations[15]. En Turquie, la prĂ©valence de la maladie serait entre  1/150 Ă  1/10 000 ; chez les armĂ©niens 1/1500 ; chez les juifs sĂ©pharades entre 1/250 et 1/1000[16] et chez les juifs sĂ©farades entre 1/250 et 1/1000[16]. La maladie est aussi prĂ©sente chez les juifs askhĂ©nazes 1/73 000, chez les grecs, les chypriotes, les italiens, les libanais, les druzes et les kurdes[16]. La non-appartenance Ă  ces populations n'est pas un critĂšre d'exclusion du diagnostic[14], des cas pouvant ĂȘtre signalĂ©s au BrĂ©sil, au Japon, ou en Europe de l'est[16].

Génétique

Les maladies génétiques situées sur le chromosome 16. La maladie périodique Familial Mediterranean Fever est listée dans la colonne de droite.

Le gÚne en cause est le gÚne MEFV (pour MEditerranean FeVer)[17] qui code une protéine, dite marénostrine (du nom latin de la méditerranée mare nostrum) ou pyrine (du grec feu, fiÚvre pyros), impliquée dans les processus inflammatoires[18] (activation de l'inflammasome)[1].

Ce gÚne a été identifié en 1997 par un consortium français[19]. Ce dernier a bénéficié d'une collaboration entre le programme Généthon et des partenaires turcs et tunisiens et de la participation d'un grand nombre de familles atteintes dans ces pays. Différentes mutations de ce gÚne apparaissent en effet chez 85 % des patients provenant de populations méditerranéennes. En parallÚle, un autre collectif de chercheurs israéliens, américains et australiens identifiait également le lien entre ce gÚne et la maladie[20].

Une mutation Ă  l'origine de cette maladie semble dater d'un peu plus de 2 000 ans, comme l'atteste la prĂ©sence d'une variĂ©tĂ© du gĂšne mutant chez des populations juives irakiennes restĂ©es isolĂ©es des autres populations juives depuis 2 500 ans.

Ce gÚne est exprimé dans les granulocytes, les monocytes et les éosinophiles : ces leucocytes sont impliqués dans les mécanismes inflammatoires. Il reste maintenant à établir le mécanisme d'action de la protéine découverte et de déterminer comment agit la colchicine.

Une piste ouverte est celle de l'Ă©tude de l'interaction entre la protĂ©ine codĂ©e par le gĂšne et les mĂ©canismes inflammatoires : si un lien est avĂ©rĂ©, de nouvelles molĂ©cules anti-inflammatoires pourraient Ă©ventuellement ĂȘtre dĂ©veloppĂ©es.

Physiopathologie

La physiopathologie de la fiÚvre méditerranéenne familiale a connu récemment des avancées importantes: la pyrine est un récepteur qui peut former un inflammasome[21]. A l'état basal, elle est maintenue inactive par une protéine chaperonne (de la famille des protéines 14.3.3) liée à la pyrine au niveau de résidus sérines phosphorylés[22]. La déphosphoration de ces sérines (localisées dans le linker codé par l'exon 2 de MEFV) est un préalable indispensable à l'activation de l'inflammasome pyrine. Des mutations sur ces résidus sérines (S208, S242) peuvent entraßner une maladie différente de la FMF: la PAAND (Pyrin-Associated Autoinflammation with Neutrophilic Dermatosis), une dermatose neutrophilique auto-inflammatoire [23].

Une inactivation des RhoA GTPase (par des toxines bactĂ©riennes par exemple) entraĂźne l'inactivation des kinases PKN1/PKN2 et la dĂ©phosphoration de la pyrine[24]. Chez les sujets sains, l'Ă©tape de dĂ©phosphoration seule n’entraĂźne pas l'activation de l'inflammasome pyrine. En revanche, chez les patients atteints de FMF, la dĂ©phosphorylation seule des sĂ©rines est suffisante pour dĂ©clencher l'activation de l'inflammasome pyrine[25]. Ceci suggĂšre qu'il existe une rĂ©gulation Ă  deux niveaux et que le second mĂ©canisme de rĂ©gulation (indĂ©pendant de la (dĂ©)phosphorylation) est dĂ©ficient chez les patients FMF.

Ce mĂ©canisme dĂ©faillant se situe vraisemblablement au niveau du domaine B30.2 (exon 10) oĂč est situĂ©e la plupart des mutations pathogĂšnes associĂ©es Ă  la FMF. C'est vraisemblablement l'interaction de ce domaine avec le cytosquelette (microtubules) qui est dĂ©faillante, comme le suggĂšre l'efficacitĂ© de la colchicine[26]. RĂ©cemment deux types de signaux activateurs de l'inflammasome pyrine ont Ă©tĂ© mis en Ă©vidence, in vitro: des analogues d'acides biliaires (BAA 473/485 non prĂ©sents physiologiquement dans l'organisme humain, mais possiblement mĂ©tabolisĂ©s par le microbiote)[27] et des catabolites de la progestĂ©rone et de la testostĂ©rone (la prĂ©gnanolone et l'Ă©tiocholanolone) prĂ©sents de maniĂšre physiologique dans l'organisme humain [28]. Ces derniers pourraient faire le lien entre le stress (car ce sont des neurostĂ©roĂŻdes), le cycle menstruel et les poussĂ©es de la maladie.

Les mutations à l'origine de la FMF abaissent le seuil d'activation de l'inflammasome pyrine[29]. Ces mutations pourraient avoir, à l'état hétérozygote, avoir conféré un avantage sélectif face aux épidémies historiques (notamment la Peste due à Yersinia pestis)[30], ce qui expliquerait sa plus forte prévalence dans le bassin méditerranéen.

Clinique

Présentation générale

AprĂšs une pĂ©riode de latence, qui dans la majoritĂ© des cas est brĂšve et ne dĂ©passe pas l’enfance, la maladie est caractĂ©risĂ©e par la survenue d’accĂšs aigus sĂ©parĂ©s par des pĂ©riodes asymptomatiques de durĂ©e irrĂ©guliĂšre, variant de quelques jours Ă  plusieurs annĂ©es.

La symptomatologie de la maladie pĂ©riodique prĂ©sente deux aspects : les manifestations paroxystiques, bruyantes mais d’évolution le plus souvent favorable spontanĂ©ment, et l’amylose, complication chronique, dont la survenue Ă©ventuelle conditionne le pronostic.

Les symptĂŽmes de la maladie pĂ©riodique surviennent une fois sur deux dans les 10 premiĂšres annĂ©es de la vie et dans 90% des cas avant l’ñge de 20 ans. Un dĂ©but aprĂšs l'Ăąge de 30 ans est exceptionnel[31].

Dans la grande majoritĂ© des cas, l’affection commence par une crise aiguĂ« abdominale, posant le problĂšme d’une urgence de type chirurgical. Les accĂšs apparaissent brusquement, atteignant leur acmĂ© en quelques heures, et rĂ©gressent habituellement en quelques jours.

Ils se répÚtent de maniÚre totalement imprévisible, parfois déclenchés par certains facteurs : activité physique inhabituelle, exposition au froid, traumatisme, intervention chirurgicale, infection, alimentation riche en graisses, émotion ou période menstruelle[1]...

AccÚs fébrile

Il se traduit par une Ă©lĂ©vation brusque de la tempĂ©rature qui atteint 38 Ă  39 °C (parfois 40 °C) en quelques heures. Ces crises fĂ©briles durent en moyenne une demi-journĂ©e Ă  trois jours. Cet accĂšs peut ĂȘtre isolĂ©, « pseudopalustre » ou accompagner une manifestation viscĂ©rale[4].

La fiĂšvre s’attĂ©nue habituellement en 12 Ă  24 heures, mais peut persister jusqu’à 5 jours, voire plus longtemps, en particulier lorsqu’il existe une atteinte articulaire.

Ces crises s'accompagnent le plus souvent d'une inflammation des séreuses à l'origine des symptÎmes : péritonite et douleurs abominales (90 à 95% des cas), synovites et douleurs articulaires (20 à 70 % des cas), pleurésies et douleurs thoraciques (40%), plus rarement testiculaire (orchite) ou cardiaque (péricardite)[16].

Des Ă©ruptions cutanĂ©es peuvent Ă©galement apparaĂźtre tandis que la prĂ©sence d'une fiĂšvre lors des crises est un bon indicateur de l'existence de cette maladie. Toutefois, la fiĂšvre peut ĂȘtre absente dans 5 % des cas[32].

AccÚs péritonéal

Il est la manifestation la plus caractéristique et, avec la fiÚvre, le symptÎme le plus fréquent de la maladie périodique (90 à 95% des cas)[1] - [16].

Il simule une urgence chirurgicale, avec parfois défense, voire véritable contracture pariétale, ou aspect radiographique évoquant une occlusion intestinale.

Lorsqu’un tel tableau est inaugural (lors de la premiĂšre crise), le diagnostic est trĂšs difficile, l’intervention chirurgicale est presque inĂ©vitable. En l’absence d’intervention, la douleur commence Ă  rĂ©gresser aprĂšs 6 Ă  12 heures et sa disparition, complĂšte en 24 Ă  48 heures, s’accompagne souvent d’une diarrhĂ©e transitoire[1] - [16].

Le diagnostic diffĂ©rentiel avec une urgence chirurgicale est souvent trĂšs dĂ©licat, reposant sur une analyse sĂ©miologique rigoureuse et sur une surveillance soigneuse. La prolongation de la crise pendant plus de 24 heures doit faire reconsidĂ©rer le diagnostic et renforcer la surveillance pour ne pas laisser passer l’heure d’une intervention chirurgicale.

Crises articulaires

Elles surviennent surtout chez l'enfant (dans 20 Ă  70% des cas), en particulier les grosses articulations, notamment le genou, la cheville, la hanche et l’épaule.

Il s’agit habituellement d’une monoarthrite, plus rarement d’une oligoarthrite ou d’une polyarthrite. Les accĂšs articulaires peuvent se prĂ©senter sous deux formes.

Les accĂšs aigus, les plus frĂ©quents, rĂ©alisent un tableau d’arthrite, avec parfois Ă©panchement fugace constituĂ© d’un liquide d’aspect clair, trouble ou puriforme, contenant de 200 Ă  1 000 000 d’élĂ©ments par millimĂštre cube, polynuclĂ©aires neutrophiles non altĂ©rĂ©s essentiellement. La crise atteint son acmĂ© en 2 Ă  3 jours, puis rĂ©gresse en 1 semaine environ, le plus souvent sans aucune sĂ©quelle.

Les formes prolongĂ©es sont moins frĂ©quentes et intĂ©ressent surtout le genou et la hanche. Le tableau est celui d’une monoarthrite chronique qui s’accompagne souvent d’une attitude en flexum et d’une dĂ©minĂ©ralisation osseuse, souvent importante. Les symptĂŽmes ne commencent Ă  rĂ©gresser qu’aprĂšs un dĂ©lai de plusieurs mois Ă  1 an et finissent par disparaĂźtre, le plus souvent sans sĂ©quelle.

TrÚs rarement néanmoins, une arthropathie destructrice chronique peut se développer au genou et surtout à la hanche, compromettant alors le pronostic fonctionnel[16].

AccĂšs thoraciques

Ils réalisent un tableau de pleurésie aiguë fébrile régressant totalement en 24 à 48 heures (40% des cas).

Signes cutanés

Ils se traduisent surtout par un érythÚme érysipéloïde (ou « pseudo-érysipÚle ») siégeant aux membres inférieurs, ou par diverses autres lésions, avec parfois une vascularite[16]. .

Sont encore signalĂ©es la survenue d’une orchite aiguĂ« unilatĂ©rale chez les garçons ĂągĂ©s de moins de 16 ans, et exceptionnellement d’une mĂ©ningite pĂ©riodique aseptique ou d’une pĂ©ricardite[1] - [16].

Signes biologiques

Le diagnostic de la maladie pĂ©riodique reste encore purement clinique car, malgrĂ© de nombreuses recherches, aucun marqueur biologique spĂ©cifique de l’affection n’a pu ĂȘtre mis en Ă©vidence[16].

Le caractĂšre inflammatoire de la maladie doit ĂȘtre confirmĂ©, dont l’augmentation de la vitesse de sĂ©dimentation globulaire, correspondant Ă  une augmentation du fibrinogĂšne et des alpha2-globulines, et le dosage de la CRP (ProtĂ©ine C reactive). L'hyperleucocytose est moins constante[31].

L’enquĂȘte immunologique, et notamment la recherche d’autoanticorps, est habituellement nĂ©gative[16].

L'absence d'inflammation au cours d'un accÚs douloureux élimine le diagnostic de maladie périodique[17].

CritĂšres du diagnostic

Diagnostic clinique

En l’absence de marqueur biologique spĂ©cifique, le diagnostic de la maladie pĂ©riodique repose sur une analyse sĂ©miologique rigoureuse, confirmĂ©e Ă©ventuellement par un test thĂ©rapeutique par la colchicine.

Le diagnostic est évoqué devant un patient ayant des accÚs de fiÚvre à répétition accompagnés de symptÎmes caractéristiques, ayant débuté dans l'enfance, et appuyé par un syndrome inflammatoire biologique durant un accÚs aigu[31] - [17].

Différents ensembles de critÚres ont été proposés pour le diagnostic, la sévérité, ou la surveillance du traitement[33].

Confirmation génétique

Un test gĂ©nĂ©tique peut permettre de dĂ©tecter la prĂ©sence des mutations responsables de la maladie. Il peut s'agir d'une ou deux mutations du gĂšne MEFV, soit deux mutations identiques homozygotes (mĂȘme mutation provenant des deux parents), soit deux mutations diffĂ©rentes hĂ©tĂ©rozygotes composites (chaque parent apporte une mutation diffĂ©rente). Mais l'absence de rĂ©sultat n'Ă©limine pas le diagnostic[31].

En effet, le rĂ©sultat de l'analyse gĂ©nĂ©tique doit ĂȘtre interprĂ©tĂ© en fonction du contexte de chaque patient[17], car des patients ayant des troubles caractĂ©ristiques peuvent ĂȘtre porteurs de mutations non encore identifiĂ©es[1] - [14] dans la base de donnĂ©es dĂ©diĂ©e[34].

Dans les cas douteux, un test thĂ©rapeutique Ă  la colchicine de 3 Ă  6 mois peut ĂȘtre utile pour trancher[31].

Évolution et complications

Le pronostic de la maladie pĂ©riodique dĂ©pend essentiellement du risque d’amylose et a Ă©tĂ© complĂštement modifiĂ© par l’efficacitĂ© prĂ©ventive de la colchicine.

Si l’amylose n’apparaĂźt pas, le pronostic est relativement bon, et pour certains auteurs, la durĂ©e de survie serait identique Ă  celle des sujets normaux.

Si un traitement n'est pas initié précocement, la principale complication à apparaßtre est la survenue d'une amylose rénale de type AA, conduisant à une insuffisance rénale et nécessitant le recours à la dialyse.

Amylose rénale

L’amylose rĂ©nale est de loin la plus prĂ©coce et la plus frĂ©quente des complications

Biopsie rénale, à haute résolution, de dépÎts amyloïdes.

La substance amyloïde de la maladie périodique est formée de fibrilles identiques à la protéine de l'amylose AA, et elle intéresse de maniÚre diffuse la paroi de toutes les artérioles, sauf celles du systÚme nerveux central ; cette répartition est dominée par la localisation rénale..

La survenue d’une amylose au cours de la maladie pĂ©riodique transforme une affection invalidante mais bĂ©nigne en une maladie mortelle quasi certaine. Son incidence est Ă©levĂ©e chez les Juifs originaires d’Afrique du Nord et chez les Turcs et plus faible chez les ArmĂ©niens, les Arabes et les Juifs ashkĂ©nazes[1].

Son Ă©volution passe par deux phases principales. Le dĂ©but est asymptomatique, il s'agit d'une protĂ©inurie modĂ©rĂ©e, de durĂ©e moyenne de 3 Ă  4 ans. Son apparition au cours de la maladie pĂ©riodique constitue une trĂšs forte prĂ©somption d’amylose, et cette protĂ©inurie doit ĂȘtre recherchĂ©e au moins une fois par an[31].

La phase nĂ©phrotique est caractĂ©risĂ©e par l’apparition d’un syndrome nĂ©phrotique clinique et biologique. La confirmation histologique peut ĂȘtre apportĂ©e par la biopsie rĂ©nale, la biopsie rectale (positive dans 75 Ă  85 % des cas), voire par la biopsie mĂ©dullaire.

Elle laisse place, aprĂšs en moyenne 1 ou 2 ans d’évolution, Ă  la phase urĂ©mique avec insuffisance rĂ©nale, qui progresse en rĂšgle rapidement, pour atteindre son stade terminal 12 Ă  18 mois plus tard.

Avant l’ùre de l’hĂ©modialyse, la durĂ©e de survie Ă©tait en moyenne de 7 ans aprĂšs l’apparition de la protĂ©inurie et de 3 ans aprĂšs celle de l’insuffisance rĂ©nale. Les patients atteints de maladie pĂ©riodique et d’insuffisance au stade terminal sont de bons candidats Ă  l’hĂ©modialyse et Ă  la greffe rĂ©nale.

Le risque essentiel est alors la poursuite du processus amyloĂŻde dans les autres organes (cƓur, intestin et surrĂ©nales notamment) et sa rĂ©cidive Ă©ventuelle sur le greffon, complications dont la survenue pourrait ĂȘtre Ă©vitĂ©e ou freinĂ©e par la poursuite du traitement par la colchicine.

Autres complications

Une péritonite chronique peut se cloisonner donnant une ascite ou des kystes. Des arhroses ou arthrites parfois destructives peuvent apparaitre au niveau de la hanche ou de la colonne vertébrale.

Le caractÚre chronique de la maladie et imprévisible des accÚs inflammatoires retentit sur la qualité de vie, avec des conséquences sociales (absentéisme scolaire ou professionnel).

Chez la femme enceinte, la plupart des auteurs notaient, avant la découverte de l'efficacité de la colchicine, une diminution des crises durant la grossesse[14]. Cependant d'autres auteurs ont mis en évidence un plus grand risque de complications de la grossesse chez les femmes atteintes de maladie périodique (avortements spontanés en début de grossesse, naissances prématurées...)[16] - [31].

Traitement

Traitement de fond

Gloriosa superba, une plante toxique dont le rhizome est riche en colchicine.

Depuis 1972[35], l’immense majoritĂ© des cas de maladie pĂ©riodique est traitĂ©e de maniĂšre continue par la colchicine. Ce traitement est dĂ©butĂ© dĂšs que le diagnostic est confirmĂ© ou fortement suspectĂ©, et poursuivi Ă  vie[31].

La dose de dĂ©part varie selon l'Ăąge et l'Ă©tat du sujet. L'efficacitĂ© est Ă©valuĂ©e sur le nombre et la durĂ©e des Ă©pisodes aigus.et une Ă©ventuelle inflammation rĂ©siduelle. La posologie habituelle est de l’ordre de 1 Ă  2 mg/j en 1 ou 2 prises, quels que soient le poids et l’ñge[16].

Cette mĂ©thode thĂ©rapeutique permet, dans la grande majoritĂ© des cas, de faire disparaĂźtre totalement, ou tout au moins d’espacer, les accĂšs. Il est largement utilisĂ© mĂȘme si le mĂ©canisme de cette thĂ©rapie reste incompris.

RĂ©sultats

La colchicine n'a pas d'activitĂ© sur une crise aiguĂ« en cours, mĂȘme en augmentant les doses. On adjoint un traitement symptomatique anti-inflammatoire et antalgique[31].

Le traitement continu par la colchicine prĂ©vient, ou tout au moins retarde, l’apparition de l’amylose dans l’immense majoritĂ© des cas, mĂȘme lorsqu’il reste sans effet sur la rĂ©pĂ©tition des accĂšs paroxystiques[17].

L’action curative de la colchicine vis-Ă -vis d’une amylose dĂ©jĂ  dĂ©clarĂ©e est moindre, mais peut se traduire par la stabilisation, la rĂ©gression et mĂȘme parfois la disparition de la protĂ©inurie, Ă  condition que celle-ci ne soit pas trop Ă©voluĂ©e et que des posologies supĂ©rieures Ă  1,5 mg/j soient utilisĂ©es[17].

Effets secondaires

L'innocuité de la colchicine a été montrée chez les enfants (courbe de croissance normale) et chez la femme enceinte (à doses habituelles). L'allaitement est possible. Le principal effet secondaire est la diarrhée, qui disparait en général spontanément en deux à trois semaines[31].

Les risques de surdosage, avec effets toxiques, apparaissent surtout lors de la survenue d'une insuffisance rénale, ou en interaction médicamenteuse (comme les antibiotiques de type macrolides)[17].

Traitement des formes résistantes

Dans 10 % des cas, mĂȘme lorsque le traitement est scrupuleusement suivi, il existe une rĂ©sistance Ă  la colchicine (inefficacitĂ© Ă  la dose maximale). Le traitement est alors mal codifiĂ©, reposant sur les biothĂ©rapies (inhibiteur de l'interleukine 1 comme le canakinumab ou l'anakinra, anti-TNF...)[16].

Le canakinumab a Ă©tĂ© commercialisĂ© sous le nom « Ilaris » ou ACZ885, par Novartis Pharma. Cette molĂ©cule agit en bloquant une protĂ©ine dite interleukine-1 bĂȘta, laquelle joue un rĂŽle dans les processus inflammatoires. Cette prescription se fait en collaboration avec un centre rĂ©fĂ©rent pour la maladie[31].

Références

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